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24/01/2018 | FRANCE | N°15/01344

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 24 janvier 2018, 15/01344


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 24 Janvier 2018

(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/01344



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Octobre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/05136









APPELANT

Monsieur [P] [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1954 à [L

ocalité 2] (BELGIQUE)

comparant en personne, assisté de Me Thomas HOLLANDE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benjamin DELSAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0469







INTIMÉE

R...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 24 Janvier 2018

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/01344

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Octobre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/05136

APPELANT

Monsieur [P] [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2] (BELGIQUE)

comparant en personne, assisté de Me Thomas HOLLANDE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benjamin DELSAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0469

INTIMÉE

RATP

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Jean-luc HIRSCH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1665 substitué par Me Isabelle GOESTER-PRUNIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : PN 175

PARTIE INTERVENANTE :

CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL (CRP) DE LA RATP

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Localité 4]

non comparante, non représentée,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère, rédactrice,

Mme Séverine TECHER, Vice-Présidente Placée

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Clémence UEHLI, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES.

Monsieur [P] [N], né le [Date naissance 1] 1954, a été engagé par la régie autonome des transports parisiens ci dessus dénommée RATP le 20 septembre 1982, en qualité d'attaché technique-2ème catégorie, groupe D, agent de maîtrise, titularisé le 1er octobre 1983, il a été affecté au service matériel roulant (MRB).

En arrêt de travail pour maladie depuis le 25 juillet 1997, il a été déclaré le 4 juillet 2000, par le médecin du travail de la RATP, le docteur [O] « inapte définitif à tout emploi à la RATP au poste de MAI EC3 MAINTENANCE».

Le 21 juillet 2000, la commission médicale de la RATP a proposé sa mise à la retraite par voie de réforme avec effet au 21 juillet qui lui a été notifiée le 31 juillet 2000.

Il avait à cette date soit le 31 mars 2000, saisi le conseil de prud'hommes de Paris devant lequel il a demandé en dernier lieu de voir:

-constater qu'il a victime d'une discrimination illicite dans le déroulement de sa carrière,

- de constater la nullité de sa mise à la réforme, d'ordonner sa réintégration immédiate dans les effectifs avec toutes conséquences de droit et condamner la RATP à lui verser le montant de son salaire d'activité sous déduction des prestations perçues depuis le 21 juillet 2000,

' de constater qu'il a été victime d'un harcèlement moral et d'une discrimination fondée sur son état de santé et en conséquence, de constater que son licenciement est nul et de condamner l'employeur à lui verser des dommages intérêts .

Par jugement du 24 avril 2007 le conseil de prud'hommes a notamment,

' fixé le classement de Monsieur [P] [N], à compter du 1er juillet 1997 au niveau EC3 ( anciennement M4),

- débouté Monsieur [P] [N] de sa demande au titre des conséquences de faits de harcèlement qu'il développait et dont il n'établissait pas la matérialité,,

- dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur [P] [N] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse en l'absence de justification par l'employeur de toute tentative en matière de reclassement.

Monsieur [P] [N] a interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 23 septembre 2009 la cour d'appel de PARIS:

-s'agissant de la réforme et du licenciement sans cause réelle et sérieuse du licenciement, a infirmé le jugement du conseil de prud'hommes du 24 avril 2007 en jugeant que celle-ci est régulière et que Monsieur [P] [N] doit être débouté de sa demande de réintégration,

-s'agissant de la discrimination quant au déroulement de carrière, a infirmé le jugement du conseil de prud'hommes du 24 avril 2007 en déboutant le Monsieur [P] [N] de sa demande concernant la reconstitution de carrière et de rappel de rémunération et de pension,

-s'agissant du harcèlement moral a confirmé le jugement du conseil de prudhomme en déboutant Monsieur [P] [N] de ses demandes à ce titre.

Monsieur [P] [N] a formé un pourvoi dont le premier moyen, portant sur la contestation de Monsieur [P] [N] de son débouté de ses demandes de nullité de la réforme a été retenu par la cour de cassation en ces termes:

« vu les articles 97,98 et 99 du statut de la RATP, 30 et 40 de l'instruction de département numéro un du département protection, prestations de prévention sociale de la RATP de janvier 1992, jugeant que l'inaptitude du Monsieur [P] [N] à son emploi statutaire, préalable à une éventuelle déclaration d'inaptitude définitive à tout emploi prononcée par la commission médicale de la RATP, ne pouvait, hors le cas d'urgence, être constaté par le médecin du travail à lui seul dans cet examen médical de l'intéressée, a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a débouté Monsieur [P] [N] de ses demandes de nullité de sa réforme, de réintégration dans les effectifs de la RATP, de paiement de son salaire d'activité sous déduction des prestations reçues et de dommages intérêts pour licenciement nul, l'arrêt rendu le 23 septembre 2009 entre les parties par la cour d'appel de Paris « »,

et a remis en conséquence sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt .

Par arrêt du 6 novembre 2012, la cour d'appel de Paris, statuant dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation,

'a infirmé le jugement du conseil de prudhommes du 24 avril 2007 et statuant à nouveau,

a dit que la décision de réforme de Monsieur [P] [N] prononcée par la RATP à effet du 21 juillet 2000 est nulle et sans effet,

en conséquence a :

-ordonné la réintégration de Monsieur [P] [N] dans les effectifs de la RATP à compter du 21 juillet 2000

-condamné la RATP à payer Monsieur [P] [N] la somme de 447 307 euros au titre des salaires arrêtés au 1er octobre 2012,

-condamné la RATP à verser à Monsieur [P] [N] la somme de 25 000 euros en réparation de son préjudice moral,

-ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

-reçu la caisse de retraite de personnel de la RATP en son intervention volontaire,

-condamné Monsieur [P] [N] à lui rembourser dans le mois de l'encaissement de la somme de 447 307 euros versée par la RATP, la somme de 122 069,54 euros correspondant au montant des prestations qu'elle lui a versées, arrêtées au 30 septembre 2012, outre les arrérages échus depuis cette date jusqu'au jour du paiement,

- rejeté toute autre demande des parties,

- condamné la RATP aux entiers dépens et à payer Monsieur [P] [N] la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 14 mars 2013, Monsieur [P] [N] a saisi la cour d'une requête en interprétation de l'arrêt du 6 novembre 2012. Les parties ont été régulièrement convoquées pour plaider et, par arrêt du 10 septembre 2013 la cour a rejeté toutes les demandes du Monsieur [P] [N].

