Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 31 JANVIER 2018
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/24850
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2015 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 08/03938
APPELANTE
SAS LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S Pris en la personne de leur Mandataire Général pour les opérations en France, la société LLOYD'S FRANCE SAS
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentée par Me Manuel RAISON, avocat postulant et Ayant pour avocat plaidant Anhaï AZMY-BARTOLI de la SELARL RAISON-CARNEL, avocats au barreau de PARIS, toque : C2444
INTIMEES
Syndicat des copropriétaires DE L'IMMEUBLE SIS [Adresse 3] AGISSANT PAR SON SYNDIC EN EXERCICE LA SARL CABINET LAVERDET, RCS CRETEIL 572 122 869 DONT LE SIEGE SOCIAL EST [Adresse 4], REPRESENTEE PAR SON GERANT
[Adresse 3]
[Adresse 5]
Représenté par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN/KAINIC/HASCOET/HELAIN, avocat au barreau d'ESSONNE
Ayant pour avocat plaidant Me Marcel ADIDA, avocat au barreau de L'ESSONNE
SARL SOCIETE FRANCILIENNE DE GESTION
[Adresse 6]
[Adresse 5]
Défaillante
Assignation devant la Cour d'Appel de PARIS, en date du 15 février 2016 , par procès verbal de recherches infructueuses, conformément à l'article 659 du code de procédure civile.
SELARL [Y]-[V] En sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL LA FRANCILIENNE DE GESTION
[Adresse 7]
[Adresse 8]
Défaillante
Assignation devant la Cour d'Appel de PARIS, en date du 11 février 2016 , faite à domicile.
SCS BANQUE DELUBAC & CIE Ayant ses bureaux [Adresse 9]
[Adresse 10]
[Adresse 11]
N° SIRET : 305 776 890
Représentée et assistée par Me Thierry BISSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0481
SASU FONCIA BASTILLE Anciennement dénommée TAGERIM BASTILLE venant aux droits de la société TAGERIM VAL DE MARNE
[Adresse 12]
[Adresse 13]
Défaillante
A Assignation devant la Cour d'Appel de PARIS, en date du 18 février 2016, remise à personne habilitée
SA GALIAN ASSURANCE Anciennement dénommée CGI ASSURANCES
[Adresse 14]
[Adresse 9]
Représentée par Me Christofer CLAUDE de la SELAS CLAUDE & SARKOZY, avocat au barreau de PARIS, toque : R175
Ayant pour avocat plaidant Me Sandrina GASPAR, avocat au barreau de PARIS, toque R 175
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Octobre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller
Mme Béatrice CHARLIER-BONATTI, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : M. Amédée TOUKO-TOMTA
ARRÊT : PAR DÉFAUT
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, président et par M. Amédée TOUKO-TOMTA, greffier présent lors de la mise à disposition.
***
FAITS & PROCÉDURE
La société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) Francilienne de gestion a été désignée aux fonctions de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3] par l'assemblée générale du 22 mai 2006 jusqu'au 30 juin 2007.
La société Francilienne de gestion a souscrit, avec effet au 1er janvier 2004, auprès de la SAS Les Souscripteurs du Lloyd's la garantie financière prévue par la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 (dite loi Hoguet).
La société Francilienne de gestion a ouvert le 23 décembre 2002 un compte auprès de la société en commandite simple (SCS) Banque Delubac & Cie, ci après la Banque Delubac, regroupant les fonds mandants des syndicats qu'elle avait en gestion et les fonds résultant de la gérance locative pour des propriétaires.
Différents sous-comptes avaient été ouverts au nom des syndicat des copropriétaires, notamment celui du [Adresse 3]. La convention de compte courant signée à cette occasion entre la société Francilienne de gestion et la Banque Delubac prévoyait que les soldes respectifs pouvaient être virés de l'un à l'autre à tout moment et sans avis, de façon à se confondre en un solde unique exigible. En 2005, les sous-comptes ont ainsi été fusionnés sur un compte unique dénommé "compte fusion".
