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14/02/2018 | FRANCE | N°17/15610

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 14 février 2018, 17/15610


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 14 FEVRIER 2018



(n° 120 , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 17/15610



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Juillet 2017 -Tribunal d'Instance de SAINT DENIS - RG n° 121700599





APPELANTE



Madame [T] [S]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 19

86 à [Localité 2]



Représentée et assistée de Me Eric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1418







INTIME



Monsieur [B] [M]

C/O Monsieur [C] [P]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 14 FEVRIER 2018

(n° 120 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/15610

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Juillet 2017 -Tribunal d'Instance de SAINT DENIS - RG n° 121700599

APPELANTE

Madame [T] [S]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 2]

Représentée et assistée de Me Eric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1418

INTIME

Monsieur [B] [M]

C/O Monsieur [C] [P]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 4] (HAITI)

Représenté et assisté de Me Yves TAMET, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 180

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Premier Président de chambre

M. Renaud SORIEUL, Président de chambre

Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Patricia PUPIER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Martine ROY-ZENATI, président et par Mme Véronique COUVET, greffier.

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 4 août 2010, la SCI [Adresse 3] a consenti un bail à usage d'habitation à M. [B] [M] pour une durée de douze mois renouvelable, moyennant un loyer mensuel révisable de 470 euros, une provision sur charges de 30 euros et le versement d'un dépôt de garantie de 468 euros portant sur un local situé [Adresse 4].

Par acte notarié du 19 avril 2012, Mme [T] [S] a acquis ce bien.

Par acte d'huissier du 10 avril 2017, M. [B] [M] a fait assigner cette dernière devant le juge des référés du tribunal d'instance de Saint Denis aux fins de voir ordonner sa réintégration dans les locaux et la restitution de ses meubles et affaires personnelles sous astreinte outre sa condamnation au paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure.

Par ordonnance du 5 juillet 2017, le juge des référés du tribunal d'instance de Saint Denis a :

- ordonné la réintégration de M. [B] [M] dans les lieux situés [Adresse 4], et la restitution de ses effets personnels, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant la signification de la présente décision - condamné Mme [T] [S] à payer à M. [B] [M] une somme provisionnelle de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts résultant de la voie de fait ;

- condamné Mme [T] [S] à payer à M. [B] [M] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [T] [S] aux dépens.

Par déclaration du 31 juillet 2017, Mme [T] [S] a interjeté appel de cette ordonnance.

Dans ses conclusions régulièrement transmises le 17 décembre 2017, auxquelles il convient de se reporter, Mme [T] [S] demande à la cour de :

- dire et juger que le congé donné par M. [B] [M] n'est que la conclusion logique de ses difficultés financières à régler ses loyers et charges (depuis le mois d'octobre 2016) et annonciateur de son départ volontaire,

- dire et juger que M. [B] [M] ne conteste pas dans ses écritures qu'il n'est pas à jour du règlement ses loyers et charges,

- dire et juger que ces retards de paiement en contravention avec les dispositions du bail autorisaient sa bailleresse à engager une procédure d'expulsion,

- dire et juger que M. [B] [M] avant de donner congé ne réglait plus ses loyers et charges,

- dire et juger que le locataire qui ne paye plus ses loyers et charges se doit de libérer les lieux sans attendre qu'une procédure d'expulsion soit engagée par son bailleur,

- dire et juger que M. [B] [M] ne peut exciper des dispositions de son contrat de bail/son droit/titre d'occupation n'existant plus /le congé ayant anéanti ce droit,

- dire et juger que le défaut de paiement des loyers et charges de la part du locataire n'est possible en cas de logement insalubre avéré que sur décision de justice,

- dire et juger que M. [B] [M] ne justifie pas, ne prouve pas et ne produit pas pour retarder différer ou bloquer le règlement de ses loyers et charges d'une part de l'existence d'un logement insalubre et d'autre part d'une décision de justice lui accordant ce droit,

- dire et juger que les dispositions de l'article 1217 du code civil (exception d'inexécution) ne sont pas opposables par M. [B] [M] à sa bailleresse ce dernier ne respectant pas lui-même ses obligations de locataire (défaut de paiement des loyers et charges depuis de nombreux mois),

En conséquence,

- infirmer en totalité l'ordonnance pour les raisons ci-avant et ci-dessous exposées,

- dire et juger qu'il existe une contestation sérieuse,

- déclarer le juge des référés incompétent,

- renvoyer les parties à mieux se pourvoir au fond,

Si par impossible,

- surseoir à statuer,

- désigner avant dire droit tel expert graphologue avec mission de vérifier si le congé délivré a bien été donné par M. [B] [M],

