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10/01/2018 | FRANCE | N°16/14098

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 10 janvier 2018, 16/14098


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 10 Janvier 2018



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/14098



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 Avril 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section RG n° 08/09185









APPELANTE

SAS HINOLISARI SUCCESS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 342 502 39

0

représentée par Me Xavier KREMER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : PN214







INTIMÉE

Madame [B] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante, assistée de Me Valentine GUERRERO, avocat au ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 10 Janvier 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/14098

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 Avril 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section RG n° 08/09185

APPELANTE

SAS HINOLISARI SUCCESS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 342 502 390

représentée par Me Xavier KREMER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : PN214

INTIMÉE

Madame [B] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante, assistée de Me Valentine GUERRERO, avocat au barreau de PARIS, toque : J094

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre, rédactrice,

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Mme Séverine TECHER, Vice-Présidente Placée

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Clémence UEHLI, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [B] [E] a été engagée le 1er mars 2000 par la SARL Hilonisari Success en qualité de 'booker'pour une rémunération de 30'000 Fr. pour 169 heures de travail mensuelles.

Par avenant en date du 15 novembre 2004 Madame [E] était affectée en qualité de booker au département femmes pour une rémunération de 5000 €pour 151,67 heures de travail, son salaire étant porté à 5500 € par mois à compter du 1er juin 2005.

Elle a été élue déléguée du personnel en mars 2005 puis le 20 mars 2007.

Mme [E] a été placée en arrêt maladie ordinaire du 10 au 19 décembre 2007, elle a ensuite été en congés jusqu'au 06 janvier 2008, puis de nouveau en arrêt maladie à compter du 10 janvier 2008, arrêt régulièrement prolongé.

À l'issue de deux examens médicaux, la salariée a été déclarée, le 26 février 2008, inapte à son poste par le médecin du travail.

Après convocation de Mme [E] à un entretien préalable et mise à pied conservatoire le 18 mars 2008, l'employeur a sollicité, le 31 mars 2008, l'autorisation de la licencier qui lui a été refusée par l'inspecteur du travail le 30 mai 2008. La décision de l'inspecteur du travail a été annulée par le ministre du travail le 7 novembre 2008 qui a décidé d'autoriser le licenciement de Madame [E].

Par lettre recommandée en date du 10 juin 2008, reçue le 12 juin 2008 l'employeur convoquait Madame [E] à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 20 juin 2008.

La salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur par lettre du 13 juin 2008.

Le 17 juillet 2008, Mme [E] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris en qualification de sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail en rupture imputable aux torts de l'employeur, en paiement des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure, pour violation du statut protecteur, pour harcèlement moral et discrimination et en paiement de créances salariales.

Par jugement en date du 27 avril 2011 le Conseil de Prud'hommes de Paris, sous la présidence du juge départiteur statuant seul, a dit que la procédure d'inaptitude médicale est inopposable à l'employeur, a dit fondée la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Madame [E] aux torts de l'employeur et a condamné la SAS Success à lui payer les sommes suivantes :

- 11'800 € à titre d'indemnité de préavis,

- 1108 € à titre d'indemnité de congés payés afférents,

- 6687,50 euros à titre d'indemnité de licenciement,

ces sommes produisant intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2008 et la condamnation étant assortie de l'exécution provisoire de droit,

- 34'500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 159'300 € à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

cette décision a condamné Madame [E] à payer à la société Success la somme de 1566 € au titre de la restitution de l'indu avec compensation avec le paiement des indemnités de rupture ; enfin cette décision a ordonné la remise à Madame [E] par la société Success de bulletins de paye et documents de rupture rectifiés conformes à la décision.

Le 26 mai 2011 la société Success a interjeté un appel limité de cette décision.

