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08/02/2018 | FRANCE | N°15/07868

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 08 février 2018, 15/07868


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 08 Février 2018

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07868



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Juin 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MELUN section RG n° 12/00006







APPELANTE

Madame Catherine X...

[...] FROMONVILLE

née le [...] à [...]

comparante en personne, assisté

e de Me Vasco Y..., avocat au barreau de MELUN







INTIMES

Monsieur Thierry Z...

[...]

représenté par Me Eric A..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0508



Association TUTELAIRE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 08 Février 2018

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07868

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Juin 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MELUN section RG n° 12/00006

APPELANTE

Madame Catherine X...

[...] FROMONVILLE

née le [...] à [...]

comparante en personne, assistée de Me Vasco Y..., avocat au barreau de MELUN

INTIMES

Monsieur Thierry Z...

[...]

représenté par Me Eric A..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0508

Association TUTELAIRE DE SEINE ET MARNE (ATSM)

[...]

représentée par Me Eric A..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0508

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Octobre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de:

Monsieur Patrice LABEY, Président de chambre

Monsieur M... L'HENORET, Conseiller

Monsieur Philippe MICHEL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Frantz RONOT, lors des débats

ARRÊT :

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, délibéré prorogé ce jour.

- signé par M... L'HENORET, Conseiller pour le Président empêché, et par Madame Frantz RONOT, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

L'Association Tutélaire de Seine et Marne (ci-après ATSM ), dont l'objet et d'assurer sur le département de la Seine-et-Marne les mesures confiées par les juges des tutelles, emploie près de 70 salariés sur quatre sites. Elle a pour président M. Guy B... depuis avril 2006 et pour directeur général M. Thierry Z... depuis le 15 novembre 2004.

La convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 est appliquée par cette Association.

Depuis 2005, l'ATSM dispose d'une délégation unique du personnel.

Elle dispose également d'un CHSCT.

Par contrat de travail à durée déterminée du 8 juin 2000 suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée du 9 novembre 2000 à effet au 9 octobre, Mme X... a été engagée par l'ATSM en qualité de secrétaire polyvalente, coefficient 432.

Elle a été élue membre du CHSCT en mars 2010 et de nouveau le 18 juin 2013.

À la fin de l'année 2010, la direction de l'association a souhaité remettre en cause un usage applicable au sein de l'antenne de Melun, relatif au temps de pause de 30 minutes pour le déjeuner dans le but d'harmoniser le décompte du temps de travail. La délégation unique du personnel a sollicité l'intervention de l'inspection du travail, laquelle a rappelé à 1'Association l'obligation d'informer et consulter les représentants du personnel.

Le 26 août 2011, après procès verbal de carence du CE, la Direction a dénoncé l'usage et décidé qu'à compter du 1er octobre 2011, le temps de pause pour le déjeuner serait d'une durée minimale de 45 minutes et maximale de 2 heures. Il a été demandé aux salariés de remettre un planning horaire incluant ce temps de pause obligatoire.

Le 13 octobre 2011 sur le site de Melun, des incidents ont opposé M. Z... à quatre salariées, parmi lesquelles Mme X....

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 octobre 2011, les quatre salariés ont été convoquées à un entretien préalable à éventuel licenciement pour faute relative aux faits du 13 octobre fixé au 28 octobre 2011, avec mise à pied à titre conservatoire à compter du 21 octobre 2011.

Par lettre du 8 novembre 2011, l'ATSM a notifié aux quatre salariés dont Mme X... une mise à pied disciplinaire de trois jours.

Par requête enregistrée le 5 janvier 2012, Mme X... a saisi le Conseil de prud'hommes de Melun d'une demande d'annulation de la mise à pied disciplinaire, l'annulation de la procédure disciplinaire engagée le 4 septembre 2013 et la condamnation de l'ATSM à lui régler, avec exécution provisoire, les sommes suivantes :

- 277,21 € à titre de remboursement de salaire de mise à pied ;

- 27,72 € au titre des congés payés afférents au remboursement de salaire de mise à pied ;

- 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

- 12 012 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

- les intérêts capitalisés à compter de la saisine du Conseil ;

Elle sollicitait également :

- la condamnation de M. Z... à lui régler la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

- la condamnation de l'ATSM et de M. Z... au paiement d'une amende de 3 750 € chacun ;

- la condamnation solidaire de l'ATSM et de M. Z... à une indemnité de 3 000 € sur le fondement

de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- l'affichage du jugement dans les locaux de l'ATSM ;

- la remise de bulletins de paie conformes au jugement.

