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02/02/2018 | FRANCE | N°16/12878

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 02 février 2018, 16/12878


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 02 FEVRIER 2018



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/12878



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/11394





APPELANTE



SCI RETRAITE

RCS EVRY 503 476 772

Prise en la personne de son représentant légal dom

icilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Guillaume PIERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0259







INTIMEE



CAISSE D'EPARGNE ILE DE FRANCE
...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 02 FEVRIER 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/12878

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/11394

APPELANTE

SCI RETRAITE

RCS EVRY 503 476 772

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Guillaume PIERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0259

INTIMEE

CAISSE D'EPARGNE ILE DE FRANCE

RCS PARIS 382 900 9422

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Henri DE LANGLE de la SELARL HENRI DE LANGLE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0663

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

M. Marc BAILLY, Conseiller

Madame Pascale GUESDON, Conseiller

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise CHANDELON, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 11 mai 2016 le Tribunal de grande instance de Paris a débouté la SCI RETRAITE arguant de l'irrégularité du taux effectif global [ci-après TEG] concernant deux prêts, destinés à financer l'acquisition d'un logement avec travaux, d'un montant de 510 000 euros et 80000 euros, prêts consentis par la SA CAISSE D'EPARGNE suivant offre du 30 septembre 2009 acceptée le 2 octobre 2009 et suivie d'un acte authentique du 12 novembre 2009. Le taux effectif global était stipulé, pour chacun des deux prêts, à 5,57 %.

Par déclaration du 10 juin 2016 la SCI RETRAITE a interjeté appel de ce jugement.

Au terme de la procédure les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante :

Par dernières conclusions notifiées le 5 septembre 2016 par voie de RPVA la SCI RETRAITE, appelante

conteste l'exactitude des TEG au motif qu'ils sont erronés du fait de l'omission de certains éléments qui auraient du être intégrés dans la base de calcul : d'une part l'offre ne mentionne les frais de courtage (5000 euros) que pour le prêt de 510 000 euros alors qu'il aurait fallu les répartir sur les deux prêts au prorata de leur montant, et d'autre part la banque a intégré une simple évaluation des frais de garantie.

En conséquence, il est demandé à la Cour, au visa des 'articles 1907, al. 2 du Code civil et L.313-4 du Code monétaire et financier',

- de recevoir la SCI RETRAITE en son appel,

- et la déclarant bien fondée, d'infirmer le jugement rendu le 11 mai 2016 en toutes ses dispositions ;

- de dire que la clause de stipulation conventionnelle d'intérêts des prêts est nulle ;

- de dire que le taux d'intérêt légal doit être substitué au taux conventionnel depuis la conclusion des prêts ;

- de condamner la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE à rembourser à la SCI RETRAITE les sommes indûment perçues en application de la substitution du taux légal au taux conventionnel ;

- de dire que lesdites sommes produiront intérêt au taux légal à compter de la date de leur prélèvement par la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE France ;

- de rejeter l'ensemble des demandes formées par la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE ;

- de condamner la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE à payer à la SCI RETRAITE la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Guillaume PIERRE, avocat, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 3 novembre 2016 par voie de RPVA, la SA CAISSE D EPARGNE, intimée,

défend que les frais de courtage ont été régulièrement pris en compte et que le coût n'en étant pas déterminable au temps de l'offre elle a intégré une évaluation des frais de garantie. Elle fait valoir à titre subsidiaire que les prétendues erreurs alléguées étant inférieures au seuil légal il n'y pas lieu à prononcer la moindre sanction sous forme de déchéance du droit aux intérêts, de principe laissée à l'appréciation du juge

L' intimée demande donc à la cour :

' de dire que la note technique réalisée par monsieur [R] et sur laquelle la SCI RETRAITE s'appuie pour prétendre qu'il y a erreur dans le calcul des TEG, ne constitue pas une preuve conforme à la loi au sens de l'article 9 du code de procédure civile,

' de constater que le coût des garanties n'était pas déterminable à date d'émission de l'offre, de sorte que c'est à bon droit que la CAISSE D'EPARGNE l' a simplement évalué,

' de constater que les frais de courtage ont régulièrement été pris en compte dans le calcul des TEG,

' de constater que la SCI RETRAITE n'apporte aucune preuve des frais allégués,

' de dire que la CAISSE D'EPARGNE a calculé le TEG conformément aux dispositions

du code de la consommation,

' de confirmer le jugement du 11 mai 2016 en ce qu'il a débouté la SCI RETRAITE de toutes ses demandes,