- donner acte à Mme [T] [S] qu'elle s'engage à prendre à ses frais avancés les honoraires de l'expert judiciaire qui sera désigné sans reconnaissance de responsabilité,

- dire et juger qu'en l'état, le juge des référés n'avait pas compétence pour attester que le congé n'a pas été délivré par M. [B] [M],

- dire et juger que M. [B] [M] n'a pas déposé plainte au préalable pour faux ou usage de faux en écritures privées, information qu'il n'a même pas évoqué à l'audience,

- dire et juger qu'il n'est pas rapporté la preuve de la mauvaise foi de Mme [T] [S],

- dire et juger que Mme [T] [S] a bien reçu un congé de son locataire lui permettant de récupérer en toute légalité son bien,

- dire et juger que rien ne permet factuellement de contester que M. [B] [M] a bien donné congé,

- dire et juger que le juge des référés n'a pas de compétence particulière en graphologie, le test d'écriture effectué lors de l'audience de plaidoiries du 22 mai 2017 ne permet pas de rejeter le congé de M. [B] [M],

- dire et juger qu'il convient d'inviter les parties à saisir le juge du fond,

En conséquence,

- supprimer l'astreinte prononcée contre Mme [T] [S] pour la demande de réintégration dans les lieux,

- infirmer la demande de condamnation de dommages et intérêts pour voie de fait car le magistrat ne rapporte pas la preuve de l'existence de cette voie de fait, Mme [T] [S] ayant bien reçu un congé du locataire sortant signé par ce dernier ou tout autre personne de sa connaissance,

- dire et juger que le magistrat de 1ère instance n'est pas habilité pour une étude graphologique,

- dire et juger que ce même magistrat aurait pu surseoir à statuer et désigner un expert judiciaire graphologue qui aurait pu sans contestation possible vérifier si M. [B] [M] était bien le signataire de la lettre de congé ou une personne de sa connaissance/entourage,

- dire et juger que l'absence d'état des lieux de sortie et/ou de remise des clefs n'impactent pas sur l'effectivité et la réalité, le bien fondé de ce congé,

- dire et juger que le congé délivré a permis à Mme [T] [S] de relouer son bien,

- dire et juger que M. [B] [M] ne rapporte pas la preuve de la mauvaise foi de Mme [T] [S],

- supprimer l'astreinte prononcée contre Mme [T] [S] pour la demande de restitution des effets personnels de M. [B] [M],

- dire et juger que M. [B] [M] ne produit aucune facture justificative avec mention de l'adresse de son logement,

- dire et juger qu'en l'espèce la demande de restitution des effets personnels de M. [B] [M] devra être rejetée M. [B] [M] n'ayant pas produit de pièces justificatives (factures '),

- condamner M. [B] [M] à lui régler la somme de 1.575 euros correspondant aux loyers et charges impayés depuis le mois de décembre 2016 au 28 février 2017,

- prononcer la résiliation du bail aux torts exclusifs de M. [B] [M] pour défaut de paiement des loyers et charges,

- condamner M. [B] [M] à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions régulièrement transmises le 3 janvier 2018, auxquelles il convient de se reporter, M. [B] [M] demande à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de dire irrecevables et mal fondées les demandes reconventionnelles formées en cause d'appel et de condamner Mme [T] [S] à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR,

- Sur les demandes de M. [B] [M]

Considérant qu'aux termes de l'article 849 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge du tribunal d'instance peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;

Que l'article L411-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que sauf disposition spéciale, l'expulsion d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux ;

Considérant qu'en l'espèce ainsi que l'indique à juste titre le premier juge, M. [B] [M] justifie être locataire d'un appartement situé [Adresse 4] par la production aux débats de l'acte sous seing privé de location du 4 août 2010 lequel s'est poursuivi tacitement ;

Considérant que M. [B] [M] soutient avoir a été évincé des lieux loués par la bailleresse tandis que cette dernière indique avoir reçu un congé du locataire envoyé le 12 février 2017 à effet du 28 février suivant et qu'il a quitté les lieux sans aucune formalité ;

Qu'il est constant que les lieux loués à M. [B] [M] ont été vidés de ses biens meubles et effets personnels le 10 mars 2017 par la bailleresse qui en a changé les serrures, ainsi qu'en atteste la main courante déposée le 14 mars 2017 et que ne conteste pas l'appelante dans ses écritures ;

