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10/01/2018 | FRANCE | N°16/07110

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 10 janvier 2018, 16/07110


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 10 JANVIER 2018



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/07110



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/05072





APPELANTE :



SCI PAUL BERT prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous

le numéro 517 734 307

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat p...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 10 JANVIER 2018

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/07110

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/05072

APPELANTE :

SCI PAUL BERT prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 517 734 307

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant

Représentée par Me Philippe LEGRAND de l'ASSOCIATION LEGRAND ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R054, avocat plaidant

INTIMÉS :

Madame [J] [Y]

Née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 2] (93)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Monsieur [R] [Y]

Né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 2] (93)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentés par Me Vincent CANU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0869

SARL METROPOL HÔTEL prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 429 083 801

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, avocat postulant

Représentée par Me Isabelle HUGUES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0872, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère

Madame Sandrine GIL, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 28 novembre 2002, Mme [U] [Y], M. [R] [Y] et Mme [J] [Y] ont donné à bail en renouvellement à la SARL Metropol Hôtel un immeuble situé [Adresse 3], pour une durée de trois, six ou neuf ans, à compter du 1er avril 2003, pour l'exploitation d'un commerce d'hôtellerie.

Par acte extrajudiciaire du 19 décembre 2011, Mme [J] [Y] et M. [R] [Y] ont fait délivrer à la «'Société Hôtelière du Metropol Hôtel SA'» un congé pour le 30 juin 2012 avec offre de renouvellement à compter du 1er juillet 2012 moyennant un loyer annuel en principal de 125 000 €, hors taxes et hors charges.

Par acte notarié du 1er août 2013, Mme [J] [Y] et M. [R] [Y] ont promis de vendre à la SARL EFO 3 cet immeuble.

Par courrier daté du 5 septembre 2013, le conseil de la SARL Metropol Hôtel a envoyé au cabinet IFF GERANCE, administrateur de biens chargé de la gestion de l'immeuble des consorts [Y], trois exemplaires originaux de l'acte de renouvellement du bail à effet du 1er juillet 2012, signés de la locataire.

Par courrier daté du 13 novembre 2013, le conseil de la SARL Metropol Hôtel a mis en demeure le cabinet IFF GERANCE en sa qualité d'administrateur de biens des consorts [Y] de réaliser des travaux de désenfumage des locaux sur le fondement de l'obligation de délivrance et d'entretien du bailleur.

Par acte notarié du 30 décembre 2013, Mme [J] [Y] et M. [R] [Y] ont vendu à la SCI Paul Bert venant aux droits de la SARL EFO 3, l'immeuble qui faisait I'objet de la promesse de vente.

Par acte extrajudiciaire du 21 janvier 2014, la SCI Paul Bert a notifié à la SARL Metropol Hôtel l'exercice de son droit d'option sur le fondement de l'article L145-57 du code de commerce.

Par jugement en date du 15 février 2016, le tribunal de grande instance de Paris a':

- Dit et jugé que le bail a été renouvelé au 1er juillet 2012;

- Dit et jugé que l'exercice du droit d'option par la SCI Paul Bert, par acte extrajudiciaire du 21 janvier 2014, est nul et de nul effet et n'est pas opposable à la SARL Metropol Hôtel ;

- Dit et jugé que les consorts [Y] ont commis une faute contractuelle qui est directement à l'origine de la situation juridique dans laquelle se retrouve la SCI Paul Bert, privée de la possibilité d'exercer son droit d'option ;

Avant dire droit, sur la perte de chance subie par la SCI Paul Bert':

- Ordonné une mesure d'expertise et désigné pour y procéder M. [I] [M] avec mission notamment de rechercher la valeur locative des lieux loués à la date du 1er juillet 2012, de déterminer le montant de l'indemnité d'occupation et de l'indemnité d'éviction dans le cas d'une perte de fonds et dans le cas d'un transfert de fonds,

- Débouté la SARL Metropol Hôtel de sa demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre de la SCI Paul Bert ;

- Débouté la SARL Metropol Hôtel de sa demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre des consorts [Y] ;

