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07/02/2018 | FRANCE | N°16/09422

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 07 février 2018, 16/09422


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2018



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/09422



Décisions déférées à la Cour :

jugement du 31 mai 2012 - Tribunal de commerce de Paris - J2008006185

arrêt du 14 mai 2014 - Cour d'appel de Paris - RG : 12/11364

arrêt du 2 février 2016 - Cour de Cassation de Paris - arrêt n°

103 F-D





DEMANDERESSE À LA SAISINE :



SARL [Adresse 1] prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro [Adresse 1]

[Adress...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/09422

Décisions déférées à la Cour :

jugement du 31 mai 2012 - Tribunal de commerce de Paris - J2008006185

arrêt du 14 mai 2014 - Cour d'appel de Paris - RG : 12/11364

arrêt du 2 février 2016 - Cour de Cassation de Paris - arrêt n° 103 F-D

DEMANDERESSE À LA SAISINE :

SARL [Adresse 1] prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro [Adresse 1]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Valérie PIGALLE, avocat au barreau de PARIS, toque : D2171

DÉFENDEURS À LA SAISINE :

Monsieur [V] [Y]

Né le [Date naissance 1] 1928 à [Localité 2] (ALGÉRIE)

Centre action sociale de la Ville de [Localité 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Madame [U] [N]

Née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Madame [Q] [S]

Née le [Date naissance 2] 1952

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentés par Me Bernard BESSIS de la SELEURL BERNARD BESSIS SELARL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0794

VILLE DE [Localité 8], représentée par son maire en exercice,

[Adresse 6]

direction des affaires juridiques

[Adresse 6]

[Localité 9]

représentée par Me Stéphane DESFORGES de la SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0131

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 6 décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère

Madame Sandrine GIL, conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Elodie RUFFIER

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle HARDOIN, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 30 juillet 2001, dûment enregistré, M. [V] [Y] et son épouse Mme [A] ont confié leur fonds de commerce d'hôtel restaurant situé [Adresse 7] en location gérance à la SARL [Adresse 1], le contrat étant assorti d'une promesse de vente du fonds au prix de 3 000 000 francs soit 457 347, 50 euros.

La SARL [Adresse 1], représentée par son gérant M. [D], a levé l'option par acte d'huissier de justice du 29 avril 2005 au prix de 3 000 000 francs soit 457 347,50 euros.

Le 6 mai suivant, les époux [Y] ont protesté contre la levée d'option en arguant d'un avenant modificatif signé le 10 mars 2002 avec l'ancien gérant de la SARL [Adresse 1], M. [J], portant le prix de vente à la somme de 4 millions de francs soit 609 796,06 euros.

Contestant l'authenticité de ce document, M [W] [D] ès qualités de gérant de la SARL [Adresse 1] a déposé plainte pour faux et usage de faux entre les mains du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris. L'instruction a été close par une ordonnance de non-lieu dont la SARL [Adresse 1] a interjeté appel et qui a été confirmée par un arrêt de la chambre de l'instruction du 17 novembre 2006. La société [Adresse 1] a formé pourvoi en cassation contre cet arrêt mais n'a pas conclu au soutien de celui-ci.

La SARL [Adresse 1] a assigné les époux [Y] devant le tribunal de commerce de Paris en demandant qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce qu'il soit statué sur la plainte avec constitution de partie civile et en nullité de l'avenant du 10 mars 2002, la vente étant parfaite selon elle par accord des parties sur la chose et le prix de 3 millions de francs.

M. et Mme [Y] ont eux mêmes assigné la SARL [Adresse 1] pour voir dire caduque et de nul effet la levée de l'option et ordonner l'expulsion de la SARL [Adresse 1] des lieux qu'elle occupe en fixant une indemnité d'occupation.

La SARL [Adresse 1] a appelé à la cause M. [O] propriétaire des murs abritant le fonds de commerce pour lui rendre opposable le jugement à venir. Ce dernier a signifié à M et Mme [Y] le 26 juillet 2007 un congé refus de renouvellement pour le 31 décembre 2007 date d'expiration du bail, avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction. M. [O] a ensuite cédé les murs commerciaux à la Ville de [Localité 3] qui est intervenue à l'instance.

Mme [Y] est décédée le [Date décès 1] 2010 laissant pour lui succéder son époux et ses deux filles Mme [N] et Mme [S] nées d'une autre union.

