RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRÊT DU 23 Novembre 2017
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/01874
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Juillet 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 14/03792
APPELANT
Monsieur [L] [S] [C]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1] / COTE D IVOIRE
comparant en personne, assisté de Me Julien AUTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B1186
INTIMEE
SAS LANCRY PROTECTION SECURITE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : 432 513 356
représentée par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juillet 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Philippe MICHEL, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice LABEY, président
Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, conseiller
Monsieur Philippe MICHEL conseiller
Greffiers : Madame Frantz RONOT, lors des débats
Madame Claudia CHRISTOPHE, lors de la mise à disposition
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure de procédure civile.
- Signé par Monsieur LABEY, Président de la chambre et par Madame Claudia CHRISTOPHE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par contrat de travail à durée indéterminée du 1er juin 2011, M. [L] [C] a été engagé par la société Sécuritas en qualité de « Agent de sécurité incendie » catégorie « Agent d'exploitation » échelon Niveau 3 Échelon 2 coefficient 140 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité moyennant un salaire brut mensuel de 1 447,57 €.
La société Sécuritas a perdu le marché sur lequel était affecté le salarié, le contrat de travail de M. [C] a été transféré auprès de la SAS Lancry Protection Sécurité selon avenant du 18 juin 2012.
L'entreprise emploie plus de onze salariés.
Par courrier notifié le 2 mai 2013, la SAS Lancry Protection Sécurité a procédé à la mutation disciplinaire de M. [C] vers le site carrefour d'Évry.
Invoquant divers manquements de son employeur dans l'exécution de son contrat de travail, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris, le 17 mars 2014, afin d'obtenir sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la résiliation judiciaire de son contrat de travail, et la condamnation de la SAS Lancry Protection Sécurité au versement des sommes suivantes assorties des intérêts au taux légal :
- Indemnité de licenciement : 1 475,18 € ;
- Indemnité compensatrice de préavis : 3 612,72 € ;
- Indemnité compensatrice de congés payés : 3 300,08 € ;
- Dommages et intérêts en réparation de son préjudice : 21 676,32 € ;
- Dommages et intérêts pour perte de chance de bénéficier d'un D.I.F : 256,25 € ;
- Annulation d'une sanction disciplinaire (mutation)
- Rappel de salaires : 10 781,40 € ;
- Salaire(s) majoration travail de nuit : 425,80 € ;
- Salaire(s) majoration travail du dimanche : 131,24 € ;
- Salaire(s) majoration jours fériés : 178,85 € ;
- Retenues sur salaires injustifiées : 119,16 € ;
- Remboursement de frais de transport : 137,55 € ;
-Article 700 du Code de Procédure Civile : 3 000 €.
Il réclamait également la remise par la SAS Lancry Protection Sécurité de l'attestation d'employeur destinée au Pôle Emploi, d'un certificat de travail, de bulletins de paie dûment rectifiés et de sa carte professionnelle SST.
La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [C] à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 21 juillet 2015 qui a :
- Prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail ;
- Condamné la SAS Lancry Protection Sécurité à lui verser les sommes suivantes :
- 7 000 € à titre de dommage et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé de jugement ;
- 10 781,40 € à titre de rappel de salaire ;
- 425,80 € à titre de rappel de salaire pour travail de nuit ;
- 131,24 € à titre de rappel de salaire pour travail le du dimanche ;
- 178,85 € à titre de rappel de salaire pour travail durant un jour férié ;
Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 24 mars 2014 ;
- Ordonné la remise d'une attestation destinée au Pôle Emploi, d'un certificat de travail, d'un solde de tout compte et d'un bulletin de paye récapitulatif conformes à la présente décision ;
- Débouté M. [C] du surplus de sa demande.
