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06/02/2018 | FRANCE | N°14/07978

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 06 février 2018, 14/07978


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 06 Février 2018

(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07978



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 13/10768





APPELANTE



SA VISIOMED GROUP

[Adresse 1]

[Localité 1]

RCS 514 231 265

représentée par Me A

nne-véronique WEBER-FARUCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E1273







INTIMEE



Madame [U] [D]

[Adresse 2]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 3]

comparante en ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 06 Février 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07978

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 13/10768

APPELANTE

SA VISIOMED GROUP

[Adresse 1]

[Localité 1]

RCS 514 231 265

représentée par Me Anne-véronique WEBER-FARUCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E1273

INTIMEE

Madame [U] [D]

[Adresse 2]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 3]

comparante en personne, assistée de Me Sarah PINEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0247

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Décembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bruno BLANC, Président

Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère

Madame Marianne FEBVRE-MOCAER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par M. Brunot BLANC, Président et par Mme Chantal HUTEAU, greffier présent lors du prononcé.

La SA VISIOMED GROUP a une activité de commerce de gros, achat, vente, import/export de tous produits liés à l'électronique et/ou tous produits de santé et matériels électroniques se rapportant à un usage médical. L'entreprise est soumise à la convention collective de la pharmacie, parapharmacie, produits vétérinaires, fabrication et commerce; elle comprend plus

[U] [D], née en 1978, a été engagée par contrat à durée indéterminée par la SAS VISIOMED le 01.10.2007 en qualité d'infographiste, ETAM, avec reprise de son ancienneté au sein de la société CLS, à temps complet (151h67).

En dernier lieu elle exerçait les fonctions d'infographiste échelon 3 niveau 6 au sein de la SA VISIOMED GROUP.

Dans un courrier en date du 20.01.2012, [U] [D], en congé maternité jusqu'au 17.02.2012, a sollicité, à la suite de ses congés payés, de bénéficier d'un congé parental d'éducation de 6 mois jusqu'au 21.09.2012, ce qui a été accepté par l'employeur, ce congé parental devant se prolonger jusqu'au 24 septembre.

[U] [D] a été convoquéE par lettre du 24.09.2012 à un entretien préalable fixé le 01.10.2012.

A cette date, [U] [D] a signé le récépissé de présentation de CSP.

Une proposition de reclassement a été adressée à [U] [D] le 10.10.2012 sur un poste d'infographiste au sein de la SAS VISIOMED sur le site de [Localité 4] classification échelon 3 niveau 6 au salaire brut mensuel de 2.785 €.

La salariée a accepté ces modalités de rupture du contrat de travail le 15.10.2012.

Le conseil des prud'hommes de Paris a été saisi par [U] [D] le 10.07.2013 en indemnisation des préjudices subis pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et pour diverses demandes liées à l'exécution du contrat de travail.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 15.07.2014 par la SA VISIOMED GROUP du jugement rendu le 05.05.2014 par le conseil de prud'hommes de Paris section Commerce, qui a mis hors de cause la SAS VISIOMED et prononcé la nullité du licenciement de la salariée, en condamnant la SA VISIOMED GROUP à verser à [U] [D] :

- 36.380 € à titre de rappel de salaire,

- 4.282 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 428 € pour congés payés afférents,

avec intérêt légal à compter de la réception de la convocation par l'employeur devant le bureau de conciliation ;

- 12.845,46 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice distinct, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

la salariée étant déboutée du surplus.

La SA VISIOMED GROUP demande à la cour de :

- CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il déboute [U] [D] de sa demande de paiement d'une somme de 4.282 euros à titre d'indemnité pour non-respect de son obligation d'adaptation, de formation et non-respect de l'entretien professionnel au retour de congé maternité, d'absence de mention de la priorité de réembauchage, ainsi que de sa demande de publication de la décision ;

L'INFIRMER en ses autres dispositions et en conséquence :

CONSTATER que l'employeur de [U] [D] lors de la rupture du contrat de travail, était la société VISIOMED GROUP SA, ce depuis le 1er avril 2010 ;

CONSTATER que l'action prud'homale de [U] [D] a été initiée à l'encontre de la société

VISIOMED GROUP SA par acte du Greffe du 24 janvier 2017 reçu par la société le 27 janvier 2014 ;