Considérant que dès lors que M. [B] [M] déniait sa signature sur le congé invoqué par Mme [T] [S] daté du 12 février 2017, le premier juge était tenu de procéder à la vérification d'écriture pour satisfaire aux dispositions prévues par l'article 1373 du code civil et les articles 287 et suivant du code de procédure civile ; qu'il a pour ce faire, sans encourir la critique de l'appelante qui considère à tort que le magistrat de 1ère instance n'est pas habilité pour une étude graphologique, procédé à la comparaison entre la signature figurant sur le courrier litigieux et les spécimens de signature effectués à la barre du tribunal ; qu'il n'était nullement tenu d'ordonner une expertise judiciaire afin de comparaison des écritures dès lors qu'il disposait des éléments pour trancher la question qui lui était soumise ;

Que le premier juge a pu valablement conclure que la signature figurant sur le courrier du 12 février 2017 n'était pas semblable à celles effectuée devant lui pas plus qu'à celles figurant sur les autres documents produits par M. [B] [M] en première instance ;

Que la cour quant à elle, procédant aussi à cette vérification d'écriture en conclut qu'au vu des éléments produits par les parties la signature figurant sur le courrier de congé litigieux diffère manifestement de celles apparaissant sur la main courante, les courriers remis à l'agence Hoquet en décembre 2016 et la déclaration de cession de véhicule du 14 janvier 2017 ; qu'il se déduit de cette comparaison sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise en écriture que M. [B] [M] n'est pas le signataire du courrier daté du 12 février 2017 contenant un congé dont Mme [T] [S] se prévaut ;

Considérant , en tout état de cause, que si le locataire avait envoyé un congé, la bailleresse devait le faire valider par décision de justice et obtenir l'autorisation d'expulser ; que Mme [T] [S], bailleresse, n'établit pas avoir engagé de procédure d'expulsion à l'encontre de son locataire ni qu'un procès verbal de conciliation exécutoire a été signé entre les parties après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux ainsi que le commande l'article L411-1 du code des procédures civiles d'exécution ci-dessus rappelé l'autorisant à débarrasser les lieux loués de meubles et effets personnels de son locataire ;

Que dès lors elle ne pouvait procéder à l'expulsion de ce dernier et c'est à bon droit que le premier juge a ordonné la réintégration de ce dernier sous astreinte, M. [B] [M] subissant un trouble manifestement illicite qu'il était urgent de faire cesser ;

Considérant que l'expulsion de M. [B] [M] de son logement d'habitation et l'enlèvement de ses meubles meublant et effets personnels en son absence puis le changement de serrures des lieux l'empêchant de réintégrer les lieux qui lui étaient donnés à bail lui a causé un préjudice moral avec l'évidence requise devant le juge des référés justifiant l'allocation d'une provision de 2.000 euros ; que l'ordonnance de référé doit donc être confirmée en toutes ses dispositions ;

- sur les demandes reconventionnelles de Mme [T] [S]

Considérant qu'en application de l'article 564 du code de procédure civile 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait' ;

Considérant que Mme [T] [S] réclame la condamnation de M. [B] [M] à lui payer la somme de 1.575 euros au titre des loyers et charges impayés de décembre 2016 à février 2017 et de prononcer la résiliation du bail aux torts exclusifs du locataire pour défaut de paiement des loyers et charges ;

Considérant que devant le premier juge Mme [T] [S] n'a pas formulé ces demandes ainsi que cela résulte de l'ordonnance déférée, se contentant en première instance de conclure au débouté pur et simple du demandeur ; qu'il en résulte qu'elle présente des demandes nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile ; qu'en outre ces demandes de provision et de résiliation de bail ne tendent pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge lequel n'était saisi que d'une demande de réintégration des lieux et de restitution des effets personnels du locataire, elle ne tend pas non plus à expliciter les prétentions qui y étaient virtuellement comprises et n'ajoute aucune demande qui en est l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'elles doivent dès lors être déclarées irrecevables ;

- Sur les frais de procédure et les dépens

Considérant que le sort de l'indemnité de procédure et des dépens a été exactement réglé par le premier juge ;

Qu'à hauteur de cour, il convient d'accorder à M. [B] [M] contraint d'exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que Mme [T] [S] supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevables les demandes de Mme [T] [S] en paiement d'une provision de 1.575 euros au titre des loyers et charges impayés et en résiliation du bail aux torts exclusifs du locataire ;

Condamne Mme [T] [S] à payer à M. [B] [M] une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [T] [S] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/15610
Date de la décision : 14/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°17/15610 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-14;17.15610 ?
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