Par conclusions déposées le 7 juillet 2017 au soutien de ses explications orales, M. [C] demande à la cour de :
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à la SAS Lancry Protection Sécurité aux torts exclusifs de celle-ci, condamné la société à lui verser les sommes de 10 781,40 € à titre de rappel sur salaire de base, pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, 425, 64 € à titre de rappel de majoration sur travail de nuit pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, 131, 24 € à titre de rappel de majoration sur travail le dimanche pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, 178,85 € à titre de rappel de majoration sur travail les jours fériés pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015 ;
- Infirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
En conséquence :
- Condamner la SAS Lancry Protection Sécurité à lui verser les sommes de :
- 1.475, 18 € à titre d'indemnité légale de licenciement due jusqu'au prononcé du jugement querellé ainsi qu'à la somme complémentaire de 451, 59 € correspondant au supplément d'indemnité légale de licenciement lié aux 15 mois supplémentaires d'ancienneté en raison de l'effet suspensif attaché au recours ordinaire en appel ;
- 3.612, 72 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 3 300, 08 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;
- 21 676, 32 € (1 an de salaire) à titre de dommages intérêts en réparation de l'ensemble de ses préjudices avec intérêts aux taux légal à compter de la date du jugement,
- 153 € réparation pour perte de chance de bénéficier d'un droit individuel de formation ;
- 1 693,38 € pour rappels de salaire qui lui reste dûs pour la période allant du 1er juillet 2015 jusqu'à son dernier bulletin de paie du mois de février 2016 ;
- 28 362, 25 € au titre des salaires qu'il aurait normalement dû continuer à percevoir du fait
de l'effet suspensif attaché aux recours en appel pour la période courant du 1er février 2016 au 31 mai 2017 ;
- 119, 16 € pour rappel de salaire en raison d'une retenue salariale injustifiée ;
- 57,30 € à titre de remboursement des frais de transport ;
- Ordonner à la SAS Lancry Protection Sécurité de lui remettre des bulletins de paie dûment modifiés quant à son statut d'agent de maîtrise depuis le 1er août 2012 ainsi que l'original de son certificat de sauveteur secouriste du travail et ce sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision à intervenir,
- Dire que du montant global de ces sommes sera déduite la somme de 12 173,12 € versée par la SAS Lancry Protection Sécurité à la suite de la notification faite début 2016 du jugement querellé.
Condamner la SAS Lancry Protection Sécurité à lui verser la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions également déposées le 7 juillet 2017 au soutien de ses explications orales, la SAS Lancry Protection Sécurité demande à la cour de :
- Infirmer le jugement déféré,
- Débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes
- Condamner M. [C] à lui verser la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :
Aux termes des articles 1184 et 1224 nouveau du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera pas à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est pas résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En application de ces textes, le contrat de travail peut être résilié aux torts de l'employeur en cas de manquement suffisamment grave de sa part qui empêche la poursuite du contrat de travail.
La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Elle prend effet au jour de la décision qui la prononce.
En l'espèce, à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire, M. [C] reproche à la SAS Lancry Protection Sécurité :
- la violation du contrat de travail ainsi que de la convention collective et défaut d'avenant modificatif ;
- la rétention abusive de ses documents professionnels,
- le non-respect de la réglementation propre à la médecine du travail,
- la violation grave et répétée d'une obligation de sécurité ainsi que la retenue injustifiée de son salaire,
- la violation des dispositions légales sur le remboursement des frais de transport.
Sur le premier de ces griefs, M. [C] expose qu'aux termes de son contrat initial et de l'avenant de reprise conclu le 18 juin 2012, il a été engagé en qualité d'agent de sécurité incendie, niveau 3 échelon 2 au coefficient de 140 pour un salaire brut mensuel de 1 476,53 €, relevant de la catégorie des agents d'exploitation selon l'annexe de l'accord du 21 octobre 2010 propre à la profession, mais que, dès le 1er août 2012, soit 1 mois après sa prise de fonction, la SAS Lancry Protection Sécurité lui a demandé d'assurer les fonctions de « chef d'équipe », relevant du statut d'agent de maîtrise tel que défini par l'annexe II de la Convention collective nationale applicable, sans pour autant augmenter sa rémunération.
Il ajoute que la SAS Lancry Protection Sécurité n'a pas voulu régulariser sa situation par l'établissement d'un nouvel avenant tenant compte de ses nouvelles fonctions et de la rémunération qui y est attachée par la convention collective.
Il en déduit qu'ainsi la SAS Lancry Protection Sécurité a violé tant ses obligations contractuelles que les dispositions de la convention collective.
Pour infirmation du jugement entrepris, la SAS Lancry Protection Sécurité réplique que :
- la mention « SSIAP 2 » figurant sur ses plannings résulte d'une erreur informatique, dont M. [C] ne s'était d'ailleurs jamais ému jusqu'en août 2013, soit pendant plus d'un an, étant précisé que la société compte environ 4 500 salariés relevant de planification sur sites clients et qu'elle envoie donc mensuellement des milliers de plannings,
- les plannings effectivement réalisés par M. [C] démontrent sans contestation possible que les fonctions réellement exercées ont été celles d'un SSIAP 1,
- M. [C] n'a pu valablement exercer les missions d'un SSIAP 2, dès le 1er août 2012, alors qu'il n'a été titulaire du diplôme SSIAP 2 qu'à compter d'avril 2013 après avoir justifié de 1607h de travail effectif comme SSIAP 1, comme exigé par les textes,
- avant son courrier du 5 août 2013, M. [C] n'a jamais formulé la moindre revendication, sur un prétendu décalage entre son contrat de travail SSIAP 1, ses bulletins de paie SSIAP 1 reçus mensuellement et la réalité des fonctions exercées au titre de sa planification,
- les courriers et fax de réclamation de M. [C] n'ont visé la réalisation de missions SSIAP 2 qu'à titre de 24 heures en juin 2013, 17 heures en juillet 2013 et 15 vacations pour le mois d'août 2013, ce que la société ne conteste pas puisqu'à la suite de l'obtention de son diplôme SSIAP 2 en avril 2013, M. [C] a effectivement pu être planifié en remplacement de Chefs d'équipe de sécurité incendie, absents pour cause de congés payés en période estivale, les, 25, 26 juin 2013, 2 et 31 juillet 2013, et sur le mois d'août 2013,
- M. [C] ne justifie pas être dans les conditions de l'article 3 de l'annexe IV de la convention collective nationale applicable.
Cela étant, l'article 3 de l'annexe IV de la convention collective nationale applicable prévoit que tout agent d'exploitation, employé administratif ou technicien assurant l'intérim d'un poste de classification supérieure pendant une période continue de plus de 2 mois recevra, à partir du troisième mois, une indemnité mensuelle qui ne peut être inférieure à la différence entre son salaire et le salaire minimal conventionnel de la catégorie du poste dont il assure l'intérim.
En l'espèce, M. [C] produit :
- son planning individuel sur la période du 1er août 2012 au 30 avril 2013 qui mentionne une affectation sur le site Natixis à Charenton le Pont en qualité de chef d'équipe de façon continue sur l'ensemble de la période à l'exception de celles des congés et des formations,
- un document intitulé « planning mission synthétique » sous forme de tableau à double entrée désignant les salariés affectés sur le site selon une répartition en trois catégories - CDM, Chef d'équipe et Agent Sécurité - et rangeant M. [C] dans celle des chefs d'équipe avec cinq autres salariés,
- un rapport d'incident qu'il a rédigé sous la qualité de chef d'équipe sécurité incendie à la suite d'une altercation avec un autre salarié le 8 octobre 2012,
- les attestations de MM [O], [V] et [Y] le présentant comme chef d'équipe.
Il résulte de la convergence de ces documents que la mention de chef d'équipe sur les plannings de M. [C] ne résulte pas d'une simple erreur matérielle, comme prétendu par la SAS Lancry Protection Sécurité, mais correspond à la situation du salarié.
M. [C] a bien effectué des missions de chef d'équipe sur une période continue de plus de 2 mois à compter du 1er août 2012.
Il s'ensuit que M. [C] est légitime, sur le fondement de l'article 3 de l'annexe IV à réclamer un rappel de salaires correspondant à la différence entre la rémunération d'un agent d'exploitation et celle d'un agent de maîtrise niveau 1 échelon 2 pour un montant non autrement contesté de 12 474,78 €, au surplus fondé sur un juste calcul fondé sur la rémunération portée sur les fiches de paie du salarié et le salaire minimum conventionnel d'un agent de maîtrise niveau 1 échelon 2.