Par lettre du 4 janvier 2007, la société Francilienne de gestion a informé le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], de ce qu'elle cédait son fonds de commerce à la société Tagerim Val de Marne à compter du 15 janvier 2007, avec transfert à cette date de son siège social à l'adresse de la société Tagerim Val de Marne (devenue Tagerim Bastille puis Foncia Bastille).
Lors de l'assemblée générale du 11 avril 2007, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], ci après le syndicat des copropriétaires ou le syndicat, a désigné la société Cabinet FD Laverdet en qualité de syndic.
Le 23 juillet 2007, la société Tagerim Val de Marne a remis au nouveau syndic les pièces administratives et comptables.
Ayant constaté que le compte bancaire présentait un solde débiteur de 165.022,74 €, alors qu'il avait été fait état antérieurement d'un déficit de 30.000 €, le syndicat des copropriétaires a effectué des déclarations de sinistre, le 2 août 2007 auprès de la société CGI Assurances (devenue Galian Assurances), garant financier de la société Tagerim Val de Marne, et le 7 septembre 2007, auprès de la société SEGAP, courtier des Souscripteurs du LLoyd's, garant financier de la société Francilienne de gestion.
Par jugement du 10 décembre 2008, le tribunal de commerce de Creteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Francilienne de gestion et désigné la SELARL [Y] [V] en qualité de liquidateur, entre les mains de laquelle le syndicat des copropriétaires a déclaré sa créance.
L'ensemble des démarches effectuées pour obtenir paiement des sommes réclamées
étant restées vaines, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] a, par acte des 25 et 26 mars et 1er avril 2008, assigné la société Francilienne de gestion, la société Segap Lloyd's, la société Tagerim Val de Marne et la société CGI Assurances devant le tribunal.
Par acte du 13 février 2009, le syndicat des copropriétaires a assigné la SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur de la société Francilienne de gestion et la Banque Delubac & Cie.
La jonction des procédures a été ordonnée.
Les Souscripteurs du Lloyd's sont intervenus volontairement à l'instance.
Par jugement du 15 mai 2012, dont le syndicat a appelé par déclaration du juillet 2012, le tribunal de grande instance de Créteil a :
- donné acte aux Souscripteurs du Lloyd's de leur intervention volontaire,
- mis hors de cause la société Segap,
- dit irrecevables les demandes formées par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Tagerim Val de Marne, la société CGI Assurances et la Banque Delubac & Cie,
- avant dire droit, ordonné une expertise au contradictoire du syndicat des copropriétaires, de la SELARL [Y] [V] ès qualité de liquidateur de la société Francilienne de gestion, des Souscripteurs du Lloyd's et de la Banque Delubac,
- désigné M. [D] [N] en qualité d'expert, avec mission, notamment, de donner tous éléments techniques et de fait permettant de fixer le montant des sommes non représentées par la société Francilienne de gestion, et de déterminer le montant de la créance du syndicat des copropriétaires à l'égard de son ancien syndic la société Francilienne de gestion, relevant de la garantie financière prévue à l'article 39 du décret du 20 juillet 1972,
- sursis à statuer sur les autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par arrêt du 9 avril 2014, cette cour a :
- réformé le jugement en ce qu'il a dit irrecevables les demandes formées par le syndicat à l'encontre de la société Tagerim Val de Marne, la société CGI Assurances et la Banque Delubac et en ce que l'expertise n'a pas été ordonnée au contradictoire de la société Tagerim Val de Marne et la société CGI Assurances.
- dit que l'expertise confiée à M. [N] sera également diligentée au contradictoire de la société Tagerim Bastille venant aux droits de la société Tagerim Val de Marne et de la société Galian Assurances, anciennement CGI Assurances.
Entre temps, M. [D] [N] a déposé son rapport le 14 mai 2013 en ouverture duquel les parties ont conclut devant le tribunal.