Par jugement en date du 31 mai 2012, la 9ème chambre du tribunal de commerce de Paris a':

- Prononcé la résiliation de la location gérance signée le 30 juillet 2001 à effet du 1er janvier 2008 aux torts exclusifs de la SARL [Adresse 1],

- Condamné la SARL [Adresse 1] à payer à M. [Y] et à ses ayants droit de Mme [Y] la somme de 41 348, 93 euros au titre de la reconnaissance de dette du 31 décembre 2002,

- Condamné la SARL [Adresse 1] à payer à M [Y] et aux ayants droit de Mme [Y]':

*la somme de 231 724 euros au titre des redevances de location gérance du 1er novembre 2004 au 31 décembre 2007,

*la somme de 15 549, 60 euros à titre de complément de loyers de la boutique du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007,

*la somme de 22 162, 17 euros au titre de solde de loyers des murs du fonds de commerce pour les années 2004 et 2005.

*une somme mensuelle de 8 788, 34 euros au titre de l'indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2008,

- Ordonné la restitution par M. [Y] et les ayants droit de Mme [Y] à la SARL [Adresse 1] de la somme de 59 881, 83 euros antérieurement versée,

- Ordonné la compensation des condamnations,

- Condamné la SARL [Adresse 1] à payer à M. [V] [Y] et aux ayants droit de Mme [Y] les intérêts au taux de retard de 1% par mois à compter de la dates d'exigibilité contractuelle des sommes ci-dessus,

- Condamné la SARL [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droit de Mme [Y] la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- Ordonné l'expulsion de la SARL [Adresse 1] des lieux qu'elle occupe [Adresse 7], avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est,

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

- Condamné la SARL [Adresse 1] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquides à la somme de 198,78 euros TTC (TVA : 32,36 euros).

La SARL [Adresse 1] a interjeté appel.

La cour d'appel de Paris (Pôle 5 - Chambre 3), par arrêt en date du 14 mai 2014 a':

- Confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf celle qui concerne la somme de 41 349, 93 euros mise à la charge de la SARL [Adresse 1],

- Débouté M. [Y] de cette demande,

- Débouté les parties de leurs autres demandes,

- Condamné la SARL [Adresse 1] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La SARL [Adresse 1] a formé un pourvoi.

Par arrêt en date du 2 février 2016, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a':

- Cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

- Remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

- Condamné M. [Y] et Mmes [N] et [S] aux dépens;

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, les a condamnés à payer les sommes globales de 3 000 euros à la société [Adresse 1] et de 2 000 euros à la Ville de [Localité 3] ;

- Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

aux motifs que, «'pour faire droit aux demandes des consorts [Y], l'arrêt, après avoir relevé que la promesse initiale de vente, incluse dans un ensemble d'obligations réciproques des parties concernant le contrat de location-gérance, n'était pas soumise à la formalité de l'enregistrement, retient que l'avenant, s'il modifie de manière substantielle la promesse initiale en fixant un autre prix de vente, modifie également les obligations des parties en prévoyant une augmentation du montant de la redevance, ces deux majorations constituant une nouvelle appréciation par celles-ci de la valeur des locaux après adjonction d'un local accessoire et de l'activité exercée, pour en déduire qu'il existe un lien entre les nouvelles obligations et le nouveau prix définis dans l'avenant lequel, échappant lui-même à l'obligation de l'enregistrement, n'est pas nul, et qu'il s'ensuit que la levée de l'option au prix de 457.340,50 € par la société [Adresse 1] ne valant pas vente, la promesse de vente est devenue caduque';

qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser un lien de dépendance entre les obligations réciproques des parties résultant de la location-gérance et de la promesse unilatérale de vente, seule circonstance de nature à faire échapper cette dernière à l'obligation d'enregistrement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.'»

La cour d'appel a été à nouveau saisie en date du 22 avril 2016.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 24 novembre 2017 au visa des articles 1583 et suivants, 1589 et suivants, 555, 1147 et suivants, 1604 et suivants et 1607 du code civil, de l'article 1840-A du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 10 mars 2002, devenu l'article 1589-2 du code civil et des articles 699 et 700 du code de procédure civile, la SARL [Adresse 1] demande à la cour de':

- Infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 31 mai 2012 dont appel.