Par lettre recommandée AR du 4 septembre 2013, l'ATSM a annulé une précédente convocation à un entretien préalable fixé au 9 septembre dans 'l'attente d'une enquête pour harcèlement que la direction de l'association va diligenter' et a mis à pied à titre conservatoire Mme X....

Mme X... a été placée en arrêt maladie à compter du 7 septembre 2013.

Après avis défavorable du CE, l'inspection du travail a refusé l'autorisation de licenciement de Mme X..., par décision du 9 décembre 2013.

Par jugement, dont appel, du 5 juin 2015, la formation de départage du conseil de prud'hommes de Melun a annulé la mise à pied à titre conservatoire notifiée par l'Association Tutélaire de Seine et Marne (ATSM) à Mme X... le 4 septembre 2013, dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, a débouté la salariée du surplus de ses demandes tant à l'égard de L'ATSM que de M. Z..., a débouté M. Z... de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive, condamné Mme C... aux dépens, en ce non compris les frais afférents à la médiation judiciaire, lesquels resteront à la charge de l'ATSM, et dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 1er décembre 2015, le médecin du travail a déclaré Mme X... inapte définitivement à tout poste au sein de l'ATSM en un seul examen (article R.4624-31 du Code du Travail) en raison du danger immédiat si maintien de la salariée à son poste et a précisé que la salariée resterait apte à un poste administratif de secrétariat en dehors de l'ATSM avec une autre organisation du travail.

Par lettre du 14 décembre 2015, l'ATSM a convoqué Mme X... à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 23 décembre 2015, puis, par lettre du 28 décembre 2015, a notifié à la salariée son licenciement en raison de l'impossibilité de la reclasser à la suite de son inaptitude définitive constatée par le médecin du travail.

Ainsi, dans le dernier état de la procédure en appel, aux termes de ses conclusions déposées le 19 octobre 2017 au soutien de ses explications orales, Mme X... demande à la cour de:

- Infirmer le jugement entrepris ;

- Annuler la sanction disciplinaire du 8 novembre 2011 ;

En conséquence,

- Condamner l'ATSM à lui payer les sommes suivantes :

277,21 € au titre de la mise à pied de trois jours retenue sur le salaire du mois de novembre 2011 ;

27,72 € au titre des congés payés afférents ;

5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

- Constater l'existence du harcèlement moral ;

En conséquence,

- Condamner l'Association Tutélaire de Seine et Marne à lui payer la somme de 36 036 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral ;

- Dire que son licenciement en date du 28 décembre 2015 est entaché de nullité ;

En conséquence,

Condamner l'ATSM à lui payer les sommes suivantes :

4 004 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

400,40 € au titre des congés payés afférents ;

36 036 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- Ordonner l'affichage de l'arrêt dans les locaux de l'ATSM et la publication dans deux journaux tels que Le Parisien édition Seine et Marne et La république de Seine et Marne aux frais de l'association en application de l'article L.1155-2 du Code du Travail ;

- Condamner l'ATSM à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Dire que les intérêts légaux commenceront à courir à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes ;

- Ordonner la capitalisation des intérêts.

Par conclusions également déposées le 19 octobre 2017 au soutien de ses explications orales, l'ATSM et M. Z... demandent à la cour de :

- Prononcer la mise hors de cause de M. Z... à défaut de demandes à son encontre ;

- Confirmer le jugement entrepris ;

Et y ajoutant,

- Condamner Mme X... à verser à l'association et à M. Z..., chacun, la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la mise hors de cause de M. Z...

Aucune demande en appel n'étant formulée à son encontre, M. Z... sera mis hors de cause.

