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16/02/2018 | FRANCE | N°16/15842

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 16 février 2018, 16/15842


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRÊT DU 16 FÉVRIER 2018



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/15842



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juin 2016 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2016000293





APPELANTE



SAS SOLO INVEST

prise en la personne de ses représentants légaux



[Adresse

1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 383 010 626 (Paris)



représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : C1050

assistée de Me Jérôme CULI...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRÊT DU 16 FÉVRIER 2018

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/15842

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juin 2016 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2016000293

APPELANTE

SAS SOLO INVEST

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 383 010 626 (Paris)

représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : C1050

assistée de Me Jérôme CULIOLI, avocat plaidant du barreau de NICE

INTIMEES

SAS OPEN

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 381 031 285 (Nanterre)

représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque: J151

assistée de Me Orianne PASCO, avocat plaidant du barreau de Paris, toque : P370 substituant Me Didier FAIZANT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0370

SARL LTTD CONSULTING

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 489 266 502 (Nanterre)

représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0020

assistée de Me Françoise COLLIN, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C0058

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente de la chambre

Mme Françoise BEL, présidente de chambre

M. Gérard PICQUE, magistrat honoraire en charge de fonction juridictionnelles

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, greffier présent lors du prononcé.

FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La société OPEN est une société de services spécialisée dans le conseil, l'ingénierie, l'infogérance et l'intégration de systèmes d'information et de communications dans des domaines divers.

La société SOLO INVEST est une société spécialisée dans le textile événementiel notamment la vente de produit textiles et bagagerie.

La société LTTD CONSULTING (ci-après dénommée LTTD) est un intégrateur de solutions informatiques et fournit des prestations de services et conseils en système d'information.

Le 8 mars 2011 les sociétés OPEN et SOLO INVEST ont conclu un contrat d' accompagnement de la société SOLO INVEST en vue de la refonte de son système d'informations.

A la suite d'un appel d'offres, la solution LAWSON M3 ayant été choisie, la société SOLO INVEST a signé un contrat d'intégration avec la société LTTD le 30 novembre 2011.

Le 21 décembre 2011 les sociétés SOLO INVEST et OPEN ont régularisé un contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage à effet rétrocatif au 3 novembre 2011, portant sur deux lots, la mise en oeuvre des modules Achats/ventes/CMR/Logistique/E-Sales, et la mise en oeuvre des modules Comptabilité /Finances.

Le 18 juillet 2012 les sociétés ont conclu un contrat d'accompagnement pour la mise en place du système d'information et le 12 octobre 2012 un contrat d'assistance au démarrage.

Le 7 janvier 2013 la solution le progiciel M3 a été installée par la bascule entre l'ancien et le nouveau système.

Les factures ont alors été émises pour le règlement du solde s'élevant à la somme de 50 905,39 €, puis à défaut de règlement la société OPEN a mis en demeure la société SOLO INVEST de payer le 15 avril 2013.

Par lettre recommandée du 1er juillet 2013 la société SOLO INVEST a mis en demeure la société OPEN de formuler une proposition d'indemnisation à la suite de nombreux dysfonctionnements et manquementqs fonctionnels de la solution informatisue installée, absence manifeste de conseils.

Par courrier recommandée du 5 juillet 2013 la société OPEN a contesté les manquements soutenus et a mis en demeure la société de payer.

Le 31 juillet 2013 la société OPEN a fait délivrer assignation à la société SOLO INVEST et à la société LTTD aux fins de condamnation de la première à lui payer en principal la somme de 77.622,79 € TTC.

Par actes extrajudiciaires des 2 et 6 janvier 2014, la société OPEN a assigné les sociétés SOLO INVEST et LTTD, en payement contre la première et garantie contre la seconde pour toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge à raison d'éventuels dysfonctionnement du progiciel Lawson M3.