Monsieur [P] [N] a été réintégré au sein de la RATP le 3 décembre 2012.

Le 22 avril 2013, Monsieur [P] [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une part d'une contestation portant sur les conditions dans lesquelles s'était opérée sa réintégration en reprochant à l'employeur une rétrogradation par la modification de son contrat de travail justifiant la reconstitution de sa carrière et son reclassement en cadre confirmé, et d'autre part de demandes liées à la constatation d'agissements répétés de harcèlement moral.

Par jugement du 13 octobre 2014, le conseil de prud'hommes a, sur le fondement de l'article R 1452 ' 6 du code du travail, déclaré Monsieur [P] [N] irrecevable au titre de la reconstitution de sa carrière en estimant que celle-ci avait été définitivement jugée par l'arrêt du 6 novembre 2012 et mal fondée en sa demande en réparation du préjudice résultant d'agissements de harcèlement moral postérieurs à sa réintégration.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 5 décembre 2017, au cours de laquelle les parties ont régulièrement développées leurs conclusions déposées et visées par le greffier auxquelles il est fait expressément référence pour un plus ample exposé des moyens prétentions des parties.

Monsieur [P] [N] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu par le conseil

de prud'hommes le 13 octobre 2014 en toutes ses dispositions et :

' de dire qu'il a fait l'objet d'une différence de traitement injustifiée dans son déroulement de carrière, que la RATP aurait dû procéder à sa réintégration en le repositionnant au niveau « cadre confirmé 2+ 40 (coefficient 760,6 ou « maîtrise expérimentée+ 100 » coefficient 762,4, avec effet rétroactif au 1er mars 2015 et condamner la RATP à lui verser la somme de 34 985,50 euros à titre de rappel de salaire sur la période du 1er octobre 2012 au 1er mars 2015 et d'ordonner à la caisse de retraite du personnel de la RATP de lui verser une pension de retraite sur la base du niveau « cadre confirmé 2+ 40 (coefficient 760,6 ou « maîtrise expérimentée+ 100 » coefficient 762,4, avec effet rétroactif au 1er mars 2015,

' de dire qu'il a été victime de harcèlement moral et en conséquence,

* de condamner la RATP à lui verser la somme de 60 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de celui-ci,

*de dire que son départ à la retraite s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de la RATP et donc s'analyse en un licenciement nul ou, subsidiairement, en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence de condamner la RATP à lui payer les sommes de 46 994,24 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 9 922,54 4 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 982,25 euros à titre de congés payés sur préavis, et un montant de 93 023,81 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, subsidiairement si la cour ne faisait pas droit à la demande de repositionnement de condamner la RATP à lui payer la somme de 33 686,95 euros à te titre d'indemnité légale de licenciement, de 7032 32 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

de 703,03 euros à titre de congés payés sur préavis, et de 65 909,25 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ;

' de condamner la RATP dans tous les cas à lui payer les sommes suivantes :

*1 500 euros, ou subsidiairement 545 euros, à titre de rappel de la prime de résultat 2012,

*1 788 euros au titre de la prime de responsabilité de l'année 2012,

*4 961,27 euros ou subsidiairement, 3304,02 euros au titre de la prime de responsabilité de l'année 2012,

*9 922,54 euros ou, subsidiairement, 6608,0 4 euros, au titre du crédit de congés annuels des RTT dont il a été privé pour l'année 2012,

' d'ordonner à la RATP de lui communiquer des bulletins de paies mensuelles au titre de la période du 21 juillet 2000 30 septembre 2012, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d'un délai de 15 jours suivant notification de la décision à intervenir,

' de condamner la RATP à lui verser des intérêts légaux en application de l'arrêt du 6 novembre 2012 selon décompte arrêté à la date de la décision à intervenir et de dire que les condamnations seront assorties de l'intérêt légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes en date du 22 avril 2013,

' de condamner la RATP à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens.

En réponse la RATP demande à la cour de constater :

-qu'elle n'est pas compétente pour statuer sur une éventuelle difficulté tenant à l'exécution de l'arrêt rendu le 6 novembre 2012 (sur le calcul des intérêts légaux), cette compétence ne pouvant qu'échoir au juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris,

-que les demandes se rapportant à des faits antérieurs à l'arrêt de la cour d'appel de céans du 6 novembre 2012, sont irrecevables comme portante atteinte au principe de l'autorité de la chose jugée et au principe de l'unicité de l'instance et sont en tout état de cause mal fondée s'agissant notamment des réclamations tendant à voir dire qu'il a fait l'objet d'une différence de traitement injustifiée dans son déroulement de carrière et que la RATP aurait dû procéder à sa réintégration en le positionnant « cadre confirmé 2+ 40 (coefficient 760,6 ou « maîtrise expérimentée+ 100 » coefficient 762,4, avec effet rétroactif au 1er mars 2015, partant des demandes visant à voir ordonner à la caisse de retraite de lui verser une pension de retraite sur cette base ainsi qu'une prime de résultat, une prime de responsabilité, une prime de 13e mois, un rappel de congés payés et deux jours de RTT au titre de l'année 2012,

' de constater que depuis sa réintégration, Monsieur [P] [N] n'a été victime d'aucune discrimination ni d'aucun acte de harcèlement et de le débouter de toutes demandes afférentes à ces griefs en particulier de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice moral, de sa demande visant à voir requalifier son départ en retraite en un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse et par incidence de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture,

' en tout état de cause de dire et juger mal fondées les demandes de Monsieur [P] [N] relatives à des primes de résultats de responsabilité de 13e mois des rappels de congés payés de RTT, à l'établissement de bulletins de paies mensuels pour la période allant du 20 juillet 2000 au 30 septembre 2012 et au paiement d'intérêts légaux en application de l'arrêt du 6 novembre 2012.

Elle réclame par ailleurs la condamnation du Monsieur [P] [N] à lui payer une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de le faire supporter la charge des dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande de repositionnement au moment de la réintégration de Monsieur [P] [N], et ses demandes subséquentes.

Monsieur [P] [N] a été réintégré dans les effectifs de la RATP le 3 décembre 2012 en exécution d'un arrêt de la cour d'appel de PARIS du 6 novembre 2012.

Il développe qu'il a fait l'objet d'une différence de traitement injustifiée dans son déroulement de carrière, que la RATP aurait dû procéder à sa réintégration en le repositionnement au niveau « cadre confirmé 2+ 40 (coefficient 760,6 ou « maîtrise expérimentée+ 100 » coefficient 762,4, avec effet rétroactif au 1er mars 2015.

Mais Monsieur [P] [N] a saisi le 31 mars 2000 le conseil de prud'hommes de Paris de demandes visant à voir constater qu'il a été victime d'une discrimination illicite dans le déroulement de sa carrière et condamner la RATP à la reconstituer, en expliquant qu'il n'a obtenu le classement en EC3 que beaucoup trop tardivement, en 2 000 avec un effet rétroactif en 1999 alors que promu M3 en 1989, il aurait dû être promu au niveau supérieur M4,EC3 de la nouvelle classification, dans un délai de 4 à 8 ans, expirant donc en 1997, demandes sur lesquelles, par jugement du 24 avril 2007, le conseil de prud'hommes a statué en fixant son classement à EC3 ( anciennement M4) à compter du 1er juillet 1997. Ce jugement développait que l'employeur, qui objectait qu'il pouvait statutairement déborder de la fourchette en cas de mauvaise appréciation professionnelle et produisant à ce titre plusieurs attestations d'anciens supérieurs hiérarchiques faisant état des insuffisances de Monsieur [P] [N], n'établissait, à la date concernée, 1997, l'existence d'aucun entretien annuel d'évaluation, d'aucune sanction disciplinaire et d'aucune remarque négative d'un supérieur hiérarchique qui puisse être opposable à Monsieur [P] [N] et aucun élément de nature à justifier qu'il puisse être dérogé à la branche supérieure de la fourchette, dans un délai de 8 ans pour l'avancement.

Monsieur [P] [N] a interjeté appel de ce jugement en demandant notamment à la cour d'appel de PARIS de voir constater la discrimination dont il a fait l'objet du fait de son origine et de son état de santé, et d'ordonner sa reconstitution de carrière au niveau EC 10 échelon d'ancienneté 18 correspondant à 25 ans d'ancienneté en 2007, subsidiairement EC8 conformément à celles de ses collègues exerçant le même emploi et entrés le même mois et au même niveau et d'ordonner sa réintégration dans les effectifs à ce niveau avec toutes les conséquences de droit.

Par arrêt du 23 septembre 2009 la cour d'appel de PARIS s'agissant de la discrimination quant au déroulement de carrière, a infirmé le jugement du conseil de prud'hommes du 24 avril 2007en déboutant Monsieur [P] [N] de sa demande concernant la reconstitution de carrière et de rappel de rémunération et de pension, en motivant:

« que Monsieur [P] [N] a été engagé en 1982 au niveau M1 position 3 échelon 4, a été commissionné le 1er octobre 1983 au même niveau, qu'en 1984 il a été nommé à l'échelle M2P1 échelon 5, qu'il a été proposé au tableau d'avancement en 1987, 1988 et 1989, que la nomination au niveau M3 dès 1988 était subordonnée à l'existence de postes disponibles, que le 1er février 1989 il a été nommé à l'échelle M3 P1 échelon 7, devenu niveau EC2 au 1er juillet 1997 en application de l'accord-cadre du 7 juillet 1997 mettant en place une nouvelle grille d'encadrement, qu'en mars 2000, Monsieur [P] [N] a été, rétroactivement au 1er janvier 1999, nommé au niveau EC3 (équivalent à l'ancienne échelle M4) la condition de postes disponibles n'étant plus exigée,

* que le passage de EC1 à EC4 était au minimum de 4,5 ans et en moyenne de 10 ans, que si Monsieur [P] [N] produit l'entretien d'évaluation de1993 et une lettre de Monsieur [I] du 4 avril 1995 qui démontrent l'absence de respect des dispositions de l'avenant cadre du 7 juillet 1997 qui prévoit un entretien d'évaluation annuel, la RATP produit des attestations circonstanciées dont il ressort que Monsieur [P] [N] est un agent doté d'une personnalité complexe, susceptible, difficile et perturbateur disposant d'une capacité de gestion et d'adaptation réduite, qui a été souvent en conflit avec ses collègues et supérieurs hiérarchiques et que ce comportement agressif est de nature à perturber sérieusement la bonne marche d'une équipe, que par ailleurs les tableaux comparatifs produit avec la carrière d'autres salariés produits ne sont pas comparables,

*que dès lors la discrimination prétendue concernant tant son déroulement de carrière que la rémunération de Monsieur [P] [N] n'était pas démontrée »

Par arrêt du 15 mars 2011, la cour de cassation sur pourvoi de Monsieur [P] [N], dont le second moyen portait sur la contestation du débouté de ses demandes au titre de la disparité de traitement et discrimination dans l'évolution de sa carrière, a jugé que ce moyen de discrimination liée à son origine et à son état de santé était inopérant en ce que Monsieur [P] [N] invoquait une violation des dispositions légales relatives à l'égalité de rémunération entre les hommes et des femmes alors qu'il avait fondé ses demandes en appel sur des faits de discrimination liée à son origine et son état de santé, et en ce que, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de faits de preuve qui lui était soumis, et sans inverser la charge de la preuve, la cour d'appel avait retenu que les retards dans des promotions invoqués par l'intéressé étaient justifiés, soit par l'absence de postes disponibles en 1988, soit, pour la période postérieure, par d'importantes difficultés professionnelles et relationnelles et a ainsi légalement justifié sa décision.

Par arrêt du 6 novembre 2012 de la cour d'appel de Paris , statuant dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, a ordonné la réintégration de Monsieur [P] [N] dans les effectifs de la RATP à compter du 21 juillet 2000, condamné la RATP à lui payer la somme de 447 307 euros au titre des salaires arrêtés au 1er octobre 2012 et de 25 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Le 14 mars 2013, Monsieur [P] [N] a saisi la cour d'une requête en interprétation de l'arrêt en demandant à la cour de confirmer qu'elle n'a pas procédé à une reconstitution de carrière de Monsieur [P] [N].

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience pour voir statuer sur cette requête en interprétation de l'arrêt rendu le 6 novembre 2012,et par arrêt du 10 septembre 2013, la cour d'appel a rejeté toutes les demandes du Monsieur [P] [N] en motivant:

-qu'il n'y avait pas lieu de faire figurer dans le dispositif la disposition « confirme qu'elle n'a pas procédé à une reconstitution de carrière de Monsieur [P] [N] » dans la mesure où elle précise suffisamment clairement dans son arrêt, et sans qu'il y ait lieu à interprétation, que la RATP devra payer à Monsieur [P] [N] le montant des salaires et avantages auxquelles il aurait eu droit s'il n'avait pas été mis à la retraite d'office par l'effet de sa réforme, jusqu'au jour de sa réintégration en tenant compte de l'ancienneté et du dernier coefficient acquis avant le prononcé de la réforme figurant sur le dernier bulletin de salaire (457,20 échelon 12).

' qu'il n'y avait pas davantage lieu de modifier le paragraphe dans laquelle la RATP a été condamnée à payer Monsieur [P] [N] la somme de 447 307 euros au titre des salaires arrêtés au 1er octobre 2012, dans la mesure où cette somme retenue par la cour est explicitée dans le dernier paragraphe de ces motifs où elle indique « le montant des salaires et avantages du à Monsieur [P] [N], considération prise de la grille de passage d'échelon automatique d'ancienneté, de l'évolution des coefficients et de la valeur du point au 1er mars 2012 (6,14 400 euros) et du coefficient atteint au 1er octobre 2009 soit 504,2, la grille de coefficient n'ayant pas été modifiée depuis 2009 (BarèmeB 225) c'est la somme de 447 307 euros qui est due à Monsieur [P] [N] au 1er octobre 2012,

' que la cour a écarté le coefficient revendiqué par Monsieur [P] [N], pour retenir le coefficient 457,20 échelon 12 acquis par Monsieur [P] [N] au 20 juillet 2000 comme point de départ du calcul des passages d'échelon et d'évolution des coefficients ; qu'ainsi la somme de 447 307 euros correspond nécessairement aux salaires d'activité comme demandés par le Monsieur [P] [N] dans son décompte ».

Il est ainsi démontré que par arrêt du 23 septembre 2009 la cour d'appel a définitivement jugé que Monsieur [P] [N] n'avait pas subi de discrimination dans l'évolution de sa carrière et que par arrêt du 6 novembre 2012, complèté par l'arrêt d'interprétation du 10 septembre 2013, la cour d'appel de renvoi a définitivement jugé que sa réintégration devait s'effectuer au coefficient 504,2 et au niveau maîtrise confirmé 1 .

Or en demandant à la cour de constater que le positionnement à ce niveau méconnaît l'évolution dont il aurait dû bénéficier au regard de son ancienneté et des modalités de déroulement de carrière prévues par les textes en vigueur au sein de la RATP et de l'évolution professionnelle normale de ses collègues placés dans une situation comparable sans que la différence ne soit justifier par des éléments objectifs, et réclamant un repositionnement au noveau Cadre Confirmé 2 soit un autre positionnement que celui définitivement fixé, la cour constatant l'identité des parties, de la chose demandée sur la même cause, constate que la demande de Monsieur [P] [N] se heurte à l'autorité de la chose jugée.

En conséquence Monsieur [P] [N] est irrecevable en ses demandes visant à voir condamner la RATP à lui verser la somme de 34 985,50 euros à titre de rappel de salaire sur la période du 1er octobre 2012 au 1er mars 2015 et à ordonner à la caisse de retraite du personnel de la RATP de lui verser une pension de retraite sur la base du niveau « cadre confirmé 2+ 40 (coefficient 760,6 ou « maîtrise expérimentée+ 100 » coefficient 762,4, avec effet rétroactif au 1er mars 2015 et la décision du conseil de prud'hommes est confirmée sur ce point.

Sur le harcèlement moral.

L'article 1152-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, l'article 1152 ' 4 posant que lorsque survient un litige le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence de harcèlement, et qu'au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Monsieur [P] [N] soutient que les modalités selon lesquelles la RATP a procédé à sa réintégration juridique, de même que les conditions ayant encadré sa réintégration effective, après plus de 12 années de procédure, sont de nature à caractériser une situation de harcèlement moral.

Mais s'agissant des conditions ayant encadré la réintégration juridique et constatant que Monsieur [P] [N] reproche à l'employeur son repositionnement au niveau maîtrise confirmé 1 alors qu'il aurait pu prétendre à un repositionnement au niveau cadre confirmé 2 et qu'il a été démontré que par des décisions particulièrement motivées, il a été définitivement jugé que Monsieur [P] [N] ne pouvait prétendre à ce repositionnement, la cour en déduit l'absence d'agissements de harcèlement moral à ce titre.

S'agissant des conditions matérielles dans lesquelles la RATP a procédé à la réintégration effective de Monsieur [P] [N], celui-ci reproche à la RATP :

-de ne rien avoir préparé pour l'accueillir au sein du service lorsqu'il s'est présenté en vue auprès du responsable des ressources humaines le 3 décembre 2012 et en particulier de l'avoir affecté dans un bureau inadapté au travail, destiné au tri du courrier, isolé de ses collègues, et dépourvu de matériel lui permettant d'exercer ses fonctions : aucun ordinateur, aucun mot de passe, aucun téléphone à sa disposition ce dont attestent plusieurs collègues dont Monsieur [P] délégué syndical, Monsieur [C], délégué du personnel qui l'accompagnaient lors de son entretien de réintégration le 3 décembre 2012 ainsi que le docteur [O], médecin du travail du service médical travail de la RATP,

' d'avoir persisté dans sa mise au placard jusqu'à son arrêt maladie à compter du 21 janvier 2013, malgré les alertes émises et qu'ainsi le 8 janvier 2013 il a été contraint de s'interposer à une tentative de saisie de son bureau, que ce n'est que le 8 janvier 2013, soit 6 semaines après sa réintégration effective qu'il a été enregistré dans l'annuaire téléphonique de l'entreprise et obtenu une ligne téléphonique, que le 14 janvier 2013 qu'il a pu obtenir un écran d'ordinateur lui permettant de travailler normalement comme ses collègues et les autres agents, que le 17 janvier qu'il a été mis en possession de sa carte de service, laquelle s'obtient normalement en 3 jours maximum et que par 2 fois, aux mois de mars et septembre 2013 ses titres de transport et la carte d'accès au site RATP ont été désactivés,

' qu'il a été confronté dès le premier jour de sa réintégration à une attitude de défiance de la part de sa hiérarchie en particulier de Madame [Q], DR, et de Monsieur [U], RRH de l'atelier central de Chaminonnet ce dont attestent Madame [M], secrétaire général du syndicat CGT et Monsieur [C], délégué du personnel, qui l'ont tous 2 accompagnés lors de son entretien du 3 décembre 2012,

-que de manière humiliante il été contraint de récupérer le chèque de règlement de ses salaires des mois d'octobre et novembre 2012 dans le bureau du responsable des ressources humaines le 7 janvier 2013, alors que comme tout salarié de l'entreprise il avait jusqu'alors reçu ses traitements par simple versement sur son compte bancaire,

- qu'il a été victime de brimades et mesures vexatoire et notamment s'est heurté au refus de sa hiérarchie de lui attribuer la médaille des transports au titre de ses 25 ans de service avant le 31 janvier 2014, de lui attribuer des jours de congés auxquels il pouvait prétendre au titre de l'année 2012, sauf pour le seul mois de décembre 2012, au refus de la RATP de lui délivrer des bulletins de salaire rectificatifs correspondant à la période de sa mise à la réforme illégale du 21 juillet 2000 au 1er octobre 2012, l'empêchant de vérifier la loyauté de la régularisation de sa situation salariale, au refus de la RATP concernant sa demande de passage à temps partiel malgré l'avis favorable du médecin du travail, à l'absence de prise en compte par les organismes de la RATP depuis son embauche en 1982 de sa nationalité française,

' qu'antérieurement à sa mise à la réforme illicite, il avait déjà été victime d'un ensemble de brigades et de mesures discriminatoires de sa hiérarchie en raison de son origine italienne, étant précisé que la portée des attestations qu'il produit sur ce point, n'a pas pu être appréciée par la cour dans son arrêt de la cour d'appel du 23 septembre 2009 puisque elles ont été établies postérieurement à celui-ci,

' que la RATP a procédé à la modification unilatérale de son contrat de travail puisqu'il s'est vu retirer tout commandement sans la moindre explication, la simple comparaison entre la fiche de poste correspondant aux fonctions exercées avant sa mise à la retraite illégale du 21 juillet 2000, et celle correspondant à l'emploi sur lequel il a été affecté lors de sa réintégration, démontrant que la part attribuée à son autonomie et initiative personnelle a été particulièrement amoindrie et qu'il a été déclassé au statut de sédentaire alors qu'il bénéficiait du statut d'actif depuis son entrée au sein de la RATP en 1982; qu'il a été le seul agent d'encadrement à ne pas avoir le statut d'actif, modification qui a fait l'objet de questions posées par les délégués du personnel le 16 mai 2013, un courrier du 1er décembre 2013 et un autre du 21 janvier 2014 et qui a finalement été réglé, par la récupération de son statut d'actif de manière officielle, 19 mois après sa demande initiale,

' que la RATP l'a inexorablement poussé à solliciter son départ à la retraite ce dont témoignent les réponses qu'elle lui a adressées comme celles faites à l'inspecteur du travail ou aux syndicats concernant sa situation,

-que le 11 janvier 2013 la CGT a lancé une alarme sociale concernant sa réintégration « nous pouvons témoigner du manque de considération qu'il y a eue à son égard lors de son accueil, ce qui frôle l'intolérable tant pour l'homme que pour le respect des décisions de justice ») et en l'absence de réponse, à une seconde alarme le 17 janvier 2013 et que plusieurs représentants et institutions représentatives du personnel ont été saisies des conditions dans lesquelles il a été procédé à à sa réintégration tels que le comité départemental économique et professionnel de l'unité matériel roulant bus, le CHSCT, les délégués du personnel, le président du conseil de prévoyance, l'assistante sociale de la RATP et le défenseur des droits,

' que dans ce contexte son état de santé s'est particulièrement détérioré de sorte qu'il a été place en arrêts de maladie successifs à compter du 21 janvier 2013 en lien direct avec cette situation de harcèlement tel que décrit par le docteur [O], le 1er septembre 2013 médecin du travail de service médical de la RATP, le docteur [K] psychiatre, le 9 septembre 2013, le docteur [W] médecin traitant agréé de la RATP ou le docteur [J].

Il convient en premier lieu d'observer que s'agissant de la dégradation de l'état de santé , Monsieur [P] [N] s'en prévalait déjà lors de la saisine du conseil de prud'hommes le 30 mars 2000 pour voir constater la discrimination dont il faisait l'objet et qu'à ce titre si le conseil constatait l'existence d'un état de santé effectivement très perturbé et d'ailleurs non contesté par la RATP, il excluait un rapport de celui-ci avec l'existence d'un harcèlement moral; que dans son arrêt du 23 septembre 2009, la cour a confirmé cette analyse en jugeant définitivement l'absence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral.

Or les certificats médicaux produits qui constatent l'état de santé dégradé de Monsieur [P] [N], ne développent pas et n'apprécient pas avec tout au moins un minimum de précaution, un lien entre l'état de santé dégradé qu'il constate et l'existence d'une aggravation directement liée à des agissements postérieurs à sa réintégration le 3 décembre 2013 dont par exemple le docteur [J] qui prend partie sans réserve pour son patient sans connaissance des éléments objectifs de sa réintégration en affirmant qu'il se trouve « ....face à une la RATP qui ne cesse d'introduire des éléments pathogènes, y compris après son retour dans l'entreprise.. »).

Il convient de souligner en second lieu que Monsieur [P] [N] qui a été définitivement debouté de sa demande de harcèlement moral par l'arrêt de la cour du 23 septembre 2009 et ne peut donc que développer des faits nouveaux se prévaut dès lors à tort de la gravité des faits tenant à la continuité d'un comportement fautif de l'employeur en développant de nombreux agissements similaires à ceux qu'il invoquait précédemment et qui ont tous été écartés et tenant déjà notamment au fait qu'il avait été amené à travailler dans un bureau trop petit et particulièrement inadapté en produisant des photos et des attestations, qu'il avait été victime de brimades de sa hiérarchie, d'injures et de réflexions déplacées de son supérieur hiérarchique, de déplacement dans d'autres services, d'agressions verbales, de l'absence de réponse à ses demandes personnelles, d'une entreprise systématique de déstabilisation et d'exclusion, de discrimination relative à ces conditions de travail notamment en ce qui concerne ces autorisations de congé ou d'absence ainsi que la communication des divers documents..; que la gravité de ces agissements, s'ils sont démontrés, ne peut dès lors être appréciée qu'au regard du comportement de l'employeur à compter de l'arrêt de la cour ordonnant la réintégration du salarié.

A ce titre il ne peut qu'être constaté:

- la rapidité avec laquelle la RATP a exécuté l'arrêt de la cour d'appel, exclusive d'une volonté d'écarter Monsieur [P] [N] de l'entreprise ou de le pousser à la retraite, puisque la notification de l'arrêt de la cour d'appel du 6 novembre 2012 ordonnant la réintégration est intervenue le 16 novembre et que dès le 28 novembre 2012, le responsable des ressources humaines des ateliers de maintenance du département matériel roulant bus, MRB, a informé Monsieur [P] [N] de l'organisation d'une visite médicale de reprise le lundi 3 décembre, suivie d'un entretien afin de lui présenter les modalités de la reprise;

-que, alors même que la mise à la retraite de Monsieur [P] [N] ne relevait que d'une mauvaise appréciation des pouvoirs de la commission d'aptitude, rectifiée par la cour de cassation qui a été réparée par le versement de plus de 400 000 euros au titre des salaires courant pendant la période d'exclusion, Monsieur [P] [N] qui reproche à la la RATP une attitude de défiance en particulier de Madame [Q], DR et de Monsieur [U], RRH de l'atelier central de Chaminonnet, sans viser aucun fait particulier permettant de soutenir ces allégations à cette date, a en revanche immédiatement démontré une réelle attitude de méfiance en choisissant de se présenter, le premier jour de réintégration avec Madame [M], secrétaire général du syndicat CGT et Monsieur [C], délégué du personnel alors même qu'il ne s'agissait pas d'un entretien disciplinaire mais d'un entretien d'intégration, en pressant ensuite l'entreprise de multiples interrogations répétitives et pour la plupart reposant sur des inquiétudes non fondées, pratiques qui avaient déjà été soulignées tant par le conseil de prud'hommes ayant eu à juger la situation antérieure et qui avait relevé la particulière qualité d'écoute, de patience et de disponibilité dont il fallait faire preuve pour y répondre, que la cour d'appel dans son arrêt qui avait confirmé ce jugement en soulignant la personalité complexe et susceptible de Monsieur [P] [N] et ses difficultés d'adaptation ;

-que alors même que ne peut être contestée la difficulté pour l'employeur à mettre en place aussi rapidement les condtions de sa ré intégration au regard d'une absence de plus de 12 ans et de l'évolution normale de ses besoins, il lui a néanmoins immédiatement attribué un bureau et un poste d'animateur qualité environnement même si le 8 janvier 2013 il a été contraint de s'interposer pour que des collègues non informés de sa présence ne prennent pas le matériel qui y était entreposé, et même si la situation n'était donc pas immédiatement optimale le jour de sa réintégration, il l'a progressivement, courant janvier et donc rapidement, pourvu d'un travail, d'un ordinateur, d'un mot de passe, d une ligne téléphonique, de sa carte de service et de fonctions dont les éléments produits ne démontrent pas une rétrogradation.
Aussi aucun agissement de harcèlement moral résultant des conditions de réintégration matérielles de Monsieur [P] [N] n'est démontré.

La cour ne trouve aucun caractère humiliant au fait de récupérer le chèque de règlement de ses salaires des mois d'octobre novembre 2012 dans le bureau du responsable des ressources humaines le 7 janvier 2013 et les quelques incidents isolés, mineurs et sans gravité démontrent des difficultés comptables et administratives qui sans la compromettre ont retardé parfois l'examen et le traitement de situations dont celle liée à l'attribution de la médaille des transports au titre de ses 25 ans de service, qui lui a bien été attribuée le 31 janvier 2014, ou liée au rétablissement de son statut d'actif, étant observé qu'il relevait avant son départ du tableau A, que son emploi après réintégration, avait évolué dans l'intervalle, depuis 2012, dans le tableau sédentaire et qu'en conséquence des vérifications étaient nécessaires.

Enfin si Monsieur [P] [N] repoche à la RATP de ne pas lui avoir donné les réponses à ses questions, la cour constate le contraire puisque dès le 11 décembre 2012, soit quelques jours après l'entretien de réintégration du 5 décembre, la RATP lui a adressé en courrier les réponses à toutes les interrogations qu'il avait formulées lors de son entretien de réintégration et tenant à son positionnement, à ses droits à congés pour l'année 2012 établis à compter du 1er décembre 2012, soit 2,16 CA et 1,34 RTT, à ses droits concernant la médaille du travail par GIS/PAD, au fait que le poste qu'il occupait au moment de la sortie des effectifs en juillet 2000, faisait partie de l'entité GPI, celle-ci ayant évolué en entité QIL en novembre 2014, que la partie environnement et qualité de l'entité QIL avait été rattachée à l'entité GLP des AC en septembre 2012 et que les postes avaient évolué vers un classement sédentaire au sein de la RATP de sorte que le poste sur lequel il avait été réintégré le classait sédentaire au regard du tableau des retraites, lui précisait encore que son responsable d'entité était en charge d'établir avec lui un plan individuel de formation lui permettant une prise de fonction optimum, ou concernant le paiement de ses indemnisations de 25 000 euros en réparation du préjudice moral et de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qu' un chèque bancaire de 27 000 euros serait établi à l'ordre de la caisse des règlements pécuniaires des avocats et transmis par voie d'avocat, qu'au titre des salaires et avantages arrêtés au 1er octobre 2012, allait lui être versée la somme de 447 307 euros conformément aux décomptes fournis par la RATP du salaire brut et avantages dus en cas de réintégration, sommes virées sur son compte et émission d'un bulletin de pet rectificatif et concluait son courrier « nous pouvons considérer que toutes les conditions sont réunies pour permettre un retour serein dans l'entreprise. Je souhaite que vous puissiez exercer à nouveau pleinement votre métier ».

Le 17 janvier 2012 le responsable des ressources humaines a répondu à ses interrogations restantes et a conclu, ainsi que l'estime la cour, qu'il a procédé à sa réintégration avec le plus grand sérieux et la plus grande promptitude même s'il a fallu résoudre le problème technique dans des délais extrêmement courts de sorte que les allégations du docteur [K] affirmant « qu'il a noté la présence d'un état de choc traumatique et l'absence de réponse demandée par le patient qui a été déclenché en arrêt de travail qui demande à être requalifié en accident du travail » qui ne sont supportées par aucun autre élément et dont les préconisations n'ont pas été suivies puisque la qualification d'accident du travail a été refusée à Monsieur [P] [N], ne sont qu'allégations, tout comme l'affirmation du docteur [T] qui prend partie sans réserve pour son patient sans connaissance des éléments objectifs de sa réintégration et développe que la RATP a usé de man'uvres « on ne peut plus classique pour déséquilibrer un cadre afin de le déstabiliser définitivement ..».

Ainsi la RATP a dans un délai raisonnable et de manière complète régulièrement répondu à ses nombreuses questions tout comme elle justifie avoir répondu aux autres interlocuteurs y compris dans le cadre de la procédure d'alarme sociale enclenchée par Monsieur [P] [N] et a de bonne foi mis en place sa réintégration.

Aussi les éléments visés par le Monsieur [P] [N] ne sont pas constitutifs, même pris ensemble d' agissements répétés susceptibles de caractériser l'existence d'un harcèlement moral.

En conséquence la cour déboute Monsieur [P] [N] de sa demande visant à voir constater l'existence d'un harcèlement moral et de sa demande subséquente en dommages et intérêts, confirmant sur ce point le conseil de prud'hommes de Paris, et ajoutant, le déboute de sa demande visant à voir constater que son départ à la retraite s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de la RATP ayant les effets d'un licenciement nul ouvrant droit à des indemnités de rupture.

Sur les demandes.

Sur la prime de résultat et la prime de responsabilité et le 13ème mois :

Monsieur [P] [N] demande à la cour de condamner la RATP à lui payer les sommes suivantes :

*1 500 euros, ou subsidiairement 545 euros, à titre de rappel de la prime de résultat 2012,

*1 788 euros au titre de la prime de responsabilité de l'année 2012,

Conformément aux dispositions de l'article R 1452 ' 6 ancien du code du travail, dans sa version applicable antérieurement au décret du 20 mai 2016, le principe de l'unicité de l'instance s'imposait aux instances prud'homales introduite avant le 1er août 2016.

Aux termes de ce principe toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties devaient, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, faire l'objet d'une seule instance de sorte que ce principe s'oppose à ce que toute prétention dont le fondement est né ou s'est révélé antérieurement à la clôture des débats devant le conseil de prud'hommes saisi d'une première demande dérivant du contrat de travail, soit formulée dans le cadre de seconde procédure.

Or le montant du 13e mois tel que prévue par l'instruction générale numéro 436M précitées, est proratisé en tenant compte de la présence à l'effectif de l'agent concerné, entre le 1er novembre de l'année N-1 et de l'année N.

Parailleurs la prime de résultat est versée l'année N, au titre des résultats de l'année N-1 en fonction de la réalisation d'objectifs fixés lors d'un entretien d'évaluation qui se tient au début de l'année et ce montant est versé aux agents d'encadrement selon les modalités prévues dans l'instruction générale numéro 436 M, conformément à la plate-forme d'accord-cadre relative au management de l'encadrement.

Considérant alors que devant la Cour d'appel de Paris de renvoi Monsieur [P] [N] a demandé de constater la nullité de la réforme prononcée à son encontre le 20 juillet 2000 à effet au 21 juillet 2000, d'ordonner en conséquence sa réintégration immédiate dans les effectifs de la RATP, de condamner cette dernière à lui payer le montant de son salaire d'activité à hauteur de 487 363,80 euros et de condamner la RATP à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral consécutif à la nullité de la réforme et que la cour d'appel dans son arrêt d'interprétation du 10 septembre 2013 de l'arrêt rendu par elle sur renvoi de cassation du 6 novembre 2012 lui a précisé à juste titre qu'il n'y avait pas lieu à interprétation sur la somme de 447 307 euros alloué pour savoir si elle devait être augmentée des primes ou des avantages, congés annuels, tant compensateur, que primes de gestion devenue 13e mois, RTT etc, du 21 juillet 2000 à la date de réintégration, pour composer le salaire d'activité, ou plein salaire, dans la mesure où notamment il a présenté devant la cour une demande uniquement en paiement de salaires d'activité de 487 363,80 euros fondée sur un coefficient 472,6 sans aucune demande de primes de quelque nature que ce soit, de 13e mois ou autres, il en ressort que Monsieur [P] [N] n'a saisi la cour dans sa demande antérieure, d'aucune demande de primes et autres.

Aussi dans la mesure où le versement des primes pour l'année 2012, supposait la fixation d'objectifs au cours de l'année 2011 et que le salarié ne pouvait ignorer lors de l'instance prud'homale ayant abouti à l'arrêt du 6 novembre 2012 que ceux -ci faisaient défaut il aurait dû, sauf à se voir opposer le principe de l'unicité de l'instance, formée devant la cour des demandes en paiement.

Il en résulte qu'en application du principe d'unicité de l'instance, il est irrecevable à présenter des demandes de paiement de primes et 13ème mois qu'il a omis de présenter à la cour dans le cadre de la précédente instance dont le fondement est né ou a été révélé antérieurement à la date où l'affaire a été plaidée devant la cour , soit le 2 octobre 2012.

Sur les congés payés et RTT.

Monsieur [P] [N] demande à la cour de condamner la RATP à lui payer les sommes de 9 922,54 euros ou, subsidiairement, 6 608,04 euros, au titre du crédit de congés annuels des RTT dont il a été privé pour l'année 2012 développant qu'il n'a obtenu que 1,34 jours de RTT et 2,16 jours de congés annuels, ce qui correspond au prorata de ses droits au titre du seul mois de décembre 2012.

Mais dans la mesure où les congés annuels sont attribués conformément aux dispositions du code du travail à raison de 2 jours et demi ouvrable par mois de travail effectif et que l'attribution d'un repos flottant dit RTT repose également sur le nombre de journées de travail effectif, que les articles 58 et 71 alinéa 3 du statut du personnel de la RATP relatifs à l'établissement des congés payés sont conformes à ces principes et considérant que le salarié n'ignorait pas au moment de la procédure antérieure que son absence de l'entreprise le privait de ses droits à ce titre, il en résulte qu'il aurait dû, en application du principe de l'unicité de l'instance précitée, saisir la cour de sa contestation quant à l'illicéité de ces principes et des dispositions conventionnelles, avec l'article 7 de la directive 2003/88/CE qu'il présente ce jour devant la cour.

A défaut il est irrecevable à former des prétentions à ce titre dans le cadre de la présente procédure.

Sur les bulletins de paie.

Monsieur [P] [N] réclame l'établissement des bulletins de paie pour la période du 20 juillet 2000 au 30 septembre 2012.

Mais le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son éviction et la réintégration incluant les salaires statutaires dans la limite du montant des salaires dont il a été privé, somme qui présente un caractère indemnitaire et dont le point de départ est fixé à la date de prononcé de la décision l'ayant ordonnée.

Aussi la réintégration n'ouvre pas droit à l'établissement de bulletins de paie divisant mensuellement le montant total de 447 307 euros alloué par la cour.

En conséquence la RATP est fondée à voir dire qu'est régulier l'établissement d'un seul bulletin reprenant l'intégralité du montant alloué et distinguant le montant des cotisations prélevées.

En conséquence Monsieur [P] [N] est débouté de sa demande à ce titre.

S'agissant des intérêts au taux légal.

Monsieur [P] [N] a saisi le cour d'appel de PARIS d'une requête en interprétation de son arrêt du 6 novembre 2012 en demandant qu'elle précise que les intérêts relatifs aux condamnations prononcées au titre des créances salariales produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation le 2 août 2000 et, s'agissant des condamnations relatives aux dommages et intérêts, qu'elles produisent intérêts à compter du prononcé de la décision

Dans son arrêt d'interprétation du 10 septembre 2013 de l'arrêt rendu sur renvoi de cassation par la cour d'appel de PARIS du 6 novembre 2012, la cour a dit qu'il n'y avait pas lieu à interprétation des modifications du dispositif concernant les intérêts dans la mesure où elle avait statué dans les limites les demandes présentées.

La même demande formée devant la cour ce jour se heurte dès lors à l'autorité de la chose jugée et est irrecevable.

Sur les frais irrépétibles.

Il n'est pas inéquitable de condamner Monsieur [P] [N], qui a fait preuve dune particulière témérité en saisissant la cour d'appel de demandes pour la plupart irrecevables et sur lesquelles il a été largement répondu dans le cadre de procédures antérieures longues et pour les autres totalement infondées, à payer à la RATP la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de le débouter de ses prétentions à ce titre.

Monsieur [P] [N], succombant est condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement du 13 octobre 2014 en ce qu'il déclare irrecevable Monsieur [P] [N] en sa demande de reconstitution de carrière et déboute Monsieur [P] [N] de sa demande en dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des conditions de sa réintégration et d'un harcèlement moral;

Ajoutant,

DÉCLARE Monsieur [P] [N] irrecevable dans ses demandes de versement de primes de résultats, d'intéressement, et de 13e mois pour l'année 2012, ainsi que de sa demande visant à compléter le point de départ des intérêts courant sur les créances fixées dans l'arrêt de la cour d'appel du 6 novembre 2012;

DÉBOUTE Monsieur [P] [N] de toutes demandes subséquentes à la constatation préalable de l'existence de harcèlement moral à compter de sa réintégration,

CONDAMNE Monsieur [P] [N] à payer à la RATP la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le déboute de ses prétentions à ce titre;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/01344
Date de la décision : 24/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/01344 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-24;15.01344 ?
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