Sur la sanction disciplinaire notifiée le 8 novembre 2011

Mme X... soutient que sa mise à pied doit être annulée car elle n'est pas motivée, la lettre du 8 novembre 2011 ne comportant aucun grief précis et vérifiable.

Elle estime qu'en tout état de cause, les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis, les déclarations de Mme D... faisant clairement ressortir la responsabilité de M Z... dans les faits du 13 octobre 2011 et aucune entrée de force dans le bureau, ni violence verbale à l'égard du directeur, n'étant établie.

Elle argue également que les actes qui lui sont reprochés sont justifiés par la nécessité de porter assistance à une collègue en danger, Mme D..., qui a évoqué à maintes reprises son inquiétude et son refus de subir l'entretien de M. Z... et qui a été séquestrée dans le bureau de celui-ci, lequel était hors de lui et détenait une arme ; qu'au surplus, en refusant l'accès à son bureau pour intervenir en faveur de Mme D..., M Z... a fait obstacle à l'exercice de son mandat par la salariée, alors en temps de délégation syndicale ; qu'elle ne peut être sanctionnée pour avoir exercé son mandat dans le cadre de l'article L. 2313-1 du Code du Travail en ce qu'elle n'a pas interrompu l'entretien entre Mme D... et M. Z..., comme relevé à tort par le conseil de prud'hommes mais a voulu simplement s'assurer que Mme D... n'était pas en danger et si la salariée souhaitait ou non se faire assister lors de l'entretien; que la sanction est discriminatoire en ce qu'elle n'a visé que les salariées protégées alors que M. Z..., dont les agissement ont été bien plus graves (abus de droit, atteinte à l'intégrité physique), n'a fait l'objet d'aucune sanction.

L' ATSM réplique que la lettre du 8 novembre 2011 comporte une motivation précise et suffisante ; que quatre salariées, dont Mme X..., ont voulu imposer à M Z..., dans le cadre d'un entretien informel, une assistance qui n'avait pas lieu d'être et n'avait d'ailleurs pas été requise par Mme D... ; que les actes d'insubordination du 13 octobre 2011 sont établis et ont donné lieu à la même sanction pour chacune des quatre salariées impliquées, de sorte que l'accusation de discrimination syndicale doit être écartée.

Cela étant, Mme X... s'est vue notifier le 8 novembre 2011, ainsi que trois autres salariées protégées, une mise à pied disciplinaire de 3 jours pour "des actes d'insubordination" le jeudi 13 octobre 2011. Il s'agit là d'un motif précis au sens de l'article R. 1332-2 du Code du Travail et vérifiable qui a donné lieu à une réunion extraordinaire du CE le 2 novembre 2011, à laquelle était convoquée Mme X... et les trois autres salariées protégées concernées, et à un avis négatif à l'issue de neuf pages.

L'attestation de Mme D... du 22 octobre 2013 produite par l'ATSM, accompagnée de la copie de la pièce d'identité de l'intéressée ne peut être écartée aux seuls motifs qu'elle est dactylographiée et qu'elle aurait été écrite sous les pressions de l'employeur qui ne sont pas démontrées.

Il ressort des pièces produites, notamment de l'attestation Mme D... évoquée ci-dessus, que cette dernière s'est rendue dans le bureau de M Z..., à la demande de ce dernier, le 13 octobre 2011 pour un entretien informel portant sur le fait qu'elle n'avait pas remis sa fiche horaire avec la pause déjeuner conformément à la dénonciation contestée de l'usage sur le temps de pause déjeuner ; que Mme D... n'avait pas manifesté le désir d'être assistée pour cet entretien par un délégué du personnel ni par quiconque et ne se sentait pas en danger, quand bien même des témoins relatent l'état d'énervement de M Z... ; que l'assistance du salarié par un délégué du personnel dans le cadre d'un tel entretien ne ressort d'aucun texte ; que malgré ces circonstances, quatre salariées protégées, dont Mme X..., membre de CHSCT, ont frappé à plusieurs reprises à la porte du directeur qui leur a signifié qu'elles n'avaient rien à faire là, puis ont tenté de forcer la porte bloquée par le directeur et qu'il s'en est suivi une bousculade.

Dans ces conditions, la faute d'insubordination consistant à imposer sa présence sous couvert d'un mandat de délégué du personnel et à perturber un entretien, malgré le refus justifié d'une telle présence par le Directeur, est établie et la sanction de la mise à pied est fondée et proportionnée à la faute de Mme X..., les quatre salariées protégées fautives ayant été sanctionnées dans les mêmes proportions, peu important que la cause de cet entretien soit liée à la dénonciation d'un usage que Mme X... estimait illicite.

Le jugement de débouté est donc confirmé.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La responsabilité de l'employeur tenu de prendre les mesures nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral n'exclut pas, en application des dispositions de l'article L.4122-1 du code du travail spécifiques aux relations de travail au sein de l'entreprise, qu'engage sa responsabilité personnelle à l'égard de ses subordonnés le salarié qui leur fait subir intentionnellement des agissements de harcèlement moral.

Les méthodes de gestion mises en oeuvre par un supérieur hiérarchique ne peuvent caractériser un harcèlement moral que si elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Mme X... explique que la dégradation du climat social et la souffrance au travail par les salariés ont été constatées au sein de l'ATSM depuis plusieurs années, sans que l'employeur ne prenne les mesures adéquates, ainsi que le démontrent l'alerte faite le 16 juin 2011 de la CRAMIF par le CHSCT et la demande faite le 5 octobre 2011 par le CHSCT de la mise en place d'un calendrier précis de travail sur les risques psycho-sociaux sur l'antenne de Nemours.

En ce qui la concerne, elle soutient avoir subi des pressions répétées sur son lieu de travail, tant en sa qualité de salariée que de membre du CHSCT, lesquelles ont compromis la bonne exécution de son contrat de travail et porté gravement atteinte à sa santé.

Elle invoque :

- des pressions du Directeur en sa qualité de membre du CHSCT, nécessitant une prise en charge médicale dès le 4 octobre 2011,

- la détérioration de sa situation par des agissements constitutifs d'un véritablement harcèlement, après l'incident, la sanction injustifiée et la saisine de la juridiction prud'homale,

- la multiplication des injonctions de travail de la part de Mme E..., nommée déléguée à la protection en mars 2012 et auprès de laquelle elle était affectée, qui utilisait tour à tour et souvent sur une même journée, des écrits manuscrits ou courriels de nature à éluder toute communication verbale avec elle, alors que son bureau était situé à quelques mètres du sien et ce afin de créer la confusion dans l'organisation de son travail de secrétariat qu'elle a toujours mené à bien depuis son embauche, ce qui allait à l'encontre de la restauration du dialogue préconisé par la médiation mise en place de décembre 2011 à juin 2012,

- l'affectation de tâches qui ne relevaient pas de sa fiche de poste,

- sa convocation en date du 15 janvier 2013, par Monsieur F... en présence de Madame E... concernant des anomalies mineures sur les courriers qu'elle avait tapés, dénoncées par celle-ci, sans aucune tentative d'échange préalable, une telle convocation par le responsable d'antenne et l'attitude démesurée de sa Déléguée ayant été à l'origine d'un arrêt de travail du 16 janvier 2013 au 7 avril 2013,

- le renouvellement de remontrances inappropriées lors de sa reprise à l'issue de son arrêt-travail de nature à la déstabiliser, comme par exemple, la rayure de la signature par M. F... le 23 avril 2013, sur un courrier qu'elle avait tapé au motif que ce courrier ne comportait pas la mention ' Vos Réf', alors que M. F... acceptait sans hésitation de signer un courrier rédigé par une autre secrétaire sans cette mention,

- la demande que lui a adressée Monsieur F... de joindre la copie de l'ensemble des comptes extérieurs aux CRG et transmettre le tout dans un délai de 3 jours qui a entraîné une surcharge de travail ayant nécessité la réalisation d'heures supplémentaires que Monsieur F... a refusé de valider,

- la convocation par M. F... pour lui reprocher sur un ton accusateur des faits relatés par une majeure protégée suivie par Mme E... alors que sa demande d'investigations suite à cette dénonciation n'a pas été accueillie,

- sa convocation le jour de son départ en congés, à un entretien préalable en vue de son licenciement. (Convocation du 16 août pour un entretien à son retour le 9 septembre), qui ne pouvait que perturber et gâcher ses congés, suivie d'une annulation, puis d'une nouvelle convocation avec mise à pied (l'accusant d'être harceleuse !!!), de nouveau annulée et suivie d'une troisième convocation., cette situation ayant été dénoncée le 10 septembre 2013 par plusieurs salariés.

Elle ajoute qu'elle a été déclarée inapte temporaire à la reprise de poste par la Médecine du Travail le 7 et 25 mars 2013 qui précisait : 'état d'épuisement psychologique permanent, du risque aggravé d'accident de la route, du risque majoré d'erreur professionnelle avec prise en charge d'une population vulnérable', qu'elle a dénoncé également le prolongement du harcèlement moral, dont elle était victime, depuis de nombreux mois et qui dégradait son état de santé et qu'elle a de nouveau été arrêtée du 15 au 26 juillet 2013 en raison d'un état anxio-dépressif.

Elle se réfère à :

- une lettre de Madame G..., une ses collègues, à Mme H..., Président du CHSCT, en date du 16 août 2013, aux fins de dénoncer le climat social au sein de l'antenne de Melun,

- un courrier du 16 février 2012 de l'inspecteur du travail qui constate 'le climat extrêmement tendu entre les instances du personnel et le directeur de l'association, M. Z...' et qui évoque une situation de danger grave et imminent,

- un courrier du15 mai 2012 de l'inspection du travail qui a après avoir procédé à l'audition de plusieurs salariés de l'association afin d'identifier l'existence et l'origine de leur situation de souffrance au travail, met en demeure l'association de mettre en oeuvre les mesures qu'il préconise,

- le compte-rendu de la réunion du CHSCT du 18 avril 2013 aux termes duquel, il est demandéà l'ATSM de faire cesser très rapidement les risques psycho sociaux eu égard aux obligations de résultant de l'employeur en matière de santé psychique et physique des salariés, la lettre envoyée à l'ATSM le 26 février 2014 de mettre en oeuvre 'une planification de la prévention adaptée à la situation constatée notamment sur l'antenne de Melun dans le cadre d'une réelle approche collective , permettant aux salariés de débattre de leur travail et d'en repenser ensemble les problématiques',

- des attestations,

- des pièces médicales,

- des échanges de mails.

Cela étant, la dégradation du climat social et la souffrance au travail constatée de manière collective au sein de l'association, ne peuvent établir des faits de harcèlement sur un salarié en particulier.

Par ailleurs, les mails de Mme E... produits par Mme X... (60 feuilles) s'échelonnant du 7 janvier 2013 au 16 avril 2013 au comportent des instructions ponctuelles, dans des termes toujours courtois et courts et qui, dans ses conditions, ne dépassent pas le cadre normal des relations professionnelles entre la déléguée à la protection et la secrétaire polyvalente qui lui était affectée, étant précisé que l'utilisation de l'écrit par le supérieur correspond au souci légitime d'une bonne transmission d'une instruction et d'éviter la déperdition de l'oral ou un éventuel oubli de l'interlocuteur et que Mme X... ne démontre pas que les mails et autres notes de Mme E... étaient exclusifs de toute communication verbale.

Dans sa lettre transmise par mail du faisant suite à l'entretien du 15 janvier 2013 entre M. F... et Mme X... en présence de Mme E..., Mme X... a reconnu les erreurs qui lui étaient reprochées dans les courriers (par exemple, courriers datés de 2012 au lieu de 2013, absence de références des tiers sur deux d'entre eux, erreurs sur le nom du signataire), de sorte que la convocation de Mme X... ne peut être considérée comme injustifiée.

