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06/02/2018 | FRANCE | N°14/08248

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 06 février 2018, 14/08248


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 06 Février 2018

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/08248



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 13/10769





APPELANTE



SA VISIOMED GROUP

[Adresse 1]

[Adresse 1]

RCS 514 231 265

représentée par Me Ann

e-véronique WEBER-FARUCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E1273







INTIMEE



Madame [O] [A]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 1]

comparante en pe...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 06 Février 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/08248

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 13/10769

APPELANTE

SA VISIOMED GROUP

[Adresse 1]

[Adresse 1]

RCS 514 231 265

représentée par Me Anne-véronique WEBER-FARUCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E1273

INTIMEE

Madame [O] [A]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Sarah PINEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0247

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Décembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bruno BLANC, Président

Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère

Madame Marianne FEBVRE-MOCAER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par M. Brunot BLANC, Président et par Mme Chantal HUTEAU, greffier présent lors du prononcé.

La SA VISIOMED GROUP a une activité de commerce de gros, achat, vente, import/export de tous produits liés à l'électronique et/ou tous produits de santé et matériels électroniques se rapportant à un usage médical. L'entreprise est soumise à la convention collective de la pharmacie, parapharmacie, produits vétérinaires, fabrication et commerce ; elle comprend plus de 10 salariés. La moyenne mensuelle des salaires de [O] [A] s'établit à 2.722,15 €.

[O] [A], née en 1978, a été engagée par contrat à durée indéterminée par la SA VISIOMED GROUP le 03.05.2010 en qualité d'assistante chargée du développement des ventes, niveau 6, échelon 3, à temps complet (151h67).

Dans un courrier en date du 03.05.2012, [O] [A], en congé maternité jusqu'au 04.06.2012, a sollicité, à la suite de ses congés payés, de bénéficier d'un congé parental d'éducation de 6 mois jusqu'au 30.09.2012 ; puis le 29.08.2012 elle a sollicité un congé partental d'éducation de 3 mois à temps partiel (80%) jusqu'au 31.12.2012.

[O] [A] a été convoquée par lettre du 04.09.2012 à un entretien préalable fixé le 17.09.2012.

A cette date, [O] [A] a signé le récépissé de présentation de Contrat de sécurisation professionnelle.

Elle a été licenciée par lettre du 28.09.2012 pour motif économique dans les termes suivants :

'Les difficultés économiques réelles et sérieuses rencontrées par la société VISIOMED

GROUP SA nous obligent à arrêter l'activité du département GD (Grande Distribution et

Grandes et Moyennes Surfaces à caractère non alimentaire et multi spécialistes) sous

la marque KAUFMAN, auquel vous étiez rattachée par contrat en date du 3 mai 2010.

Ces raisons nous ont contraints à supprimer votre poste...'

La salariée a accepté ces modalités de rupture du contrat de travail le 04.10.2012.

Le conseil des prud'hommes de Paris a été saisi par [O] [A] le 10.07.2013 en indemnisation des préjudices subis pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et pour diverses demandes liées à l'exécution du contrat de travail.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 21.07.2014 par la SA VISIOMED GROUP du jugement rendu le 05.05.2014 par le conseil de prud'hommes de Paris section Commerce, qui a prononcé la nullité du licenciement de la salariée pour discrimination, en condamnant la SA VISIOMED GROUP à verser à [O] [A] :

- 46.277 € à titre de rappel de salaire,

- 5.444 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 544 € pour congés payés afférents,

avec intérêt légal à compter de la réception de la convocation par l'employeur devant le bureau de conciliation ;

- 13.329 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice distinct, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

la salariée étant déboutée du surplus.

La SA VISIOMED GROUP demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il déboute [O] [A] de sa demande de paiement d'une somme de 5.444 euros à titre d'indemnité pour non-respect de son obligation d'adaptation, de formation et non-respect de l'entretien professionnel au retour de congé maternité, d'absence de mention de la priorité de réembauchage, ainsi que de sa demande de publication de la décision ;

INFIRMER le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

Au principal :

CONSTATER que [O] [A] justifiait, lors de la rupture de son contrat de travail, d'une ancienneté de 2 ans et 5 mois dont 5 mois en congé parental comptant pour moitié, soit 26,5 mois d'ancienneté ;

CONSTATER que [O] [A] a accepté un contrat de sécurisation

professionnelle le 4 octobre 2012 ;