Et statuant à nouveau,

- Dire et juger valable la levée d'option d'achat du fonds de commerce signifiée par la société [Adresse 1] le 29 avril 2005 à M. [V] [Y] et son épouse Mme [G] [A] au prix de 3 000 000 francs soit 457 347,50 euros.

- Dire et juger parfaite la cession au profit de la Société [Adresse 1] du fonds de commerce d'hôtel meublé restaurant qu'elle exploitait sis [Adresse 7], suite à sa levée d'option du 29 avril 2005.

- Dire et juger par suite que la société [Adresse 1] est régulièrement propriétaire dudit fonds de commerce d'hôtel meublé restaurant qu'elle exploitait sis [Adresse 7] jusqu'à l'expropriation, et l'expulsion subséquente du 7 juillet 2015.

- Dire et juger que le document litigieux intitulé « avenant » daté du 10 mars 2002 contenant une promesse unilatérale de cession de fonds de commerce qui n'a pas été enregistré dans le délai de 10 jours à compter de son acceptation, est entaché de nullité absolue et à tout le moins dépourvu de tout effet juridique.

- Dire et juger que M. [V] [Y], ni Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] ne justifient pas plus, au demeurant, de l'existence d'un différend et de concessions réciproques consenties aux termes de l'acte qualifié également de transaction, et qu'il ne justifie pas davantage du fait que le document litigieux aurait été signé le 10 mars 2002.

- Dire et juger que la société [Adresse 1] est bien fondée à opposer à M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée par l'exception de nullité dudit document litigieux intitulé « avenant » daté du 10 mars 2002.

- Dire et juger que M. [V] [Y] et son épouse Mme [A], Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A], n'ont pas respecté leur obligation de délivrance du fonds de commerce vendu.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, à payer à la société [Adresse 1] la somme de 750 000 euros au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, consécutif à la perte du fonds de commerce acquis par ses soins suite à sa levée d'option du 29 avril 2005

- Ordonner la compensation due à concurrence des dommages et intérêts de 750 000 euros avec le prix de vente du fonds de commerce de 457 347,50 euros.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, à payer à la société [Adresse 1] la somme résiduelle s'élevant après compensation à 292 652,50 euros.

- Débouter M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Madame Mme [A] épouse [Y] décédée, de l'ensemble de leurs demandes, fins moyens et conclusions et notamment de leurs demandes reconventionnelles.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, à rembourser à la société [Adresse 1] la somme de 38 874,49 euros versée au titre de dépôt de garantie au titre du contrat intitulé « Contrat de location gérance avec promesse de vente de fonds de commerce » du 30 juillet 2001.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, à payer à la société [Adresse 1] la somme de 39 000 euros correspondant au solde créditeur de l'apurement des comptes entre les parties concernant les redevances de location-gérance.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner solidairement M. [V] [Y] et Mmes [Q] [S] et [U] [N], ayants droit de Mme [G] [A] épouse [Y] décédée, aux entiers dépens de la première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de Maître Pigalle Valérie conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 3 novembre 2017, M. [V] [Y], Mme [U] [N] et Mme [Q] [S] demandent à la cour de':

- Déclarer l'appel du jugement rendu le 31 mai 2012 mal fondé,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de location-gérance aux torts de la société [Adresse 1],

- Dire et juger que le lien existant entre le contrat de location gérance et la promesse de vente inclus dans le même acte S.S.P. en date du 30 juillet 2001, enregistré, est caractérisé par la succession dans le temps du contrat de cession du fonds de commerce au contrat de location gérance et que de fait, la levée d'option en vue de la cession du fonds ne pouvait intervenir qu'une fois le contrat de location gérance parvenu à son terme dans des conditions d'exécution normales,

- Dire et juger que le défaut de paiement des redevances excluait que le contrat de location gérance parvienne à son terme et que l'option soit levée';

- Dire et juger que l'avenant n°2 du 10 mars 2002 pouvait ne pas être enregistré dès lors qu'il portait sur un accord avalisé par les deux parties, mais également parce qu'il intervenait comme complément de l'avenant n°1 enregistré modifiant le contrat de location gérance et la promesse unilatérale de vente inclus dans un même instrumentum signé le 30 juillet 2001, enregitré ce qui constituant un ensemble contractuel unique,

en conséquence, dire et juger que la levée de l'option du 20 avril 2005 de la société [Adresse 1] est irrégulière et qu'elle n'a produit aucun effet,