CONSTATER que [U] [D] a accepté un contrat de sécurisation professionnelle le 15 octobre 2012, relevant des dispositions de l'article L 1233-67 alinéa 1 du Code du travail, édictant un délai de prescription abrégé ;

CONSTATER que [U] [D] a été pleinement informée des conséquences de l'acceptation

du contrat de sécurisation professionnelle, tant lors de l'entretien préalable, que dans le cadre de la notice qui lui a été remise à cette occasion, et notamment de la prescription abrégée visées par l'article L 1233-67 alinéa 1 du Code du travail, rappelé dans la notice remise ;

CONSTATER que l'ancienneté de [U] [D] à la date de rupture du contrat de travail était

inférieure à 6 ans ;

Et au principal

DIRE les demandes formées par [U] [D] à l'encontre de la société VISIOMED GROUP SA, y compris au titre de la discrimination, sont irrecevables comme prescrites par application des dispositions de l'article L 1233-67 alinéa 1 du Code du travail ;

DIRE en conséquence [U] [D] irrecevable comme prescrite en l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de la société VISIOMED GROUP SA ;

ORDONNER à [U] [D] de procéder au remboursement auprès de la société VISIOMED GROUP SA de la somme brute de 24.753,59 € dont elle a bénéficié au titre de la saisie-attribution qu'elle a faite pratiquer avec intérêts au taux légal à compter de la notification par le Greffe de l'arrêt à intervenir ;

Subsidiairement

DIRE [U] [D] irrecevable comme prescrite en toutes ses demandes formulées à l'encontre de la société VISIOMED GROUP SA par application des dispositions de l'article L 1233-67 alinéa 1 du Code du travail et la débouter de l'ensemble de ses demandes ;

ORDONNER à [U] [D] de procéder au remboursement auprès de la société VISIOMED GROUP SA de la somme brute de 24.753,59 € dont elle a bénéficié au titre de la saisie-attribution qu'elle a faite pratiquer avec intérêts au taux légal à compter de la notification par le Greffe de l'arrêt à intervenir ;

A titre encore plus subsidiaire

AVANT-DIRE DROIT, ordonner une expertise afin de déterminer le montant du préjudice réellement subi par [U] [D] et, à cette fin, désigner tel Expert qu'il plaira à la Cour de désigner, avec mission de :

- Se faire communiquer toutes pièces et tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission

- Examiner les pièces et documents ;

- Entendre tout sachant, tout témoin ;

- Déterminer l'étendue du préjudice réellement subi par [U] [D] par suite de la rupture du contrat de travail dont elle bénéficiait au sein de la société VISIOMED GROUP SA, tenant compte :

o Des indemnités ASS et ARE qui lui ont été servies par le Pôle Emploi ;

o Des sommes qu'elle perçoit depuis la rupture de son contrat de travail, au titre de son activité de création graphique et au titre de toute autre activité ;

o Des frais de garde d'enfant (nourrice-crèche) qu'elle n'a pas eu à exposer durant sa période d'inactivité ;

o Des refus d'emploi qui lui ont été notifiés, après validation de ses recherches d'emploi réelles ;

o De l'impact de la baisse de revenus alléguée par [U] [D] sur les revenus imposables du foyer ;

o De l'impact de la perte d'emploi de [U] [D] sur toute prise en charge, totale ou partielle, du prêt immobilier de l'ancienne salariée et son conjoint, par une ou plusieurs assurances perte d'emploi ;

o De l'impact de la perte d'emploi de [U] [D] sur toutes allocations familiales ou autres ;

- Dire que l'Expert devra, de ses constatations et conclusions, établir un rapport qu'il adressera au greffe social de la Cour dans les trois mois de sa saisine ;

- Dire qu'en cas d'empêchement de l'Expert, il sera procédé à son remplacement par

simple ordonnance ;

- Fixer le montant de la provision à consigner ainsi que le délai de consignation ;

SURSEOIR à statuer sur les demandes formulées ;

RESERVER les dépens ;

A titre infiniment subsidiaire

FIXER la moyenne mensuelle de salaire de [U] [D], au regard des 12 derniers mois de salaires perçus avant rupture du contrat de travail, à la somme de 994,85 € brut, en application des dispositions de l'article 37 de la Convention collective, des articles L 3123-10 et L 3123-13 du Code du travail ;

CONSTATER que [U] [D] n'a jamais demandé sa réintégration ;

