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19/12/2017 | FRANCE | N°14/10313

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 19 décembre 2017, 14/10313


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 19 Décembre 2017

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10313



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Août 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/06966





APPELANTE

Madame [N] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1]



représ

entée par Me Xavier CHILOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : B0377





INTIMEE

Société ELOA PROD

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Lucie WALKER, avocat au barreau de PARIS, to...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 19 Décembre 2017

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10313

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Août 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/06966

APPELANTE

Madame [N] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1]

représentée par Me Xavier CHILOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : B0377

INTIMEE

Société ELOA PROD

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Lucie WALKER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0630 substitué par Me David MARCOTTE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0630

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Sylvie HYLAIRE, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Sylvie HYLAIRE, président

Madame Valérie AMAND, conseiller

Madame Jacqueline LESBROS, conseiller

Greffier : Mme Laurie TEIGELL, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Sylvie HYLAIRE, Présidente et par Madame Aurélie VARGAS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Eloa Prod, créée en 2005, est une société de production de fiction télévisuelle qui emploie plus de 10 salariés.

Au début de l'année 2013, elle a reçu l'accord d'une chaîne de télévision pour produire un téléfilm intitulé «'Family Show'», réalisé par Monsieur [S] [Y]. Le contrat conclu le 13 février 2013 prévoyait que le tournage ait lieu du 25 mars au 24 avril 2013, soit pour une durée de 23 jours.

Les journées des 20, 21, 22, 25 et 26 mars 2013 ont été consacrées à la préparation du tournage qui s'est finalement déroulé du 27 mars au 23 avril 2013.

Pour la réalisation de ce téléfilm, Monsieur [S] [Y] a présenté à la société Eloa Prod la candidature de Monsieur [B] [K] pour le poste de directeur de la photographie. C'est dans ce contexte que Monsieur [E], directeur de production de la société Eloa Prod, a pris contact avec Monsieur [K] et a engagé des discussions avec son agent, la société Cinélité.

Un contrat de travail à durée déterminée d'usage technicien en qualité de directeur photo spécialisé, statut cadre, a été adressé à l'agence Cinélité le 14 mars 2013 pour la période de préparation du tournage, soit du 20 au 22 mars et du 25 au 26 mars inclus, moyennant une rémunération brute hebdomadaire de 2.375,85 €, les parties ne s'étant alors pas entendues sur les conditions de rémunération de la poursuite de la collaboration.

Le 22 mars 2013, la société Eloa Prod informait l'agence Cinélité que le 'contrat' ne serait pas reconduit et rappelait que le contrat adressé le 14 mars 2013 n'avait pas été retourné.

Des discussions ont également été engagées avec les membres de l'équipe de Monsieur [K], constituée notamment de Monsieur [D] [R] et de Madame [N] [L] ainsi que de Monsieur [V].

Le 22 mars 2013, un contrat de travail à durée déterminée d'usage de technicien en qualité de premier assistant OPV spécialisé pour la période de la préparation du tournage, soit du 20 au 22 mars et du 25 au 26 mars 2013 inclus, moyennant une rémunération brute hebdomadaire de 1.163,25 €, a été remis à Monsieur [R] par Monsieur [E].

Madame [L] ne s'est pas présentée.

Les contrats à durée déterminée d'usage établis pour Monsieur [K] et Monsieur [R] n'ont pas été signés ni retournés par eux.

Le 22 mars 2013 en début d'après-midi, Monsieur [R] a quitté son poste de travail, dans des circonstances contestées entre les parties.

Le salaire convenu dans le contrat de travail à durée déterminée lui a été réglé ainsi qu'à Monsieur [K] qui a terminé sa mission le 26 mars 2013.

Aucun contrat n'a ensuite été établi pour le tournage du film, la société Eloa Prod ayant fait appel à un autre chef opérateur et à l'équipe de celui-ci.

*

Le 22 mai 2013, Monsieur [K], Monsieur [R], et Madame [L] ont saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin de voir ordonner la requalification de leurs contrats de travail à durée déterminée d'usage en contrat à durée indéterminée.

Par jugement rendu le 26 août 2014, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Madame [L] de l'ensemble de ses demandes, l'a condamnée aux dépens et a débouté la société Eloa Prod de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par déclaration enregistrée au greffe le 23 septembre 2014, Madame [L] a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

Madame [L] demande à la cour d'infirmer la décision déférée, de requalifier le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et de :

- condamner la société Eloa Prod à lui verser les sommes suivantes, assorties des intérêts légaux :

* 2.326 € à titre d'indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée,

* 8.141 € à titre de rappel de salaires outre 814 € au titre des congés payés afférents, correspondant à l'ensemble de la période de tournage,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture illicite et anticipée du contrat de travail,

* 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- prononcer l'exécution provisoire pour le tout sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile.

La société Eloa Prod conclut à la confirmation de la décision déférée, au rejet de l'ensemble des prétentions du salarié et sollicite la somme de 2.000 €sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la requalification du contrat de travail d'usage à durée déterminée

Madame [L] sollicite la requalification de son contrat de travail à durée déterminée d'usage en contrat de travail à durée indéterminée au motif que la société Eloa Prod n'aurait pas respecté les règles de forme applicables.

La société Eloa Prod fait valoir qu'aucun contrat de travail n'a été établi pour Madame [L] car celle-ci ne s'est pas présentée pour la préparation du tournage.

Madame [L] explique qu'il n'était pas prévu qu'elle intervienne dans la phase de préparation du tournage mais seulement pour le tournage lui-même.

Ce fait est confirmé par le témoignage de Monsieur [E] qui déclare : '[N] [L] n'a jamais été concernée par la phase préparation'.

Dès lors, la société Eloa Prod ne saurait se retrancher derrière l'absence de l'appelante pour échapper à ses éventuelles obligations.

Or, il ressort des explications données par la société Eloa Prod elle-même que, si des pourparlers avaient été engagés avec Monsieur [K] quant aux conditions financières de la poursuite de leur collaboration à l'issue de la période de préparation du tournage, Monsieur [E] avait rencontré Madame [L], en sa qualité de 'membre de l'équipe' de Monsieur [K] afin d'évoquer, comme pour Monsieur [R], 'sa participation au projet', Monsieur [E] ajoutant : 'nous étions d'accord sur leurs salaires'.

Il était donc bien prévu que Madame [L] participe au tournage selon des conditions d'embauche sur lesquelles les parties avaient trouvé un accord, cet engagement constituant une promesse d'embauche.

L'existence de cette promesse est d'ailleurs confirmée par le message adressé le 20 mars 2013 à l'appelante par Madame [O] [N], assistante de production de la société, qui lui demandait de lui adresser sa fiche de renseignement, Madame [L] ayant alors donné ses renseignements d'identité et la réponse, à laquelle étaient joints les justificatifs des visites médicales du travail ainsi qu'un RIB, précise : profession : '1ère assistante caméra, salaire hebdomadaire pour 39 h : 1.163 € (comme [D] [R])'.

Il est ainsi établi qu'il y avait bien eu entre la société Eloa Prod et Madame [L] une promesse d'embauche pour le tournage qui, en l'état des pièces produites, ne peut être considérée comme ayant été conditionnée par l'engagement de Monsieur [K].

Cette promesse est assimilable à un contrat de travail à durée indéterminée qui ne peut donc faire l'objet d'une 'requalification' ouvrant droit à l'indemnité prévue par de l'article L. 1245-2 du code du travail.

Du fait que cette promesse a été rompue avant tout commencement d'exécution, la demande en paiement des salaires ne peut également qu'être rejetée.

Mais le non-respect de la promesse d'embauche, faute pour la société Eloa Prod de justifier qu'elle est imputable à Madame [L], constitue un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à l'indemnisation du préjudice subi qui sera évalué, au regard de la durée initialement prévue pour le tournage et du salaire convenu, à la somme de 2.000 €.

La société Eloa Prod, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à Madame [L] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision étant seulement susceptible d'un pourvoi en cassation, dépourvu d'effet suspensif d'exécution, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne la société Eloa Prod à payer à Madame [L] les sommes suivantes:

- 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Condamne la société Eloa Prod aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 14/10313
Date de la décision : 19/12/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°14/10313 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-19;14.10313 ?
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