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions, notamment en ce qu'il a':

condamné la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droits de Mme [Y] la somme de 41.349,93€ au titre de la reconnaissance de dette du 31 décembre 2002,

condamné la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droit de Mme [Y], la somme de 231.724€ au titre des redevances de la location-gérance du 1er novembre 2004 au 31 décembre 2007,

condamné la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droits de Mme [Y] la somme de 22.162,17€ au titre du solde des loyers des murs du fonds de commerce pour les années 2004 à 2005,

condamné la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droits de Mme [Y] une somme mensuelle de 8.788,34€ au titre de l'indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2008';

ordonné la restitution par M. [Y] et les ayants droits de Mme [Y] à la société [Adresse 1] de la somme de 59.881,83€ antérieurement versée à ladite société';

- Condamner la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droits de Mme [Y] 50 000 euros, au titre de dommages et intérêts,

- Condamner la société [Adresse 1] à payer à M. [Y] et aux ayants droits de Mme [Y] 15 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Bernard Bessis Selarl en vertu des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La ville de [Localité 3] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 novembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la promesse de vente :

L'article 1840A du code général des impôts dispose que : 'Sans préjudice, le cas échéant, de l'application des dispositions de l'article 1741, est nulle et de nul effet toute promesse unilatérale de vente afférente à un immeuble, à un droit immobilier, à un fonds de commerce, à un droit à un bail portant sur tout ou partie d'un immeuble ou aux titres des sociétés visées aux articles 728 et 1655 ter, si elle n'est pas constatée par un acte authentique ou par un acte sous seings privés enregistré dans le délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire. (...)'

Il est constant qu'une promesse unilatérale de vente échappe à la formalité de l'enregistrement s'il existe un lien de dépendance entre les obligations réciproques des parties résultant de la location-gérance et de la promesse unilatérale de vente.

En l'espèce, selon l'acte du 30 juillet 2001, comportant promesse unilatérale de vente et contrat de location gérance, la promesse de vente n'est consentie «'qu'au locataire gérant actuel'». L'avenant non enregistré du 10 mars 2002, qui augmente le prix de vente à la somme de quatre millions de francs stipule qu'il est « expressément convenu que pour pouvoir prétendre à lever la promesse de vente dont s'agit, le locataire gérant devra être et avoir été toujours strictement à jour de ses redevances de location gérance et des loyers et charges afférents aux murs, sous peine de rendre la présente promesse caduque dès le premier incident de paiement.'»

Dans ces conditions, il existe bien un lien de dépendance entre les obligations réciproques des parties, la promesse n'est consentie qu'au locataire gérant et celui-ci ne conserve cette qualité qu'autant qu'il s'acquitte de la redevance. Il en résulte que l'avenant du 10 mars 2002 portant le prix de cession à la somme de quatre millions de francs n'avait pas à être enregistré et a été valablement consenti.

Dès lors, la levée d'option d'achat du fonds de commerce signifiée par la société [Adresse 1] le 29 avril 2005 à M. [Y] et à son épouse Mme [G] [A] au prix de 3.000.000 francs n'a pu avoir aucun effet. Faute de levée d'option la promesse est devenue caduque.

Sur le compte entre les parties :

Les intimés sollicitent la condamnation de l'appelante à leur régler une somme de 41.349,93 € au titre d'une reconnaissance de dette du 31 décembre 2002.

Pour justifier de leur créance, ils produisent une lettre émanant de M. [J] le précédent gérant de la SARL [Adresse 1], lequel reconnaît devoir la somme de 41.349,93 € au titre d'un arriéré de loyers. Cependant, M. [Y] ne s'explique pas sur le fait qu'il a néanmoins délivré des quittances à la SARL [Adresse 1] pour toute l'année 2002, confirmant ainsi l'attestation de l'expert comptable de la société qui indique que celle-ci a réglé l'intégralité des redevances de l'année 2002. Par ailleurs, aucune autorité de chose jugée s'imposant au civil ne peut être tirée des motifs de l'arrêt de la chambre de l'instruction du 17 novembre 2006 concernant la lettre susvisée émanant de M. [J]. Dès lors, la preuve suffisante de la réalité de cette dette n'étant pas apportée, les intimés doivent être déboutés de cette demande en paiement.

Les intimés soutiennent que la société [Adresse 1] n'a pas réglé les redevances dues à compter du 1er novembre 2004 et reste redevable à ce titre de la somme de 231.724 € pour la période du 1er novembre 2004 au 31 décembre 2007. Elle n'a pas davantage réglé la redevance mensuelle de 259,16 €, afférente au local ajouté en application de l'avenant du 1er mars 2002 et reste à ce titre redevable d'une somme de 15.549,60 € pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007. Elle est en outre redevable au titre des murs, de la somme de 4.422,28 € pour l'année 2004 et de la somme de 17.739,89 € pour la période du 1er janvier 2005 au 31 juillet 2005 soit une somme totale de 22.162,17 €.

L'appelante soutient qu'elle a réglé les redevances pour la période du 1er novembre 2004 au 11 juillet 2005, date de la levée d'option, entre les mains des créanciers de M. [Y], dans le cadre de saisies attribution à hauteur de la somme de 75.467,31 € s'agissant d'une créance de M. [F] à l'encontre de M. [Y] et à hauteur de la somme de 94.186,89 € s'agissant d'une créance de la société Crédit Lyonnais à l'encontre de M. [Y]. M. [Y] ne s'explique pas sur ce point.

La cour relève que la société [Adresse 1] établit avoir versé la somme totale de 75.467,31 € entre les mains de la SCP Guérin et Bourgeac, huissier de justice dans le cadre d'un dossier opposant M. [Y] et M. [F], pour la période du 31 décembre 2002 au 31 mai 2005. Cependant, il résulte du décompte de l'huissier que pour la période du 1er novembre 2004 au 31 mai 2005, seule la somme totale de 36.582,96 € a été versée.

Par ailleurs, la société [Adresse 1] établit par la production d'un jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en date du 25 novembre 2004, qu'elle a été condamnée, pour ne pas avoir respecter une saisie attribution qui lui avait été notifiée le 9 avril 2004 pour un montant de 16.775,02 € par la société Crédit Lyonnais, créancier de M. [Y], a régler à cette société la dite somme. Elle justifie s'être acquittée à ce titre auprès de l'huissier entre le 24 mars 2005 et le 25 juillet 2005 de la somme de 18.719,58 €. Elle ne produit en revanche aucune pièce pour justifier du surplus des versements qu'elle aurait fait entre les mains d'autres créanciers de M. [Y].

Dans ces conditions, elle ne justifie de versements s'imputant sur la dette qu'à hauteur de la somme de (36.582,96 € + 18.719,58 € =) 55.302,54 €.

Dès lors, le montant des redevances impayées pour la période entre le 1er novembre 2004 et le 31 décembre 2007 s'élève à la somme de 231.724 € - 55.302,54 € soit 176.421,46 €.

L'attestation de M. [W], expert comptable de la société [Adresse 1] selon laquelle la somme de 243.442,31 € a été versée pour la période du 30 juillet 2001 au 31 juillet 2005, ne vient pas contredire le fait que les redevances n'étaient plus payées à compter du 1er novembre 2004.

La société [Adresse 1] ne justifie pas s'être acquittée du montant de la redevance complémentaire de 259,16 € pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007 et reste à ce titre redevable de la somme de 15.549,60 €, l'attestation de M. [W] dont elle se prévaut n'étant pas relative à ce complément de loyer.

S'agissant de la location des murs, la société [Adresse 1] établit par l'attestation de M. [W], son expert comptable, dont la sincérité ne peut sérieusement être mise en doute, avoir versé entre les mains de M. [O], bailleur, la somme de 78.524,03 €. Dans ces conditions, elle n'est plus redevable d'aucune somme à ce titre.

Les consorts [Y]-[N]-[S] ne contestent pas avoir reçu de la société [Adresse 1] une somme de 38.874,49€ lors de la signature de l'avenant du 1er mars 2002, s'imputant sur la dette.

Il convient d'ordonner une compensation entre les créances réciproques.

Le défaut de paiement des redevances entraîne le prononcé de la résiliation du contrat de location-gérance et il convient de confirmer le jugement entrepris.

Les intimés sollicitent la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société [Adresse 1] à leur verser la somme mensuelle de 8.788,34 € au titre d'indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2008 égale au montant de la redevance augmentée du loyer des murs.

