La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/01/2018 | FRANCE | N°16/00128

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 16 janvier 2018, 16/00128


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 16 Janvier 2018

(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/00128



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/11338



APPELANTE :



EURL LES TROIS AXES

Sise [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT

BOETIE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756 substituée par Me Margaux ZEISSER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756





INTIMEE:



Madame [N] [O] [P]

Demeurant [Adre...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 16 Janvier 2018

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/00128

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/11338

APPELANTE :

EURL LES TROIS AXES

Sise [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT BOETIE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756 substituée par Me Margaux ZEISSER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756

INTIMEE:

Madame [N] [O] [P]

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nathalie VANDEN BOSSCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0849

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Novembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bruno BLANC, président

Mme Soleine HUNTER-FALCK, conseillère

Mme Roselyne GAUTIER, conseillère.

qui en ont délibéré,

Greffier : Mme Aouatef ABDELLAOUI, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par Monsieur Bruno BLANC, Président, et par Mme Marine BRUNIE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

EXPOSE DU LITIGE

[N] [O] [P], née en 1981, a été engagée par contrat de qualification par l'EURL LES TROIS AXES exerçant sous l'enseigne ANTHEA CUISINES le 24.04.2001, pour une durée de 24 mois, du 02.05.2001 au 30.04.2003, en qualité d'assistante architecte échelon 1 coefficient 225 à temps complet (39h par semaine).

Le 29.04.2003, un contrat de travail commercial VRP a été signé entre l'EURL LES TROIS AXES et [N] [O] [P], cette dernière étant embauchée en qualité de VRP exclusif ; il était prévu une rémunération variable avec un minimum garanti de 1.183,03 € brut mensuel pour 151h67, composée de commissions brutes fonction du chiffre d'affaires enregistré hors taxes mobilier, accessoires, électroménager, évier et robinetterie d'une part et d'autre part fonction du chiffre d'affaires hors taxes travaux et pose selon des modalités précisées contractuellement

Un nouveau contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre les parties et paraphé par elles le 20.12.2005, [N] [O] [P] étant engagée en qualité de VRP exclusif Directrice de magasin, moyennant une rémunération mixte comportant une partie fixe de 1.500 € par mois et une partie variable résultant de commissions brutes et fonction du chiffre d'affaires enregistré hors taxe versées mensuellement conformément à un tableau annexé, outre des commissions calculées sur le chiffre d'affaires hors taxes travaux et pose selon des modalités précisées contractuellement ; ce contrat comportait des mentions manuscrites de la main du gérant : 'voir détail des rémunérations objet du présent contrat signé le 29/04/2003 - seul le fixe est modifié à 1500 € brut mensuel', le calcul du chiffre d'affaires enregistré hors taxe étant prévu dans un tableau en annexe ; étaient en effet annexés des documents relatifs au système de pourcentage, précisant qu'aucune heure supplémentaire ne pourrait être effectuée sans l'autorisation écrite du gérant outre une note de service concernant les modalités de commande et livraison.

L'EURL LES TROIS AXES a une activité de commerce de détail en magasin non spécialisé. L'entreprise comprend moins de 11 salariés.

Le 08.01.2009, [N] [O] [P] a demandé à son employeur de lui régler ses commissions au trimestre comme il avait été convenu en 2007, et de la payer tous les 5 du mois.

Dans un courrier du 19.01.2010 adressé à son employeur, [N] [O] [P] a formé une réclamation relative à la prise en charge de ses frais professionnels ainsi qu'un repositionnement salarial conforme à la convention collective, son salaire mensuel minimum devant être fixé à 2.000 € en niveau 1.

L'EURL LES TROIS AXES a répliqué le 20.09.2010 en contestant ces prétentions.

La salariée a été placée en congé maternité du 30.12.2010 jusqu'au 25.08.2011.

[N] [O] [P] a dans un courrier en date du 28.08.2012 donné sa démission à son employeur dans les termes suivants :

'Je vous fais part de ma démission du poste de responsable magasin que

j'occupe au sein de votre entreprise à compter du 28/03/2012.

Sauf accord réciproque et conformément aux dispositions figurant à mon contrat de travail, j'effectuerai mon préavis de trois moîs jusqu'au 28/11/2012.

Je vous demande de bien vouloir accuser réception de la présente et vous remercie de la confiance que vous m'avez témoignée.'

Le CPH [Localité 1] a été saisi par [N] [O] [P] le 17.07.2013 en requalification de cette démission en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, indemnisation des préjudices subis et pour diverses demandes liées à l'exécution du contrat de travail.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 06.01.2016 par l'EURL LES TROIS AXES du jugement rendu le 09.11.2015 par le Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 1, qui a :

Condamné l'EURL LES TROIS AXES à verser à [N] [O] [P] les sommes suivantes :

a) Au titre des commissions :

- 4 031,17 l'EURL LES TROIS AXES au titre de rappel de salaire sur 2008

- 403,12 € au titre des congés payés

- 1 020,66 € au titre du rappel de salaire sur 2009

- 102,07 € au titre des congés payés

- 2 406,22 € au titre du rappel de salaire sur 2010

- 240,62 € au titre des congés payés

- 2 005 € au titre du rappel de salaire sur 2011

- 200,50 € au titre des congés payés

- 4 068 € au titre du rappel de salaire 2012

- 406,80 € au titre des congés payés

b) Au titre des heures supplémentaires :

- 949,93 € au titre de salaires sur 2008

- 94,99 € au titre des congés payés

- 2 346,90 € au titre de salaires sur 2009

- 234,69 € au titre des congés payés

- 1 788,11€ au titre de salaires sur 2010

- 178,81 € au titre des congés payés

- 782,3 0 € au titre de salaires sur 2011

- 78,23 € au titre des congés payés

- 1 955,75 € au titre de salaires sur 2012

- 195,57 € au titre des congés payés

c) Au titre du non respect du salaire minimum garanti mensuellement par la convention

collective :

- 845,97 € au titre de rappel de salaire sur 2008

- 84,59 € au titre des congés payés

- 281,99 € au titre du rappel de salaire sur 2010

- 28,19 € au titre des congés payés

- 660,98 € au titre du rappel de salaire sur 2011

- 66,09 € au titre des congés payés

- 2 270,37 € au titre de rappel de salaires sur 2012

- 227,03 € au titre des congés payés ;

d) Au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

- 6 787,98 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

Avec, intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, jusqu'au jour du

paiement, et Ordonné la remise des documents sociaux conformes (attestation Pôle emploi, certificat de travail et solde de tout compte) sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification du présent jugement ;

e) Au titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé :

- 16 119,24 € au titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

f) Au titre des dommages et intérêts au titre du non respect des droits à indemnités journalières maternité :

- 6 562 € au titre des dommages et intérêts au titre du non respect des droits à indemnités j ournalières maternité

g) Au titre des dommages et intérêts au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat :

- 2 000 € au titre des dommages et intérêts au titre de la remise tardive des documents

de fin de contrat ;

h) Au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 22 000 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, jusqu'au jour du paiement,

Ordonné l'exécution provisoire en application de l 'article 515 du Code de Procédure Civile

- 700 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Débouté [N] [O] [P] du surplus de ses demandes

Condamne L'EURL LE au,paiement des entiers dépens.

La société demande à la cour d'infirmer le jugement, et de :

DIRE la démission sans réserve de [N] [O] [P] non-équivoque ;

DEBOUTER [N] [O] [P] de toutes ses demandes, fins et prétentions;

A TITRE SUBSIDIAIRE de :

DEBOUTER [N] [O] [P] de ses demandes en dommages et intérêts ;

RAPPORTER les autres condamnations prononcées à des proportions plus raisonnables;

EN TOUT ETAT DE CAUSE de :

CONDAMNER [N] [O] [P] à verser à la Société LES TROIS AXES la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

De son côté, [N] [O] [P] demande de :

CONDAMNER la Société LES TROIS AXES à lui régler les sommes suivantes :

Au principal :

a) au titre du caractère abusif de la rupture :

' 6 787,98 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

' 26 855,40 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Subsidiairement : au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail :

' 25 000 € de dommages-intérêts

b) Au titre des commissions restant à devoir en application du contrat de travail :

' 4 031,17 € à titre de rappel de salaire sur « 2008 », outre les congés payés afférents pour

un montant de 403,12 € ;

. 1 020,66 € à titre de rappel de salaire sur « 2009 », outre les congés payés afférents pour

un montant de102,07 €;

' 2 406,22 € à titre de rappel de salaire sur « 2010 », outre les congés payés afférents pour

un montant de240,62 €;

' 2005 € à titre de rappel de salaire sur « 2011 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 200,50 €;

' 4 068 € à titre de rappel de salaire sur « 2012 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 406,80 €;

c) Au titre des heures supplémentaires accomplies par Madame [O] [P] dans le cadre de ses fonctions de Directrice de magasin :

' 949,93 € à titre de rappel de salaire sur « 2008 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 94,99 €;

' 2 346,90 € à titre de rappel de salaire sur « 2009 », outre les congés payés afférents pour

un montant de 234,69 € ;

' 1 788,11 € à titre de rappel de salaire sur « 2010 », outre les congés payés afférents pour un montant de 178,81 € ;

' 782,30 € à titre de rappel de salaire sur « 2011 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 78,23 €;

' 1 955,75 € à titre de rappel de salaire sur « 2012 », outre les congés payés afférents pour un montant de 195,57 € ;

' 16119,24 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

d) Au titre du non-respect du salaire minimum garanti mensuellement par la convention collective applicable au contrat de travail :

' 845,97 € à titre de rappel de salaire sur « 2008 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 84,59 € ;

' 281,99 € à titre de rappel de salaire sur « 2010 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 28,19 €;

' 660,98 € à titre de rappel de salaire sur «2011 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 66,09 €;

' 2 270,37 € à titre de rappel de salaire sur « 2012 », outre les congés payés afférents pour un montant de 227,03 €;

e) Au titre de la perte des droits aux indemnités journalières maternité :

' 6 562 € à titre de dommages-intérêts ;

f) Au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat :

' 2 000 € à titre de dommages-intérêts ;

Et en toute hypothèse :

CONDAMNER la Société LES TROIS AXES à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

ORDONNER la remise des documents sociaux rectifiés ;

CONDAMNER la Société LES TROIS AXES aux entiers dépens.

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l'exécution du contrat de travail :

Au préalable, l'EURL LES TROIS AXES oppose la prescription triennale pour les demandes antérieures au 17.07.2008, eu égard à la date de la saisine du conseil des prud'hommes de Paris le 17.07.2013.

Aux termes de l'article L 3245-1 du code du travail dans sa version au 16.06.2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Cependant, les dispositions du code du travail prévues aux III et IV de l'article 21 de la loi n°2013-504 du 14.06.2013 s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Ces dispositions s'appliquent aux demandes formées par [N] [P] qui a introduit sa requête le 17.07.2013, et pour la partie de cette créance antérieure au 31.07.2008, date d'exigibilité des salaires du mois de juillet 2008.

a) commissions restant à devoir en application du contrat de travail :

Le premier juge a estimé, pour faire droit à la demande, qu'il ressortait des pièces communiquées que [N] [O] [P] n'avait pas été exactement et entièrement remplie de ses droits au titre de la partie variable de son salaire contractuel, et qu'elle démontrait la preuve de sa créance.

Selon l'employeur, la prétendue dégradation des conditions de travail ne peut être un motif de rappel de commissions ; les commissions sont dues conformément aux dispositions contractuelles fixées le 29.04.2003 dès lors que sur le contrat de travail suivant a été portée la mention manuscrite, en ce qui concerne la rémunération : 'voir détail des rémunérations objet du présent contrat signé le 29/04/2003 - seul le fixe est modifié à 1500 € brut mensuel'. Il relève que la salariée se fonde à tort sur le tableau annexé au contrat de travail de 2004, qu'elle a modifié dans ses demandes les termes de l'annexe 1 du contrat du 20.12.2005 sans donc pouvoir y prétendre, et que par ailleurs les calculs étaient établis sur la base des chiffres qu'elle communiquait. Il en ressort que la salariée a été réglée des commissions dues, et qu'elle n'avait pas demandé l'application de taux différents.

[N] [O] [P] précise qu'elle ne remet pas en cause les commissions 'pose et livraisons' déjà touchées mais les commissions 'ventes' assises sur le chiffre d'affaires du magasin ; pour contester le calcul présenté par l'EURL LES TROIS AXES elle s'en remet au contrat de travail signé le 20.12.2005 et observe que les intitulés '% sur CA HT' et 'Coeff HT Achat / TTC Vente' ont été inversés ce qui ressort des propres calculs de l'employeur pour les commission vendeurs, du rattrapage partiel dont elle a bénéficié et de son propre refus de signer un projet de contrat de travail le 16.09.2010 qui aurait entériné les calculs de l'employeur qu'elle conteste ; elle a régulièrement contesté ces calculs et en justifie.

Les parties étant contraires dans leur interprétation des conventions existant entre elles, il convient de rechercher la commune intention des parties contractantes plutot que de s'arrêter au sens littéral du texte.

Il est constant que les parties ont signé un nouveau contrat le 20.12.2005, selon lequel [N] [O] [P] était promue Directrice de magasin, ce qui a eu une incidence sur sa rémunération ; il était alors prévu une rémunération fixe de 1.500 € qui devait être complétée d'une rémunération variable de deux types ; en ce qui concerne les commissions sur ventes, seules objet du litige, le gérant a renvoyé de manière manuscrite au contrat signé le 29.04.2003 pour le 'détail des rémunérations', tout en renvoyant également aux annexes pour le pourcentage à appliquer sur le chiffre d'affaires enregistré hors taxe. Or aucune des parties ne donne les calculs des commissions sur vente antérieurement au 01.12.2005, et le précédent contrat de travail comportait déjà une annexe précisant les conditions du commissionnement qui n'est pas communiquée non plus.

Il convient donc de se référer aux éléments complémentaires fournis et l'EURL LES TROIS AXES ne peut se borner à opposer les seules dispositions contractuelles, qui elles mêmes ne sont pas claires dès lors que la mention manuscrite renvoie au détail des rémunérations prévues le 29.04.2013 alors qu'il est fait référence également à des annexes qui elles mêmes détaillent le système de pourcentage à appliquer.

[N] [O] [P] démontre que le 11.08.2010, le gérant a a calculé un rappel de commission (p.14) en indiquant 'réglement au % différent suite erreur sur contrat' mais également : 'le paiment de ces % ne vaut pas accord de la société, le paiement de ces % est fait de sorte à éviter ds polémiques et contentieux' et : 'ces commissions sont le double +/- de ce qui était prévu contractuellement et comptablement - stop au 30/07.2010" ; par suite l'employeur a reconnu une erreur tout en contestant le calcul de la salariée mais en réglant ce qui était réclamé. [N] [O] [P] produit un projet de contrat en date du 01.09.2010 qui n'a pas été régularisé ; celui ci stipulait un calcul de commissions avec des coefficients qui correspondaient aux chiffres du pourcentage sur CA HT du contrat signé en décembre 2010 (il y a donc bien eu une inversion des données) ainsi qu'une pourcentage sur CA HT réduit par rapport à celui mentionné sous la rubrique 'coefficient HT' du contrat de décembre 2010 ; il y a donc eu visiblement interversion des données. Enfin la salariée justifie également avoir formé une réclamation dès le 05.10.2010.

La salariée verse aux débats un nouveau calcul des rappels de salaire sur commissions, qui est clair et précis ; il convient de faire droit à ses prétentions et de confirmer le jugement rendu sur le principe de la créance.

b) heures supplémentaires accomplies par [N] [O] [P] dans le cadre de ses fonctions de Directrice de magasin :

Selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties, le salarié doit donc étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

L'EURL LES TROIS AXES oppose que le contrat de travail signé le 20.12.2005 stipulait que la salariée ne pouvait pas prétendre à des heures supplémentaires sauf si elles avaient été autorisées par écrit par le gérant. Elle n'a formé aucune réclamation pendant l'exécution du contrat. [N] [O] [P] se borne à affirmer qu'elle avait respecté les heures d'ouverture du magasin ce qui est contredit pour le mois de décembre 2011, alors qu'elle s'était absentée en raison de la maladie de ses enfants ; deux autres salariées étaient présentes au magasin et [N] [P] était libre d'organiser son temps de travail ; cette demande est infondée ou excessive.

[N] [O] [P] affirme avoir réalisé chaque semaine 5 heures supplémentaires en respectant les horaires du magasin alors qu'elle était rémunérée pour 35 heures, elle a également assuré des rendez vous ches les clients ; elle n'a été secondée que par [O] [E] et par son remplaçant pendant son congé maternité ; elle produit l'attestation de [O] [E] qui a été présente de janvier 2009 à mai 2010 et qui précise que les horaires d'ouverture du magasin étaient de 10h à 18h30 du mardi au samedi sauf le mercredi de 9h à 17h30, et que [N] [O] [P] 'travaillait de 10h à 19h du mardi au samedi' mais aussi que les métrés étaient effectués le soir en semaine ou le samedi.

Elle verse aux débats un décompte hebdomadaire, qui de ce fait n'est pas suffisamment détaillé et précis.

L'EURL LES TROIS AXES produit en revanche les plannings de la salariée entre 2008 et 2012 qui font apparaître qu'elle pouvait exceptionnellement avoir des rendez vous avant 10h le matin ou après 18h30, certaines plages horaires étant restées libres.

Ces éléments ne permettent pas de faire droit à la demande de la salariée qui est globale et systématique ; le jugement rendu sera infirmé.

c) dommages-intérêts pour travail dissimulé :

Au vu de la solution rendue en ce qui concerne les heures supplémentaires, il convient de rejeter cette demande, les manquements de l'employeur n'étant pas démontrés.

d) non-respect du salaire minimum garanti mensuellement par la convention :

Les parties s'opposent également sur la convention collective applicable, [N] [O] [P] faisant valoir la convention collective du négoce de l'ameublement, et son employeur, l'accord interprofessionnel des VRP.

Le premier juge a retenu l'application de la convention collective du négoce de l'ameublement en constatant que les bulletins de salaire mentionnent l'une comme l'autre, les derniers faisant référence à la convention collective du négoce de l'ameublement ce qui correspond à l'activité de l'entreprise et aux fonctions exercées par [N] [O] [P].

L'EURL LES TROIS AXES observe que, dans son courrier du 20.09.2010, elle a précisé à la salariée qu'il y avait lieu d'appliquer conformément aux dispositions contractuelles la convention collective des VRP tout en indiquant : 'Toutefois, si la convention collective liée à l'entreprise comportait des dispositions visant expressément les VRP et qui soient plus favorables que la convention collective des VRP, ces dispositions vous concerneraient. Une étude est à réaliser sur ce point précis'.

La convention collective applicable est fonction de l'activité de l'entreprise et non pas de l'activité du salarié sauf lorsqu'il s'agit de l'activité particulière des VRP. Par ailleurs, la contractualisation des conventions collectives est possible, même partiellement, par mention de la convention collective applicable dans le contrat, sauf si la mention est purement informative.

Dans le même ordre d'idées, il a été jugé que la mention d'une convention collective applicable à l'entreprise, sur le bulletin de paie d'un VRP, ne vaut pas application de celle-ci à l'intéressé, si la convention ne comporte pas de stipulation expresse relative aux VRP.

Or l'article 1er de la convention collective du négoce de l'ameublement stipule expressément que les clauses de cette convention s'appliquent à tous les salariés de l'entreprise sauf aux voyageurs, représentants et placiers qui ne peuvent se prévaloir que des textes qui leur sont propres.

Par suite, il y a lieu de rejeter les demandes de [N] [O] [P] dès lors qu'elle ne démontre pas que des dispositions plus favorables que celles prévues par l'accord interprofessionnel des VRP aient effectivement été appliquées spontanément par son employeur ; le jugement rendu sera infirmé.

e) Au titre de la perte des droits aux indemnités journalières maternité :

Eu égard à la solution donnée, [N] [O] [P] qui n'a droit qu'à un rappel de salaire sur commissions sur ventes, ne démontre pas qu'elle aurait subi une perte sur ses indemnités journalières maternité. En conséquence le jugement rendu sera infirmé.

Sur la requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse:

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer le vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.

Ainsi si les faits invoqués au soutien de la prise d'acte de rupture ne la justifiaient pas eu égard aux griefs énoncés dans la lettre de prise d'acte qui sont déterminants, les effets produits sont ceux d'une démission. En revanche si les faits invoqués par le salarié sont établis et constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur, la prise d'acte de rupture produit les effets du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

[N] [O] [P] n'a pas motivé son courrier de démission du 28.08.2012. Dans ses écritures elle se prévaut de la modification unilatérale de son contrat de travail, l'EURL LES TROIS AXES ayant modifié unilatéralement le mode de calcul de sa rémunération variable sur ventes, ce qui a eu pour effet de diminuer sa rémunération ; elle invoque également le non respect du salaire mensuel minimum garanti dès lors qu'elle ne relevait pas du statut des VRP puisqu'elle ne prospectait pas de clientèle et que son emploi était celui de Directrice de magasin ; elle se prévaut de la dégradation de ses conditions de travail et des conséquences sur sa rémunération ; mais aussi du non respect des échéances de règlement des commissions et de délivrance des bulletins de paie réguliers.

L'EURL LES TROIS AXES constate que les termes de la démission de [N] [O] [P] sont dénués de toute ambiguïté ; elle a retrouvé un emploi rapidement et a saisi le conseil des prud'hommes tardivement, sans avoir évoqué ses griefs antérieurement.

Aux termes des articles L. 7311-3 et L. 7313-2 du code du travail : « Est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui : 1° travaille pour le compte d'un ou plusieurs employeurs ; 2° exerce en fait d'une façon exclusive et constante une profession de représentant ; 3° ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ; 4° est liée à l'employeur par des engagements déterminant : a) la nature des prestations de services ou des marchandises offertes à la vente ou à l'achat ; b) la région dans laquelle il exerce son activité ou les catégories de clients qu'il est chargé de visiter ; c) le taux des rémunérations » (code du travail, art. L. 7311-3) ; « l'absence de clauses interdisant soit l'exercice d'une autre profession, soit l'accomplissement d'opérations commerciales personnelles ne peut faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 7313-1 ».

En l'espèce le contrat liant les parties stipulait que [N] [O] [P] était engagée en qualité de 'VRP EXCLUSIF', et elle acceptait d'exercer sa profession de représentant de manière exclusive et constante, à n'exercer aucune opération pour son compte personnel, à prospecter personnellement la clientèle qui lui était confiée ; [N] [O] [P] était placée sous la responsabilité hiérarchique de la Direction commerciale, son secteur d'activité s'étendant sur l'Ile de France avec une priorité sur la partie Est, il lui revenait de visiter cette clientèle ; la nature des prestations était définie à l'article 4 (organisation du travail et mission) ; la rémunération prévoyait certes un fixe mais également une partie variable calculée au pourcentage.

Dans ces conditions [N] [O] [P] ne démontre pas qu'elle ne bénéficiait pas du statut de VRP, alors même qu'elle bénéficiait d'une carte professionnelle de VRP depuis 2005 en raison de l'attestation qu'elle avait elle même délivrée le 15.05.2005, et qu'elle n'a pas contesté ce statut jusqu'à la saisine prud'homale mais s'en prévalait bien au contraire pour réclamer le paiement de ses commissions notamment avant son congé maternité.

Il n'en reste pas moins que l'EURL LES TROIS AXES n'a pas respecté les stipulations contractuelles implicites relatives à la rémunération variable sur les commissions de ventes, ce qui a eu un effet sur la rémunération de la salariée, et que l'employeur n'a pas respecté les échéances de versement de ces commissions que [N] [O] [P] a été contrainte de réclamer à plusieurs reprises.

Ces faits sont établis, ils rendent la démission équivoque, et constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur, la démission produisant les effets du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée, de l'âge de [N] [O] [P], de son ancienneté dans l'entreprise, de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces communiquées et des explications fournies à la cour, l'EURL LES TROIS AXES sera condamnée, eu égard à un salaire moyen de 2.552,90 € à verser au salarié à titre de dommages intérêts la somme de 20.500 € outre l'indemnité conventionnelle de licenciement dont le montant n'a pas été contesté. Cette somme à caractère indemnitaire est nette de tous prélèvements sociaux. Le jugement sera infirmé sur le quantum.

Lorsque le licenciement illégitime est indemnisé en application des articles L1235-2/3/11 du code du travail, la juridiction ordonne d'office, même en l'absence de Pôle emploi à l'audience et sur le fondement des dispositions de l'article L 1235-5, le remboursement par l'employeur, de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du jugement, dans la limite de six mois ; en l'espèce au vu des circonstances de la cause il convient de condamner l'employeur à rembourser les indemnités à concurrence d'un mois.

Sur les autres demandes :

[N] [O] [P] déclare que l'employeur lui a remis avec retard les documents sociaux alors qu'il ressort des documents produits qu'elle a retrouvé un emploi dès décembre 2012, et que donc le préjudice n'est pas établi. Il est fait droit à la demande de remise des documents sociaux rectifiés.

Il serait inéquitable que [N] [O] [P] supporte l'intégralité des frais non compris dans les dépens tandis que l'EURL LES TROIS AXES qui succombe doit en être déboutée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 09.11.2015 par le Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 1 en ce qu'il a, sur le principe, condamné l'EURL LES TROIS AXES au paiement d'un rappel de commissions, et à une indemnité pour licenciement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à une indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi qu'à 700 € au titre de l'article 700 du CPC ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la démission doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Condamne l'EURL LES TROIS AXES à payer à [N] [O] [P] les sommes de :

a) au titre des commissions restant à devoir en application du contrat de travail :

' 4 031,17 € à titre de rappel de salaire sur « 2008 », outre les congés payés afférents pour

un montant de 403,12 € ;

. 1 020,66 € à titre de rappel de salaire sur « 2009 », outre les congés payés afférents pour

un montant de102,07 €;

' 2 406,22 € à titre de rappel de salaire sur « 2010 », outre les congés payés afférents pour

un montant de240,62 €;

' 2005 € à titre de rappel de salaire sur « 2011 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 200,50 €;

' 4 068 € à titre de rappel de salaire sur « 2012 », outre les congés payés afférents pour un

montant de 406,80 €;

b) au titre de la rupture du contrat de travail :

' 6 787,98 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

' 20.500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

Dit que l'EURL LES TROIS AXES devra transmettre à [N] [O] [P] dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision un certificat de travail et une attestation Assedic/Pôle emploi conformes ainsi qu'un bulletin de salaire récapitulatif;

Rejette les autres demandes ;

Ordonne, dans les limites de l'article L 1235-4 du code du travail, le remboursement par l'EURL LES TROIS AXES à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à [N] [P] à concurrence de un mois de salaire,

Condamne l'EURL LES TROIS AXES aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à payer à [N] [O] [P] la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 16/00128
Date de la décision : 16/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°16/00128 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-16;16.00128 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award