- Débouté les consorts [Y] de leur demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre de la SARL Metropol Hôtel ;

- Dit et jugé que la SARL Metropol Hôtel devra garantir les consorts [Y] de toutes sommes réglées par eux au titre du ravalement c'est-à-dire de la mise en propreté des façades de l'immeuble (notamment de la façade [Adresse 3]) à l'exclusion des travaux de reprise de structures ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

- Réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

La SCI Paul Bert a interjeté appel de la décision par déclaration en date du 23 mars 2016.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 20 septembre 2017 au visa des articles 1134, 1382 et 1383 du code civil et de l'article L145-57 du code de commerce, la SCI Paul Bert demande à la cour de':

- Recevoir la SCI Paul Bert en son appel et l'y déclarer bien fondée.

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le bail a été renouvelé au 1er juillet 2012 et en ce qu'il a dit que l'exercice du droit d'option signifié par la SCI Paul Bert à la société Metropol Hôtel le 21 janvier 2014 était nul et de nul effet.

Statuant à nouveau,

- Dire qu'aucun accord définitif n'est intervenu entre les consorts [Y] et la société Metropol Hôtel sur le renouvellement amiable du bail au 1er janvier 2012 moyennant un loyer annuel de 90 000 € en principal.

En conséquence,

- Dire et juger valable et opposable à la société Metropol Hôtel le droit d'option notifié à celle-ci par la société Paul Bert le 21 janvier 2014.

- Dire qu'en omettant de révéler à la SCI Paul Bert l'existence du congé avec offre de renouvellement signifié à la société Metropol Hôtel le 19 novembre 2011 les consorts [Y] ont commis à son égard une faute grave.

- Dire que la SCI Paul Bert n'avait d'autre choix que celui de signifier son droit d'option à la société Metropol Hôtel pour retrouver la libre disposition des lieux et qu'elle devra en conséquence lui payer le montant de l'indemnité d'éviction quel qu'en soit le montant.

- Dire et juger que la SCI Paul Bert ne pouvant plus exercer son droit de repentir elle subit une perte de chance équivalente à 5% du montant de l'indemnité d'éviction qu'elle devra verser à la société Metropol Hôtel, soit la somme de 210 000 €.

- Condamner les consorts [Y] à payer à la SCI Paul Bert à titre de dommages et intérêts la somme de 210 000 €.

Subsidiairement,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les consorts [Y] avaient commis une faute contractuelle qui est directement à l'origine de la situation juridique dans laquelle se trouve la SCI Paul Bert, privée de la possibilité d'exercer son droit d'option.

- Dire et juger que le préjudice subi par la SCI Paul Bert est constitué par l'impossibilité de réaliser les travaux permettant le changement de catégorie hôtelière de l'établissement et qu'il en résulte tant une perte de loyer qu'une perte d'Excédent Brut d'Exploitation dont le montant représente 1 078 080 €.

En conséquence,

- Condamner les consorts [Y] à payer à la SCI Paul Bert la somme de 1 078 080 € à titre de dommages et intérêts.

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise et désigné pour y procéder M. [I] [M].

En toute hypothèse,

- Condamner les consorts [Y] à payer à la SCI Paul Bert la somme de 10 548 € au titre du solde des travaux de ravalement.

- Débouter la société Metropol Hôtel de sa demande de dommages et intérêts.

- Débouter les consorts [Y] de l'intégralité de leurs demandes.