CONSTATER que [U] [D] ne démontre pas son préjudice, ni avoir effectué des démarches pour retrouver du travail à temps complet dès la rupture de son contrat de travail avec la société VISIOMED GROUP SA ;

RAPPELER que le salarié dont le licenciement est nul pour discrimination et qui ne demande pas sa réintégration ne peut prétendre qu'au paiement des indemnités de rupture et d'une indemnité réparant le préjudice causé par le caractère illicite du licenciement d'un montant au moins égal à celui prévu par l'article L 1235-3 (ancien) du Code du travail ;

RAMENER en conséquence les demandes de dommages et intérêts formulées par [U] [D], tous préjudices et toutes demandes confondus, à l'équivalent de 6 mois du salaire mensuel moyen, par application des dispositions de l'article L 1235-3 (ancien) du Code du travail applicable au licenciement nul soit la somme de 5.969,10 € ;

DIRE que les dommages et intérêts alloués à la salariée viendront en compensation avec les sommes déjà perçue par elle suite aux saisies-attributions opérées et qu'il appartiendra à la salariée de procéder au remboursement auprès de la société VISIOMED GROUP SA du trop-perçu, avec intérêts au taux légal à compter de la notification par le Greffe de l'arrêt à intervenir ;

DEBOUTER purement et simplement [U] [D] de toute demande au titre du préavis et congés payés afférents, compte tenu du CSP auquel elle a adhéré ;

DEBOUTER [U] [D] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause

DECLARER [U] [D] irrecevable en son exception de nullité du contrat de sécurisation professionnelle pour défaut de cause, par application des dispositions de l'article 74 du Code de procédure civile et l'en débouter ;

DEBOUTER [U] [D] de sa demande de dommages et intérêts fondée sur les dispositions de l'article 123 du Code de procédure civile ;

DEBOUTER [U] [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

ORDONNER à [U] [D] de restituer à la société VISIOMED GROUP SA l'intégralité des sommes qu'elle s'est appropriée du fait des saisies-attribution qu'elle a fait pratiquer au titre de l'exécution provisoire de droit, sur la base d'une somme brute de 24.753,59 €, ladite somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la notification par le Greffe de l'arrêt à intervenir ;

CONDAMNER [U] [D] à verser à la Société VISIOMED GROUP SA la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, compte tenu de la mise en cause abusive effectuée à son encontre ;

CONDAMNER [U] [D] aux entiers dépens de la présente instance.

De son côté, [U] [D] demande de :

JUGER qu'elle a fait l'objet d'une mesure discriminatoire fondée sur sa situation de famille et son retour de congé parental, quelques jours seulement après sa collègue [I] [A];

JUGER que l'action de [U] [D], fondée sur les dispositions relatives à la discrimination n'est pas prescrite, bénéficiant d'une prescription quinquennale ;

JUGER que VISIOMED ne peut se prévaloir utilement des dispositions relatives à

l'article L1224-1 Code du travail et en conséquence, la débouter de sa fin de non-recevoir,

JUGER que VISIOMED ne peut se prévaloir utilement de la fin de non-recevoir en application de l'article 2234 du Code Civil, [U] [D] ayant été empêchée du fait du défaut d'information imputable à son ancien employeur ;

JUGER que l'action de [U] [D], n'est pas prescrite, puisqu'elle n'a eu connaissance de son droit à l'égard de la SA qu'à compter de la communication des pièces sollicitées par sommations de communiquer et que la prescription n'a pu courir à son encontre qu'à compter de la révélation de ce fait ;

JUGER que les deux sociétés SA et SAS du fait de leur similarité peuvent être considérées comme étant des employeurs conjoints en sorte que la fin de non-recevoir soulevée par l'une est inopposable à [U] [D] ;

JUGER que la fraude corrompt tout et que VISIOMED ne peut plus se prévaloir d'une fin de non-recevoir alors qu'elle n'a pas dénié sa qualité d'employeur à l'audience devant le Bureau de Conciliation ;

JUGER qu'en vertu de l'article 2238 du Code Civil, la prescription de l'action de [U] [D] ne saurait être acquise ;

JUGER qu'en tout état de cause, VISIOMED ne peut se prévaloir de ce délai de prescription en l'absence de preuve de ce qu'elle a communiqué cette information à son ancienne salariée aucune signature ne permettant de s'assurer de ce que cette information a été transmise en application de l'article L1233-67 alinéa 1 du Code du Travail ;