' 'surabondamment', de constater que les erreurs alléguées sont inférieures au seuil légal, et de dire qu'il n'y a lieu de prononcer la moindre sanction,

' de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI RETRAITE de toutes ses demandes,

et à titre subsidiaire,

- de constater que la seule sanction applicable à l'erreur dans une des mentions de l'offre de prêt serait la déchéance du droit aux intérêts, dans la proportion fixée par la Cour,

En conséquence,

- de dire que l'erreur alléguée ne justifie pas d'être sanctionnée par la déchéance totale du droit aux intérêts, et en vertu du pouvoir discrétionnaire reconnu à la Cour,

- dire que les intérêts du prêt seront fixés au taux contractuel en conformité avec la volonté des parties.

Enfin, il est réclamé la somme de 7000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs dernières conclusions ci-dessus visées.

SUR CE

Considérant que la SCI RETRAITE poursuit la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts ;

 

Considérant que la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE conclut à l'irrecevabilité d'une telle prétention au regard des dispositions de l'article L312-33 du code de la consommation, qui ne sanctionne que par une déchéance du droit aux intérêts, dans une proportion fixée par le juge, l'irrégularité du taux effectif global figurant dans l'offre de prêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction alors en vigueur, le prêteur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues à l'article L312-8, lequel renvoie, concernant le taux effectif global, aux prescriptions de l'article L313-1 du même code en définissant le contenu, pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge ;

Considérant qu'en vertu des prévisions impératives de l'article L312-8 du code de la consommation, les manquements aux obligations prévues par cet article sont sanctionnés par l'article L312-33 du même code, exclusivement applicables en raison du caractère d'ordre public desdites règles spécifiques édictées pour la protection du consommateur et qui l'emportent donc sur celles plus générales posées par l'article 1907 du code civil, lequel sanctionne par la nullité l'absence de prescription d'un taux d'intérêt et, par extension, d'un taux effectif global, dont l'irrégularité éventuelle est assimilée à une absence ;

Considérant qu'il en résulte qu'en droit la seule sanction d'un taux effectif global erroné n'est pas la nullité de la clause de stipulation d'intérêts mais la déchéance du droit aux intérêts, qui n'est pas demandée par la SCI RETRAITE sollicitant expressément et uniquement la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ;

Considérant que l'emprunteur ne saurait, sauf à vider de toute substance les dispositions d'ordre public des articles L312-1 et suivants du code de la consommation, disposer d'une option entre nullité ou déchéance ;

Qu'une telle option, outre qu'elle priverait le juge de la possibilité de prévoir une sanction proportionnée à la gravité de l'erreur, ce en contradiction avec les récentes directives européennes à la lumière desquelles les textes nationaux doivent s'appliquer

- celle n° 2008/48 transposée en droit français par la loi du 1er juillet 2010 telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'union qui précise, dans sa décision du 9 novembre 2016, qu'une déchéance totale des intérêts ne peut intervenir que pour sanctionner l'irrégularité d'un professionnel ayant privé le consommateur d'apprécier la portée de son engagement, et

- celle n° 2014/17 transposée en droit français par ordonnance du 25 mars 2016 pour harmoniser les crédits accordés aux consommateurs relatifs à des biens immobiliers à usage résidentiel et notamment son article 38 selon lequel toute sanction doit être effective, proportionnée et dissuasive

ne participerait pas à l'unique objectif recherché par le législateur, à savoir donner au TEG une fonction comparative ;

Considérant ainsi qu'au vu de ce qui vient d'être exposé, il convient de déclarer irrecevable la demande de la SCI RETRAITE aux fins de nullité de la stipulation d'intérêts;

Sur les dépens et frais irrépétibles

Considérant que la SCI RETRAITE partie perdante doit être condamnée aux dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE la charge de ses frais irrépétibles à nouveau engagés en cause d'appel, qu'il sera fait doit à sa demande formulée sur ce fondement, tout en la modérant et en lui allouant à ce titre la somme de 1500 euros ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SCI RETRAITE de l'intégralité de ses demandes,

L'infirme en ce qui a déclaré irrecevable comme étant prescrite, l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels formulée par la SCI RETRAITE concernant le prêt consenti par la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE suivant offre du 30 septembre 2009,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable ladite action,

Confirme le jugement déféré en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles,

Y ajoutant,

Condamne la SCI RETRAITE aux dépens d'appel,

Condamne la SCI RETRAITE à payer à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles à hauteur d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/12878
Date de la décision : 02/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°16/12878 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-02;16.12878 ?
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