Par arrêt en date du 21 mai 2013, la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris a confirmé la décision entreprise sauf en ce qu'elle a dit la procédure d'inaptitude médicale inopposable à l'employeur et y ajoutant a condamné la société Success à payer à Madame [E] la somme de 1668,37 euros à titre de rappel de jours de réduction de temps de travail et a débouté Madame [E] de sa demande indemnitaire relative au non-respect de la procédure et enfin a condamné la société Success à payer à Madame [E] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt en date du 7 janvier 2015, la chambre sociale de la Cour de Cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris, mais seulement en ce qu'il a déclaré opposable à l'employeur la procédure d'inaptitude médicale et décidé que la prise d'acte par Madame [E] de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société Hinolisari Sucess est justifiée et condamné cette société au paiement d'une indemnité de préavis et de congés payés, d'une indemnité de licenciement, de dommages-intérêts au titre de l'article L 1235-3 du code du travail ainsi que d'une indemnité pour violation du statut protecteur et ordonné la remise d'un bulletin de paie et des documents de rupture rectifiés.

Aux motifs suivants que 'la visite de reprise, dont l'initiative appartient normalement à l'employeur, peut aussi être sollicitée par le salarié, soit auprès de son employeur, soit auprès du médecin du travail en avertissant au préalable l'employeur de cette demande, qu'à défaut d'un tel avertissement, l'examen ne constitue pas une visite de reprise opposable à l'employeur'.

La chambre sociale de la Cour de Cassation a renvoyé l'affaire devant la Cour d'Appel de Paris autrement composée.

Par conclusions déposées le 21 novembre 2017, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SAS Hinolisari Sucess conclut à la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail Madame [E] était fondée, elle demande à la cour de dire qu'elle s'analyse en une démission et de débouter la salariée de toutes ses demandes.

Elle demande à la cour de condamner la salariée lui restituer la somme de 16'985,84 euros au titre de la répétition de l'indu avec intérêts au taux légal à compter de la notification à intervenir et capitalisation et à lui payer la somme de 7000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 21 novembre 2017 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Madame [E] demande la requalification de la rupture en licenciement aux torts et griefs de l'employeur et la condamnation de la société Hinolisari Sucess à lui payer les sommes suivantes :

- 6687,50 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 17'700 €à titre d'indemnité de préavis,

- 70'800 € à titre de dommages intérêts sur le fondement de l'article 1235-3 du code du travail,

- 5900 € à titre de dommages-intérêts pour inobservation de la procédure,

- 159'300 € à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

- 2994,92 euros à titre de rappel de salaires impayés,

- 294,92 euros au titre des congés payés afférents,

- 1668,37 euros à titre de rappel de 11 jours de récupération,

- 35'400 € à titre de dommages intérêts pour harcèlement et discrimination,

- 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle demande en outre la remise de bulletins de paie rectifiés depuis novembre 2004 et des documents sociaux sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du jugement. Elle conclut au débouté de la demande reconventionnelle, et subsidiairement à la compensation entre les créances des parties.

MOTIVATION

Liminairement il convient de relever qu'au regard de la portée de la cassation l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 21 mai 2013, a définitivement débouté Mme [E] de sa demande en paiement de dommages intérêts pour non respect de la procédure, il a définitivement condamné la société Hinolisari Sucess à payer à Mme [E] la somme de 1668,37 € à titre de rappel de RTT, et condamné Mme [E] à payer à la société Hinolisari Sucess une somme de 1566 € en restitution de l'indu au titre de frais de transport.

S'agissant de la demande de Mme [E] en réparation d'un préjudice moral en raison d'un harcèlement et de discrimination, la cour d'appel dans ses motifs précise qu'elle déboute la salariée par voie de confirmation, mais elle aurait du procéder par voie d'ajout et non de confirmation dans le dispositif , le jugement ne comportant aucune disposition sur ce chef de demande. Quant à la demande en en paiement du rappel de salaires et des congés payés afférents la cour dans son arrêt en date du 21 mai 2013 relève que le premier juge a omis de statuer sur ce chef, mais omet à son tour dans son dispositif de juger cette demande; dès lors la cour, sur ces demandes seulement, devra compléter le jugement déféré.

* Sur la rupture du contrat de travail :

La société prétend qu'avant la prise d'acte de la rupture du contrat de travail Mme [E] avait démissionné de son poste implicitement à compter du mois de mars 2008.

La volonté de démissionner doit être claire et non équivoque.

Il résulte de très nombreuses attestations de salariés, ou d'anciens salariés de la société Hinolisari Sucess mais également de tiers, dirigeants de sociétés concurrentes, consultants, d'un constat d'huissier en date du 11 avril 2008, de document de travail expédié par Mme [E] sous l'adresse électronique '[Courriel 1]' que Mme [E] a travaillé à Londres comme bookeuse pour la société Select Model Management, société concurrente de la société Hinolisari Sucess, dès le mois de mars 2008. Tous ces éléments concordants ne sont pas sérieusement contredits par l'attestation de la gérante de la société Select Model Management qui tente simplement de justifier la présence de Mme [E] dans les locaux de son entreprise et le fait qu'elle ait répondu aux clients francophones de son agence par leurs liens amicaux.

Cependant les pièces produites démontrent que par lettre en date du 19 décembre 2007, Mme [E] a reproché à son employeur de la pousser à quitter l'entreprise, de plus par la suite elle a engagé une procédure de reconnaissance de son inaptitude médicale en sollicitant auprès de la médecine du travail l'organisation des visites médicales de reprise en février 2008, ce qui exclut de sa part toute volonté de démissionner.

La rupture du contrat de travail est donc intervenue à la suite de la prise d'acte de la rupture du contrat par Mme [E] le 13 juin 2008.

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués empêchaient la poursuite du contrat de travail soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Mme [E] se contente de procéder par voie d'affirmation générale, elle ne produit aucun élément de nature à établir une quelconque entrave à l'exercice de ses fonctions de déléguée du personnel, ses allégations sont contredites par M. [D], élu délégué du personnel titulaire en même temps que Mme [E] le 20 mars 2007 ainsi que cela résulte du procès-verbal des élections versé aux débats par Mme [E] elle-même.

Il apparaît que c'est M [D], et non Mme [E] qui a été porteur des demandes des salariés pour la mise en place éventuelle d'une mutuelle et de tickets restaurants. Mme [E] reproche à l'employeur de ne plus l'avoir convoquée aux réunions de délégué du personnel à compter de sa mise à pied conservatoire le 18 mars 2008.

Il est contant que la suspension du contrat de travail du fait d'un arrêt maladie ou de la mise à pied conservatoire, annulée le 30 mai 2008 par la décision d le'inspecteur du travail, n'ont pas pour effet de suspendre le mandat de déléguée du personnel. L'employeur ne s'explique pas sur ce point, il ne conteste pas le défaut de convocation de Mme [E] toutefois ce manquement est à relativiser dès lors que la salariée travaillait alors, non pas ponctuellement comme elle le prétend, mais régulièrement à Londres pour une entreprise concurrente.

Mme [E] soutient, et le premier juge a retenu, que l'employeur au début du mois de décembre a fait pression sur elle pour qu'elle quitte son poste afin de la remplacer par M. [N] à compter du 07 janvier 2008 date à laquelle elle affirme s'être présentée à son poste et avoir fait l'objet d'une forme de licenciement l'employeur lui imposant de partir, l'évinçant de son poste.

Ainsi M. [K], ancien responsable administratif et financier reconnaît avoir adressé à Mme [E] le 07 décembre 2007 une lettre 'banche', préalable à un licenciement-transaction, et atteste qu'il a procédé de la sorte à la demande de l'un des deux dirigeants de la société. Mmes [Z], [M] et M. [W] affirment que Mme [E] s'est présentée le 07 janvier 2008, à son poste de travail selon les uns ou pour un entretien avec Ms [U] et [L] en présence de M. [A] pour les autres, et qu'elle est repartie. Ces mêmes personnes affirment que l'employeur dès le mois de décembre 2007 aurait annoncé le départ de Mme [E] le 07 janvier 2008, après les congés de Noël non travaillés dans l'entreprise. Deux mannequins dont Mme [J] [R] le 03 janvier 2008 ont envoyé à Mme [E] des courriels faisant état de cette annonce.

Cependant, la crédibilité de ces éléments est plus que douteuse.

Certes, il ne fait aucun doute que M. [K] est bien l'expéditeur de la lettre blanche envoyée à destination de la salariée le 07décembre 2007, en revanche la société conteste fermement être le commanditaire de cet envoi, et relève à juste titre que dès le 01 février 2008 M. [K] ne s'est plus présenté à son poste ce qui justifiera son licenciement. Étant également observé que ce salarié responsable administratif et financier a validé, par apposition de sa signature, des remboursements sur le compte personnel de Madame [E] de frais payés avec la carte bancaire de la société pour un montant de plus de 16 000 € ainsi que cela ressort du rapport de l'expert-comptable.

Mme [R] explique dans un courriel avoir expédié le courriel du 03 janvier 2008 à la demande de Mme [E], qui lui en a dicté les termes, tout en réfutant sa teneur, elle explique que les dirigeants de l'entreprise l'avait simplement informée de l'absence de Mme [E] en raison d'un arrêt maladie.

Mme [M], déléguée du personnel suppléante, reconnaît avoir fait une fausse attestation à la demande de Mme [E].

Mme [A] [Z] qui prétend avoir accompagné Mme [E] le 07 janvier 2008 avait quitté l'entreprise depuis le 03 août 2007, comme le démontre le registre d'entrée et de sortie du personnel. Surtout il résulte de pièces produites par l'employeur que Madame [Z] est impliquée dans des faits de mises à disposition de mannequins débutantes en vue de la réalisation de photos pour le catalogue de lingerie d'une société utilisatrice sans contrat de mise à disposition entre cette dernière et la société Hinolisari Sucess, à l'occasion desquelles Madame [E] assurait le rôle de booker, faits retenus par le ministre du travail dans sa décision du 7 novembre 2008.

On peut ajouter que la société Hinolisari Sucess a déposé plaint à l'encontre de Monsieur [W] pour l'établissement d'une fausse attestation.

Monsieur [N], qui, le lendemain de la réception de sa lettre de licenciement par la société Hinolisari Sucess, début février 2009, a établi une attestation en faveur de Madame [E] prétendant avoir été en contact avec la société Hinolisari Sucess en vue de son recrutement pour remplacer Madame [E] dès le mois de novembre 2007, revient expressément sur la teneur de ses premières affirmations, expliquant ses mensonges par la colère et ajoutant que lors de son recrutement l'employeur avait simplement fait état des départs de Madame [Z] et de Madame [T].

Enfin, de très nombreux salariés présents dans l'entreprise le 7 janvier 2008, notamment dans la salle de booking, affirment que Madame [E] ne s'est nullement présentée à son poste de travail et soutiennent qu'à aucun moment l'employeur n'a informé les autres booker en décembre 2007 ou en janvier 2008 que la salariée, en congé maladie depuis le 10 décembre puis en congés payés pendant les congés de fin d'année, devait quitter l'entreprise le 7 janvier 2008. On peut ajouter que Monsieur [D], réfute fermement que ce 7 janvier 2008 une réunion a été organisée entre Madame [E] lui-même et les deux dirigeants de la société.

Au surplus l'employeur, qui justifie de sa satisfaction du travail de la salariée jusqu'à son arrêt maladie le 10 décembre 2007, puisqu'il lui a versé une prime d'un montant de 5900 € bruts au mois de novembre 2007, produit la demande manuscrite de la salariée de prise de congés sans solde les 7, 8 et 9 janvier 2008. Madame [E] ne conteste pas sa signature sur ce document.

Ainsi, au regard de la fausseté avérée de plusieurs attestations ou courriels produits par Madame [E], des éléments concordants apportés par l'employeur, les prétendues violences, la pression morale exercées sur la salariée pour qu'elle quitte l'entreprise en décembre et début janvier 2008 ne sont nullement établies, il en va de même de son licenciement de fait, et de son éviction de son poste le 7 janvier 2008.

Il apparaît que Madame [E], objet par ailleurs de plusieurs avis à tiers détenteur entre les mains de la société Hinolisari Sucess depuis le mois de décembre 2007, a influencé divers témoins pour tenter d'imputer la rupture du contrat de travail à la société Hinolisari Sucess.

La salariée invoque également le refus de l'employeur de lui reconnaître le statut de cadre. Il appartient à celui qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assurait de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification revendiquée.

Mme [E] qui ne justifie d'aucune demande en ce sens en cours de contrat, est défaillante dans son rapport probatoire. Tant son contrat de travail, que l'avenant du 15 novembre 2004 que l'ensemble de ses bulletins de salaire font état de son emploi de Booker et en aucun cas d'un poste de responsable du département femmes. Elle produit un document intitulé attestation au nom de M. [L], dirigeant de l'entreprise, daté du 20 juillet 2006, faisant état de son emploi de directrice du booking du département femmes. M. [L] conteste sa signature sur ce document. L'examen des contrats qu'il a signé corrobore sa contestation, en fait ce document a été signé sans doute possible, par M. [K], il s'agit donc d'un faux, aucun autre document émanant de l'entreprise, compte-rendu de réunion ou autre, faisant mention de son rôle de direction du département femmes n'est versé aux débats, Mme [E] ne produit aucun élément de preuve de nature à établir son rôle de direction sur les bookers affectés à ce département, aucune note aucune directive à leur adresse. Ce grief n'est pas établi.

En revanche il est établi que l'employeur lui devait au moment de la rupture du contrat des jours de RTT. Cependant l'arrêt maladie de la salariée, puis son absence ne lui ont pas permis de prendre ces jours, l'employeur ne conteste pas lui devoir une indemnité à ce titre suite à la rupture du contrat pour un montant de 1668,37 euros .

Par ailleurs Madame [E] reproche à la société de l'avoir privée de son salaire à l'expiration de son arrêt maladie le 17 mars 2008 alors qu'elle avait été déclarée inapte par le médecin du travail à la reprise de son poste le 26 février 2008, de ne pas avoir repris le paiement des salaires à l'expiration du délai d'un mois suivant l'avis d'inaptitude et d'avoir violé son obligation de recherche de reclassement. Cependant il apparaît que les visites de reprise ont été sollicitées par la salariée sans que l'employeur en ait été préalablement averti. Dès lors la procédure de déclaration d'inaptitude et l'avis médical du 26 février 2006 ne sont pas opposables à la société Hinolisari Sucess et les griefs ci-dessus invoqués ne sauraient être retenus.

À l'issue de son arrêt maladie le 18 mars 2008 Mme [E] a été mise à pied à titre conservatoire, étant observé que comme déjà évoqué elle était alors à Londres où elle effectuait un travail pour le compte de la société Select Model Management. Aucun manquement de l'employeur à l'obligation de paiement du salaire ne peut donc lui être fait, certes la mise à pied conservatoire a été annulée par la décision de l'inspecteur du travail du 30 mai 2008, mais d'une part cette dernière a elle-même été annulée par le Ministre du travail et de l'emploi. Surtout l'employeur justifie avoir versé par chèques des 30 avril et 31 mai 2008 chaque mois à Mme [E] la somme de1199,11 € bruts à titre de salaire après retenues des saisies-arrêts pratiquées par le Trésor Public 4158,27 € en avril, 3483,27 € en mai, et, 8365,46 € en juin 2008 après la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par l'intéressée. Aucun manquement de l'employeur n'est établi.

Madame [E] reproche également à l'employeur de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article R 2421-14 du code du travail créé par le décret du 7 mars 2008 qui précise qu'en cas de faute grave avec mise à pied immédiate du salarié la demande d'autorisation de licenciement, s'il n'y a pas de comité d'entreprise, est présentée dans un délai de 8 jours à compter de la date de la mise à pied.

En l'espèce la mise à pied disciplinaire de Mme [E] lui a été notifiée par lettre recommandée reçue le 18 mars 2008, le délai susvisé expirait le 25 mars 2008, l'employeur reconnaît n'avoir saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation que le 31 mars 2008 soit avec six jours de retard, ce qui constitue un manquement à ses obligations légales.

En conséquence, et dans ce contexte, le défaut de convocation de Mme [E] aux réunions de délégués du personnel et le non paiement de 1663 € au titre des jours de RTT, ou encore le retard de six jours pour saisir l'inspecteur du travail aux fins d'autorisation du licenciement de Mme [E] n'empêchaient pas la poursuite de l'exécution du contrat de travail.

Au regard de l'ensemble de ces éléments il convient d'infirmer le jugement entrepris et de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Madame [E] doit produire les effets d'une démission, de la débouter de ses demandes en paiement d'indemnités compensatrices de préavis, de congés payés sur préavis, de licenciement, de dommages intérêts sur le fondement de l'article 1235-3 du code du travail et en paiement d'une indemnité pour violation du statut protecteur.

Il sera également infirmé en ce qu'il a ordonné la remise à la salariée de bulletins de salaire et de documents de rupture rectifiés.

* Sur la demande en paiement de dommages intérêts pour harcèlement et discrimination:

Mme [E] invoque un acharnement à son encontre et un recours abusif à la justice pénale, et sollicite le paiement de dommages intérêts pour discrimination et harcèlement sans distinction.

Or, d'une part aucun abus de recours à la justice n'est démontré.

De plus comme ci-dessus évoqué seul le défaut de convocation de Mme [E] aux réunions de délégués du personnel, le non paiement de 1663 € au titre des jours de RTT, et un retard de six jours pour saisir l'inspecteur du travail aux fins d'autorisation de son licenciement sont établis.

Ces faits pris dans leur ensemble ne permettent pas de présumer un harcèlement moral.

S'agissant de la discrimination l'employeur justifie par diverses attestations, courriels que Mme [E] était partie travailler chez un concurrent en Angleterre dès le mois de mars 2008, ce qui caractérise un élément objectif étranger à toute volonté de discrimination. Dès lors complétant le jugement il convient de débouter Mme [E] de ce chef.

* Sur la demande en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés :

Cette demande n'est absolument pas explicitée, on ignore la période concernée, les éléments de calcul, dès lors complétant le jugement il convient de débouter Mme [E] de ce chef.

* Sur la demande reconventionnelle en remboursement de la somme de 16'985,84 euros la répétition d'un indu :

Comme ci-dessus évoqué, dans son arrêt en date du 21 mai 2013, la cour d'appel de Paris a définitivement statué sur la demande de la société en remboursement de la somme de 16'185,84 euros ainsi que sur celle de 1679,81 euros.

* Sur les autres demandes

Madame [E] qui succombe sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée à payer à la société Hinolisari Sucess une indemnité d'un montant de 3000 €en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

RÉFORME le jugement déféré en ce qu'il a dit fondée la prise d'acte par Madame [E] de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, en ce qu'il a condamné la société Hinolisari Sucess à payer à Madame [E] des indemnités de préavis, d'indemnité de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts au titre de l'article L 1235-3 du code du travail et d'une indemnité pour violation du statut protecteur et a ordonné la remise de bulletins de paie de documents de rupture rectifiés,

et statuant de nouveau

DIT QUE, la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [E] le 17 juin 2008 produit les effets d'une démission,

DÉBOUTE Madame [E] de ses demandes en paiement des indemnités compensatrices de préavis, de congés payés sur préavis, de licenciement, de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L 1235-3 du code de travail et d'une indemnité pour violation du statut protecteur ainsi que de sa demande de remise d'un bulletin de paie et de documents de fin de contrat rectifiés ,

Y ajoutant,

DÉBOUTE Madame [E] de ses demandes en paiement de dommages intérêts pour harcèlement, discrimination et en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés afférents,

CONDAMNE Madame [E] à verser à la société Hinolisari Sucess la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [E] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/14098
Date de la décision : 10/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°16/14098 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-10;16.14098 ?
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