JUGER que l'exception de nullité soulevée par [U] [D] à l'encontre du CSP pour défaut de cause est perpétuelle ;

En conséquence,

A TITRE PRINCIPAL :

PRONONCER la nullité du Contrat de Sécurisation Professionnel et du licenciement critiqués au motif de leur caractère discriminatoire envers [U] [D] par la société VISIOMED GROUP SA ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 149.091,40 euros à [U] [D] à titre de rappel de salaires de la date du CSP nul jusqu'à l'audience du mois de décembre 2017 (62 mois x salaire de référence de 2.404,70 euros) ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 36.070,50 euros à [U] [D] à titre de dommages intérêts pour préjudice distinct du fait de la discrimination, du préjudice moral, du préjudice fait à sa carrière (15 mois x salaire de référence de 2.404,70 euros) ;

A TITRE SUBSIDIAIRE :

JUGER que l'absence de cause économique, la fausse cause et la cause illicite relative au caractère discriminatoire de la rupture prive de cause le CSP conclu et le dire, en conséquence nul ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 149.091,40 euros à [U] [D] à titre de rappel de salaires du fait de la nullité du contrat conclu ;

A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE :

JUGER, plus subsidiairement, que la société VISIOMED GROUP SA s'est abstenue dans une intention dilatoire de soulever plus tôt la fin de non-recevoir puisqu'elle n'a pas dénié sa qualité d'employeur devant le Bureau de Conciliation et qu'elle connaissait l'existence des deux procédures ayant le même Conseil et les affaires ayant été plaidées ensemble ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 149.091,40 euros à [U] [D] à titre de dommages intérêts en réparation de l'entier préjudice subi ;

A TITRE INFINIMENT PLUS SUBSIDIAIRE :

JUGER que la société VISIOMED n'a pas respecté les critères d'ordre de licenciement ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 149.091,40 euros à [U] [D] à titre de dommages-intérêts pour non respect des critères d'ordre du licenciement ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 36.070,50 euros à [U] [D] à titre de dommages intérêts pour préjudice distinct du fait du préjudice moral, du préjudice fait à sa carrière (15 mois x salaire de référence de 2.404,70 euros) ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

DÉBOUTER les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 5.000 euros à [U] [D] à titre de dommages-intérêts pour défaut de mention de la priorité de réembauchage ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 4.809,40 euros à [U] [D] à titre d'indemnité de préavis et 480 euros au titre des congés y afférents ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 4.809,40 euros à [U] [D] à titre d'indemnité pour non-respect de son obligation d'adaptation, de formation et non-respect de l'entretien professionnel au retour de congé maternité ;

ORDONNER la publication aux frais des sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS

VISIOMED de la décision à intervenir dans deux journaux au choix de [U] [D];

PRONONCER l'intérêt légal sur toutes les sommes fixées par elle à compter de la date de la saisine du Conseil et jusqu'à complet paiement ;

PRONONCER la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code Civil ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED au paiement d'une somme de 8.000 euros à [U] [D] sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

CONDAMNER solidairement les sociétés VISIOMED GROUP SA et SAS VISIOMED aux entiers dépensde première instance et d'appel, comprenant 600 euros d'honoraires pour l'audit des comptes de la société VISIOMED par un expert comptable.

La SAS VISIOMED a demandé pour sa part de confirmer le jugement l'ayant mise hors de cause et de condamner la salariée à lui verser la somme de 3.000 € en vertu de l'article 700 du CPC.

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action :

Au préalable il est exact que dans ses conclusions déposées devant le conseil des prud'hommes de Paris lors de l'audience du 05.06.2014, la SA VISIOMED GROUP a soulevé la prescription de l'action sur le fondement des dispositions de l'article L 1233 -67 alinéa 1 du code du travail, texte dérogatoire au droit commun, alors qu'elle avait été convoquée directement devant le bureau de jugement ; la juridiction prud'hommale n'a pas évoqué ce moyen dans sa décision et n'y a pas répondu.

La SA VISIOMED GROUP fait valoir deux arguments sur la prescription de l'action.