Par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire en date du 8 juin 2016, le tribunal de commerce de Paris après jonction des instances, a :

Condamné la société SOLO INVEST à payer à la société OPEN la somme de 77 622,79 euros majorée des intérêts de retard contractuels à compter du 31 juillet 2013,

Débouté la société OPEN de sa demande de condamner la société LTTD à garantir la société OPEN de toutes condamnations,

Débouté la société SOLO INVEST de sa demande de désignation d'un expert,

Débouté la société SOLO INVEST de sa demande de dommages et intérêts,

Condamné la société SOLO INVEST à payer 3 000 € à la société OPEN au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a débouté du surplus et débouté la société LTTD de la totalité de sa demande,

Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif,

Condamné la société SOLO INVEST aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 dont 13,52 € de TVA

Le tribunal énonce en ses motifs :

sur la question du respect par la société OPEN de ses obligations contractuelles et sur le paiement de la facture de la société OPEN par la société SOLO INVEST, :

- la créance représentée par les factures d'un montant total de 77 622,79 € TTC est certaine, liquide et exigible

- les contrats des 8 mars et 3 novembre 2011, d'accompagnement à la refonte du système d'information de la société SOLO INVEST et d'assistance à maitrise d'ouvrage ,ne sont pas contestés; des ateliers de travail réunissant ces deux sociétés et la société LTTD ont été organisés sur l'ensemble du périmètre du progiciel et que des rapports rédigés par la société OPEN ont été diffusés aux sociétés LTTD et SOLO INVEST puis validés par les équipes de cette dernière.

- s'agissant du contrat d'intégration du logiciel signé entre les sociétés SOLO INVEST et LTTD le 30 novembre 2011, la mission de la société LTTD consistait en la mise en 'uvre du progiciel selon les besoins spécifiques et détaillés dans un cahier des charges par la société SOLO INVEST et une validation de l'adéquation du progiciel avec les besoins fonctionnels et techniques de cette dernière a été réalisée.

- le dirigeant de la société SOLO INVEST a donné le feu vert («Go Live») pour l'intégration du progiciel le 7 janvier 2013, en précisant qu'un certain nombre d'éléments étaient encore manquants au progiciel, et a indiqué subir des dysfonctionnements en raison de mauvais fichiers. Mais la société ne s'est manifestée qu'après la mise en 'uvre du progiciel en dépit du fait que la totalité des comptes rendus ont été validés par elle sans réserve, que les débats et pièces produites ne permettent pas de démontrer que la société OPEN a failli dans son obligation de conseil et que les factures impayées réclamées par la société OPEN n'ont pas été contestées dans leur montant pour solde des contrats exécutés.

Sur la mise en cause et garantie de la société LTTD : aucune faute ne pouvait être reprochée à la société LTTD de sorte qu'elle ne saurait être condamnée à garantir la société OPEN de toutes condamnations.

Sur la demande d'expertise formulée par la société SOLO INVEST :les pièces produites par les parties permettent d'apprécier le bien fondé des prétentions des parties, la mission de l'expertise n'étant pas de suppléer la carence des parties en matière de preuve.

Sur la demande en dommages et intérêts de la société SOLO INVEST : SOLO INVEST ne rapporte pas la preuve que la société OPEN a failli à son devoir de conseil et n'établit pas un lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice avancé.

La société SOLO INVEST a relevé appel par déclaration du 19 juillet 2016.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 18 octobre 2016 la société SOLO INVEST aux fins de voir la Cour :

Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en date du 8 juin 2016 en toutes ses dispositions,

Prendre acte du paiement par la société SOLO INVEST le 22 juin 2016 de la somme totale de 84.163,45 €, représentant l'ensemble des condamnations mises à sa charge aux termes du jugement déféré.

Dire et juger que la société OPEN a manqué à l'égard de la société SOLO INVEST à son devoir de conseil dans le cadre de l'étude et de l'analyse de ses besoins de fonctionnement mais également dans la retranscription fonctionnelle de ses besoins dans le cadre de la mise en place d'une solution informatique adaptée.