CONSTATER que la procédure de licenciement économique initiée à l'encontre de [O] [A] est parfaitement justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et par un motif économique, et que c'est à bon droit que la salariée s'est vu proposer un contrat de sécurisation professionnelle ;

DIRE que la rupture du contrat de travail de [O] [A] ne résulte d'aucune discrimination ;

DIRE en conséquence que la rupture du contrat de travail pour motif économique résultant de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle est parfaitement justifiée ;

DEBOUTER [O] [A] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

RAPPELER qu'il appartient à [O] [A] de restituer à la société VISIOMED GROUP SA l'intégralité des sommes dont elle a bénéficié au titre des saisies-attribution qu'elle a faites pratiquer ;

A titre subsidiaire :

FIXER la moyenne mensuelle de salaire de [O] [A] , au regard des 12 derniers mois de salaires perçus avant rupture du contrat de travail, à la somme de 890,22 € brut, en application des dispositions de l'article 37 de la Convention collective, des articles L 3123-10 et L 3123-13 du Code du travail ;

CONSTATER que [O] [A] n'a jamais demandé sa réintégration ;

RAPPELER que le salarié dont le licenciement (ou la rupture du contrat de travail) est nul pour discrimination et qui ne demande pas sa réintégration ne peut prétendre qu'au paiement des indemnités de rupture et d'une indemnité réparant le préjudice causé par le caractère illicite du licenciement d'un montant au moins égal à celui prévu par l'article L 1235-3 (ancien) du Code du travail ;

CONSTATER que [O] [A] ne démontre aucun préjudice, et ne démontre pas avoir effectué des démarches pour retrouver du travail à temps complet dès la rupture de son contrat de travail avec la société VISIOMED GROUP SA ;

RAMENER les demandes de dommages et intérêts formulées par [O] [A] sur la base d'un licenciement/rupture nul pour discrimination à l'équivalent de 6 mois du salaire mensuel moyen, par application des dispositions de l'article L 1235-3 (ancien) du Code du travail applicable au licenciement nul, soit la somme de 5.341,20 € ;

DEBOUTER [O] [A] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

RAPPELER qu'il appartient à [O] [A] de restituer à la société VISIOMED GROUP SA le trop-perçu sur les sommes dont elle a bénéficié au titre des saisies-attribution qu'elle a faites pratiquer ;

A titre encore plus subsidiaire :

CONSTATER que [O] [A] ne démontre ni préjudice, ni avoir effectué des démarches pour retrouver du travail à temps complet dès la rupture de son contrat de travail avec la société VISIOMED GROUP SA ;

RAMENER les demandes de dommages et intérêts formulées par [O] [A] à une somme équivalent à 6 mois de salaire, soit 6 X 890,22 € = 5.341,32 € dans l'hypothèse où la Cour entendrait faire droit aux demandes fondées sur l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat, ou l'absence de critères d'ordre, ou le défaut de reclassement, à charge pour la salariée de rembourser à la société VISIOMED GROUP SA les sommes trop perçues par suite des saisies attributions qu'elle a faites pratiquer ;

En tout état de cause

DEBOUTER [O] [A] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

DECLARER [O] [A] irrecevable en son exception de nullité

« perpétuelle » ;

FIXER le salaire mensuel moyen de [O] [A] à la somme de 890,22 € brut au regard

des rémunérations qui lui ont été servies au cours des 12 derniers mois ayant précédé la rupture du contrat de travail ;

DEBOUTER purement et simplement [O] [A] de toute demande au titre du préavis et congés payés afférents, compte tenu du Contrat de sécurisation professionnelle auquel elle a adhéré ainsi que de toutes autres demandes ;

DIRE que les sommes dont a bénéficié [O] [A] dans le cadre des saisies

attributions qu'elle a faites pratiquer devront venir en déduction des condamnations éventuellement prononcées et devront, pour le surplus, être remboursées à la société VISIOMED GROUP SA ;

DIRE que les sommes devant être remboursées à la société VISIOMED GROUP SA seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la notification par le Greffe de l'arrêt à intervenir ;

CONDAMNER [O] [A] à verser à la Société VISIOMED GROUP SA la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER [O] [A] aux entiers dépens de la présente instance.