M. [C] est tout aussi légitime à réclamer des rappels d'indemnités de travail de nuit, d'indemnités de travail le dimanche, et d'indemnités de travail les jours fériés sur cette même base de calcul.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a fait droit aux demandes ci-dessus, étant précisé qu'il devra être ajouté à la somme de 10 781,40 € allouée par le jugement au titre des rappels de salaire du 1er août 2012 au 31 mai 2015, celle de 1 693,38 € correspondant au rappel de salaire du 1er juillet 2015 à la dernière période rémunérée de février 2016, pour obtenir un total dû de 12 474,78 €.
Enfin, en application de l'article L.3141-26 du code du travail, la SAS Lancry Protection Sécurité sera condamnée à verser à M. [C] une indemnité de congés payés correspondant à la fraction des congés non pris à la date de la rupture du contrat de travail, soit selon le calcul non contesté de M. [C] appuyé par les bulletins de paie de l'intéressé, 46,50 jours pour un montant de 3 300,08 €.
La carence de la SAS Lancry Protection Sécurité à régulariser la rémunération de M. [C] conformément à celles attachées à ses fonctions effectives, malgré les revendications du salarié, a privé ce dernier d'un montant significatif de salaire, sur une longue période. Elle caractérise à elle seule un manquement suffisamment grave de l'employeur dans une de ses obligations essentielles au contrat de travail et dans l'application de la convention collective nationale applicable pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs articulés par M. [C], le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la SAS Lancry Protection Sécurité.
Il résulte de l'article 1184 ancien et 1224 nouveau du code civil que si, en cas de confirmation en appel du jugement prononçant la résiliation judiciaire du contrat de travail, la date de la rupture est celle fixée par le jugement, il en va autrement lorsque l'exécution du contrat de travail s'est poursuivie après cette décision.
Dans le cas présent, il résulte clairement des pièces du dossier qu'après avoir interjeté appel du jugement du 21 juillet 2015, M. [C] a écrit à la SAS Lancry Protection Sécurité, soit directement soit par lettres officielles entre conseils, pour lui rappeler l'effet suspensif attaché à son recours et solliciter la reprise de ses fonctions et le paiement de ses salaires dans l'attente de la décision d'appel mais que la société a formellement refusé son retour dans l'entreprise.
Il s'ensuit que M. [C] s'est légitimement maintenu à la disposition de l'employeur et n'a pu reprendre son travail qu'en raison de l'opposition non fondée de ce dernier.
Le fait que le dispositif du jugement ordonnant la remise des documents sociaux de fin de contrat de travail soit assorti de l'exécution provisoire de droit, ne dispensait pas la SAS Lancry Protection Sécurité de son obligation de fournir du travail à son salarié et de lui payer ses salaires à défaut de rupture effective du contrat de travail en raison de l'effet suspensif de l'appel en vertu de l'article 539 du code de procédure civile.
En conséquence, la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] prendra effet au présent arrêt et il sera fait droit à la demande en rappel de salaires de M. [C] pour la période du 1er février 2016 au 31 mai 2017 selon un montant non autrement contesté et conforme à la rémunération minimum conventionnelle applicable au salarié.
La résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [C] peut prétendre à l'indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait avant la rupture du contrat de travail, prévue par l'article L.1234-9 du code du travail, et à l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L.1234-1 du même code du travail.
Il sera donc fait intégralement droit aux demandes de M. [C] à ces titres selon un calcul conforme à la rémunération du salarié à la date de la rupture et à son ancienneté dans l'entreprise pour l'indemnité de licenciement, et à la durée du préavis conventionnellement déterminée pour l'indemnité compensatrice de préavis.
Par ailleurs, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [C], de son âge (50 ans) et de son ancienneté (6 ans et 4 mois) à la date de la rupture, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences de la rupture à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu d'allouer à M. [C] la somme de 12 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L.1235-3 du code du travail.
Sur le rappel de retenue injustifiée de salaire :
M. [C] fait valoir qu'il a avait demandé à la SAS Lancry Protection Sécurité d'annuler sa vacation du 22 septembre 2013, en l'absence d'équipement adéquat et de formation adaptée à l'intervention sur la moto pompe présente sur le site Carrefour à Evry.
Mais, comme soulevé par la SAS Lancry Protection Sécurité, les plannings versés au dossier attestent du suivi d'une formation par M. [C] avant son affectation sur le site Carrefour Evry et M. [C] se prévaut à l'égard de la société non d'une absence de tenue SIAPP mais d'une tenue usagée.