Dire et juger que la société OPEN s'est manifestement abstenue d'entreprendre toutes diligences efficaces qui auraient permis de mettre un terme définitif aux dysfonctionnements et manquements fonctionnels relevés sur le logiciel M3.

Dire et juger que les manquements de la société OPEN sont en liens directs avec l'ensemble des préjudices subis par la société SOLO INVEST : frais de personnel supplémentaire, traitement et émission d'avoirs et bons de retour, livraisons express en forte augmentation, charges externes complémentaires et préjudice commercial.

Condamner la société OPEN à payer à la société SOLO INVEST la somme de 3.515.233,75 € à titre de dommages et intérêts.

Condamner la société OPEN à payer à la société SOLO INVEST la somme de 20.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner la société OPEN aux entiers dépens, distraits au profit de Me Sandra OHANA, avocat sous sa due affirmation de droit.

Au soutien de son appel la société SOLO INVEST fait valoir :

- les manquements de OPEN à ses obligations contractuelles et à son devoir de conseil:

la mise en place du logiciel M3 comportait de nombreux dysfonctionnements et manquements fonctionnels évidents malgré plusieurs reports, des spécificités n'ont pas été respectées ou n'ont pas été réalisées, la société OPEN n'est intervenue de façon efficace ni en amont ni dans la résolution de ces difficultés, conformément aux dispositions du cahier des charges établi;

les manquements sont essentiellement constitués des manques fonctionnels de la solution proposée par la société OPEN, soit des problèmes de défaut d'entrée de commande sur le web, des manques concernant l'alerte de la société suite à la réception de commande, des manques concernant les alertes de commande en anomalie, des manques ayant pour effet de procéder à des blocages clients de manière injustifiée, des manques supplémentaires concernant les problématiques liées aux paramétrages de transporteur au niveau national,

- la validation des comptes rendus par la société SOLO INVEST : le process restait à finaliser - il incombait à la société OPEN d'évaluer l'ensemble de ses besoins afin de parvenir aux résultats souhaités. Aussi, un cahier des charges a été rédigé entre les sociétés SOLO INVEST et OPEN, devant contenir tous les points essentiels à la mission confiée à la société LTTD, de sorte que eu égard aux termes techniques employés, c'est la société OPEN qui a défini les process devant être mis en 'uvre par la société LTTD.

- la société OPEN devait remplir une obligation de résultat : il qu'il appartenait à la société OPEN de démontrer qu'elle avait répondu à l'ensemble de ses obligations, ce qu'elle n'a pas fait. Elle ajoute que cette obligation de conseil consistait notamment à informer, conseiller et mettre en garde le client en ce qui concerne les prestations et décisions relatives à l'exécution des prestations et si tel avait été le cas, elle n'aurait jamais donné le « go live », eu égard à l'existence tant des dysfonctionnements que des manques fonctionnels avérés tels que soulevés avant et après le «go live».

la société OPEN avait une obligation générale d'assistance envers elle, à laquelle cette dernière n'a pas davantage satisfait. La société OPEN aurait dû après le «go live» l'assister afin de trouver une solution et qu'il soit remédié aux dysfonctionnements et manques fonctionnels.

- elle a subi des préjudice divers : perte de clientèle, retours, charges, préjudice commercial,

Vu les conclusions notifiées et déposées le 16 décembre 2016 par la société OPEN tendant à voir la Cour :

A titre principal :

Constater que la société OPEN a respecté de l'ensemble de ses obligations contractuelles, notamment au titre de son devoir de conseil,

En conséquence,

Dire et juger la société SOLO INVEST mal fondée en son appel et la débouter de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement rendu Ie 8 juin 2016 par le tribunal de commerce de Paris dans toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire, si la Cour venait à faire droit aux griefs de la société SOLO INVEST relatifs à de prétendus dysfonctionnements et manquements fonctionnels du progiciel LAWSONS M3

Constater que la garantie contractuelle prévue à l'article 5.1.4. du contrat conclu entre les sociétés SOLO INVEST et OPEN le 21 décembre 2011 ne peut valablement être invoquée par la société SOLO INVEST,

Constater que la mise en oeuvre opérationnelle du progiciel LAWSON M3 relevait de la mission confiée à la société LTTD CONSULTING,

En conséquence,

Condamner la société LTTD CONSULTING à garantir intégralement la société OPEN de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge du fait d'éventuels dysfonctionnements du progiciel LAWSON M3.