Par jugement du 13 octobre 2015 le tribunal de grande instance de Paris a :
- condamné Les Souscripteurs du Lloyd's à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] la somme de 165.022,74 € avec intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2008,
- rejeté les demandes formulées à l'encontre de la Banque Delubac, de la société Foncia Bastille venant aux droits de la société Tagerim Val de Marne et de la société Galian Assurances anciennement dénommée CGI Assurances,
- rejeté la demande tendant à voir fixer la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la société Francilienne de gestion,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive formulées par la Banque Delubac et la société Galian Assurances,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné les Souscripteurs du Lloyd's aux dépens, qui comprennent les frais d'expertise, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Les souscripteurs du Lloyd's ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 8 décembre 2015.
La procédure devant la cour a été clôturée le 6 septembre 2017.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions en date du 10 août 2017 par lesquelles Les Souscripteurs du Lloyd's, appelants, invitent la cour à :
- infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté la demande tendant à voir fixer la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la société Francilienne de gestion,
- dire que la garantie financière couvre un solde de trésorerie,
- constater que la demande du syndicat ne porte pas sur le solde de trésorerie,
- constater qu'à défaut de créance certaine, liquide et exigible, la garantie financière n'a pas été mise en oeuvre,
- constater que seule la Banque Delubac pourrait être condamnée à indemniser le préjudice du syndicat des copropriétaires,
- constater que la créance du syndicat des copropriétaires n'a pas à faire l'objet d'une déclaration de créance,
- débouter l'ensemble des demandes fins et prétentions dirigées contre eux,
- à titre subsidiaire, si par impossible la cour considérerait que leur garantie financière doit être mise en oeuvre, condamner la Banque Delubac à les relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre,
- à titre infiniment subsidiaire, condamner la Banque Delubac à les relever et garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre dans la limite de 146.902 €,
- condamner tout succombant aux dépens, ainsi qu'à leur payer la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions en date du 23 décembre 2016 par lesquelles le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], intimé ayant formé appel incident, demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les Souscripteurs du Lloyd's à lui payer la somme de 165.022,74 €, sauf à infirmer sur le quantum, avec intérêt au taux légal à compter du 25 mars 2008, outre la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire,
- réformant le jugement et statuant à nouveau, condamner in solidum Les souscripteurs du Lloyd's, la société Foncia Bastille venant aux droits de Tagerim Val de Marne et la
Compagnie Galian Assurances, anciennement CGI Assurances, à lui payer, avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 7 septembre 2007, la somme de 168.280,87 €, in solidum avec la banque Delubac à hauteur de 70.000 € à titre de dommages et intérêts en application des articles 1382 et suivants du code civil,
- condamner les Souscripteurs du Lloyd's aux dépens d'appel, ainsi qu'à lui payer la somme supplémentaire de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions en date du 25 août 2017 par lesquelles la société Banque Delubac, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les Souscripteurs du Lloyd's au titre de leur garantie financière et l'a mis hors de cause,
- réformant le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes indemnitaires accessoires,
condamner les Souscripteurs du Lloyd's à lui verser la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- débouter les Souscripteurs du Lloyd's et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- débouter l'ensemble des parties de toutes demandes contraires,
- condamner les Souscripteurs du Lloyd's et le syndicat des copropriétaires à lui payer respectivement 5.000 € et 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamner les Souscripteurs du Lloyd's aux dépens de première instance et d'appel ;
Vu les conclusions en date du 30 juin 2016 par lesquelles la société Galian Assurances, anciennement dénommée CGI Assurances, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour de :
- dire que la société Tagerim Val de Marne n'a jamais été élue par une assemblée générale en qualité de syndic de la copropriete [Adresse 3],
- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé recevable l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Foncia Bastille, anciennement dénommée Tagerim Val de Marne, et subséquemment recevable à son égard,
- dire irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société Foncia Bastille, anciennement dénommée Tagerim Val de Marne, par le syndicat des copropriétaires et corrélativement dire irrecevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires à son égard,
- la mettre hors de cause,
- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires formulées à son encontre,
- débouter le syndicat des copropriétaires, ainsi que toute autre partie, de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
- réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive à hauteur de 3.000 €, ainsi qu'au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de 5.000 €,
- condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 3.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le syndicat des copropriétaires ou tout succombant aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu la signification de la déclaration d'appel à la requête des Souscripteurs du Lloyd's délivrée à la société Foncia Bastille le 8 février 2016 à personne habilitée, à la SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Francilienne de gestion le février 2016 à domicile, à la société Francilienne de gestion le 15 février 2016 suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, la signification de conclusions à la requête des Souscripteurs du Lloyd's délivrée à la société Foncia Bastille le 16 août 2017 par dépôt de l'acte en l'étude de l'huissier, à la SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Francilienne de gestion le 18 août 2017 à personne habilitée et à la société Francilienne de gestion le 23 août 2017 suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile ;
Vu la signification de conclusions à la requête du syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] délivrée à la société Foncia Bastille le 9 mai 2016 à personne habilitée et à la SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Francilienne de gestion le 9 mai 2016 à personne habilitée ;
Vu la signification de conclusions à la requête de la société Galian Assurances délivrée à la société Francilienne de gestion le 1er juillet 2016 suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, à la SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Francilienne de gestion le1er juillet 2016 à domicile et à la société Foncia Bastille le 1er juillet 2016 à personne habilitée ;
SUR CE,
La SELARL [Y] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Francilienne de gestion, la société Francilienne de gestion et la société Foncia Bastille n'ont pas constitué avocat ; il sera statué par défaut ;
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Sur la mise en oeuvre de la garantie financière
L'article 39 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 dispose en son alinéa 1 :
"La garantie financière couvre toute créance ayant pour origine un versement ou une remise effectués à l'occasion d'une opération mentionnée à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 susvisée. Elle produit effet sur les seules justifications que la créance est certaine, liquide et exigible et que la personne garantie est défaillante, sans que le garant puisse exiger du créancier qu'il agisse préalablement contre le professionnel débiteur aux fins de recouvrement";
La garantie financière découlant du cautionnement par le syndic, qui est distincte de l'assurance de responsabilité civile des professionnels de l'immobilier, a pour objet exclusif de garantir les remboursements ou restitutions des versements ou remises reçus à l'occasion du mandat de syndic ; il appartient au syndicat de démontrer que sa créance à l'encontre de la société Francilienne de gestion est certaine, liquide et exigible ;
Les Souscripteurs du Lloyd's ont été garant financier de la société Francilienne de gestion jusqu'au 6 mai 2007, date d'effet de résiliation de la garantie ;
La société Francilienne de gestion a été le syndic de la copropriété du [Adresse 3] depuis 2004 ; son mandat de syndic a été reconduit par l'assemblée générale du 22 mai 2006 jusqu'au 3 juin 2007 ; elle a cependant cédé son fonds de commerce le 15 janvier 2007 à la société Tagerim Val de Marne, actuellement dénommée Foncia Bastille ; la société Tagerim Val de Marne a présenté sa candidature en qualité de syndic au syndicat du [Adresse 3] qui a décliné cette proposition ; c'est pourquoi, l'assemblée générale du 11 avril 2017 a désigné un nouveau syndic en la personne de la société Cabinet Laverdet ; les pièces administratives et comptables ont été remis au nouveau syndic le 23 juillet 2007 ; après analyse de ces pièces, le syndicat des copropriétaires s'est plaint de ce que le solde bancaire de la copropriété présentait un solde débiteur de 165.023 € alors qu'il avait été fait état d'un déficit de 30.000 € lors de l'assemblée générale du 11 avril 2007 ;
La société Francilienne de gestion avait ouvert un compte courant dans les livres de la société Banque Delubac ; elle avait ouvert plusieurs sous-comptes, notamment pour la copropriété du [Adresse 3] qui n'avait pas voté l'ouverture d'un compte séparé ; toutefois, la Banque Delubac a fusionné, en juin 2005, l'ensemble des sous-comptes réservés aux fonds mandants sur un compte unique ;
Le syndicat des copropriétaires fait valoir une créance de 165.022,14 € à l'encontre de la société Francilienne de gestion et a déclaré cette créance entre les mains des Souscripteurs du Lloyd's le 7 septembre 2007 qui ont refusé leur garantie ;
Pour déterminer le caractère certain, liquide et exigible de la créance du syndicat, M. [N], expert désigné par le tribunal, a retenu comme point de départ les comptes de l'exercice du 1er décembre au 31 janvier 2005 approuvés par l'assemblée générale du 22 mai 2006 ; à partir de ces comptes non contestés, l'expert a reconstitué le solde financier de la copropriété à la date de fin, qui est celle de la nomination du nouveau syndic par l'assemblée générale du 11 avril 2007, en examinant les opérations encaissées et décaissées entre le 1er janvier 2006 et le 11 avril 2007 et en procédant à la vérification des opérations enregistrées en compte banque avec les écritures bancaires du compte fusionné, du 1er janvier 2006 à la date de fin de la reconstitution comptable ;
Ce rapprochement a été effectué du 1er janvier 2006 au 16 juillet 2007 en raison de ce que les comptes de la copropriété ont été tenues par la société Francilienne de gestion jusqu'au 16 juillet 2007, date de l'édition de la comptabilité remise au Cabinet Laverdet ; l'expert indique cependant que la comptabilité n'a été tenue à jour par la société Francilienne de gestion que jusqu'au 11 avril 2007 puisqu'une seule écriture a été enregistré en comptabilité entre le 11 avril et le 16 juillet 2007, ce qui constitue, selon l'expert, une anomalie ;
L'expert a arrêté la situation de trésorerie de la copropriété au 16 juillet 2007 en fixant le solde comptable du compte banque au 16 juillet 2007 à la somme de 165.022,74 € ; il a indiqué que le solde comptable du compte banque était de 160.936,60 € (déduction faite de la somme de 5.361,09 € qui représente le solde financier qui figure en comptabilité mais pas dans le compte bancaire fusionné) à la date du 11 avril 2007 (page 13 du rapport d'expertise), la différence s'expliquant par l'écriture identifiée en comptabilité entre le 11 avril et le 16 juillet 2007 ;
Le syndicat a produit en cours d'expertise le grand livre comptable arrêté au 16 juillet 2007 qui mentionne en pages 28 à 31 "compte Delubac" un débit (et donc un solde positif vis-à-vis de la banque) de 165.022,74 € ;
Les relevés du compte bancaire ouvert dans les livres de la Banque Delubac par la société Francilienne de gestion ont été transmis à l'expert judiciaire, à savoir :
- l'extrait de compte du compte "61 De Gaulle" du 7 avril 2004 au 27 avril 2006,
- les extrait du compte (fusion compte mandant Francilienne de Gestion) du 1er janvier 2006 au 4 février 2009 ;
Le caractère exigible résulte de la cessation des fonctions de syndic de la société Francilienne de gestion qui est tenue de restituer les sommes appartenant au syndicat des copropriétaires ; s'agissant des caractères certain et liquide, les comptes bancaires versés aux débats permettent de constater que les opérations mentionnées au débit du compte banque du Grand Livre (qui sont donc des opérations que doit la banque c'est-à-dire au crédit des copropriétaires) se retrouvent bien dans les comptes ;
La difficulté vient de ce que la Banque Delubac a fusionné le compte de la copropriété dans un compte général concernant l'ensemble des copropriétés gérés par la société Francilienne de gestion alors qu'antérieurement le syndicat des copropriétaires bénéficiait d'un sous-compte, rendant les opérations plus claires ; il a été mis fin à ce sous-compte le 27 avril 2006 par la clôture du compte et le virement du solde créditeur de 377,31 € sur un compte
général "fusion n° 227010656" pour le même montant (pièce syndicat n°33 page 75) ; si, à cette date toutes les confusions étaient possible, il n'en reste pas moins que l'expert judiciaire a pu, en examinant les relevés de compte, démontrer que les sommes figurant au Grand Livre comptable comme ayant été perçues par le syndicat des copropriétaires, se retrouvent bien sur le compte bancaire ; l'expert a pointé dans les relevés bancaires toutes les sommes qui correspondent aux écritures concernant le syndicat dans le Grand Livre ; il résulte du rapport d'expertise que la remise des chèques et des virements en banque totalisait au 16 juillet 2007 une somme de 238.316,40 € alors que le syndicat des copropriétaires n'avait dépensé que 73.293,66 € ; il aurait donc dû bénéficier d'un solde bancaire créditeur de 165.022,74 € ; l'expert judiciaire indique qu'au 16 juillet 2007, ses conclusions ne peuvent être différentes de celles du 11 avril 2007, dans la mesure où la comptabilité a été tenue jusqu'au 11 avril 2007 et non jusqu'au 16 juillet 2007 ; il précise néanmoins qu'en date du 16 juillet 2007 le solde comptable du compte en banque ressort à 165.022,74€ ; cette somme représente en réalité le solde de trésorerie résultant de la gestion de la société Francilienne de gestion qui aurait dû être remis au nouveau syndic ; ce solde a été arrêtée au 16 juillet 2007 mais il résulte du rapport d'expertise qu'il était du même montant le 6 mai 2007, date de la cessation de la garantie financière des Souscripteurs du Lloyd's puisqu'à partir du 11 avril 2007 la société Francilienne de gestion a cessé de tenir la comptabilité du syndicat et de gérer la copropriété ;
Les souscripteurs du Llyod's soutiennent que le préjudice subi par le syndicat des copropriétaires est dû uniquement aux manquements de la Banque Delubac, ce qui a pour conséquence, selon eux, de les délier de leur obligation à garantie financière ; toutefois, la garantie financière en application de l'article 39 du décret du 20 juillet 1972 est due dès lors qu'il est démontré l'absence de restitution des fonds et une créance certaine, liquide et exigible, ce qui est le cas en l'espèce comme il a été dit plus haut ; le seul constat de la défaillance de la société Francilienne de gestion, qui est acquis aux débats, oblige Les Souscripteurs du Lloyd's à garantie ;
Les premiers juges ont justement retenu que les opérations d'expertise ont permis de rapporter la preuve de l'existence d'une créance du syndicat des copropriétaires sur la société Francilienne de Gestion, certaine, liquide et exigible, d'un montant de 165.022,74 € ;
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné les Souscripteurs du Lloyd's à payer au syndicat la somme de 165.022,74 € au titre de sa garantie financière, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 25 mars 2008 valant mise en demeure et rejeté le surplus de la demande du syndicat au titre des intérêts financiers (5.361,09 €), non justifiée et qui ne rentrent pas dans la garantie prévue par l'article 39 du décret du 20 juillet 1972 ;
Sur les demandes contre la société Banque Delubac & Cie
Il est acquis aux débats que la société Francilienne de gestion avait ouvert des sous comptes pour gérer les fonds des copropriétés, mais à partir du l6 juin 2005, les fonds du syndicat ont été placés sur un compte global commun à la quasi totalité des copropriétés que ce syndic
détenait en portefeuille ;
'Sur la demande du syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'en fusionnant le sous compte de la copropriété avec le compte général mandataire de la société Francilienne de gestion, sans la
moindre autorisation, la Banque Delubac a commis une faute délictuelle qui engage sa responsabilité à son égard ; il soutient subir un préjudice résultant de la perte d'une chance de pouvoir recouvrer ainsi les fonds qui auraient dû lui être restitués par la société Francilienne de gestion et qui n'a pu l'être du fait de cette fusion qui a entraînée d'une part, une fusion et même une confusion avec les autres comptes de copropriété et notamment avec les copropriétés débitrices, d'autre part, un avis à tiers détenteur de la part du Trésor Public ;
Les premiers juges ont justement retenu que le syndicat des copropriétaires qui bénéficie de la garantie financière des Souscripteurs du Lloyd's échoue à démontrer qu'il subit un préjudice ;
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts formulée à l'encontre de la Banque Delubac & Cie ;
'Sur la demande des Souscripteurs du Lloyd's
Les Souscripteurs du Lloyd's soutiennent que la Banque Delubac n'était pas fondée à procéder à la fusion des comptes mandants sans l'accord du syndicat des copropriétaires, et sollicitent sa condamnation à les garantir des condamnations prononcées au bénéfice du syndicat ; ils font valoir qu'après émission d'un avis à tiers détenteur, une saisie a été effectuée par le Trésor Public sur le compte ouvert dans les livres de la Banque
Delubac pour une dette personnelle de la société Francilienne de gestion, ce qui a permis l'appréhension de la somme de 146.902 € sur des fonds mandants ;
Les premiers juges ont justement retenu que les Souscripteurs du Lloyd's ne sont pas fondés
à solliciter la garantie de la Banque Delubac pour une condamnation à paiement découlant, non pas de la mise en cause de sa responsabilité à l'égard du syndicat des copropriétaires, mais de la seule mise en oeuvre de son engagement de garant financier du syndic ayant reçu mandat de la copropriété ;
Les Souscripteurs du Lloyd's ne peuvent se retourner contre la Banque Delubac qu'à la condition d'établir une faute de sa part, ayant contribué à la défaillance de la société Francilienne de gestion à remettre la somme de 165.022,74 € ; or il n'est pas établi que l'impossibilité pour la société Francilienne de gestion de remettre cette somme au syndicat à la fin de sa mission est imputable directement à une faute de la Banque Delubac ; en effet, la société Francilienne de gestion était en difficulté financière depuis plusieurs années, ce qui a conduit à sa liquidation judiciaire prononcée le 10 janvier 2008 ;
A cet égard, il doit être noté que Les Souscripteurs du Lloyd's ont mandaté le 12 mai 2005 le cabinet Orion pour procéder à un audit des comptes de la société Francilienne de gestion ; c'est ainsi que le rapport d'audit, daté du 19 juin 2006, indique que "les insuffisances des fonds mandants sont chroniques depuis au moins 2002" (pièce Delubac n°7 ' page 16 § 3.2) ; la fusion des sous-comptes en juin 2005 n'est donc pas à l'origine de la disparition des fonds mandants ;
En ce qui concerne l'avis à tiers détenteur émis par le Trésor Public le 9 janvier 2007 pour un montant de 146.902 €, la Banque Delubac n'a commis aucune faute en le réglant le 13 mars 2007 ; en premier lieu, l'avis a été régularisé par le Trésor Public sur l'ensemble des comptes de la société Francilienne de gestion et en second lieu, cette dernière ne l'a pas contesté alors qu'elle seule avait la faculté de saisir la juridiction compétente si elle avait considéré que l'avis à tiers détenteur ne pouvait pas porter sur tel ou tel sous-compte ; par ailleurs l'article L 211-3 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter ; l'article R 211-19 du même code dispose que l'acte de saisie rend indisponible l'ensemble des comptes du débiteur ; la Banque Delubac n'avait pas la possibilité de contester cet avis sur lequel il était mentionné que "cet avis, notifié à un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, porte sur l'ensemble des comptes du débiteur qui représente des créances en sommes d'argent et les rend indisponibles. Le présent avis à tiers détenteur vous rend personnellement débiteur des causes de cette saisie envers le Trésor, dans la limite de votre obligation.