Pour s'opposer à cette demande, la société [Adresse 1] fait valoir qu'elle ne peut être redevable du loyer des murs depuis le 1er janvier 2008, dès lors que les consorts [Y] ne sont plus titulaires d'un bail, celui-ci ayant pris fin suite à la signification du congé avec refus de renouvellement. Elle se prévaut des termes d'une assignation de la ville de [Localité 3] devant le tribunal de grande instance de Paris sollicitant la condamnation solidaire de M. [Y], des ayants droits de Mme [Y] et de la société [Adresse 1] au paiement de l'indemnité d'occupation pour la période du 1er janvier 2010 au 7 juillet 2015, date de libération effective des lieux et relevant qu'aucune somme n'avait été payée depuis le 1er janvier 2008.

La cour relève qu'il n'est pas contesté que la société [Adresse 1] a continué d'occuper les lieux après le terme de la location gérance. Selon l'avenant du 10 mars 2012, elle devait s'acquitter du règlement des loyers des murs en sus du paiement de la redevance.

Si pour la période écoulée entre le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2010, la société [Adresse 1] ne peut être tenue au paiement d'une indemnité d'occupation correspondant aux murs, puisque aucune somme à ce titre n'a été payée au propriétaire des murs, en revanche pour la période postérieure jusqu'à l'expulsion elle reste tenue au paiement. Par ailleurs, étant restée dans les lieux, elle est redevable envers consorts [Y]-[N]-[S] d'une indemnité d'occupation irrégulière, ayant privé les époux [Y] de la jouissance des lieux, du fait de son occupation sans droit ni titre, indemnité correspondant au paiement de la redevance soit 6.098 €, du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, puis à compter du 1er janvier 2010 au paiement de la redevance augmentée du loyer soit la somme totale mensuelle de 8.788,34 €.

Sur la demande de dommages intérêts :

Les consorts [Y]-[N]-[S] sollicitent la condamnation de la société [Adresse 1] à leur payer une somme de 50.000 € au titre de la résistance abusive. En l'espèce, la société [Adresse 1] n'a fait qu'user de son droit d'agir en justice, elle n'a commis aucune faute ouvrant droit à dommages-intérêts et les intimés doivent être déboutés de cette demande.

La société [Adresse 1] qui succombe sera déboutée de ses autres demandes ; elle supportera les entiers dépens et paiera à M. [Y], Mme [N] et Mme [S], ensemble une somme de 15.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la condamnation au titre de la reconnaissance de dette, le montant des redevances de location gérance du 1er novembre 2004 au 31 décembre 2007, la condamnation au titre du solde des loyers des murs du fonds de commerce pour les années 2004 et 2005, le montant des restitutions à opérer au profit de M. [Y] et des ayants droits de Mme [Y], le montant de l'indemnité d'occupation irrégulière pour la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2009,

L'infirme sur ces points,

Statuant à nouveau,

Condamne la société [Adresse 1] à payer à M. [Y], Mme [N] et Mme [S], ensemble une somme de 176.421,46€ au titre du solde des redevances dues pour la période écoulée entre le 1er novembre 2004 et le 31 décembre 2007,

Déboute M. [Y], Mme [N] et Mme [S] de leur demande en paiement :

- de la somme de 41.349,93 € au titre de la reconnaissance de dette du 31 décembre 2002,

- de la somme de 22.162,17 € au titre du solde du loyer des murs du fonds de commerce pour les années 2004 et 2005,

Condamne la société [Adresse 1] à payer à M. [Y], Mme [N] et Mme [S], ensemble une somme mensuelle de 6.098 €, du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 au titre de l'indemnité d'occupation irrégulière,

Condamne in solidum M. [Y], Mme [N] et Mme [S] à restituer à la société [Adresse 1] une somme de 38.874,49 € versée lors de la signature de l'avenant du 1er mars 2002,

Y ajoutant,

Dit que l'avenant du 10 mars 2002 doit recevoir application,

Dit que faute d'avoir levé l'option la promesse de vente est devenue caduque,

Déboute M. [Y], Mme [N] et Mme [S] de leur demande de dommages-intérêts,

Déboute la société [Adresse 1] du surplus de ses demandes,

Condamne la société [Adresse 1] à payer à M. [Y], Mme [N] et Mme [S] ensemble une somme de 15.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société [Adresse 1] aux entiers dépens avec distraction au profit de Bernard Bessis SELARL en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/09422
Date de la décision : 07/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°16/09422 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-07;16.09422 ?
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