En tout état de cause,

Condamner la société SOLO INVEST à payer à la société OPEN la somme de 35.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société SOLO INVEST aux entiers dépens.

La société OPEN soutient :

- l'absence de manquement contractuel à son obligation de conseil laquelle n'est qu'une obligation de moyen en raison de l'aléa présenté; elle conteste de prétendus manquements fonctionnels du progiciel LAWSON M3, l'absence de retranscription des besoins essentiels de SOLO dans le Cahier des charges par OPEN et de n'être pas intervenue dans la résolution de ces difficultés ; elle était assistant au maître de l'ouvrage mais pas assistant délégué ; à aucun moment, OPEN n'a donc été en charge de la conception ou de la mise en oeuvre du progiciel LAWSON M3 ;

- LTTD CONSULTING a la qualité de maître d'oeuvre ; mais elle est intervenue, en amont, dans la définition même des besoins spécifiques de SOLO et avait la charge de définir les spécifications détaillées ;

- l' absence de réserves par SOLO lors de la réception du progiciel LAWSON M3; aucun reproche sur le dysfonctionnement avant le 3 avril 2013 soit 3 mois après la réception du progiciel et 5 mois après la recette ;

- l'absence de valeur probante du procès-verbal de constat ;

- les dysfonctionnements invoqués par SOLO, s'ils étaient avérés, relèvent de la mise en oeuvre opérationnelle du progiciel LAWSON M3 exécutée par LTTD et donc de la responsabilité de LTTD ;

-le défaut de preuve des préjudices et du lien de causalité.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 14 février 2017 par la société LTTD CONSULTNG tendant à voir la Cour :

Dire et juger que les griefs de la société SOLO INVEST concernent la mission d'assistant à maître d'ouvrage telle que définie par le contrat du 11 décembre 2011 et l'exercice du devoir de conseil de la société OPEN vis à vis de la société SOLO INVEST et non la réalisation de la solution informatique par la société LTTD CONSULTING,

Donner acte à la société LTTD CONSULTNG qu'elle s'en remet à justice pour la détermination tant de la matérialité des manquements de la société OPEN que du lien de causalité entre les manquements de la société OPEN dénoncés par la société SOLO INVEST et les préjudices allégués par la société SOLO INVEST,

Dire et juger que les conséquences financières des éventuels manquements de la société OPEN qui seraient retenus ne peuvent être mis à la charge de la société LTTD CONSULTING ;

En conséquence :

Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté la société OPEN de sa demande de condamnation de la société LTTD CONSULTNG à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

En tout état de cause

Condamner la société OPEN au paiement de la somme 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société OPEN au paiement des dépens.

La société LTTD expose :

- Les griefs de la société SOLO INVEST ne concernent pas la mauvaise réalisation de la solution informatique, mais sa mauvaise conception du fait de l'absence de prise en compte de ses besoins dans les spécifications détaillées telles que validées par la société OPEN, ou par la société SOLO INVEST sur les conseils de la société OPEN ; le contrat régularisé entre la société SOLO INVEST et la société OPEN mettait bien à la charge de cette dernière la validation des documents émis par la société LTTD, et que l'article 4.1 du contrat liant la société LTTD à la société SOLO INVEST stipulait que la société OPEN «est habilitée à prendre toute décision relative au Projet au nom et pour le compte du Client». Elle considère donc ne pas être concernée par le litige car le non-paiement des factures de la société OPEN par la société SOLO INVEST trouve son fondement uniquement dans des griefs de la société SOLO INVEST à l'égard de la société OPEN ;