En premier lieu au regard des dispositions spécifiques concernant le contrat de sécurisation professionnelle : la SA VISIOMED GROUP se prévaut à son égard de la prescription de l'action intentée par [U] [D] en application des dispositions de l'article L 1233-67 alinéa 1 du code du travail selon lequel, lorsque le salarié a adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle, 'toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle'. La société constate que ce délai était mentionné dans le documents qui a été remis à la salariée lors de l'entretien préalable, ce qui est attesté par Y. [F], responsable administratif et financier ayant participé à cet entretien, ainsi que par le conseiller du salarié qui était présent. Elle soutient que [U] [D] ayant accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 15.10.2012, ce qui correspond au point de départ de la prescription applicable, la prescription était acquise le 16.10.2013, alors que la SA VISIOMED GROUP n'a été convoquée par le greffe du conseil des prud'hommes que le 24.01.2014.

En second lieu au regard de la discrimination alléguée : la SA VISIOMED GROUP déclare que le salarié qui accepte un contrat de sécurisation professionnelle voit l'action engagée à l'encontre de l'employeur limitée dans le temps, quelque soit le motif de la rupture, en contrepartie des avantages procurés ; la rupture résulte d'une manifestation expresse de la volonté de la salariée et l'article L 1233-7 ne prévoit aucune exception au délai dérogatoire qui y est mentionné.

[U] [D] réplique que les dispositions de l'article L 1471-1 du code du travail ayant limité à 2 années le délai de prescription applicable à partir du jour où celui qui exerce l'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action judiciaire, ne s'applique pas aux actions en discrimination et que l'action est alors de 5 ans ; or la saisine initiale visait la discrimination. Elle affirme que l'action en contestation du motif économique de la rupture n'est pas visée par l'article L 1235-7 alinéa 2 et doit être interprété strictement, l'article L 1233-67 devant bénéficier du même régime ; les dispositions régissant le droit du contrat continuent à s'appliquer.

Elle constate ne pas avoir été informée du transfert, certes automatique, de son contrat de travail vers la SA VISIOMED GROUP ; la prescription dans ces conditions n'a pas pu courir à son égard ; en outre en présence d'un lien de subordination commun à l'égard de ces deux sociétés, la prescription a été interrompue ; la société VISIOMED n'a pas soulevé la fin de non recevoir devant le bureau de conciliation en ne déniant pas sa qualité d'employeur, il s'agit d'une fraude qui ne permet pas à l'employeur de soulever la prescription ; [U] [D] conteste avoir eu connaissance d'un délai qui lui aurait été applicable hormis celui de 21 jours propre au Contrat de sécurisation professionnelle ; en dernier lieu la prescription est par nature perpétuelle.

La requête initiale transmise au greffe du conseil des prud'hommes le 10.07.2013 par [U] [D] faisait état d'une demande en vue de voir déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et tendant à une indemnisation pour discrimination salariale ; cette demande était dirigée à l'encontre de la SAS VISIOMED, employeur d'origine. [U] [D] a sollicité la mise en cause de la SA VISIOMED GROUP le 16.01.2014 ; cette nouvelle partie est intervenue lors de l'audience du bureau de jugement s'étant tenue le 05.05.2014 et, à cette date, la salariée a soulevé la nullité de son licenciement en se fondant sur la discrimination, le licenciement étant à son sens intervenu à l'issue de son congé parental et étant lié à sa situation de famille.

La demande initiale de [U] [D] portait sur une inégalité de traitement en matière salariale, qui repose sur le principe 'à travail égal salaire égal' et qui interdit toute mesure discrétionnaire de l'employeur ; la salariée ne revendiquait donc pas à ce stade de discrimination liée à son congé parental et à sa situation de famille à défaut de demande plus précise ; une différence de traitement entre salariés d'une même entreprise ne constitue pas par elle même une discrimination illicite au sens de l'article L 1132-1 du code du travail.

En conséquence, les dispositions spécifiques de l'article L 1134-5 ne s'appliquent pas à une action qui n'était pas fondée sur les dispositions comprises dans le chapitre II du Titre III portant sur les discriminations. Par suite, c'est le régime propre au contrat de sécurisation professionnelle qui doit être appliqué, l'article L 1233-67 ayant instauré une prescription abrégée de 12 mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

La salariée ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 15.10.2012, le délai de prescription courait jusqu'au 15.10.2013.

Pour déterminer le véritable employeur de [U] [D] à la date de la signature du contrat de sécurisation professionnelle, il convient d'établir les conditions du transfert de son contrat de travail de la SAS VISIOMED, signataire de son contrat de travail, à la SA VISIOMED GROUP qui a initié la procédure de rupture du contrat.

