Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 1
ARRET DU 06 FEVRIER 2018
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/13209
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Avril 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/10682
APPELANTE
Madame [Y] [R] née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire)
[Adresse 1]
[Adresse 2]
(ROYAUME UNI)
représentée par Me Stéphane DUNIKOWSKI, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, toque : NAN320
INTIME
Le MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de Madame le PROCUREUR GÉNÉRAL près la Cour d'Appel de PARIS
élisant domicile en son parquet au [Adresse 3]
représenté par Madame de CHOISEUL PRASLIN, substitut général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 décembre 2017, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposé, devant M. Jean LECAROZ, conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Dominique GUIHAL, présidente
Mme Dominique SALVARY, conseillère
M. Jean LECAROZ, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique GUIHAL, présidente et par Mme Mélanie PATE, greffier présent lors du prononcé.
Vu le jugement rendu le 14 avril 2016 par le tribunal de grande instance de Paris qui a dit que Mme [Y] [R], se disant née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire), n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et laissé les dépens à la charge du Trésor public,
Vu l'appel formé par Mme [Y] [R] le 15 juin 2016,
Vu le jugement rectificatif rendu le 1er septembre 2016 par le tribunal qui a dit qu'il convenait de lire que la demanderesse Mme [Y] [R] est condamnée aux dépens,
Vu les conclusions signifiées le 5 octobre 2017 par Mme [Y] [R] qui demande à la cour de dire qu'elle est française par filiation maternelle, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de laisser les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu les conclusions signifiées le 6 janvier 2017 par le ministère public qui demande à la cour de constater la caducité d'appel de [Y] [R], de confirmer le jugement, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de statuer ce que de droit sur les dépens ;
SUR QUOI,
Considérant que le ministère de la Justice ayant délivré le 10 février 2017 le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile, il est justifié de l'accomplissement par Mme [Y] [R] des formalités prévues par cet article ; que son acte d'appel n'est pas caduc et ses conclusions sont recevables ;
Considérant que par application de l'article 30 du code civil, il appartient à Mme [Y] [R], qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité pour s'être vue refuser la délivrance d'un tel certificat le 12 mars 2009 par le greffier en chef du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France, de rapporter la preuve que les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française sont remplies ;
Considérant que Mme [Y] [R] soutient qu'elle est française par filiation maternelle, sa mère alléguée, [D] [N], née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire) étant française par filiation et ayant conservé cette nationalité en tant que descendante d'un originaire du territoire de la République française, selon un arrêt de cette cour du 2 mars 2006 ;
Considérant que le ministère public ne contestant pas la qualité de Française de [D] [N], il appartient encore à Mme [Y] [R] de rapporter la preuve d'un lien de filiation légalement établi avec [D] [N], ce, avant sa majorité, afin de pouvoir produire effet sur la nationalité conformément aux exigences de l'article 20-1 du code civil, au moyen d'actes d'état civil probants au sens de l'article 47 du même code ;
Que pour rapporter la preuve qu'elle est née le [Date naissance 1] 1970 de [I] [R] et de [D] [N], Mme [Y] [R] verse aux débats :
- la copie délivrée le 3 mai 2013 de son acte de naissance portant mention de ce qu'il a été dressé le 23 février 1970 sous le numéro 97 et rectifié par « ordonnance n°91 STS/2001 du 3 avril 2001 de MR le juge de la section du tribunal de Séguéla »,
- l'ordonnance de rectification rendue le 3 avril 2001 rendue par le président de la section de tribunal de Séguéla ordonnant la rectification de l'acte de naissance n°97 du 23 février 1970 en ce qui concerne le nom et la date et le lieu de naissance de la mère, en disant qu'il y sera désormais écrit « [D] [N], née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 1] en lieu et place de [N] [D], née le [Date naissance 4] à [Localité 2] » ;
Mais considérant que l'article 21 de l'Accord en matière de justice signé le 24 avril 1961 entre la République française et la République de Côte d'Ivoire prévoit que « Seront admis, sans légalisation, sur les territoires respectifs de la République Française et de la République de Côte d'Ivoire les documents suivants établis par les autorités administratives et judiciaires de chacun des deux Etats :
[']
Les expéditions des décisions, ordonnances, jugements, arrêts et autres actes judiciaires,
[']
Les documents énumérés ci-dessus devront être revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et, s'il s'agit d'expéditions, être certifiés conformes à l'original par ladite autorité. En tout état de cause, ils seront établis matériellement de manière à faire apparaître leur authenticité » ;
Que l'article 41 du même accord ajoute que « La partie à l'instance qui invoque l'autorité d'une décision judiciaire ou qui en demande l'exécution doit produire :
a) Une expédition de la décision réunissant les conditions nécessaires à son authenticité ;
b) L'original de l'exploit de signification de la décision ou de tout autre acte qui tient lieu de signification ;
c) Un certificat du greffier constatant qu'il n'existe contre la décision ni opposition ni appel ;
d) Le cas échéant, une copie de la citation de la partie qui a fait défaut à l'instance, copie certifiée conforme par le greffier de la juridiction qui a rendu la décision » ;
Considérant que, comme le soutient le ministère public, l'expédition de l'ordonnance rendue le 3 avril 2001 par le tribunal de Séguéla n'est pas certifiée conforme et n'est pas accompagnée du certificat du greffier constatant qu'il n'existe contre la décision ni opposition ni appel ; qu'aucun exploit de signification de cette décision n'est versé aux débats ;
Que cette ordonnance ne peut être accueillie en France ; qu'il en résulte que Mme [Y] [R] ne justifie pas d'un état civil certain, celui-ci ayant été rectifié sans que la décision rectificative puisse valablement être invoquée par elle en France ; que le livret de famille ne peut servir à palier l'absence d'un acte d'état civil probant au sens de l'article 47 du code civil ; que Mme [Y] [R] ne rapporte pas la preuve que [D] [N], née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire), est sa mère ;
Considérant que nul ne pouvant prétendre à la nationalité française à quel que titre que ce soit, s'il ne justifie pas d'un état civil fiable et certain, Mme [Y] [R] est déboutée de ses demandes ;
Que le jugement est donc confirmé ;
Considérant que succombant à l'instance, Mme [Y] [R] est condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS,
Déclare que l'acte d'appel de Mme [Y] [R] n'est pas caduc et que ses conclusions sont recevables,
Confirme le jugement,
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,
Condamne Mme [Y] [R] aux dépens.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE