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30/01/2018 | FRANCE | N°15/06443

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 30 janvier 2018, 15/06443


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 30 Janvier 2018

(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/06443



Décisions déférées à la Cour : jugement rendu le 04 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Encadrement RG n° 12/04512 et du jugement rectificatif rendu le 25 juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Encadrement RG n° 15/06379





APPELANTE:



SA ESPACE 2

Sise [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 332 724 376

représentée par Me Charlotte BARRE, avocat au barreau de...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 30 Janvier 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/06443

Décisions déférées à la Cour : jugement rendu le 04 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Encadrement RG n° 12/04512 et du jugement rectificatif rendu le 25 juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Encadrement RG n° 15/06379

APPELANTE:

SA ESPACE 2

Sise [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 332 724 376

représentée par Me Charlotte BARRE, avocat au barreau de DIJON

INTIME :

Monsieur [C] [C]

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Henri ROUCH, avocat au barreau de PARIS, toque : P0335

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Soleine HUNTER-FALCK, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Bruno BLANC , Président

Madame Roselyne GAUTIER, Conseillère

Madame Soleine HUNTER-FALCK, Conseillère

Greffier : Mme Marine BRUNIE, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par M. Bruno BLANC, président et par Mme Marine BRUNIE, greffier présent lors du prononcé.

EXPOSE DU LITIGE

La SA ESPACE 2 a une activité de promotion immobilière et marchand de biens. L'entreprise est soumise à la convention collective de la promotion immobilière ; elle comprend plus de 10 salariés.

[C] [C], né en 1984, a été engagé par contrat à durée indéterminée par la SA ESPACE2 le 01.08.2006 en qualité de prospecteur foncier junior niveau 2 échelon 1 coefficient 123 statut non cadre à temps complet.

Il a, par la suite, été nommé développeur foncier le 01.02.2007 et percevait une rémunération brute annuelle de 37.000 € outre une rémunération variable calculée sous forme de commissions assises sur les terrains amenés par le collaborateurs et les terrains issus du portefeuille de la société ainsi que des primes.

Dans un courrier du 04.05.2009, la SA ESPACE 2 a augmenté la rémunération fixe annuelle du salarié à 60.000 € brut.

En dernier lieu il avait la position de développeur foncier cadre niveau 4 échelon 1.

Le 04.03.2009, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde à l'encontre de la SA ESPACE 2 et a désigné M° [H] en qualité de mandataire judiciaire ; la période d'observation a été prolongée de 6 mois par décision rendue le 01.10.2009, puis à nouveau les 04.12.2009 et 18.02.2010 ; un plan de sauvegarde a été arrêté le 08.03.2010. La société est au jour de l'audience in bonis.

Le 01.12.2009, un contrat de prêt a été signé entre les parties, la société consentant au salarié un prêt de 20.000 € au taux 0%, remboursable après une franchise de 24 mois par 20 mensualités de 1.000 €.

Le 05.04.2011 un accord de cession de parts a été signé au profit de [C] [C], responsable d'agence [Localité 1], selon lequel la SA ESPACE 2, eu égard aux missions 'remplies très brillamment' par le salarié, lui a cédé 10% des parts des SCCV prospectées et signées par le salarié : 115 BERTEAUX, WILSON ROUQUIER, LE VALOISIEN, DOMAINE DU VIEUX PAYS, VILLA IMPRESSIONNISTE, en stipulant en outre que 'Toutes les opérations à venir de l'Agence Ile de France qu'elles soient 'logées' dans une SCCV existante ou à créer intègreront pour 10% des parts de Monsieur [C] [C]', le tout sans contrepartie d'apports tout au moins les 2 premières années.

[C] [C] a été placé le 09.12.2011 en arrêt de travail, prolongé jusqu'au 25.02.2012.

Par LRAR du 23.12.2011, la SA ESPACE 2 a demandé au salarié de restituer son portable PC, son téléphone Blackberry professionnel, le téléphone mobile Bouygues de [Localité 2], afin de poursuivre l'activité du salarié pendant son arrêt maladie. En réponse, [C] [C] a dénoncé le 29.12.2011 ses conditions de travail qui l'avaient conduites à un surmenage ; l'employeur a réitéré par LRAR du 10.01.2012 sa demande de restitution temporaire de ce matériel, propriété de l'entreprise.

Le 11.01.2012, [C] [C] a contesté le montant qui lui avait été versé pendant son arrêt maladie par son employeur de 2.500 € par mois au lieu de 8.980 € et en a demandé la régularisation, ce qui a été contesté par la SA ESPACE 2 le 19.01.2012 ; puis le 24.01.2012, le conseil de [C] [C] a mis en demeure la société de régler une somme brut de 8.986,58 € au titre du mois de décembre 2011.

[C] [C] a été convoqué par lettre du 03.02.2012 à un entretien préalable fixé le 14.02.2012 reporté au 27.02.2012 avec mise à pied conservatoire, puis licencié par son employeur le 16.03.2012 pour faute grave ; il lui était reproché les faits suivants :

'Par la présente, nous vous informons que nous déplorons de votre part de nombreux agissements constitutifs de fautes graves.

Ainsi, et en premier lieu, nous avons relevé de nombreuses insuffisances et négligences professionnelles préjudiciables aux intérêts de notre société.

En effet, il a été porté à notre connaissance, entre autre le 7 février 2012, par le bureau d'étude BUCHET intervenant sur l'opération de Le Valoisien, que vous avez pris la liberté de faire travailler ce prestataire ainsi que le Cabinet RBI, sans devis validé par vos soins et plus grave encore par votre direction.

Vous avez ainsi engagé « à l'aveugle » notre société dans des dépenses et des coûts non maîtrisés sans aucun contrôle, ni garantie de responsabilité, et ce contrairement à toutes les règles internes de notre société, mais également aux règles les plus élémentaires de prudence ; de surcroît, ces coûts auraient dû être au compte des entreprises adjudicataires, notamment pour des problèmes d'assurances.

Sous votre responsabilité, des travaux dans le cadre du chantier de « [Localité 3]» ont été engagés sans information ni accord préalable de la direction générale ; nous découvrons aujourd'hui, au fur et à mesure, des devis de travaux supplémentaires que les entreprises nous ont confirmé vous avoir transmis mais que vous n'avez pas communiqués à votre Direction, ce qui est contraire à nos règles de procédures internes que vous connaissez pourtant parfaitement.

Vous avez, dans un deuxième temps, volontairement manqué à vos obligations professionnelles les plus élémentaires en accompagnant avec une grande légèreté les projets dont vous aviez la charge.

Vous avez demandé l'embauche de trois personnes, proposées et sélectionnées par vous-même, en contrat à durée déterminée pour aider aux appels d'offres auprès des entreprises des différents corps d'états ; vous les avez laissées livrées à elles-mêmes et nous avons pu constater, lors de la reprise de vos dossiers durant votre arrêt maladie, un retard considérable dans les consultations d'entreprises sur les opérations Résidence Primo Levi, Villa Impressionniste, Wilson Rouquier - Carré d'Or.

Pire encore, vous avez démobilisé et déresponsabilisé nos maîtres d''uvre sur ce poste spécifique de leur mission en prétendant vous charger exclusivement de la consultation en contravention formelle avec nos règles internes, les contrats de maître d''uvre dont vous aviez la gestion, le tout en nous faisant courir un risque important par rapport à nos assurances ; dans le même temps, vous avez gérer avec une incroyable légèreté la signature des marchés des entreprises choisies, laissant traîner ces signatures, affirmant même au maître d''uvre, de façon mensongère, que certains marchés avaient été signé et envoyés « depuis longtemps » alors qu'il n'en était rien.

Cette attitude des plus laxistes, dans la gestion d'une tâche des plus élémentaires, nous cause un préjudice considérable et entache irrémédiablement notre réputation et notre image de marque (l'entreprise MART1NIER sur l'opération Le Valoisien a fini par «déclarer forfait » après avoir attendu en vain pendant plusieurs mois le retour de son marché signé, ce qui nous a obligé à rechercher une nouvelle entreprise impliquant du travail supplémentaire, du retard dans l'avancement de notre chantier et un surcoût de prix).

Votre manquement est d'autant plus dommageable que vous n'avez pas alerté votre direction sur la situation de ces chantiers dont nous avons, depuis votre arrêt maladie, des retours calamiteux et inquiétants : des entreprises sans assurance intervenant sur nos chantiers et qui ont été payées (exemple de l'entreprise BATAL) parfois même surpayées au regard de l'avancement réel de leur travaux (BATAL, CR1SAN ...), des travaux réalisés contrairement au règle de l'art et en dépit de tout bon sens (cloisons et chapes réalisées alors que l'immeuble n'est pas hors d'eau, ni hors d'air, en sorte que ces travaux ont été gravement endommagés par les intempéries et sont à refaire, entraînant des surcoûts et des retards dans l'avancement du chantier ; les travaux de façade réalisés sur l'opération de [Localité 3] ne sont pas conformes au CCTP),

Aujourd'hui, nous avons à gérer, de votre fait, les mécontentements de nos clients qui ne seront pas livrés dans les délais contractuellement prévus, compte tenu de la nécessité de trouver de nouvelles entreprises pour remplacer celles qui se sont désistées, mais également du temps nécessaire pour faire un point clair sur l'état des travaux modificatifs acquéreurs que vous avez traités là encore avec une insouciance incroyable : travaux validés par vos soins sans valorisation de prix et sans calcul de leur impact sur les délais de livraison, absence de suivi des travaux modificatîfs clients auprès des entreprises obligeant à défaire ce qui a été fait.

Nous avons découvert que votre manque de sérieux et d'engagement professionnel s'est également manifesté dans la gestion des actes authentiques d'acquisition des terrains du projet « les rives de Lafittete », où vous avez été plus que négligent dans la régularisation du document d'arpentage indispensable à la finalisation et à la signature des actes notariés, sachant en plus que l'entier dossier était en votre possession exclusive (et non dans le dossier de l'assistante de programmes), avec des promesses établies en votre nom sans accord de la Direction et sans que substitution soit faite, ce qui a failli faire «capoter » l'opération.

Or, sans l'intervention, l'obstination et les diligences menées en urgence par notre direction, ces actes n'auraient pas pu être régularisés, causant ainsi un préjudice irrémédiable pour notre société.

Vos défaillance et négligence professionnelles ont également été mises en évidence dans l'encadrement de vos collaborateurs prospecteurs fonciers ; en effet, ces derniers ont porté à notre connaissance, les 12 et 14 décembre 2011, leur désarroi et leur frustration face à votre refus presque systématique et inexplicable de présenter à la direction la majeure partie de leurs dossiers de prospects fonciers dont une rapide étude a pourtant permis de mettre en évidence la réelle rentabilité ; à l'inverse, vous avez engagé la société dans des projets fonciers ne présentant qu'un intérêt factice ; nous citons, pour exemple, votre traitement laxiste d'une promesse de vente d'un immeuble sis [Adresse 3], dont nous avons dû nous désengager et maîtriser, dans l'urgence, une menace de procédure judiciaire.

Enfin, et en dernier lieu, dans le cadre de votre arrêt maladie, nous vous avons fait parvenir deux lettres de mise en demeure d'avoir à nous restituer notre matériel afin de pouvoir reprendre en votre absence le suivi de vos dossiers, le traitement courant des demandes de notre clientèle ou de nos partenaires professionnels.

En totale insubordination vous avez refusé de restituer ces éléments dont vous n'êtes en aucun cas propriétaire et vous avez, sans motif valable, refusé d'exécuter la consigne donnée par votre direction.

Plus encore, vous vous êtes approprié purement et simplement le matériel et les biens appartenant à notre société.

Votre conseil, Maître [U] [G] a, par lettre en date du 24 janvier 2012, clairement signifié votre refus de restituer ce matériel.

De surcroît, votre refus à nous restituer le véhicule Renault Megane immatriculé [Immatriculation 1]75 en votre possession, est une attitude inexcusable de votre part, Nous vous rappelons que le véhicule en question est une voiture de fonction dont vous n'avez plus aucune utilité depuis la perte de votre permis de conduire. Cette appropriation est inadmissible.

Ainsi, par votre seul fait et en suite à votre refus inexpliqué de remettre votre ordinateur où se trouvait la seule version disponible du dossier LINUX concernant le développement foncier [Localité 1]ce, ainsi que vos téléphones portables, vous avez volontairement placé votre employeur dans une situation délicate et ne pouvant qu'entraîner la désorganisation du service.

Vous ne pouvez en effet ignorer, puisque vous avez gardé les outils de travail qui vous ont été confiés, que bon nombre de bureaux d'études, d'architectes, de corps de métier et également de clients vous ont directement adressé des demandes ou des éléments nécessaires au suivi des chantiers.

Vous avez volontairement conservé ces informations sans les faire basculer vers vos collaborateurs ou à l'attention de votre direction. .

Par votre fait, vous avez placé notre société dans des situations compliquées à gérer, provoqué des retards de traitement et par la même irrémédiablement généré des ajournements de travaux.

Votre comportement nous amène à sérieusement nous interroger sur votre volonté de nuire à notre société.