Dans ces conditions, la retenue sur salaire de M. [C] est justifiée.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de ce chef de demande.
Sur les frais de transport :
M. [C] fait valoir qu'il a acheté sa carte Navigo de novembre et décembre 2013 pour un montant de 114,60 € mais qu'aucun remboursement en application de l'article R.3261-1 du code du travail n'apparaît sur les bulletins de paie des mois concernés.
La SAS Lancry Protection Sécurité réplique que M. [C] ne lui a jamais fourni les justificatifs comme cela ressort de sa pièce 15.
Mais, dès lors que M. [C] fournit des justificatifs dans la présente instance, il sera fait droit à sa demande en application de l'article R.3261-1 du code du travail.
Sur la perte de chance de bénéficier du droit individuel à la formation :
L'application erronée d'un taux de rémunération à M. [C] par la SAS Lancry Protection Sécurité a privé le salarié de la chance de bénéficier de l'intégralité de son DIF.
Ce préjudice devra être réparé par l'octroi d'une somme de 153 €.
Sur la remise de documents sociaux et professionnels :
Au vu des développements ci-dessus, la SAS Lancry Protection Sécurité sera condamnée à remettre à M. [C] un bulletin de paie récapitulatif.
La détention par la SAS Lancry Protection Sécurité du certificat de sauveteur secouriste du travail (SST) ne pouvant être tenue pour certaine, la remise de cette pièce ne sera pas ordonnée.
Sur les frais non compris dans les dépens :
Par application de l'article 700 du code de procédure civile, la SAS Lancry Protection Sécurité, sera condamnée à verser à M. [C], accueilli au principal de son appel, la somme de 3 000 €, au titre des frais exposés par celui-ci qui ne sont pas compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
DÉCLARE recevable l'appel de M. [C],
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] aux torts exclusifs de la SAS Lancry Protection Sécurité, condamné la société à verser à M. [C] un rappel sur salaire de base pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, un rappel de majoration sur travail de nuit pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, un rappel de majoration sur travail le dimanche pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015, un rappel de majoration sur travail les jours fériés pour la période allant du 1er août 2012 au 31 mai 2015 et en ce qu'il a rejeté la demande de rappel de salaire pour retenue injustifiée,
INFIRME le jugement entrepris pour le surplus,
Statuant à nouveau :
CONDAMNE la SAS Lancry Protection Sécurité à verser à M. [C] les sommes de :
- 1 475, 18 € à titre d'indemnité légale de licenciement due jusqu'au prononcé du jugement entrepris, outre la somme complémentaire de 451, 59 € correspondant au supplément d'indemnité légale de licenciement lié aux 15 mois supplémentaires d'ancienneté résultant de l'effet suspensif de l'appel ;
- 3 612, 72 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 3 300, 08 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;
- 12 000 € à titre de dommages intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse ;
- 153 € réparation pour perte de chance de bénéficier d'un droit individuel de formation ;
- 1 693,38 € pour rappels de salaire qui lui reste dûs pour la période allant du 1er juillet 2015 jusqu'à son dernier bulletin de paie du mois de février 2016 ;
Y ajoutant,
DIT que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] prend effet à la date du présent arrêt ;
CONDAMNE la SAS Lancry Protection Sécurité à verser à M. [C] la somme de 28 362,25 € au titre des salaires qu'il aurait normalement dû continuer à percevoir pour la période courant du 1er février 2016 au 31 mai 2017,
CONDAMNE la SAS Lancry Protection Sécurité à remettre à M. [C] un bulletin de paie récapitulatif, sous astreinte provisoire de 20 € par jour de retard sur une durée de quatre mois à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification ou signification de la décision à intervenir,
DIT que du montant global de ces sommes, sera déduite la somme de 12 173,12 € déjà versée par la SAS Lancry Protection Sécurité en exécution du jugement entrepris,
CONDAMNE la SAS Lancry Protection Sécurité à verser à M. [C] la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [C] aux dépens.
LE GREFFIER
Claudia CHRISTOPHE
LE PRÉSIDENT
Patrice LABEY