De son côté, [O] [A] demande de :

JUGER qu'elle a fait l'objet d'une mesure discriminatoire fondée sur sa situation de famille et son retour de congé parental, quelques jours seulement après sa collègue [V] [X] ;

JUGER que l'exception de nullité soulevée par [O] [A] à l'encontre du Contrat de sécurisation professionnelle pour défaut de cause est perpétuelle ;

En conséquence,

A TITRE PRINCIPAL :

PRONONCER la nullité du Contrat de Sécurisation Professionnel et du licenciement critiqués au motif de leur caractère discriminatoire envers [O] [A] par la société VISIOMED GROUP SA ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 43.554,40 euros à titre de rappel de salaires de la date du Contrat de sécurisation professionnelle nul jusqu'à l'audience du mois de décembre 2017 ;

La CONDAMNER au paiement de 35.178,25 euros à titre de dommages intérêts réparant la différence de salaire de février 2014 au jour de l'audience ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 40.832,25 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice distinct du fait de la discrimination, du préjudice moral, du préjudice fait à sa carrière (15 mois x salaire de référence de 2.722,15 euros);

A TITRE SUBSIDIAIRE :

JUGER que l'absence de cause économique, la fausse cause et la cause illicite relative au caractère discriminatoire de la rupture prive de cause le Contrat de sécurisation professionnelle conclu et le dire, en conséquence nul ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 43.554,40 euros à titre de rappel de salaires du fait de la nullité du contrat conclu ;

A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE :

JUGER que la société VISIOMED n'a pas respecté les critères d'ordre de licenciement ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 43.554,40 euros à [V] [X] à titre de dommages-intérêts pour non respect des critères d'ordre du licenciement ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 5.444,30 euros à titre d'indemnité de préavis et 544,40 euros au titre des congés y afférents ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 5.444,30 euros à titre d'indemnité pour non-respect de son obligation d'adaptation, de formation et non-respect de l'entretien professionnel au retour de congé maternité ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 10.000 euros à titre d'indemnité pour préjudice distinct résultant de son licenciement ;

ORDONNER la publication aux frais de la société VISIOMED GROUP SA de la décision à intervenir dans deux journaux au choix de [O] [A] ;

PRONONCER l'intérêt légal sur toutes les sommes fixées par elle à compter de la date de la saisine du Conseil et jusqu'à complet paiement ;

PRONONCER la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code Civil ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA au paiement d'une somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

CONDAMNER la société VISIOMED GROUP SA aux entiers dépensde première instance et d'appel, comprenant 600 euros d'honoraires pour l'audit des comptes de la société VISIOMED par un expert comptable.

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la discrimination en raison de la situation familiale et le retour de congé parental de la salariée et ses conséquences :

Aucun salarié ne peut être licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, en raison notamment de sa situation de famille ou de sa grossesse.

Il appartient au salarié qui se prétend victime d'une discrimination de présenter des faits laissant supposer son existence ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie adverse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

[O] [A] fait valoir qu'elle a été, avec sa collègue [V] [X], également de retour d'un congé parental d'éducation, la seule à faire l'objet d'un licenciement économique, alors que toutes deux n'exerçaient ni les mêmes fonctions, ni n'avaient la même ancienneté, ni les mêmes compétences, ni le même âge ; si l'employeur oppose la suppression du département consacré à la marque KAUFMAN, il n'est pas démontré que [O] [A] ait été la seule salariée à y travailler ni qu'elle travaillait exclusivement pour cette marque alors qu'elle devait essentiellement développer la marque VISIOMED BABY. La rupture résultant d'un contrat de sécurisation professionnelle est tout autant visée par les dispositions interdisant la discrimination. Peu importe que sur les 9 salariées ETAM en CDI, il y avait également une femme enceinte qui bénéficiait d'un régime de protection distinct ou encore qu'une salariée ait pu bénéficier d'un congé parental après le licenciement critiqué sans être elle même licenciée.

Elle présente par ces seuls éléments des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination fondée sur sa situation de famille alors qu'elle revenait, comme sa collègue S. [X], d'un congé parental.

La SA VISIOMED GROUP réplique que la salariée a accepté sans contrainte le contrat de sécurisation professionnelle, alors qu'elle s'est trouvée dans la même situation que sa collègue, [V]. [X], ce qui ne suffit pas à démontrer la réalité de la discrimination. Elle oppose principalement la réalité des difficultés économiques rencontrées par l'entreprise en produisant les bilans qui font état d'une perte de près de 5 millions € fin 2011 puis de près de 3 millions € l'année suivante, les capitaux propres étant inférieurs à la moitié du capital social le 31.12.2012 ; une augmentation de capital a été décidée en décembre 2012 (600.000 €) ; les difficultés économiques résultent également du rapport publié le 31.10.2012 et communiqué par la salariée en première instance qui révèle la dégradation du résultat d'exploitation et la mise en place d'une politique de réduction des coûts ; elle conteste le fait que l'entreprise ait recouvré sa solidité financière courant 2012, alors même que le chiffre d'affaires consolidé a diminué entre 2012 et 2013, accompagné d'une nouvelle baisse de la marge brute et des capitaux propres. Enfin, la société relève que sur les 8 salariés en CDI de statut ETAM, 3 exerçaient des fonctions spécifiques de comptable, contrôleur de gestion et administrateur informatique et étaient non remplaçables, outre un magasinier, seule une salariée n'était pas en congé parental : [D] [V].

Le premier juge s'est interrogé sur la nécessité de supprimer les deux postes occupés par [O] [A] et S. [X], modestes employées non cadres, pour assurer le redressement des comptes d'une société au chiffre d'affaires de 11 millions €, sans que celle ci apporte d'éléments sur la situation des autres cadres et dirigeants de l'entreprise ; il a constaté que les deux seules salariées licenciées l'ont été juste à l'issue de leur congé parental et que les explications données par l'employeur n'étaient donc pas convaincantes, sans que cette motivation permette d'établir la réalité de la discrimination.

Dans la lettre de licenciement notifiée le 28.09.2012 la SA VISIOMED GROUP déclare que la suppression du poste de [O] [A] est liée à l'arrêt de l'activité du département GD (Grande distribution et grandes et moyennes surfaces à caractère non alimentaire et multi spécialistes) sous la marque Kaufman, auquel la salariée était rattachée par son contrat.

Le contrat de travail mentionnait en effet que [O] [A] devait exercer ses fonctions sur ce secteur sans pour autant limiter son activité à la seule marque Kaufman. La salariée affirme en revanche avoir travaillé essentiellement pour la marque VISIOMED BABY ; elle produit des documents de travail généraux qui ne mentionnent pas spécialement son nom ou ne font pas figurer d'organigramme ce qui aurait permis de la situer au sein de l'entreprise (pièces 3 /4 /5 / 22 / 23) ; elle communique cependant l'attestation de S. [X], qui confirme que [O]. [A] se consacrait essentiellement au developpement de la gamme dénommée VISIOMED BABY, la gamme KAUFMAN étant introduite plus tard.

Il en résulte qu'il n'est pas démontré par les seuls éléments produits que [O] [A] aurait consacré son activité au seul développement de la marque Kaufman, ni que le département GD ait diminué son activité d'une manière quelconque.

En outre, le livre entrée/sortie du personnel fait apparaître qu'une autre assistante commerciale grand public de statut ETAM était en poste depuis le 26.08.2010, [D]. [V], et qu'une chef des ventes de statut ETAM avait été embauchée le 01.10.2010 ; la SA VISIOMED GROUP ne présente pas davantage d'organigramme au soutien de ses prétentions.

Dans ses écritures, la SA VISIOMED GROUP se borne à constater que les 2/3 de l'effectif salarié du service était en congé parental, c'est à dire deux salariées sur 3, en précisant 'puisque seule Madame [D] [V] n'était pas dans cette situation' ; ce qui ne justifie pas que le licenciement de cette dernière n'ait pas été envisagé ni que les deux salariées aient dû de ce fait être licenciées à leur retour de congé parental.

Enfin la salariée avait formé une demande de renouvellement de son congé parental, à mi temps, préalablement à la date de convocation à l'entretien préalable.

En conséquence, la SA VISIOMED GROUP ne prouve pas que la décision de licencier [O] [A] était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination au regard de sa situation familiale. La rupture du contrat de travail est donc nulle.

En réparation du préjudice subi, et en l'absence de demande de réintégration, la salariée ne peut prétendre, ainsi que le rappelle l'employeur, qu'aux indemnités de rupture et à une indemnité d'éviction qui sera au moins égale à 6 mois de salaire en application de l'article L 1253-3-1 du code du travail.

La salariée se borne à réclamer d'une part un rappel de salaire et d'autre part des dommages intérêts réparant la différence de salaire à partir de février 2014, ces demandes ne pouvant pas être satisfaites sous cette forme.

Néanmoins elle demande également une indemnité pour préjudice distinct résultant de son licenciement, étant précisé que le juge prud'homal a en effet condamné l'employeur à verser 13.329 € pour préjudice distinct correspondant à 6 mois de salaire.

Les parties s'opposent sur le salaire moyen à prendre en compte ; à la date de la rupture et du licenciement, [O] [A] était en congé parental à temps complet, et son contrat de travail avait donc été suspendu. Il convient par suite de prendre en compte une moyenne qui se calcule sur les 12 mois ayant précédé ce congé parental et donc de faire droit à la demande qui était limitée à 10.000 €.

Cependant elle sollicite 'en tout état de cause' l'indemnité compensatrice de préavis qu'il y a lieu de lui accorder ; il appartiendra alors à l'employeur de récupérer les sommes versées à Pôle Emploi dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle, la société ne contestant pas les montants réclamés.

En ce qui concerne les préjudices supplémentaires allégués, résultant de la discrimination, du préjudice moral et du préjudice de carrière, [O] [A] fait valoir un préjudice de carrière car elle n'a pas retrouvé immédiatement un travail à temps plein mais seulement à temps partiel en février 2014, or elle communique un tableau qui montrerait les différences entre les salaires perçus et des avis d'imposition sans produire d'éléments concrets et vérifiables sur sa situation professionnelle actuelle, ce qui ne permet pas d'évaluer un préjudice de carrière. Elle ne détermine pas le préjudice distinct tiré de la discrimination. Elle excipe des conditions vexatoires de la rupture en indiquant avoir été licenciée le jour de sa reprise ce qui ne donne pas d'indication sur le préjudice effectivement subi.

Sur les demandes complémentaires :

[O] [A] demande la condamnation de l'employeur à lui verser une indemnité pour non-respect de son obligation d'adaptation, de formation et non-respect de l'entretien professionnel au retour de congé maternité. La salariée affirme simplement que l'employeur n'a pas satisfait à ses obligations.

La SA VISIOMED GROUP a répondu en se prévalant des dispositions des articles L 6312-1 1° et L 6321-1 du code du travail alors que la demande est faite dans le contexte du retour du congé d'éducation. Les dispositions de l'article 1225-56 et suivants du code du travail, les demandes de formation devant être exprimées par le salarié ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, cette demande ayant été formée uniquement dans le cadre de la procédure prud'homale. Sur l'application de l'article L 6321-1 qui est invoqué uniquement dans le cadre de la demande subsidiaire en matière de non respect des critères d'ordre, à titre surabondant il convient de dire que la salariée en donne aucun élément sur les demandes qu'elle aurait formées auprès de son employeur qui n'y aurait pas satisfait.

La publication de la décision n'a pas à être ordonnée compte tenu du sens de la décision.

Sur la demande reconventionnelle :

La SA VISIOMED GROUP réclame pour sa part le remboursement de la somme versée au titre de la saisie attribution soit un montant de 26.014,90 € brut avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision. En effet l'employeur justifie de ce que des saisies attribution ont été réalisées pour le compte de [O] [A] à l'encontre de la SA VISIOMED GROUP entre les mains de la société HSBC FRANCE le 04.11.2014, le compte de la société étant débiteur, et de la société BRED BANQUE POPULAIRE le 11.03.2014, en application du jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Paris le 05.04.2014, pour un montant total de 21.186,57 €. Il convient de faire droit à cette requête eu égard à la décision rendue à toutes fins utiles.

La capitalisation des intérêts est de droit conformément à l'article 1343-2 nouveau du code civil (ancien 1154 du code civil).

Il serait inéquitable que [O] [A] supporte l'intégralité des frais non compris dans les dépens tandis que la SA VISIOMED GROUP qui succombe doit en être déboutée ; cette dernière devra prendre à sa charge les dépens d'instance et d'appel sans que cela inclue les honoraires d'audit qui n'étaient pas nécessaires eu égard à la décision rendue.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 05.05.2014 par le conseil de prud'hommes de Paris section Commerce en ce qu'il a prononcé la nullité de la rupture pour discrimination et a condamné la SA VISIOMED GROUP à verser à [O] [A] l'indemnité compensatrice de congés payés avec les congés payés afférents ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne la SA VISIOMED GROUP à payer à [O] [A] la somme de 10.000 € au titre du préjudice distinct résultant de la rupture déclarée nulle, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement rendu le 05.05.2014 et capitalisation des intérêts;

Dit que [O] [A] devra restituer à la SA VISIOMED GROUP la somme de 21.186,57 € reçue à la suite des saisies attribution réalisées entre les mains de la société HSBC FRANCE et de la société BRED BANQUE POPULAIRE et l'y condamne en tant que de besoin, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne la SA VISIOMED GROUP aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à payer à [O] [A] la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 14/08248
Date de la décision : 06/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°14/08248 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-06;14.08248 ?
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