Il en est de même de la rayure de sa signature par M. F... sur un courrier tapé par Mme X... daté du 23 avril 2013, en ce que celui-ci est affecté de la même erreur que l'une ayant fait l'objet de l'entretien du 15 janvier 2013, à savoir l'absence de la référence du tiers. Au surplus, il doit être relevé, en premier lieu, que, selon le mail de M. F... du 29 avril 2013, ce n'est pas l'absence de la formule 'Vos Réf :' qui a entraîné la réaction de M. F..., comme indiqué de façon erronée par Mme X... dans ses conclusions, mais la présence d'une telle formule lorsque celle-ci n'est pas renseignée, en deuxième lieu, que ces mêmes erreurs de formule de références non renseignées se sont répétées dans des courriers adressés au juge des tutelles de Melun le 13 mai 2013 et au procureur de la République de Melun le 27 juin 2013, ce dernier courrier étant affecté au surplus de fautes de frappe, et en dernier lieu, que Mme X... ne démontre pas, autrement que par affirmation, que M. F... faisait preuve de tolérance à ce sujet à l'égard des autres secrétaires.

Mme X... procède également par affirmation lorsqu'elle indique qu'il lui était confié des tâches qui ne relevaient pas de sa fiche de poste.

Le refus de M. F... de valider les heures supplémentaires effectuées par Mme X... le 26 juin 2013 (2 heures) à la suite de sa demande de copie de l'ensemble des comptes extérieurs aux CRG et transmission du tout dans un délai de 3 jours, procède du non respect par Mme X... de la procédure mise en place dans l'association qui impose d'avertir le responsable hiérarchique et le service RH avant le dépassement horaire, conformément à la note de service RH 2013/SL06 du 20 février 2013.

La convocation de Mme X... par M. F... pour un entretien le 11 juillet 2013 suit une lettre de réclamation d'une majeur protégée en date du 17 juin 2013 dénonçant le comportement à son égard de la secrétaire lors de sa visite au service le 7 juin précédent et s'inscrit donc dans le souci légitime du supérieur hiérarchique d'obtenir des explications de la part de la salariée mise en cause, étant relevé que «le ton, sans équivoque, accusateur et non conciliateur» qu'aurait employé M. F... lors de l'entretien ne résulte que des seules affirmations de Mme X....

La convocation adressée à Mme X... le 16 août pour un entretien à son retour le 9 septembre, suivie d'une annulation en nouvelle convocation à un entretien préalable à une mesure disciplinaire s'inscrit dans le cadre d'une procédure engagée par l'employeur à la suite de signalements de faits de harcèlement moral au sein de l'association susceptibles de mettre en cause Mme X... et alors que cette dernière ne s'est pas rendue à deux convocations fixées les 9 et 11 septembre 2013 par M. Z..., directeur général, pour recueillir ses explications dans le cadre d'une enquête pour harcèlement.

Dans son attestation produite par Mme X..., Mme Cécilia I... dit n'avoir rien à rapporter de désobligeant à l'égard de cette dernière, témoigne du comportement général de Mme E... et de M. F... et évoque sa propre situation dans ses relations avec M. F... et le licenciement qu'elle estime abusif dont elle a fait l'objet courant 2013. Il ne peut donc être tiré aucune conséquence de ce témoignage sur la situation particulière de Mme X....

Mme Valérie J... indique que, lors d'un entretien entre Mme X... et le responsable d'antenne en présence de Mme E..., elle a entendu cette dernière sortir du bureau en criant et en claquant la porte. Toutefois, cet événement, qui selon les termes de la lettre de Mme X... transmise par mail du 9 avril 2013, est survenu lors de l'entretien du 15 janvier 2013 entre M. F... et Mme X..., auquel assistait Mme E..., est unique et ne peut en conséquence caractériser des faits de harcèlement qui impliquent une répétition.

Dans une attestation, Philippe K... indique n'avoir jamais eu à se plaindre du travail et du comportement de Mme X..., ce qui est sans portée sur l'appréciation de l'existence ou non de faits de harcèlement dont aurait été victime Mme X....