- Condamner la société Metropol Hôtel et les consorts [Y] à payer chacun à la SCI Paul Bert la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la société Metropol Hôtel et les consorts [Y] aux dépens dont distraction au profit de Maître Patricia HARDOUIN avocat aux offres de droit conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 7 novembre 2017 au visa des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil, des articles L145-60 et L145-57 du code de commerce et de l'article 564 du code de procédure civile, Mme [J] [Y] et M. [R] [Y] demandent à la cour de':

- Infirmer le jugement entrepris excepté en ce qu'il a débouté la SCI Paul Bert et la SARL Metropol Hôtel de leurs demandes de dommages et intérêts ;

Et statuant à nouveau,

- Déclarer la SCI Paul Bert irrecevable en sa demande portant sur les travaux de ravalement ;

- Débouter la SCI Paul Bert de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Débouter la SARL Metropol Hôtel de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la SARL Metropol Hôtel à garantir les Consorts [Y] de toute somme supplémentaire qui pourrait être mise à leur charge au titre du ravalement de l'immeuble ;

- Condamner la SARL Metropol Hôtel à payer aux Consorts [Y] la somme de 32 558,90 € au titre des travaux de ravalement ;

- Condamner la SARL Metropol Hôtel à payer aux Consorts [Y] la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner la SCI Paul Bert ou tout succombant à payer aux Consorts [Y] la somme de 30 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- Condamner la SCI Paul Bert ou tout succombant aux entiers dépens d'appel dont distraction sera ordonnée au profit de Vincent CANU, avocat à la cour d'appel de PARIS.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 7 novembre 2017 au visa des articles 1101, 1134 et 1147 du code civil et de l'article L145-57 du code de commerce, la SARL Metropol Hôtel demande à la cour de':

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit et jugé nul l'exercice du droit d'option de la SCI Paul Bert et dit et jugé renouvelé le bail consenti à la SARL Metropol Hôtel à compter du 1er juillet 2012 moyennant un loyer annuel de 90 000 €

- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SARL Metropol Hôtel de sa demande de 10 000€ de dommages et intérêt à l'encontre de la SCI Paul Bert et en ce que la part contributive exacte de la SARL Metropol Hôtel aux travaux de ravalement n'a pas été fixée.

- Dire et juger que le bail a été renouvelé à compter du 1er juillet 2012 au prix de 90 000 € annuels non assujettis à la TVA.

- Dire et juger nul le droit d'option exercé par la SCI Paul Bert alors que le bail était renouvelé antérieurement.

Subsidiairement, si la Cour validait le droit d'option,

- Fixer l'indemnité d'éviction à la somme de 15 000 000 € et condamner la SCI Paul Bert à la payer à la SARL Metropol Hôtel.

- Chiffrer le montant des sommes que la SARL Metropol Hôtel devra payer à M. et Mme [Y] au titre des travaux de ravalement au vu de la facture de la société MARTEAU en date du 24 juillet 2015 en excluant les travaux de structure et constater le règlement de 55 000 € soit un montant supérieur à la facture MARTEAU

- Débouter les consorts [Y] du surplus de leurs demandes relatives aux travaux de ravalement et de facture d'architecte

- Débouter les consorts [Y] de leurs demandes de 5 000 € de dommages et intérêts à l'encontre de la SARL Metropol Hôtel

- Dire et juger qu'en poursuivant cette procédure et en refusant parallèlement d'exécuter ses obligations contractuelles la SCI Paul Bert a fautivement causé un préjudice à la SARL Metropol Hôtel dont elle doit réparation.

- La condamner à payer à la SARL Metropol Hôtel 10 000 € de dommages et intérêts.

- Débouter la SCI Paul Bert et les consorts [Y] de l'ensemble de leurs demandes

- Condamner la SCI Paul Bert et les consorts [Y] à payer à la SARL Metropol Hôtel 8 000€ d'article 700 du code de procédure civile au stade de l'appel ;

- Condamner la SCI Paul Bert en tous les dépens dont distraction au profit de la SELARL BDL AVOCATS sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le renouvellement du bail :

Il résulte des pièces produites qu'un congé offre de renouvellement au prix de 125.000 € a été délivré le 19 décembre 2011 à effet du 30 juin 2012, par les bailleurs au preneur.

Le 25 septembre 2012, le cabinet IFF GERANCE, mandataire des bailleurs a adressé à la société locataire un courrier rédigé ainsi qu'il suit :

'pour faire suite au congé avec offre de renouvellement qui vous a été notifié en date du 19 décembre 2011, nous vous informons comme convenu, que votre loyer annuel et en principal sera porté rétroactivement du 1er juillet 2012 à la somme de 90.000€ (...) soit la somme de 22.500€ par trimestre. Ce nouveau loyer figure sur votre avis d'échéance d'octobre 2012, ci-joint ainsi que le complément du dépôt de garantie soit 3.745€.