- la société OPEN, est seule à l'origine des manquements allégués par la société appelante car c'est elle qui a recommandé le progiciel M3, élaboré les spécifications générales figurant au cahier des charges, validé ou préconisé à la société SOLO INVEST la validation des spécifications détaillées, et organisé les recettes. Elle ajoute que la conformité de ce qu'elle a livré aux spécifications détaillées qui ont été approuvées par la société OPEN, ou sur ses conseils par la société SOLO INVEST, n'est mise en cause par aucune des deux sociétés ;

- quelle que soit la personne qui les a validés, il ne peut lui être reproché d'avoir réalisé la Solution conformément à ces dernières ;

-si la société OPEN devait être condamnée se serait en raison de la mauvaise exécution de ses obligations d'assistant à maître d'ouvrage et son devoir de conseil, de sorte qu'elle ne saurait garantir la société OPEN de ses propres manquements vis-à-vis de la société SOLO INVEST; l'article 4.1 du contrat la liant à la société SOLO INVEST dispose que les préjudices subis par cette dernière restent à sa charge dès lors qu'ils résultent d'exécutions fautives ou de faits dommageables de la société OPEN. Ainsi, la responsabilité de la société LTTD ne saurait nullement être engagée.

MOTIFS

La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.

1. Les société SOLO et OPEN ont souscrit un premier contrat le 8 mars 2011 pour la définition des besoins de SOLO pour la refonte du système d'information par l'établissement d'un cahier des charges.

Au titre de ce contrat SOLO fait grief à OPEN d'avoir manqué à son obligation de conseil dans le cadre de l'étude et de l'analyse de ses besoins de fonctionnement, dans la retranscription fonctionnelle de ses besoins dans le cadre de la mise en place d'une solution informatique adaptée.

SOLO soutient que OPEN est débitrice d'une obligation de conseil renforcée à raison de la complexité de la chose achetée, ce que conteste OPEN .

SOLO ne justifiant cependant pas en quoi OPEN était tenue d'un obligation de résultatdans la spécification des besoins, l'élaboration d'un cahier des charges et le choix du partenairecommercial, qu'elle ne critique pas utilement, il en résulte que la preuve incombe à SOLO de faire la preuve d'un manquement contractuel par OPEN.

Selon le constat [X] :

- Aucun acheteur n'est paramétré ;

- Les codes sont génériques et aucun article n'est apparent ;

- La fonction de calcul du besoin en quantité n'est pas mise au point ;

- Le processus de validation des articles nouvellement créés indispensable à l'activité de la Société n'a pas été mis en place ; il en est de même notamment des fonctions «impression des tarifs par client », « gestion des composants »...

- La maintenance des tarifs est d'une lourdeur excessive qui engendre, en cas de modification, un risque d'erreur très important.

Les manquements fonctionnels portent sur des points mentionnés au cahier des charges:

4.1.5 ( clients) , 4.1.1( données articles, quantité), 4.2.2 ( gestion des prix de vente), de sorte que OPEN a rempli son obligation de conseil en identifiant les besoins de SOLO, les dysfonctionnements reprérés n'étant pas imputables à cette société mais à la mise en oeuvre du progiciel.

2.Les parties ont conclu un second contrat le 21 décembre 2011 à effet au 3 novembre 2011 ,dont l'objet, aux termes de l'article 1er du contrat, est une assistance à maîtrise de l'ouvrage dans le cadre de la mise en oeuvre de la solution LAWSON telle que décrite dans la proposition financière.

Il résulte des clauses de cet acte que les prestations d'OPEN portent sur les deux lots de la mise en oeuvre de la solution,

' le lot 1 : mise en 'uvre des modules d'Achats/ Ventes/ CRM/ Logistiques/ E- sales/ LB/ de la solution Lawson M3;

le lot 2: mise en 'uvre des modules Comptabilité/Finances de la solution Lawson M3",

ainsi détaillé :

« le pilotage général du projet: gestion du projet, suivi du planning et des jalons clés, gestion des réunions de pilotage,

- l'encadrement de l'intégrateur [LTTD] sur toutes les phases du projet,

- la participation à l'ensemble des réunions planifiées dans le cadre des ateliers de conception, de spécifcations fonctionnelles des développements, reprises des données et interfaces, la rédaction des comptes rendus associés et la validation des documents émis par LTTD dans le cadre du projet,

- l'assistance dans le cadre de la phase d'implémentation : définition de la stratégie de recette, rédaction des cahiers de recette, assistance aux tests qu'ils soient unitaires ou dintégration,

- l'organisation des formations utilisateurs dans le cadre de la phase d'intégration,

- l'assistance au démarrage et notamment la prise en charge de la relation entre SOLO et l'intégrateur : réunions et compte-rendus associés, formalisation des fiches d'incidents, tests unitaires des corrections livrées et tests d'intégration si besoin.

- l'élaboration et la gestion de la communication. ''

L'article 1 in fine rappelle que sauf disposition contraire, le présent contrat est un contrat de louage d'ouvrage.

OPEN soutient le caractère d'obligation de résultat de l'obligation souscrite.

Tant la complexité de la mission l'induit que la lettre du contrat conclu le mentionne expressément.

En effet, l'article 5.1 du contrat stipule que OPEN est expressément tenue à une obligation de conseil de résultat à l'endroit de SOLO, de sorte que c'est à bon droit que SOLO soutient qu'il appartient à OPEN de démontrer que l'inexécution ne provient pas de l'exercice de sa mission.

Dès lors , si conformément au contrat , l'assistant au maître de l'ouvrage ne se substitue pas au maître de l'ouvrage dans l'exercice de ses attributions, OPEN doit justifier qu'elle a délivré à SOLO un conseil permettant à cette société de prendre la décision adaptée aux circonstances, ou bien que SOLO a délibérément contrevenu aux conseils qui lui étaient prodigués.

Les parties ont ensuite conclu une 'proposition d'accompagnement' le 18 juillet 2012 puis une 'proposition d'assistance au démarrage' du 12 octobre 2012.

Si OPEN n'a pas été chargée de la conception ou de la mise en oeuvre du progiciel LAWSON, sa responsabilité est cependant susceptible d'être engagée, comme celle de LTTD peut l'être sur le fondement du contrat souscrit avec SOLO du chef de la mission de maître d'oeuvre qui lui a été confiée à savoir notamment une solution opérationnelle conforme au cahier des charges et ses annexes, OPEN étant tenue d'une obligation de bonne fin notamment dans le conseil sur le choix de la solution informatique et de l'intégrateur.

Ainsi, les fonctionnalités du logiciel, les spécifications détaillées ressortissent de la responsabilité de LTTD de sorte que les dysfonctionnements reprérés n'entraînent pas nécessairement la mise en jeu de la responsabilité de OPEN.

Aux termes du contrat liant les parties, le devoir de conseil consistait à 'informer, conseiller et mettre en garde le client en ce qui concerne les prestations et décisions relatives à l'exécution des prestations', étant entendu que le client reste seul maître de la décision finale ; informer, conseiller et alerter le client sur la cohérence des objectifs et des choix fixés et pris pendant la durée des prestations'

En l'espèce, les divers dysfonctionnements de la solution informatique évoqués ne sont pas sérieusement contestables.

Ils relèvent de la responsabilité d'OPEN dans la mesure où cette société ne justifie pas avoir exécuté son obligation de résultat.

Il appartenait donc à OPEN de s'assurer que l'ensemble des besoins répertoriés au cahier des charges, était effectivement pris en charge dans la solution logicielle et que l'ensemble des comptes-rendus permettaient à SOLO de donner un 'Go Live' adapté.