Dans une autre attestation, M. Philippe K... évoque essentiellement sa situation personnelle. Certes, il indique que le mot d'ordre donné à tous les cadres par M. Z... au sujet des quatre représentants du personnel mises en cause dans l'incident du 13 octobre 2011, dont Mme X..., était «Tous les moyens sont bons, travaillez à leur mise à l'écart et développez les intimidations» et que Mme H... avait décidé de s'occuper personnellement de Mme X.... Toutefois, Mme X... ne met nullement en cause Mme H... dans les faits de harcèlement qu'elle invoque.

Mme Véronique L... témoigne du ton virulent de M. F... lorsqu'il est sollicité par Mme X... et d'une tension existant entre les deux, sans élément factuel à part la phrase : «je ne comprends pas ce que tu viens faire dans mon bureau, rapporte toi à ta fiche de poste» de sorte qu'il n'est pas possible de vérifier la portée du comportement de M. F... au delà de l'appréciation subjective du témoin, si le constat du témoin ne repose pas sur une appréciation subjective et, en tout état de cause, si la nature des relations entre M. F... et Mme X... dépassait un manque d'affinité ou une simple mésentente.

Il résulte des éléments ci-dessus que, dans certains cas, Mme X... n'établit pas la matérialité de faits précis et concordants qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, et que dans d'autres cas, lorsque ces faits pris dans leur ensemble le permettent, l'ATSM prouve que les faits en cause ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes au titre du harcèlement.

Sur la nullité du licenciement pour inaptitude physique

Mme X... fait valoir que l'inaptitude physique ayant motivé son licenciement est inhérente au harcèlement moral qu'elle a subi dès lors qu'elle est en arrêt de travail depuis septembre 2013 et qu'un reprise à son poste au sein de l'ATSM est constitutif d'un danger immédiat, selon l'avis du médecin du travail que l'ATSM n'a pas contesté auprès de l'inspection du travail et qui est donc définitif et incontestable.

Mais, le harcèlement moral invoqué par Mme X... n'ayant pas été retenu, la demande en nullité du licenciement pour une inaptitude qui serait consécutive à ce harcèlement doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la nullité du licenciement pour atteinte au statut protecteur

Mme X... rappelle qu'elle était membre du CHSCT lorsque le licenciement a été notifié et que l'ATSM était donc tenue de solliciter l'autorisation de l'inspection du travail avant de lui notifier le licenciement, ce que manifestement, elle n'a pas fait.

Cela étant, il résulte des pièces du dossier que Mme X... a été élue membre du CHSCT le 18 juin 2013 (procès-verbal des élections des membres du CHSCT du 18 juin 2013), que son mandat expirait le 18 juin 2015 et qu'elle bénéficiait ainsi d'une protection de protection expirant au 18 décembre 2015.

L'article R.2421-8 du code du travail dispose que l'entretien préalable au licenciement a lieu avant la présentation de la demande d'autorisation de licenciement à l'inspecteur du travail.

Or, au 23 décembre 2015, date fixée pour l'entretien préalable, l'ATSM 77 n'avait plus à requérir la demande d'autorisation de licencier Mme X... puisqu'elle ne bénéficiait plus de la protection de l'article L.2411-13 du Code du Travail.

Mme X... devra donc être déboutée de sa demande en nullité de licenciement pour atteinte à son statut protecteur.

Sur l'affichage et la publication de l'arrêt

Mme X... succombant au principal de son appel, sa demande de publication et d'affichage de l'arrêt sera rejetée.

Sur les frais non compris dans les dépens

Par application de l'article 700 du code de procédure civile, Mme X..., qui succombe en son appel, sera condamnée à verser à l'ATSM et à M. Z..., chacun, la somme de 500 €, au titre des frais exposés par les intimés qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement de départage du conseil de prud'hommes de Melun du 5 juin 2015 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE Mme X... du surplus de ses demandes,

CONDAMNE Mme X... à verser à l'ATSM et à M. Z..., chacun la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme X... aux dépens.

LE GREFFIER LE CONSEILLER Pour le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 15/07868
Date de la décision : 08/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°15/07868 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-08;15.07868 ?
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