Le versement demandé est obligatoire : en ne l'effectuant pas vous vous exposeriez à être poursuivi en paiement";
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Les Souscripteurs du Lloyd's de leur demande en garantie dirigée contre la Banque Delubac ;
Sur la demande du syndicat des copropriétaires contre la société Foncia Bastille et la société Galian Assurances
La société Tagerim Val de Marne, devenue Foncia Bastille, a acquis une partie du fonds de commerce de la société Francilienne de gestion le 16 novembre 2006 ;
Aux fins de se voir désigner en qualité de syndic, elle a proposé sa candidature en suscitant la convocation d'une assemblée générale extraordinaire pour le 20 mars 2007 ; cette assemblée ne s'est pas tenue et il n'est pas contestable que la société Tagerim Val de Marne n'a jamais été désignée en qualité de syndic de la copropriété ; il n'en reste pas moins que la demande du syndicat contre les sociétés Foncia Bastille et Galian est recevable au regard des articles 31 et 122 du code de procédure civile ; le jugement doit être confirmé sur ce point ;
Le syndicat des copropriétaires soutient qu'entre la fin du mois de novembre 2006 et le 11 avril 2007, date de l'assemblée générale qui a donné mandat de syndic au Cabinet Laverdet, la société Tagerim Val de Marne a poursuivi l'activité de syndic de la société Francilienne de gestion et a géré les fonds de la copropriété ;
Les premiers juges ont exactement relevé que, s'il devait être considéré qu'il a existé sur cette période, une gestion de fait qui constituerait une faute imputable à la société Tagerim Val de et Marne, celle-ci serait sans lien causal avec le préjudice du syndicat résultant de la non représentation des fonds par la société Francilienne de gestion et de sa défaillance, et son préjudice serait de surcroît inexistant du fait de l'effectivité de la garantie financière
accordée par les Souscripteurs du Lloyd's ; il convient d'ajouter que la gestion de fait évoquée par le syndicat n'est nullement démontrée par le rapport d'expertise dont il résulte, au contraire, que la société Francilienne de gestion a géré la copropriété jusqu'au 11 avril 2007 ;
Pur ailleurs, comme l'a dit le tribunal, la mise en oeuvre de la garantie financière accordée par la société Galian Assurances, anciennement dénommée CGI Assurances, n'est pas
justifiée, en l'absence de mandat de syndic donné à la société Tagerim Val de Marne par l'assemblée générale des copropriétaires ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat de ses demandes contre les sociétés Foncia Bastille et Galian Assurances ;
Sur les demandes de dommages-intérêts
En application des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s'il s'agit d'une erreur grave équipollente au dol ; l'appréciation inexacte qu'une partie se fait de ses droits n'est pas constitutive en soi d'une faute ;
Les sociétés Galian Assurances et Banque Delubac ne rapportent pas la preuve de ce que l'action du syndicat des copropriétaires et des Souscripteurs du Lloyd's aurait dégénéré en abus ;
Pour ces motifs et ceux des premiers juges que la cour adopte, le jugement doit être confirmé en ce qu'il les a débouté de leur demande de dommages-intérêts ;
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens, qui comprennent de droit les frais d'expertise, et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les Souscripteurs du Lloyd's, partie perdante, doivent être condamnés aux dépens d'appel ainsi qu'à payer les sommes supplémentaire suivantes par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel :
- au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] :
5.000 €,
- à la société Banque Delubac & Cie : 5.000 €,
- à la société Galian Assurances : 5.000 € ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Les Souscripteurs du Lloyd's ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement ;
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Condamne Les Souscripteurs du Lloyd's aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les sommes supplémentaires suivantes par application de l'article 700 du même code en cause d'appel :
- au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] :
5.000 €,
- à la société Banque Delubac & Cie : 5.000 €,
- à la société Galian Assurances : 5.000 € ;
Rejette toute autre demande ;
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT