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19/01/2018 | FRANCE | N°15/23767

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 19 janvier 2018, 15/23767


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRET DU 19 JANVIER 2018



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23767



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Novembre 2015 -Tribunal de Commerce de MARSEILLE - RG n° 2013F03186





APPELANTE



SARL GIBMEDIA

prise en la personne de ses représentants légaux



[Adresse

1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 480 793 058 (Toulouse)



représentée par Me Bruno MARGUET, avocat au barreau de PARIS, toque : J084







INTIMEE



SARL ULYSSE SERVICE,

prise en la personne de ses re...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 19 JANVIER 2018

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23767

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Novembre 2015 -Tribunal de Commerce de MARSEILLE - RG n° 2013F03186

APPELANTE

SARL GIBMEDIA

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 480 793 058 (Toulouse)

représentée par Me Bruno MARGUET, avocat au barreau de PARIS, toque : J084

INTIMEE

SARL ULYSSE SERVICE,

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 438 380 891 (Montpellier)

représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : C1050

assistée de Me Isabelle RAOUL-DUVAL, avocat plaidante du barreau de PARIS, toque : J123

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente de la chambreMme Françoise BEL, présidente de chambre

M. Gérard PICQUE, magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, des débats : Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, greffier présent lors du prononcé.

La société GIBMEDIA est une société prestataire de services techniques dans le domaine télématique, qui offre aux éditeurs de services sur internet, différentes solutions de monétisation de leurs contenus numériques.

La société ULYSSE SERVICE propose un service de consultation en ligne des dates de concours de la fonction publique. Elle appartient au « Groupe DISPOFI » composée de la société-mère DISPOFI devenue DISPOBIZ, de la société PUBLIDIA et de la société FRANCE EXAMEN qui exploitent également des sites Internet destinés à renseigner les internautes sur les déclarations d'impôts ou encore les résultats d'examens scolaires.

Depuis 2006, la société GIBMEDIA fournissait à la société ULYSSE SERVICE des prestations de centre serveur dédié avec la fourniture de services de réseau, logiciel de connexion au service Minitel sur les services de FRANCE TELECOM, location de lignes Transpac, assorties de maintenances techniques, de développement et d'hébergement du service.

La société ULYSSE SERVICE diffusait ses services par le biais du code Minitel attribué par FRANCE TELECOM, permettant aux utilisateurs d'accéder aux services à partir d'une connexion TELETEL et de payer selon la durée de connexion en étant facturé par le fournisseur d'accès internet, FRANCE TELECOM.

Des conventions tripartites étaient signées entre les sociétés GIBMEDIA, ULYSSE SERVICE et FRANCE TELECOM par lesquelles l'opérateur collectait les coûts de communication des utilisateurs et les reversait, après déduction du prix de son service, soit directement au fournisseur de service, soit au centre serveur désigné par le fournisseur, en étant que bénéficiaire.

Par courrier du 10 mars 2011, la société FRANCE TELECOM devenue société ORANGE indiquait à la société ULYSSE SERVICE que l'offre TELETEL ne sera plus commercialisée à compter du 1er mai 2011 pour être remplacée par une offre CONTACT +, que l'ensemble des contrats TELETEL prendront automatiquement fin le 30 septembre 2011, date de fermeture technique de l'offre X25 et que les contrats TELETEL en cours se poursuivent aux conditions habituelles jusqu'au 30 septembre 2011.

Par courrier du 13 mai 2011, la société ORANGE informait la société ULYSSE SERVICE que la date de fermeture définitive de 1'offre TELETEL était repoussée au 30 juin 2012.

Le 15 juin 2012, les sociétés GIBMEDIA et ULYSSE SERVICE et autres sociétés, ont signé un protocole d'accord dont l'objet est de permettre une coopération entre elles et mettre un terme à tous les litiges nés ou à naître relatifs à la fin des contrats TELETEL avec la société FRANCE TELECOM et l'offre CONTACT+ non encore opérationnelle.

Le 21 juin 2012, dans ce même cadre de substitution de l'offre TELETEL par l'offre CONTACT +, la société GIBMEDIA proposait à la société ULYSSE SERVICE de lui concéder un mandat exclusif de représentation pour une période irrévocable de six mois afin de : 'négocier avec FRANCE TELECOM les modalités financières et techniques inhérentes à l'adhésion de la nouvelle offre internet CONTACT+, l'informer sur l'évolution des négociations, effectuer les diligences nécessaires à l'ouverture des codes de service et s'assurer de leur mise en service effective.'

Le 7 février 2013, la société ULYSSE SERVICE décidait de mettre un terme à ce mandat avec effet à la date de réception de ce courrier faisant valoir que la durée irrévocable de six mois était expirée et que des arriérés importants de factures étaient dus par la société GIBMEDIA.

C'est dans ces conditions que par acte extrajudiciaire du 7 octobre 2013, la société GIBMEDIA a assigné la société ULYSSE SERVICE devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins de faire constater que la société ULYSSE SERVICE a rompu les relations commerciales entretenues entre elles de manière brutale et abusive et obtenir l'indemnisation du préjudice subi.

Par jugement du 3 novembre 2015 le tribunal de commerce de Marseille a déclaré la société GIBMEDIA irrecevable en ses demandes, a rejeté la demande en dommages et intérêts formée par la société ULYSSE SERVICE et a condamné la société GIBMEDIA à payer à la société ULYSSE SERVICE la somme de 2500 € au titre des frais irrépétibles occasionnés par la présente procédure et les dépens .

Le tribunal énonce en ses motifs que le protocole d'accord signé le 15 juin 2012 par les sociétés GIBMEDIA et ULYSSE SERVICE est conforme aux dispositions légales et très clair en son objet de «mettre un terme à toute action, née ou à naître, qu'elle le soit par la voie civile ou pénale, et qui serait fondée directement sur la cessation du service TELETEL par FRANCE TELECOM et/ou sur mise en place du service CONTACT +», et a valeur de transaction ; que la preuve d'un recours abusif de la société GIBMEDIA n'est pas rapporté.

La société GIBMEDIA a relevé appel par déclaration du 25 novembre 2015.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 14 septembre 2017, par la société GIBMEDIA aux fins de voir la Cour :

Vu l'article L.442-6-I-5 du Code de commerce ;

Vu les articles 1382 aujourd'hui 1240, 2048 et 2050 du Code civil ;

Vu le jugement rendu le 3 novembre 2015 par le Tribunal de commerce de PARIS ;

Sur la recevabilité de l'action de la société GIBMEDIA :

Dire et juger que l'objet du protocole signé entre la société GIBMEDIA et la société ULYSSE SERVICE le 15 juin 2012 était limité au différend né à cette date entre les parties

Dire et juger que, par définition, ce protocole ne saurait empêcher la société GIBMEDIA d'initier une procédure judiciaire fondée sur une rupture des relations commerciales intervenue le 7 février 2013 et donc postérieurement à sa signature ;

En conséquence :

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé la société GIBMEDIA irrecevable en son action et l'a condamnée au versement, au profit de la société ULYSSE SERVICE, d'une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Sur le bien-fondé de l'action de la société GIBMEDIA :

Dire et juger que la société ULYSSE SERVICE a rompu les relations commerciales entretenues avec la société GIBMEDIA de manière brutale et abusive ;

En conséquence :

Condamner la société ULYSSE SERVICE à payer à la société GIBMEDIA la somme de 44.168,95 € à titre de dommages et intérêts destinés à compenser la perte financière éprouvée du fait de la rupture brutale des relations commerciales ;

Condamner la société ULYSSE SERVICE à payer à la société GIBMEDIA la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts du fait des agissements déloyaux commis à l'occasion de la rupture brutale des relations commerciales ;

Débouter la société ULYSSE SERVICE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

La condamner à payer à la société GIBMEDIA la somme de 12.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître MARGUET, Avocat, en application de l'article 699 du même Code.

La GIBMEDIA fait valoir en substance :

-

que l'objet du protocole était de mettre fin au différend concernant l'exécution des conventions TELETEL et de poursuivre leur coopération avec le remplacement de l'offre TELETEL par CONTACT +, et n'interdisait pas d'engager une nouvelle procédure fondée sur des faits postérieurs ; que la société ULYSSE qui s'est seule engagée à renoncer à toute action a abandonné brutalement la coopération dix-huit mois après la signature du protocole;

- que les deux sociétés ont entretenu entre elles des relations commerciales depuis 2005, en vue de la monétisation du contenu des sites internet d'ULYSSE à compter de 2006 dans le cadre de l'exploitation de services TELETEL, ensuite remplacé par l'offre CONTACT + donnant lieu à la signature d'un mandat exclusif de représentation en date du 21 juin 2012 confirmant la pérennisation des relations commerciales entre les parties ; que ces relations ont permis à la société ULYSSE de percevoir des revenus substantiels,

- qu'elle a exécuté le mandat jusqu'à une rupture brutale des relations établies au début de l'année 2013 sans qu' aucun grief ne soit formulé à son encontre et que des prétendus montants impayés n'ont été réclamés que postérieurement à la lettre de résiliation ;

- elle a subi un préjudice du fait des agissements fautifs de la société ULYSSE SERVICE;

Vu les conclusions notifiées et déposées le 5 octobre 2017 par la société ULYSSE SERVICE tendant à voir la Cour :

Vu le jugement entrepris rendu par le Tribunal de commerce de Marseille en date du 3 novembre 2015,

Vu l'ordonnance du 25 juillet du Tribunal de Commerce de Toulouse,

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 10 mars 2017,

Vu les anciens articles 1134, 1156, 1184, 1382, 1991, 1993 et 2004 du Code Civil,

Vu les articles 2044 et 2052 du Code Civil

Vu l'article L.442 -6 du Code de commerce,

Vu les articles 32-1, 378 et 500 du Code de Procédure Civile,

Vu les pièces du dossier,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société GIBMEDIA irrecevable en ses demandes du fait de la signature le 15 juin 2012 du protocole entre les parties qui a valeur de transaction et ayant acquis l'autorité de la chose jugée,

En outre,

Débouter la société GIBMEDIA de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Et statuant à nouveau

Dire et juger que la société GIBMEDIA a abusé de son droit d'ester en justice compte tenu de ses propres défaillances à l'égard de la société DISPOBIZ,

En conséquence,

Condamner la société GIBMEDIA au paiement d'une somme de 10 000 € pour procédure abusive,

A titre subsidiaire,

Dire et juger que les relations commerciales établies entre la société ULYSSE SERVICE et la société GIBMEDIA pour la fourniture de prestations de centre serveur ont pris fin à la date de l'arrêt du TELETEL par FRANCE TELECOM, soit le 16 novembre 2012, hors toute responsabilité des parties,

Dire et juger que la relation instaurée concomitamment entre la société ULYSSE SERVICE et la société GIBMEDIA, par la signature le 21 juin 2012 d'un Mandat de Représentation à durée déterminée, était précaire et, en tout état de cause n'a pas donné lieu à facturation,

Dire et juger que ce mandat a expiré le 21 décembre 2012,

En conséquence,

Dire et juger qu'aucune indemnisation n'est due à la société GIBMEDIA compte tenu de l'arrivée du terme du mandat au 20 décembre 2012,

Débouter la société GIBMEDIA de l'ensemble de ses demandes pour rupture brutale de relations commerciales établies,

A titre infiniment subsidiaire,

Constater la poursuite des seules obligations de paiement de GIBMEDIA au bénéfice de la société ULYSSE SERVICES, portant sur les reversements perçus d'OBS avant la fermeture du service Télétel, au nom et pour le compte de la société ULYSSE SERVICES,

Constater que par le mandat du 21 juin 2012, la société GIBMEDIA s'est engagée à régler l'intégralité des sommes dues conjointement à la société ULYSSE SERVICE et aux trois autres sociétés mandantes et cocontractantes, affiliées à la société DISPOBIZ, à titre de condition résolutoire,

Constater qu'au 7 février 2013, la société GIBMEDIA avait failli à son obligation de verser à ULYSSE SERVICES les reversements collectées d'OBS en son nom et pour son compte de fin mai à fin septembre 2012, ainsi qu'attesté par ses propres Notes de Crédit établies au nom et pour le compte de la société ULYSSE SERVICES, valant factures (numéros n°12-05-018, NC-12-06-018, NC-12-07-015, NC-12-08-007 NC-12-09-014)

Constater qu'au 7 février 2013, la société GIBMEDIA avait reconnu, par l'établissement de Notes de Crédit en date de fin octobre et novembre 2012 au nom et pour le compte de la société ULYSSE SERVICES valant factures (numéros NC-12-10-012, NC-12-11-013), être redevable à l'égard de la société ULYSSE SERVICES des reversements perçus d'OBS collectés à la date d'établissement des dites factures,

Constater que le Tribunal de Commerce de Toulouse a, par décision du 25 juillet 2013, devenue définitive, confirmé l'existence d'une créance de la société ULYSSE pour la somme de 147.898,25 euros, exigible antérieurement dès les années 2010 à 2012,

Constater que le Tribunal de Commerce de Toulouse a, par décision du 10 septembre 2015 devenue définitive, confirmé l'existence d'une créance de la société DISPOBIZ à l'encontre de la société GIBMEDIA pour un montant de 301.273,26 euros, exigible dès les années 2010 à 2012,

Constater que la Cour d'appel de Paris a, par son arrêt du 10 mars 2017, considéré que ce défaut de paiement constituait un manquement grave de GIBMEDIA à ses obligations, justifiant la résiliation immédiate des relations commerciales entre les parties,

Constater qu'en outre, la société GIBMEDIA, n'a pas exécuté les missions confiées au titre du mandat du 21 juin 2012, par notamment la société ULYSSE SERVICES,

En conséquence,

Dire et juger que, la société ULYSSE SERVICE a valablement, par son courrier en date du 7 février 2013 adressé conjointement avec les autres mandants de son Groupe, dénoncé le mandat du 21 juin 2012 ou toute autre relation quelle qu'elle soit, avec effet immédiat, en raison de manquements graves de la société GIBMEDIA dans l'exécution de ses obligations contractuelles résultant du mandat,

Dire et juger que la résiliation du mandat ou toute autre relation quelle qu'elle soit, a pris effet le 7 février 2013, aux torts de la société GIBMEDIA,

Dire et juger qu'aucune indemnisation n'est due à la société GIBMEDIA compte tenu de la justification de la résiliation du mandat ou toute autre relation quelle qu'elle soit sans préavis,

En outre,

Dire et juger que la société GIBMEDIA ne démontre à l'encontre de la société ULYSSE SERVICES la commission d'aucun acte déloyal,

En conséquence,

Débouter la société GIBMEDIA de l'ensemble de ses demandes pour rupture brutale de relations commerciales établies,

A titre encore plus subsidiaire,

Dire et juger que la société GIBMEDIA est défaillante dans l'administration de la preuve de son préjudice et de sa quantification,

En conséquence,

Débouter de plus fort, la société GIBMEDIA de ses demandes de réparation à ces titres,

En tout état de cause,

Condamner la société GIBMEDIA à payer à la société ULYSSE SERVICE la somme de 12 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'intimée fait valoir essentiellement

- l'autorité de la chose jugée du protocole d'accord signé par les parties le 15 juin 2012 lequel s'applique aux deux parties ;

- l'absence de relations commerciales établies entre elle et la société GIBMEDIA ;

- la fin des relations à la date du 16 novembre 2012, date de la fin des services TELETEL; la nécessité de redéfinir leurs relations dans le cadre de l'offre CONTACT+, ou bien à la date d'expiration du mandat le 30 décembre 2012 d'une durée de déterminée de six mois et précaire permettant une révocation à tout moment, seules les obligations de reversements des sommes perçues de la société OBS par la société GIBMEDIA demeurant ;

- le défaut d'exécution du mandat et la faute de GIBMEDIA dans le défaut de reversements des sommes collectées ;

- l'absence de préjudice subi par GIBMEDIA.

MOTIFS

La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.

Les deux pièces communiquées le 5 décembre 2017 postérieurement à l'ordonnance de clôture du 12 octobre 2017 sont d'office déclarées irrecevables.

1. Sur la recevabilité :

Aux termes de l'article 1er du protocole signé le15 juin 2012, 'le présent protocole a pour objet de permettre une coopération efficace entre les parties et de mettre un terme à tous les litiges nés ou à naître entre les parties relatifs à la fin des contrats TELETEL avec France télécom et à l'offre CONTACT +'.

Pour l'application de ce protocole, l'article 2 relatif aux engagements des sociétés DISPOFI, PUBLIDIA, ULYSSE SERVICE, FRANCE EXAMEN (les sociétés A), dispose 'les sociétés A renoncent à toute action, née ou à naître ... fondée directement sur la cessation du service TELETEL et/ou sur la mise en place du service CONTACT +'.

L'article 3 relatif aux engagements des sociétés GIBMEDIA et BJ INVEST (les sociétés B) établit 'qu'en contrepartie des engagements pris par les société A, les sociétés B s' engagent à apporter tout leur concours dans le cadre des actions judiciaires initiées par les sociétés A contre France télécom.'

Il résulte de ces dispositions claires que la renonciation à l'introduction d'une action ne s'impose qu'aux sociétés A à l'encontre des sociétés B, que le protocole transactionnel n'est assorti d'aucune autorité de chose jugée sur le droit d'action de la société GIBMEDIA à l'encontre de la société ULYSSE SERVICE, de sorte que l'action introduite par assignation du 7 octobre 2013 est recevable.

Le jugement dont appel est infirmé en toutes ses dispositions.

2. Sur les relations commerciales établies :

L'appelant fait valoir que les relations commerciales se sont poursuivies au delà du changement de technologie, GIBMEDIA ayant continué à fournir une solution de payement à la durée aux éditeurs de sites dont ULYSSE.

L'intimée soutient que si des relations de fourniture de services ont duré pendant sept ans pour l'exploitation des services TELETEL, ces relations ont expiré le 16 novembre 2012, date de la fin des relations TELETEL de France télécom , que, parallèlement et de manière parfaitement distincte, de nouvelles relations ont été entamées dans la perspective d'une mise en place de la nouvelle offre Contact+.

Le point de départ des relations commerciales entre les parties n'est pas contesté et se situe à l'année 2005. L'appelante établit par la production des contrats TELETEL qu'à partir de 2006, la société ULYSSE a bien entrepris de confier à GIBMEDIA en sa qualité de centre serveur la monétisation du contenu de ses sites par la solution TELETEL.

L'objet du protocole est de ' permettre une coopération efficace entre les parties'.

Ainsi c'est pour la réalisation de cet objectif que les parties ont décidé de mettre un terme à tous les litiges, nés ou à naître relatifs à la fin des contratsTELETEL et à l'offre CONTACT+.

Cette dernière offre n'étant pas opérationnelle à la date de signature du protocole, les parties sont bien convenues de la poursuite de leurs relations au moyen de la nouvelle technologie offerte par France télécom.

L'appelante est dès lors fondée à soutenir la poursuite des relations entre les parties.

La signature non-contestée, du mandat exclusif donné à GIBMEDIA le 21 juin 2012 afin d'accomplir au nom et pour le compte d'ULYSSE auprès de l'opérateur historique les opérations techniques inhérentes à la migration de ses sites internet vers l'offre CONTACT+, est un élément probant de la manifestation non-équivoque de volonté d'ULYSSE de la poursuite des relations commerciales en recourant à la nouvelle offre.

En effet, le préambule énonce clairement et expressément, après rappel des relations entretenues par les parties dans le cadre d'une précédente offre de l'opérateur France Télécom dénommée TELETEL, de l'intervention du lancement d'une nouvelle offre CONTACT+ avant le 30 juin 2012 qui justifie le contrat de mandat, que les parties ont décidé d'un commun accord de poursuivre leur collaboration à l'occasion du lancement de l'offre CONTACT+ et de l'ouverture de nouveaux codes de services avant l'expiration de la solution TELETEL le 16 novembre 2012.

Ainsi conformément à la commune intention des parties manifestée par la signature tant du protocole que du mandat, la fin du service TELETEL n'entraîne pas la cessation des relations commerciales, les parties entendant poursuivre leur collaboration commerciale de monétisation des sites internet au moyen de l'offre nouvelle CONTACT+ mise en oeuvre par le même opérateur Orange lequel facturation directement l'opération.

La prétention à la fin des relations commerciales entre les parties à la date du 16 novembre 2012 date de fin de la solution TELETEL est dès lors écartée.

L'allégation par ULYSSE d'une exécution fautive de la convention par GIBMEDIA peut justifier la mise en oeuvre par ULYSSE d' une procédure de rupture des relations à la date d'envoi de la lettre de résiliation mais ne peut fonder une absence de poursuite des relations commerciales à la date du 16 novembre 2012.

Le moyen d'une relation poursuivie ponctuellement pour une durée de six mois est tout autant en voie de rejet, l'introduction d'un élément de précarité dans des relations établies pendant sept ans qui présentent un caractère suivi stable et habituel laissant légitimement croire au partenaire commercial la poursuite des relations commerciales établies, étant prohibé par les dispositions de l'article L442-6 I 5° du code de commerce, les relations entre les parties devant se poursuivre au delà du terme fixé au contrat de mandat.

L'intimée ne pouvait dans les circonstances de telles relations résilier quand bon lui semble le mandat sans encourir le risque de commettre un abus de droit.

En conséquence les relations entre les parties n'ont pas pris fin le 20 décembre 2012.

3. Aux termes de l'article L442-6 I 5° du Code de commerce : 'Engage la responsabilité de son auteur et l' oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commercant, industriel on artisan : () 5°) De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminé, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d' inexécution par l' autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».

L'appelant soutient avoir exécuté les obligations résultant du contrat de mandat.

A cet effet il verse aux débats des 'bons de commande' (pièces 21 et 35) passées auprès de l'opérateur Orange pour requérir l'ouverture de codes pour plusieurs sites internet commercialisés par la société ULYSSE .

L'intimée soutient sans être démentie que les deux premiers bons de commande ne désignent pas des services édités par la société ULYSSE, seul le troisième bon de commande portant des mentions que l'intimée reconnaît lui être applicables.

Le bon de commande objet de la pièce 35 portant des mention similaires, la bonne exécution du mandat est rapportée.

Le courriel du 13 juin 2012 dans lequel Orange s'étonne que GIBMEDIA n'ait pas avisé ses clients de l'offre CONTTACT+, est antérieur au protocole d'accord du 15 juin et du mandat du 21 juin 2012 et n'est pas en conséquence susceptible de faire la preuve d'une mauvaise exécution de l'acte.

GIBMEDIA justifie ensuite par la production d'un courrier recommandé d'Orange du 28 juin 2012 que le mandataire a procédé aux diligences nécessaires à la mise en oeuvre de la solution CONTACT+ .

La preuve de l'exécution du mandat conduit à écarter le bien-fondé de la faculté de résiliation sans préavis.

GIBMEDIA ne conteste pas aux termes de ses conclusions et de ses productions, devoir à la société ULYSSE un montant de 136.102,63 euros au 31 décembre 2012, la société ULYSSE ayant pour sa part adressé le 22 mars 2013 une mise en demeure de payer la somme de 147.898,25 euros pour des montants dus de mai à décembre 2012, GIBMEDIA ayant procédé au règlement des périodes de facturation de janvier 2012 à avril 2012.

Par courrier recommandé du 7 février 2013, la société ULYSSE, visant tant la durée du mandat que le défaut de règlement des montants dus , après rappel d'une sommation par huissier de justice le 31 janvier 2013 restée infructeuse, a dénoncé le mandat à effet à la date de réception du courrier.

Contrairement à ce que soutient GIBMEDIA, la lettre de rupture du 7 février 2013 vise expressément le défaut de payements de sommes.

L'appelant justifie toutefois par un courrier de DISPOFI du 24 janvier 2013 à GIBMEDIA antérieur à la lettre de résiliation, l'existence d'une convention de compensation des créances et dettes 'détenues respectivement entre les sociétés du groupe DISPOFI ( DISPOFI, FRANCE EXAMEN, PUBLIMEDIA et ULYSSE ) d'une part et GIBMEDIA d'autre part' .

Par courrier du 4 avril 2013, GIBMEDIA a demandé à ULYSSE d'opérer compensation entre l'intégralité des sommes dues par GIBMEDIA à ULYSSE d'un montant de 147.898,25 euros (et la somme de 520.442,37 euros à DISPOFI) avec les sommes dues par FRANCE EXAMEN à GIBMEDIA d'un montant de 684.412,41 euros au titre de l'exercice 2012 et les sommes dues au titre des exercice 2010 et 2011 d'un montant de 310.198,70 euros.

Le refus opposé en réponse par ULYSSE par courrier du 19 avril 2013 d'opérer compensation entre l'intégralité des sommes dues par GIBMEDIA à DISPOFI et ULYSSE avec les sommes dues par FRANCE EXAMEN à GIBMEDIA, au motif qu'il n'a jamais été procédé à la moindre compensation concernant les sommes dues à la société ULYSSE, GIBMEDIA ayant toujours acquitté les sommes dues pour les périodes de 2010, 2011 et jusqu'en avril 2012 par virement directement au profit de ULYSSE, alors qu'il existe une convention de compensation concernant l'ensemble des sociétés du groupe DISPOFI et la société GIBMEDIA, n'est pas légitime.

L'intimée ne peut se prévaloir pour justifier du bien fondé de l'absence de préavis du prononcé de décisions de condamnation à payer postérieures de plusieurs mois à l'envoi de la lettre de rupture alors que l' inexécution fondant l'absence de préavis doit exister à la date d'envoi de la lettre le 7 février 2013 et qu'il est constant qu'existe une convention de compensation valable à cette date que la société ULYSSE a refusé unilatéralement d'appliquer.

Ainsi le défaut de payement allégué ne présente pas au regard de ces circonstances le caractère d'une inexécution fautive par GIBMEDIA de ses obligations autorisant la faculté de résiliation sans préavis.

4. Le préjudice subi :

Le caractère suffisamment prolongé et significatif du courant d'affaires entre les parties d'une durée de sept années justifie un préavis de 7 mois.

Le chiffre d'affaires réalisé pendant la durée des relations commerciales est de 18.126,20 euros en 2010, 28.036,89 euros en 2011 et 75.718,22 euros en 2012, soit un chiffre d'affaires moyen de 40.608 euros.

Seule doit être recherchée la marge dont la victime a été privée après déduction des coûts variables.

Compte tenue de l'activité exercée qui tendait à procurer des solutions de monétisation de sites internet, la marge peut être fixée à 70 % du chiffre d'affaires moyen représentant la somme de 28 425,60 euros.

L'appelant ne justifiant pas d'agissements déloyaux de la société ULYSSE la demande en dommages et intérêts formée de ce chef est rejetée.

La succombance de la société ULYSSE conduit au rejet de la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive formée contre la société GIBMEDIA.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour,

DÉCLARE d'office irrecevables les pièces communiquées postérieurement à l'ordonnance de clôture ;

INFIRME le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Vu l'article L442-6 I 5° du Code de commerce,

CONDAMNE la société ULYSSE à payer à la société GIBMEDIA la somme de 28 425,60 euros ;

Vu l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la société ULYSSE à payer à la société GIBMEDIA la somme de 10.000 euros ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes en dommages et intérêts ;

REJETTE toute demande autre ou plus ample ;

CONDAMNE la société ULYSSE aux entiers dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 15/23767
Date de la décision : 19/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°15/23767 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-19;15.23767 ?
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