La 'proposition d'accompagnement ' du 18 juillet 2012 est mentionnée comme un 'additif à l'accompagnement effectué par OPEN, auprès de SOLO INVEST, pour la mise en place du système d'inormation M3.

Il est établi par SOLO que des validations de comptes-rendus sont intervenues alors que les process de chaque terme n'étaient pas terminés, et que OPEN ne justifie pas d'une mise en garde de SOLO contre les risques encourus de telles validations.

La mission de OPEN s'étendait à la validation des documents émis par la société LTTD.

SOLO établit justement par la production d'un mail [V] du 6 décembre 2012 que le libellé de la base tarif n'est pas clair, n'est pas suffisamment identifiable.

L'appelante soutient des manques fonctionnels correspondant à des besoins qui n'avaient pas été spécifiés lors de la phase de conception et des spécificités qui n'ont pas été respectées ou n'ont pas été réalisées.

Toutefois SOLO ne justifie pas en quoi OPEN a mal évalué les besoins de SOLO en développements spécifiques de sorte que ce moyen est rejeté.

SOLO soutient que le 'go live ' a été donné sur les instructions de OPEN, après avoir été deux fois reporté, sur la foi des informations fournies par OPEN et LTTD, et que sont apparus, dès cette date quotidiennement de nombreux manques fonctionnels et dysfonctionnements; que cette opération s'est déroulée dans des conditions parfaitement inadéquates et non-conformes, en l'espèce des défauts d'entrée de commande sur le web, des manques concernant les alertes de commande en anomalie, des manques ayant pour effet de procéder à des blocages clients de manière injustifiée, des manques supplémentaires concernant les problématiques liées au paramétrage de transporteur au niveau national.

S'agissant des spécifications détaillées, il ne peut être sérieusement contesté que celles-ci relèvent de la société LTTD.

Le 'feu vert' au basculement vers la nouvelle solution informatique étant un moment particulièrement critique dans la vie d'une société, et OPEN étant tenue de conseiller le client à toutes les étapes du projet, alors qu'à la suite de ce moment des dysfonctionnements sont apparus,

OPEN doit être en mesure de justifier des difficultés qui ont fait obstacle à la bonne fin du projet.

Elle ne justifie pas que le comportement de LTTD, notamment des insuffisances en matière d'identification de spécifications détaillées ainsi que leur mise en oeuvre, qui peuvent être fautifs pour cette société, constitue un fait présentant un caractère exonératoire de sa responsabilité.

Elle n'établit pas que l'accord de SOLO et de LTTD sur une liste des adaptations spécifiques qu'elles jugeaient indispensables de mettre en oeuvre, dont le nombre excédant 60, présentent un tel caractère.

OPEN qui fait le grief à SOLO de n'avoir pas été actif et d'avoir exposé correctement et clairement ses besoins, n'en rapporte pas la preuve et ne démontre pas qu'un tel comportement justifie une exonération de sa responsabilité. En effet elle ne justifie d'aucune mise en garde de SOLO dans sa manière d'agir en particulier dans la participation à la rédaction du cahier des charges.

3. Sur l'absence de réserves de SOLO lors de la réception du logiciel :

OPEN fait valoir que la recette même provisoire entraîne une présomption de conformité à la commande et atteste une volonté de rendre le système opérationnel; que la réception sans réserve purge tous les défauts apparents de conformité au regard des engagements contractuels

Elle se prévaut de l'article 6.4 du contrat d'intégration signé entre SOLO et LTTD, aux termes duquel le client procède à la recette définitive au moyens de jeux d'essais; que dans l'hypothèse d'apparition de défauts imputables au progiciel, le client s'engage à transmettre un descriptif de chaque défaut ; que la recette définitive ne peut être prononcée qu'après disparition de tout défaut bloquant; que la recette définitive est validée par la signature d'un procès-verbal de réception sans réserve de Défaut par les parties'.

