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14/12/2017 | FRANCE | N°16/20934

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 14 décembre 2017, 16/20934


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2017



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/20934



Décision déférée à la cour : jugement du 08 septembre 2016 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2015034592





APPELANTE



Société LKW WALTER INTERNATIONALE TRANSPORTORGANISATION AG, société anonyme de droit autr

ichien

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée par Maître Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocate au barreau de PARIS, toque : R231

Ayant pour avocate plaidante...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/20934

Décision déférée à la cour : jugement du 08 septembre 2016 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2015034592

APPELANTE

Société LKW WALTER INTERNATIONALE TRANSPORTORGANISATION AG, société anonyme de droit autrichien

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Maître Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocate au barreau de PARIS, toque : R231

Ayant pour avocate plaidante Maître Brigitte VICTOR-GRANZER, avocate au barreau de PARIS, toque : C2176

INTIMÉE

SAS LOUIS DREYFUS LINES

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 1]

N° SIRET : 449 952 993

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Maître Christophe NICOLAS du Cabinet RICHEMONT NICOLAS & ASSOCIES, toque : J54

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 octobre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et Madame Anne DU BESSET, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère

Madame Anne DU BESSET, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La compagnie Louis Dreyfus Lines (ci-après LD Lines) exploite des lignes maritimes régulières entre la France, l'Angleterre, l'Irlande et l'Espagne.

La société LKW Walter Internationale Transportorganisation AG (ci-après LKW Walter) qui est un prestataire de transport autrichien, a régulièrement confié ses remorques à la société LD Lines pour des traversées maritimes entre l'Espagne et le Royaume-Uni.

A la suite de plusieurs transports maritimes effectués pour la société LKW Walter en mai 2014 entre l'Espagne et le Royaume-Uni, la société LD Lines a établi à son ordre une facture de fret n°190/1405/0035 en date du 26 mai 2014 d'un montant de 18.550 euros TTC.

La société LKW Walter ne s'est acquittée que partiellement de cette facture, lui appliquant d'office une retenue de 9.243,36 euros, correspondant selon elle à la compensation avec sa propre créance facturée sous le n°217751 le 2 juillet 2014 à LD Lines, résultant du coût de réparation d'un camion, endommagé par le sous-traitant de celle-ci lors d'un transport en date des 8 et 9 avril 2014, qu'elle avait dû supporter (soit, 8.987,36 euros pour les frais de garage, 181 euros pour le coût du transport du camion et 75 euros pour les frais de gestion).

Malgré une mise en demeure du 30 avril 2015, la société LKW Walter a refusé de payer le solde correspondant à cette compensation.

Par suite, par acte du 18 mai 2015, la société LD Lines l'a assignée en paiement devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 8 septembre 2016, assorti de l'exécution provisoire, le dit tribunal a :

' débouté la société LD Lines de sa demande d'irrecevabilité de la demande reconventionnelle de la société LKW Walter ;

' débouté la société LKW Walter de sa demande reconventionnelle ;

' condamné la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 9.243,36 euros en principal, majoré des intérêts de retard de trois fois le taux légal à compter du 30 avril 2015 et d'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros ;

' débouté la société LD Lines de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

' condamné la société LKW Walter à payer la somme de 2.000 euros à la société LD Lines au titre de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus ;

' condamné la société LKW Walter aux dépens.

Vu la déclaration d'appel du 20 octobre 2016 de la société LKW Walter ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 20 février 2017 par la société LKW Walter, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les pièces versées aux débats,

Vu la convention d'Athènes de 1974 relative au transport par mer de passagers et de leurs bagages,

Vu le règlement (CE) n° 392/2009 du parlement européen et du conseil du 23 avril 2009 relatif à la responsabilité des transporteurs de passagers par mer en cas d'accident,

Vu l'article 6 de la convention de Bruxelles de 1924,

Vu l'article 1289 et suivants du code civil,

' réformer intégralement le jugement entrepris, et, ainsi, constater la compensation légale entre la facture n° 190 /1405/0035 du 26 mai 2014 pour un montant de 18.550 euros de la société LD Lines et la facture n° 217751 du 2 juillet 2014 pour un montant de 9.243,36 euros de la société LKW Walter Transportorganisation AG, et, par conséquent, débouter la société LD Lines de l'intégralité de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

' déclarer recevable et bien fondée la demande reconventionnelle de la société LKW Walter Transportorganisation AG au titre de la créance indemnitaire au montant de 9.243,36 euros';

' prononcer la compensation judiciaire entre la demande de la société LD Lines et la demande reconventionnelle de la société LKW Walter Transportorganisation AG ;

En tout état de cause,

' débouter la société LD Lines de toutes autres demandes, notamment au titre de pénalités pour résistance abusive et autres';

' condamner la société LD Lines au paiement d'un montant de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

Vu les dernières conclusions signifiées le 11 janvier 2017 par la société LD Lines, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les articles 1147 et suivants, 1289 et suivants, du code civil (anciennes références),

Vu les articles 1231-1 et suivants, 1347, 1347-1 et suivants, du code civil (nouvelles références),

Vu l'article 2240 du code civil,

Vu la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée,

Vu les pièces,

' constater que la société LD Lines est titulaire d'une créance d'un montant de 9.243,36 euros à l'encontre de la société LKW Walter, correspondant au solde restant dû au titre de la facture n°190/1405/0035 en date du 26 mai 2014 ;

' constater qu'aucune contestation n'a été soulevée concernant la facture n°190/1405/0035 de la société LD Lines ;

' dire et juger que la société LKW Walter n'est pas en droit d'effectuer une retenue sur le montant du fret dû au titre de la facture n°190/1405/0035 en date du 26 mai 2014 ;

' dire et juger que la société LKW Walter n'est pas en mesure de justifier d'une créance certaine, liquide et exigible à l'encontre de la société LD Lines ;

' dire et juger en conséquence que les conditions de la compensation entre la demande de LD Lines et la demande reconventionnelle de la société LKW Walter ne sont pas réunies ;

' dire et juger que la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée est applicable,

' dire et juger que la demande reconventionnelle de la société LKW Walter est prescrite, et l'en débouter ;

' confirmer en conséquence le jugement en ce que le tribunal a condamné la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 9.243,36 euros en principal, majoré des intérêts de retard de trois fois le taux légal à compter du 30 avril 2015 et d'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros, outre une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 ;

' infirmer le jugement en ce que le tribunal a débouté la société LD Lines de sa demande de dommages-intérêts ;

' dire et juger en effet que la société LKW Walter fait preuve d'une résistance illégitime en refusant de payer une facture incontestablement due ;

' condamner en conséquence la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 15.000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

' condamner l'appelante à payer à la concluante une somme complémentaire de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui s'ajoutera à l'indemnité allouée en première instance ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Teytaud, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2017.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

' Sur la compensation légale :

Vu les articles 1289 et suivants du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

LD Lines soutient à bon droit que les conditions de la compensation légale de créances, qui s'opère de plein droit, ne sont pas réunies, faute pour LKW Walter de justifier à son encontre d'une créance certaine, liquide et exigible, de façon simultanée à la sienne.

En effet, la créance prétendue de LKW Walter qui correspond à sa facture n°217751du 2 juillet 2014, est de nature indemnitaire et comme telle sujette à discussion, en ce qu'elle correspond à la réparation d'un dommage causé à son camion, lors de son déchargement le 9 avril 2014 par une société tierce, Terpor, sous-traitant de LD Lines. D'ailleurs, il n'est pas justifié que celle-ci a reconnu sa dette indemnitaire à ce titre tant en son principe, qu'en son quantum, les pièces produites, pour la plupart au surplus rédigée en langue anglaise ou espagnole non traduite en français, n'en attestant pas de façon claire, Terpor pouvant tout aussi bien être la débitrice concernée.