Nous vous précisons que le renouvellement de bail prenant effet au 1er juillet 2012 vous parviendra sous quelques jours.'

Ainsi que l'ont retenu les premiers juges par ce courrier, au travers notamment de la mention 'comme convenu' y figurant, le cabinet IFF GERANCE confirme à la SARL METROPOL HOTEL l'existence d'un accord intervenu entre bailleurs et locataire sur le montant du loyer annuel du bail renouvelé au 1er juillet 2012.

Toutes les échéances ont été établies sur la base de ce nouveau loyer de 90.000 €, et payées par le locataire ainsi que le complément du dépôt de garantie versé en octobre 2012.

Le 2 août 2012, le notaire des consorts [Y] a adressé à la société METROPOL HOTEL l'avenant de renouvellement, lequel a été régularisé par la locataire et retourné à l'administrateur de biens le 5 septembre 2012.

L'écrit n'est pas exigé pour la validité d'un bail commercial. Celui-ci est conclu dès l'accord de volonté des parties.

Dès lors, la signature du bail par la société locataire est sans incidence sur le renouvellement du bail.

En l'espèce, la proposition des bailleurs de fixer le prix du loyer du bail renouvelé à un prix de 90.000 €, inférieur à celui proposé dans le congé avec offre de renouvellement, a été acceptée par la société locataire, ainsi que l'établit le paiement régulier des loyers sur la base du loyer nouvellement appelé et le courrier du 25 septembre 2012, sus visé.

Ainsi que l'ont noté les premiers juges, il importe peu que le montant du loyer sur lesquels les parties se sont finalement mises d'accord, soit inférieur au montant du loyer demandé par les consorts [Y] dans leur congé et soit inférieur au résultat obtenu en application de la méthode hôtelière, cela ne peut remettre en cause le caractère définitif du bail, les parties demeurant libre de s'accorder sur le prix du loyer du bail renouvelé.

Dès lors que le bail a été renouvelé à compter du 1er juillet 2012, il n'est plus possible au bailleur d'exercer son droit d'option.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul et non opposable à la SARL METROPOL HOTEL l'exercice par la SCI PAUL BERT de son droit d'option, par acte extrajudiciaire du 21 janvier 2014.

Sur la responsabilité des consorts [Y] :

La SCI PAUL BERT recherche la responsabilité des consorts [Y] en soutenant qu'ils ont commis une faute qui lui cause un préjudice financier.

Selon elle, ils ont commis une faute :

- en ne lui révélant pas la réalité de la situation locative de l'immeuble vendu :

- en omettant de révéler à l'acquéreur l'existence du congé avec offre de renouvellement signifié à la société METROPOL HOTEL le 19 décembre 2011 pour le 30 juin 2012,

- en omettant de révéler à l'acquéreur le courrier adressé par la société IFF GERANCE, administrateur de biens des bailleurs, le 25 septembre 2012 à la société METROPOL HOTEL,

- en dissimulant l'envoi par leur notaire de l'avenant de renouvellement du bail avec un loyer de 90.000 €/an en principal au locataire pour signature le lendemain de la régularisation de la promesse de vente,

- en ne révélant pas la signature de l'avenant de renouvellement adressé par le conseil de la société METROPOL HOTEL à la société IFF GERANCE, administrateur de biens des bailleurs le 5 septembre 2013,

- en taisant la mise en demeure adressée par lettre recommandée AR le 13 novembre 2013 par le conseil du preneur au cabinet IFF GERANCE, concernant la réalisation des travaux de désenfumage selon devis en date du 9 novembre 2012 pour un montant de 16.234,04 € TTC.

Les consorts [Y] soutiennent que M. [O] [F] est un professionnel averti de l'immobilier et du domaine hôtelier plus particulièrement, alors que Mme [Y], médecin et M. [Y], conservateurs des hypothèques, sont des profanes en la matière. Ils soutiennent qu'ils n'ont commis aucune faute, pour eux le bail n'a pas été renouvelé et comme ils s'y étaient engagés, ils n'ont pas signé le nouveau bail. Ils soulignent que l'existence du congé n'a pas été dissimulé à la SCI PAUL BERT, laquelle n'a pu se méprendre.

En page 5 de la promesse notariée du 1er août 2013, il est stipulé à propos de l'entrée en jouissance :

'un projet de renouvellement de ce bail a été envisagé en 2012, prévoyant un loyer annuel de 90.000 €. Une copie de ce projet est demeurée ci-après annexée sur support électronique. Depuis lors, le locataire paye sur la base de ce nouveau loyer. Toutefois, ce projet n'a pas à ce jour été régularisé. Le promettant s'engage à ne pas régulariser ce renouvellement.'

En page 4 de l'acte notarié de vente du 30 décembre 2013, il a été stipulé, toujours à propos de l'entrée en jouissance :

'un projet de renouvellement de ce bail (celui du 28 novembre 2002) a été envisagé en 2012, prévoyant un loyer annuel de 90.000 €.

Depuis lors, le locataire paye sur la base de ce nouveau loyer. Toutefois, ce projet n'a pas à ce jour été régularisé.

Le vendeur déclare qu'il n'a pas régularisé ce renouvellement, conformément à l'engagement pris aux termes de la promesse unilatérale de vente régularisée par Me [Z] [U], notaire à [Localité 5] le 1er août 2013".

Mme [J] [K]-[Y] a adressé le 11 juillet 2013 à M. [O] [F] un courriel rédigé ainsi qu'il suit :

'(...)

Pour le bail actuel :

notre notaire l'a demandé par courrier au cabinet de gérance, qui va le lui envoyer, ainsi que d'autres documents demandés.

Je n'ai toujours pas la version pdf de ce bail, par contre j'ai les renseignements suivants: il s'agit exactement des mêmes conditions qu'en 2003, donc le même texte que celui que je vous ai donné ce matin.

Il est signé du 01/07/2012

le loyer a été fixé à 90.000 €/an.(...)'

Compte tenu du courriel ci-dessus reproduit, la SCI EFO 3, représentée par M. [O] [F], signataire de la promesse de vente et la SCI PAUL BERT, ayant pour associé M. [O] [F], acquéreur du bien dont il n'est pas contesté qu'ils sont des professionnels de l'immobilier hôtelier, n'ont pu se méprendre sur l'existence d'un congé, la question de l'existence d'un avenant de renouvellement n'ayant aucun sens à défaut d'un tel acte.

Des mentions contenues dans les actes, les acquéreurs pouvaient déduire que le renouvellement du bail avait été négocié entre les parties, que le prix proposé par les bailleurs, figurant dans le projet d'avenant joint à la promesse de vente, était fixé à 90.000 €, que ce nouveau loyer avait été accepté par le preneur, puisque mention était faite de son règlement par ce dernier.

La régularisation du bail, auquel les actes faisaient allusion, étant sans incidence sur la validité du bail renouvelé, il importe peu que celle-ci soit ou non intervenue.

C'est en vain que l'acquéreur soutient que le loyer de 90.000 €, correspondant au loyer plafonné applicable au 1er juillet 2012, n'aurait été qu'un loyer provisoire. En effet, sa mention dans l'avenant, lequel était joint à la promesse de cession, ne laisse aucun doute sur le fait qu'il s'agissait bien du nouveau loyer.

Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le fait de ne pas avoir révélé ni l'envoi par leur notaire du projet d'avenant de renouvellement, ni la signature unilatérale de l'avenant par le locataire, n'est pas constitutif d'une faute car aucun de ces événements n'a eu d'incidence sur le caractère définitif du bail qui était acquis bien avant leur survenance.

De même le courrier du 25 septembre 2012, n'a fait que constater un accord préexistant.

En outre, le fait de ne pas avoir révélé la mise en demeure portant sur les travaux de désenfumage est sans lien avec le préjudice financier allégué par la SCI Paul Bert.

En conséquence, il n'est pas établi que les consorts [Y] ont commis une faute ouvrant droit à réparation, l'acquéreur, compte tenu de sa qualité de professionnel de l'immobilier hôtelier ayant les éléments suffisants pour connaître la situation locative du bien acquis.

Sur le ravalement :

Les consorts [Y] sollicitent la condamnation de la société METROPOL HOTEL à leur payer la somme de 32.558,90 € (55.000 € + 17.558,90 € - 40.000 € correspondant à deux versements de 20.000 € chacun du 1er avril 2016 et 15 septembre 2017). Ils soutiennent qu'en application du bail d'origine le preneur devait supporter le coût du ravalement ; que c'est le défaut d'entretien régulier qui a eu des conséquences sur la dégradation des biens et que la société locataire doit supporter seule les conséquences de ses manquements.

La société METROPOL HOTEL, ne conteste pas devoir supporter la charge du ravalement. Elle indique avoir procédé le 7 novembre 2017, par chèque de banque émis au bénéfice de la CARPA à un nouveau versement de 15.000 €, portant ainsi le total de ses versements à la somme de 55.000 € à laquelle elle limite son engagement, le surplus des demandes correspondant à des travaux de structures qui ne peuvent selon elle être mises à sa charge.

Il résulte des pièces produites aux débats que :

- le coût du ravalement de l'hôtel s'est élevé à la somme totale de 60.465,75 € HT soit 72.558,90 € TTC selon une facture n°00107184 du 24 juillet 2015 de la société Marteau.

-selon une clause de l'acte de vente du 30 décembre 2013 'le vendeur s'engage à défaut de prise en charge des (travaux de ravalement) par la SARL METROPOL HOTEL, à régler l'intégralité du montant des travaux de ravalement, pénalités de retard et peines d'amende pouvant en résulter, que l'acquéreur pourrait être amené à supporter et ce à première demande ;

à titre de sûreté et garantie de l'engagement du vendeur les parties ont convenu de séquestrer la somme de 55.000 €,

- par ordonnance de référé en date du 13 juin 2016, les consorts [Y] ont été condamnés à payer à la SCI PAUL BERT la somme de 17.558,90 € au titre du solde des travaux de ravalement.

Se prévalant d'un devis qu'elle avait antérieurement fait réaliser en 2013, la société METROPOL HOTEL soutient qu'elle ne devrait pas supporter les postes suivants : coût du contrôle des scellements soit 16660,50 €, restauration de la pierre avec retaille complète des parements soit 13.800 €, sondage général piochage jusqu'à la partie saine, brossage et dépoussiérage soit 5335 €, étage d'attique sur les parties maçonnées, piochement des parties mal adhérentes ou dégradées soit 880 €.

Outre le fait que ces postes ne se retrouvent pas dans la facture de la société MARTEAU, ces travaux ne relèvent pas de la reprise des structures mais bien du ravalement. Ils doivent en conséquence être laissés à la charge de la société METROPOL HOTEL.

Le versement de la somme de 40.000 € étant reconnu par les consorts [Y] et celui de la somme de 15.000 € étant établi par un chèque de banque, il convient de les déduire.

En conséquence, la société METROPOL HOTEL sera condamnée à verser aux consorts [Y] une somme de 17.558,90 € (72.558,90 € TTC - 40.000 € - 15.000 €).

Sur la demande de la SCI PAUL BERT de condamnation des consorts [Y] au titre du ravalement :

La SCI PAUL BERT sollicite la condamnation des consorts [Y] à lui payer une somme de 10.548 € TTC soit 8.790 € HT, correspondant à une facture du 18 juin 2015 s'agissant des honoraires de son architecte pour le suivi des travaux de ravalement.

Les consorts [Y] concluent à juste titre à l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle en cause d'appel en application de l'article 564 du code de procédure civile.

Sur la demande de dommages-intérêts formée par la société METROPOL HOTEL à l'encontre la SCI PAUL BERT :

Selon le dispositif de ses écritures, la société METROPOL HOTEL sollicite la condamnation de la SCI PAUL BERT à lui payer une somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour avoir poursuivi cette procédure et en refusant parallèlement d'exécuter ses obligations contractuelles.

Dans le corps de ses écritures elle sollicite une somme de 100.000 € à titre de dommages-intérêts. Conformément à l'article 954 du code de procédure civile cette prétention non énoncée au dispositif est irrecevable.

L'action de la SCI PAUL BERT à l'encontre de la société METROPOL HOTEL ne constitue pas en soi une faute, en l'absence de tout élément de nature à caractériser un abus dans l'exercice de cette action, un tel abus ne pouvant résulter de la mauvaise appréciation de la SCI PAUL BERT de ses droits.

Par jugement en date du 9 février 2017, la société METROPOL HOTEL a obtenu, avec exécution provisoire, la condamnation de la SCI PAUL BERT à réaliser à ses frais les travaux d'agrandissement de la trappe de désenfumage, ainsi qu'au coût des travaux de création d'une chambre accessible aux personnes à mobilité réduite.

La société locataire soutient également que la SCI PAUL BERT aurait installé un échafaudage inutile pendant trois mois de juillet à septembre 2014, lui portant ainsi préjudice. Elle n'en apporte cependant pas la preuve.

La SCI PAUL BERT soutient que la demande de la société METROPOL HOTEL serait irrecevable et mal fondée. S'agissant de la demande relative aux dommages-intérêts pour non-exécution des travaux de désenfumage et de mise aux normes des chambres d'handicapées, elle soutient que cette demande est irrecevable faute de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant et étant de surcroît formée pour la première fois en cause d'appel.

La cour relève que cette demande de dommages-intérêts ne se rattache pas aux prétentions originaires par un lien suffisant et qu'elle est de ce fait irrecevable.

Sur la demande de dommages-intérêts formée par les consorts [Y] à l'encontre de la société METROPOL HOTEL :

Les consorts [Y] sollicitent la condamnation de la SARL METROPOL HOTEL à leur payer une somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts puisqu'ils ont été contraints d'exécuter les obligations du preneur en ses lieux et place en réglant le coût du ravalement.

Cependant, en application de l'article 1231-6 du code civil, ils n'établissent avoir subi de par la mauvaise foi de la société METROPOL HOTEL un préjudice indépendant du retard apporté au paiement. Il y a donc lieu de les débouter de ce chef de demande.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit et jugé que le bail a été renouvelé au 1er juillet 2012;

- Dit et jugé que l'exercice du droit d'option par la SCI Paul Bert, par acte extrajudiciaire du 21 janvier 2014, est nul et de nul effet et n'est pas opposable à la SARL Metropol Hôtel ;

- Débouté la SARL Metropol Hôtel de sa demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre de la SCI Paul Bert ;

- Débouté la SARL Metropol Hôtel de sa demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre des consorts [Y] ;

- Débouté les consorts [Y] de leur demande en dommages-intérêts dirigée à l'encontre de la SARL Metropol Hôtel ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que les consorts [Y] n'ont pas commis de faute contractuelle,

Déboute la SCI Paul Bert de ses demandes de dommages-intérêts dirigées contre les consorts [Y],

Condamne la société METROPOL HOTEL à payer à Mme [J] [Y] et M. [R] [Y], ensemble, une somme de 17.558,90€, au titre du solde du coût du ravalement,

Déclare irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande en paiement des honoraires d'architecte formée par la SCI Paul Bert à l'encontre des consorts [Y],

Déboute la société METROPOL HOTEL de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la SCI Paul Bert et pour le surplus la déclare irrecevable,

Déboute les consorts [Y] de leur demande de dommages-intérêts formée contre la société METROPOL HOTEL,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI Paul Bert aux dépens de la première instance et de l'appel avec distraction au profit de la SELARL BDL, avocats et de Me Vincent Canu, avocat en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/07110
Date de la décision : 10/01/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°16/07110 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-10;16.07110 ?
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