Elle soutient que la recette n'a donné lieu à aucune réserve après le 'Go live', SOLO concluant qu'elle a fait valoir dans les comptes-rendu que des points restaient à éclaircir et à finaliser.

SOLO, en application de l'article 5.1.4 du contrat souscrit le 21 décembre 2011 selon lequel 'le prestataire s'engage corriger à ses frais et dans les délais raisonnables les Anomalies que le client pourraient relever au cours du mois suivant la réception' soutient qu'est fondé, en l'état du refus d'intervention de OPEN et des manquements caractérisés de celle-ci, d'obtenir indemnisation de son préjudice.

OPEN oppose que SOLO ne peut pas invoquer la garantie contractuelle dans le but de pallier l'absence des réserves qu'elle aurait pourtant pu émettre.

SOLO ne présente aucune observation sur le défaut de réserve allégué. Mais soutient que les manquements de OPEN justifie la mise en jeu de sa responsabilité.

Il échet de dire que le contrat mentionnant l'exécution d'une recette étant conclu entre SOLO et LTTD, OPEN ne peut s'en prévaloir contre SOLO pour dénier son éventuelle responsabilité.

Après la mise en demeure par le conseil de SOLO le 1er juillet 2013, la société OPEN n'est pas intervenue dans le cadre de l'article 5.1.4 du contrat du 21 décembre 2011.

Le jugement dont appel est infirmé en ce qu'il a débouté la société SOLO de son action en responsabilité contre OPEN.

4. SOLO ne peut solliciter la condamnation pour des dysfonctionnements qui ressortissent des spécifications relevant de LTTD et ont entraîner des problèmes de commande, de livraison de la marchandise, de comptabilité, de charges externes, dont au demeurant elle ne justifie pas d'un lien de causalité.

Elle ne justifie pas que la perte de chiffre d'affaires alléguée est en lien direct avec le défaut d'exécution conforme de l'obligation de conseil.

Dès lors il lui sera alloué en réparation intégrale du préjudice subi résultant du manquement de OPEN à la somme que la cour peut fixer, au vu des pièces produites, à la somme de 80.000 euros.

Cette somme se compensera avec les montants restant dus au titre des factures de OPEN d'un montant de 77.622,79 euros outre les intérêts, au payement desquelles SOLO a été justement condamnée, les prestations ayant été effectuées.

Il n'est pas contesté par OPEN que SOLO INVEST s'est acquittée de la somme de 84.163,45 euros le 22 juin 2016 en exécution du jugement dont appel.

La société OPEN étant tenue à des obligations issues du contrat signé avec SOLO dont le non -respect a occasionné un préjudice distinct des manquements de LTTD dans la mise en oeuvre opérationnelle du progiciel LAWSON M3, il n'y a lieu à condamner LTTD à la garantir intégralement des condamnations prononcées à son encontre.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour,

INFIRME le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société SOLO INVEST de son action en responsabilité formée contre la société OPEN ;

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE la société OPEN à payer à la société SOLO INVEST la somme de 80.000 euros ;

DIT que ce montant vient se compenser avec la condamnation au payement de factures contre la société SOLO INVEST d'un montant de 77.622,79 euros outre les intérêts, montant réglé le 22 juin 2016 ;

DÉBOUTE la société OPEN de sa demande de condamnation contre la société LTTD CONSULTING à la garantir intégralement des condamnations prononcées à son encontre;

LA DÉBOUTE pour le surplus de ses demandes ;

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE la société OPEN à payer à la société SOLO INVEST la somme de 10.000 euros ;

CONDAMNE la société OPEN à payer à la société LTTD CONSULTING la somme de 3000 euros ;

REJETTE toute demande autre ou plus ample,

CONDAMNE la société OPEN aux entiers dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 16/15842
Date de la décision : 16/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°16/15842 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-16;16.15842 ?
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