' Sur la compensation judiciaire :

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande en paiement de LD Lines en principal et intérêts au titre du solde de sa facture n°190/1405/0035 du 26 mai 2014 qui n'est absolument pas contestée par LKW Walter.

Concernant la demande reconventionnelle en paiement de LKW Walter à raison de l'avarie causée à son camion lors du transport, il est soutenu à bon droit par LD Lines que cette demande se trouve régie, non par la convention d'Athènes du 13 décembre 1974, mais par la convention de Bruxelles amendée du 25 août 1924.

En effet, il n'est pas établi par LKW Walter, ainsi qu'elle en a la charge, que les parties auraient expressément choisi de se soumettre à la convention d'Athènes, le courriel du 8 avril 2014 faisant état des 'detalles de reserva' (détails de la réservation) étant insuffisant pour en attester. En effet, ce mail, outre qu'il est produit en espagnol mâtiné d'anglais non entièrement traduit, ne fait référence à la convention d'Athènes que 'si elle est applicable' d'après la traduction fournie de 'when applicable'. Or, il n'est pas prouvé que cette convention, relative au transport par mer des passagers et de leurs bagages, serait applicable, puisque dans le cas présent, il s'agissait d'un transport de camion non accompagné, c'est-à-dire sans chauffeur/passager ('pasajeros 0 adulto').

De même, alors que ce point est contesté, la preuve n'est pas rapportée par LKW Walter - faute par exemple de constat d'huissier en attestant - que le lien hypertexte 'http://www.ldlines.co.uk/cgv.php' figurant en bas de ce courriel, renverrait à sa pièce n°1/2 (en anglais non complètement traduit) qui concerne manifestement les conditions générales de transport par 'ferry' de personnes, tel n'étant pas le cas, sachant que pour sa part LD Lines se prévaut d'autres conditions générales de vente qui seraient accessibles lors d'une réservation d'un transport par internet et renvoient pour leur part à la convention de Bruxelles de 1924 amendée.

La demande se trouve dès lors soumise à la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée, peu important qu'aucun connaissement n'ait été établi, celle-ci pouvant s'appliquer même en l'absence d'un tel document qui peut être suppléé par 'tout document similaire'. Par ailleurs, il n'est pas prouvé que le transport litigieux était un transport 'ro/ro' (roll on/roll off) excluant comme tel l'application de cette convention, celle-ci ayant vocation à s'appliquer à tout connaissement relatif à un transport de marchandises entre port relevant de deux états différents.

Or, selon l'article 3.6 de cette convention, les actions contre le transporteur à raison des pertes ou dommages subis par les marchandises se prescrivent en une année à compter de leur délivrance.

En conséquence, par application de ce texte, la demande est prescrite, ainsi que le soutient à bon droit LD Lines, pour avoir été formée pour la première fois par conclusions du 2 décembre 2015, alors que le camion a été réceptionné le 9 avril 2014, date faisant courir le délai pour agir, et comme telle irrecevable. Le jugement sera donc réformé seulement en ce qu'il a débouté LKW Walter de sa demande, au lieu de la déclarer irrecevable.

Ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure ne permettent de caractériser à l'encontre de LKW Walter une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit de se défendre en justice ; LD Lines a donc été déboutée à bon droit de sa demande de dommages intérêts formée au titre de la prétendue résistance abusive de son adversaire.

LKW Walter qui succombe supportera les dépens de l'appel. L'équité commande d'allouer à LD Lines la somme supplémentaire de 1.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a débouté la société LKW Walter de sa demande reconventionnelle indemnitaire ;

Statuant de nouveau sur le point réformé,

DÉCLARE la société LKW Walter irrecevable en sa demande reconventionnelle indemnitaire formée au titre de sa facture n°217751 du 2 juillet 2014 ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 1.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la société LKW Walter aux dépens.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/20934
Date de la décision : 14/12/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°16/20934 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-14;16.20934 ?
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