[U] [D] a reconnu la réalité du transfert automatique de son contrat de travail le 31.03.2010, ainsi que l'observe sa contradictrice en se reportant aux écritures transmises devant le conseil des prud'hommes ; seule la salariée aurait pu se prévaloir d'un défaut d'accord exprès à l'occasion d'une modification de son contrat de travail ce qu'elle ne fait pas, s'agissant d'un transfert conventionnel ou d'application volontaire ; par ailleurs, sont produits différents documents justifiant de la poursuite du contrat de travail dans la nouvelle entreprise notamment : les registres entrée/sortie du personnel des deux sociétés mentionnant le changement d'employeur, les bulletins de salaire n'étant produit qu'à compter de septembre 2011 mais portant la mention d'une entrée au sein de la SA VISIOMED GROUP à compter du 01.04.2010 avec une reprise d'ancienneté au 02.11.2006 ; enfin, le 01.04.2010, [U] [D] a signé une demande d'affiliation à la mutuelle de son nouvel employeur et à l'organisme de prévoyance, ce qui démontre qu'elle était bien informée de ce changement et qu'elle l'avait accepté.

C'est donc bien la SA VISIOMED GROUP qui était l'employeur de [U] [D] au moment de la rupture.

[U] [D] déclare que les deux sociétés étaient les employeurs conjoints de la salariée en se prévalant de la similitude de dénomination, de siège social, d'organe dirigeant, d'activité, en affirmant sans le démontrer que les directives lui étaient données par les mêmes supérieurs hiérarchiques ; pour aurant la salariée ne démontre aucunement l'existence d'un unique lien de subordination alors qu'elle a été engagée par deux sociétés juridiquement distinctes.

La SAS VISIOMED doit être mise hors de cause.

[U] [D] ne peut reprocher à la SAS VISIOMED de ne pas avoir contesté sa qualité d'employeur pendant le cours de la procédure prud'homale avant l'audience du bureau de jugement qui s'est tenue en présence de l'employeur véritable, le précédent sollicitant alors sa mise hors de cause ; cette situation n'est révélatrice d'aucune fraude ni même de mauvaise foi.

Enfin sur la communication à la salariée de l'information relative au délai de prescription, celle-ci s'est vue remettre lors de l'entretien préalable du 01.10.2010, ainsi que l'a noté le conseiller du salarié dans son compte rendu, le bulletin d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle de même que la notice d'information, ce qui est confirmé par Y [F] ; la notice précise explicitement en page 3 que 'Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par 12 mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle' ; par suite la salariée était suffisamment informée des conditions de mise en place de cette modalité de rupture et c'est donc en toute connaissance de cause qu'elle a signé le volet d'acceptation le 15.10.2010.

A défaut d'avoir saisi la juridiction prud'homale d'une action en contestation de la rupture du contrat de travail à l'encontre de son employeur dans le délai légal, l'action de [U] [D] doit être déclarée prescrite. De ce fait, celle ci n'a pas la possibilité de prétendre à une indemnité en se prévalant de l'intention dilatoire de 'la société VISIOMED' et de sa déloyauté qui ne sont pas démontrées.

Sur la demande reconventionnelle :

La SA VISIOMED GROUP réclame le remboursement de la somme versée au titre de la saisie attribution soit un montant de 24.753,59 € avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision. En effet l'employeur justifie de ce que des saisies attribution ont été réalisées pour le compte de [U] [D] à l'encontre de la SA VISIOMED GROUP entre les mains de la société HSBC FRANCE le 04.11.2014 et de la société BRED BANQUE POPULAIRE le 12.03.2014, en application du jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Paris le 05.04.2014, pour un montant total de 20.448,57 €. Il convient de faire droit à cette requête eu égard à la décision rendue.

L'équité et la situation économique des parties justifient que soient laissés à la charge de chacune d'elles les frais exposés qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 05.05.2014 par le conseil de prud'hommes de Paris section Commerce en ce qu'il a mis hors de cause la SAS VISIOMED ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que l'action de [U] [D] à l'encontre de la SA VISIOMED GROUP est prescrite ;

Dit que [U] [D] devra restituer à la SA VISIOMED GROUP la somme de 20.448,57 € reçue à la suite des saisies attribution réalisées entre les mains de la société HSBC FRANCE et de la société BRED BANQUE POPULAIRE et l'y condamne en tant que de besoin, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne [U] [D] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 14/07978
Date de la décision : 06/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°14/07978 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-06;14.07978 ?
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