Dès lors, et compte tenu de ce qui précède, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement et à la date de l'envoi de la présente lettre sans indemnité de préavis ni de licenciement.'

Le 29.03.2012, [C] [C] a contesté ce licenciement ce qu'il a confirmé par LRAR du 30.03.2012.

Le conseil des prud'hommes de Paris a été saisi par [C] [C] le 19.04.2012 en contestation de cette décision, et indemnisation des préjudices subis.

Par ordonnance rendue le 22.06.2012, le juge des référés du conseil des prud'hommes de Paris, saisi par [C] [C] d'une demande de rappel de salaire à l'encontre de la SA ESPACE 2, a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 5.236 € à titre de rappel de salaire pour les mois de décembre 2011 et janvier 2012, outre les congés payés afférents, cette somme représentant un maintien de salaire dans le cadre de son arrêt maladie en application des dispositions conventionnelles ; la cour d'appel de Paris a constaté le désistement d'appel de la SA ESPACE 2 dans son arrêt du 29.10.2015.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 28.06.2015 par la SA ESPACE 2 du jugement rendu le 04.05.2015, et le 28.07.2015 du jugement rectificatif rendu le 25.06.2015, par le conseil de prud'hommes de Paris section Encadrement, qui a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la SA ESPACE 2 à verser à [C] [C] :

- 7.500 euros bruts à titre de rappels de salaire sur mise à pied outre 750 euros bruts de congés payés afférents ;

- 15.000 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis outre 1.500 euros de congés payés afférents ;

- 8.125 euros nets d'indemnité de licenciement ;

avec intérêt légal à compter de la réception de la convocation par l'employeur devant le bureau de conciliation ;

- 100 euros à titre de dommages intérêts pour absence de mention de DIF ;

- 30.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, selon la décision rectificative ;

avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement .

- 700 euros au titre de l'article 700 du CPC,

le salarié étant débouté du surplus et la société condamnée aux dépens.

La société demande à la cour de :

Dire et juger que le licenciement prononcé à l'encontre de [C] [C] repose sur une faute grave ;

Dire et Juger que la société ESPACE 2 ne doit que la somme de 1.526,58 euros nets au titre de rappels de salaire pour les mois de décembre 2011 et janvier 2012 ;

Constater que la somme de 1.526,58 euros nets a déjà été réglée en juillet 2012 à [C] [C] par l'entremise de son huissier ;

Dire et Juger que le salaire mensuel de [C] [C] était de 5.000 euros bruts ;

En conséquence :

Infirmer l'ordonnance de référé du Conseil de Prud'hommes de Paris rendue le 22 juin 2012;

Infirmer le jugement prononcé par le Conseil de Prud'hommes de Paris le 4 mai 2015 ainsi que le jugement rectificatif du 25 juin 2015 ;

Débouter [C] [C] de toutes ses demandes ;

Débouter [C] [C] de ses demandes de rappels de salaire comme injustifiées ;

Condamner [C] [C] à régler à la société la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépense.

De son côté, [C] [C] demande de confirmer le jugement, de débouter l'appelante de toutes ses demandes et de condamner la SA ESPACE 2 à payer :

A TITRE PRINCIPAL ;

- Constater que le délai maximum d'un mois entre l'entretien préalable et l'expédition de la lettre de licenciement n'a pas été respecté;

En conséquence,

- Dire et juger que le licenciement de [C] [C] est sans cause réelle et sérieuse et totalement abusif,

A TITRE SUBSIDIAIRE :

- Constater que les faits reprochés dans la lettre de licenciement ne sont pas datés,

En conséquence,

- Dire et juger que le licenciement de [C] [C] est sans cause réelle et sérieuse et totalement abusif,

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :

- Constater l'absence de faute grave imputable à [C] [C] ;

En conséquence,

- Dire et juger que le licenciement de [C] [C] est sans cause réelle et sérieuse et totalement abusif,

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

- Constater en outre la violation par l'employeur de son obligation d'information relative au droit individuel à la formation ;

Voir fixer le montant du salaire mensuel de [C] [C] [C] à la somme de 8.986,58 Euros nets,

En conséquence,

- Condamner la Société ESPACE 2, à payer à [C] [C] les sommes suivantes :

* 13.479,87 euros nets, au titre de rappel de salaire sur mise à pied du 3 février au 16 mars 2012,

* 1.347,87 euros nets, au titre des congés payés y afférents,

* 26.959,74 Euros nets au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 2.695,97 Euros nets au titre des congés payés afférant au préavis,

* 13.132,75 Euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 90.000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives au droit individuel à la formation,

* 3.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents sociaux dont notamment l'attestation POLE EMPLOI.

- Condamner la Société ESPACE 2 à remettre à [C] [C] son attestation POLE EMPLOI, son certificat de travail et son reçu pour solde de tout compte rectifiés suivant le jugement à intervenir, sous astreinte de 100 Euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.

A TITRE SUBSIDIAIRE ET POUR LE CAS OU VOTRE COUR CONFIRMERAIT

QUE LE SALAIRE MENSUEL DE [C] [C] EST DE 5.000 EUROS BRUTS,

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société ESPACE 2 à verser à [C] [C] :

*7.500 Euros à titre de rappel de salaires sur la mise à pied du 3 février au 16 mars 2012,

*750 Euros au titre des congés payés y afférents,

* 15.000 Euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 1.500 Euros au titre des congés payés y afférents,

*8.125 Euros à titre d'indemnité de licenciement,

*100 Euros à titre de dommages et intérêts pour absence de mention du DIF,

*30.000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*700 Euros devant le Conseil de Prud'hommes au titre de l'article 700 du Code de Procédure

Civile,

EN TOUT ET DE CAUSE

Condamner la Société ESPACE 2 à verser à [C] [C] la somme de 6.000 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la régularité et les conséquences de la rupture :

En ce qui concerne la régularité de la procédure de licenciement, [C] [C] se prévaut des dispositions de l'article L 1332-2 du code du travail en considérant que le délai légal d'un mois pour notifier le licenciement au salarié à partir de la date de l'entretien préalable n'avait pas été respecté dès lors que qu'il avait été dans un premier temps convoqué le 03.02.2014 à un entretien fixé le 14 février, cette date étant reporté unilatéralement par l'employeur au 27 février ; il estime que la lettre de licenciement aurait dû être notifiée au plus tard le 14 mars.

la SA ESPACE 2 réplique avoir modifié la date de l'entretien préalable puisque le salarié était en arrêt maladie au jour du premier entretien prévu afin de respecter les droits de la défense ; la lettre de licenciement a été notifiée dans le délai d'un mois ayant suivi la seconde date d'entretien préalable.

La lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée au salarié dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable et, à défaut, le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse ; cependant, l'employeur, informé de l'impossibilité dans laquelle se trouve le salarié de se présenter à l'entretien, peut en reporter la date ; c'est alors à compter de cette nouvelle date que court le délai d'un mois qui lui est imparti pour notifier la sanction.

En l'espèce, le caractère disciplinaire du licenciement n'a pas fait débat ; par ailleurs, il ressort des éléments de la cause que la SA ESPACE 2 a convoqué [C] [C] à un entretien préalable par un courrier daté du 03.02.2012 et posté le même jour, alors que, le 12.01.2012, elle avait reçu l'avis d'arrêt de travail daté du 10.01.2012 prescrivant le renouvellement de son arrêt maladie initié le 09.12.2011, fixé par le médecin traitant jusqu'au 27.02.2012.

Il en résulte que la société avait connaissance de cet arrêt maladie le jour de l'envoi de la convocation du salarié à l'entretien préalable ; la SA ESPACE 2 a décidé de renouveler la convocation à l'entretien prélable par un courrier du 15.02.2012 au motif que le salarié n'avait pas cru utile de se présenter à cet entretien, sans mentionner aucunement sa sitution d'arrêt maladie qui perdurait depuis le 9 décembre, et sans même que [C] [C] ait sollicité un report de cet entretien.

Par suite, l'employeur a, de sa propre initiative, reporté l'entretien préalable et ne peut se prévaloir de ce report pour justifier le dépassement du délai impératif de l'article L 1332-2 du code du travail dès lors que la lettre de licenciement a été notifiée le 16.03.2012 soit au delà du délai d'un mois devant être calculé à partir de la première convocation du 03.02.2012.

En conséquence, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner plus avant l'argumentation développée par les parties, le licenciement de [C] [C] doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement en cause confirmé.

Sur le salaire moyen devant être retenu pour déterminer l'indemnisation du salarié, le premier juge l'a fixé à la somme de 5.000 € bruts par mois en se référant au contrat de travail et au courrier du 04.05.2009 ayant prévu un salaire annuel brut de 60.000 €, soit un salaire brut mensuel de 5.000 €.

[C] [C] constate que ses bulletins de salaire en 2010 mentionnent cependant un salaire brut de 4.000 € mais également chaque mois un 'accompte' de 2.961,64 € qu'il qualifie de salaire, soit en brut, une somme de 3.846,29 € et soit un total mensuel de 7.846,29 € ; à partir de janvier 2011, cet 'accompte' mensuel est passé à 5.961,26 € net soit 7.741,90 € soit un total mensuel de 11.846,29 €.

[C] [C] produit un échange de courriel avec son responsable hiérarchique, G. [A], selon lequel il aurait eu comme information que des instructions avaient été données en février 2011 pour sortir les avances des charges sociales ; il déclare que ses bulletins de salaire ont été refaits et il communique les précédents qui font état d'un salaire brut de 7.697,58 € en juillet, septembre et octobre 2010 au delà de 5.000 €.

En tenant compte enfin des performances non contestés du salarié dans son travail, il convient de dire que le salaire mensuel brut moyen de [C] [C] au cours de l'année 2011 a bien été de 11.846,29 €.

En conséquence, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée, de l'âge de [C] [C], de son ancienneté dans l'entreprise, de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, sans éléments sur les conséquences du licenciement à son égard, la SA ESPACE 2 sera condamnée à verser au salarié à titre de dommages intérêts la somme de 71.077,74 € ; cette somme à caractère indemnitaire est nette de tous prélèvements sociaux, outre les indemnités de rupture et le rappel de mise à pied ainsi qu'il est précisé au dispositif et calculés sur le salaire moyen brut.

Lorsque le licenciement illégitime est indemnisé en application des articles L1235-2/3/11 du code du travail, la juridiction ordonne d'office, même en l'absence de Pôle emploi à l'audience et sur le fondement des dispositions de l'article L 1235-5, le remboursement par l'employeur, de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du jugement, dans la limite de six mois ; en l'espèce au vu des circonstances de la cause il convient de condamner l'employeur à rembourser les indemnités à concurrence d'un mois. Le jugement rendu sera infirmé sur les indemnités accordées.

Sur les autres demandes :

En ce qui concerne le droit individuel à la formation, si la lettre de licenciement ne fait pas mention des droits acquis par le salarié, la société oppose à juste titre que la progression professionnelle du salarié est démontrée par l'augmentation conséquente de son salaire moyen et qu'il ne démontre donc pas le préjudice particulier qui aurait été le sien. Le jugement sera infirmé.

Sur le remise tardive des documents sociaux et notamment de l'attestation Pôle Emploi, là encore [C] [C] ne démontre pas le préjudice qui en aurait résulté alors même qu'il ne justifie pas avoir été contraint de s'inscrire pour bénéficier d'une prise en charge par cet organisme. Il est fait droit à la demande de remise des documents sociaux sans que l'astreinte soit nécessaire. Ces dernières demandes n'ont pas été prises en compte par le premier juge.

Il serait inéquitable que [C] [C] supporte l'intégralité des frais non compris dans les dépens tandis que la SA ESPACE 2 qui succombe doit en être déboutée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 04.05.2015 et le 28.07.2015 du jugement rectificatif rendu le 25.06.2015 par le conseil de prud'hommes de Paris section Encadrement en ce qu'il a décidé du caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement mais l'infirme sur les montants octroyés ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne en conséquence la SA ESPACE 2 à payer à [C] [C] les sommes calculées en brut de :

* 17 506,32 euros, au titre de rappel de salaire sur mise à pied du 3 février au 16 mars 2012,

* 1.750,63 euros, au titre des congés payés y afférents,

* 35.012,65 euros nets au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 3.501,26 euros nets au titre des congés payés afférant au préavis,

* 17.055,52 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 71.077,74 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives au droit individuel à la formation,

* 3.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents sociaux dont notamment l'attestation POLE EMPLOI.

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

Dit que la SA ESPACE 2 devra transmettre à [C] [C] dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision un certificat de travail et une attestation Assedic/Pôle emploi conformes ainsi qu'un bulletin de salaire récapitulatif ;

Rejette les autres demandes ;

Ordonne, dans les limites de l'article L 1235-4 du code du travail, le remboursement par la SA ESPACE 2 à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à [C] [C] à concurrence d'un mois de salaire ;

Condamne la SA ESPACE 2 aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à payer à [C] [C] la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 15/06443
Date de la décision : 30/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°15/06443 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-30;15.06443 ?
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