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22/11/2017 | FRANCE | N°15/11369

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 22 novembre 2017, 15/11369


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 22 Novembre 2017

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/11369 et 15/12319



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 14/00486





APPELANTE :

SARL GROUPE M. SERVICE

[Adresse 1]

[Adresse 2]

N° SIRET : 310 058 631

représentée

par Me Eveline LEVY-JOCHIMEK, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 170







INTIMÉE :

Madame [M] [L]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

née le [Date naissance 1] 1952 à MONTFERMEIL (78...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 22 Novembre 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/11369 et 15/12319

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 14/00486

APPELANTE :

SARL GROUPE M. SERVICE

[Adresse 1]

[Adresse 2]

N° SIRET : 310 058 631

représentée par Me Eveline LEVY-JOCHIMEK, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 170

INTIMÉE :

Madame [M] [L]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

née le [Date naissance 1] 1952 à MONTFERMEIL (78)

représentée par Me Nathalie LEHOT, avocat au barreau d'ESSONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/033052 du 07/10/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoît DE CHARRY, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Benoît DE CHARRY, Président de chambre

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Mme Séverine TECHER, vice-présidente placée

Greffier : Mme Martine JOANTAUZY, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benoît DE CHARRY, Président et par Madame Martine JOANTAUZY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Madame [M] [L] a été engagée par le Groupement pour l'Insertion des Personnes Handicapées Physiques (G.I.H.P.) Ile de France par contrat de travail à durée déterminée en date du 16 octobre 2008 en qualité de conducteur accompagnateur. La relation de travail s'est poursuivie à l'expiration de ce contrat sous forme d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel.

Madame [M] [L] assurait le transport d'enfants accueillis à l'IME [Établissement 1] à [Localité 1].

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers.

Madame [M] [L] percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle de 1298,18 euros.

Au cours du mois de juin 2013, le marché du transport des enfants assuré par Madame [M] [L] a été attribué à la SAS GROUPE M SERVICE.

Par lettre en date du 14 octobre 2013, Madame [M] [L] a été convoquée par la SAS GROUPE M SERVICE à un entretien préalable fixé au 24 octobre suivant, et une mise à pied conservatoire lui a été notifiée.

Par lettre en date du 31 octobre 2013, Madame [M] [L] a été licenciée par la SAS GROUPE M SERVICE pour faute grave.

Contestant notamment son licenciement, Madame [M] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau qui, par jugement en date du 7 octobre 2015 auquel la Cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

-requalifié le licenciement pour faute grave de Madame [M] [L] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamné la SAS GROUPE M SERVICE à payer à Madame [M] [L] :

* 10 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2596,36 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 259,63 euros à titre de congés payés afférents,

* 860,18 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 1000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté Madame [M] [L] du surplus de ses demandes,

-débouté la SAS GROUPE M SERVICE de sa demande reconventionnelle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS GROUPE M SERVICE a relevé appel de ce jugement par deux déclarations parvenues au greffe de la cour les 20 et 23 novembre 2015.

La SAS GROUPE M SERVICE soutient que le licenciement pour faute grave est justifié.

En conséquence, elle sollicite l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement et le débouté de Madame [M] [L] de l'ensemble de ses demandes ainsi que sa condamnation à lui verser 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

En réponse, Madame [M] [L] fait valoir que le licenciement est injustifié et que la SAS GROUPE M SERVICE doit lui verser sa rémunération pour les mois de septembre et octobre 2013.

En conséquence, elle sollicite la confirmation du jugement pour ce qui regarde les sommes allouées à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, au titre des indemnités de rupture et au titre du remboursement des frais irrépétibles, et la condamnation de la SAS GROUPE M SERVICE à lui payer 2596,36 euros à titre de rappel de salaire des mois de septembre et octobre 2013 et 256,63 euros au titre de congés payés afférents. Elle demande également la condamnation de la SAS GROUPE M SERVICE à lui payer 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la jonction de instances d'appel

Il y a lieu d'ordonner d'office, en application de l'article 367 du code de procédure civile, la jonction des deux procédures d'appel qui portent sur un même jugement.

Sur le licenciement

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Le juge ayant écarté la faute grave invoquée par l'employeur doit rechercher si les faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige fait grief à Madame [M] [L] de ne pas avoir averti expressément la SAS GROUPE M SERVICE de son refus du transfert et de ne s'être pas présentée sur son lieu de travail malgré de nombreuses mises en demeure.

Aux termes de l'accord du 7 juillet 2009 relatif à la garantie de l'emploi et à la poursuite des relations de travail en cas de changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, il existe un dispositif de garantie d'emploi et de poursuite des relations de travail.

Après réception de la liste du personnel concerné par le transfert, l'entreprise entrante établit un avenant au contrat de travail dans le délai de 15 jours avant le début du marché (si les délais le permettent).

Le personnel concerné dispose d'un délai de 10 jours, si les délais le permettent, pour formaliser son accord sur le projet d'avenant au contrat qui lui est été proposé par l'entreprise entrante. En cas de désaccord, il lui appartient de prévenir expressément, dans les meilleurs délais, l'entreprise entrante comme l'entreprise sortante de son refus de transfert. Il reste alors salarié de l'entreprise sortante.

Au cas d'espèce, la SAS GROUPE M SERVICE avait connaissance dès le mois de juin 2013 du fait que Madame [M] [L] faisait partie du personnel concerné par le changement de prestataire.

Ce n'est que le 18 septembre 2013 que, par une lettre recommandée, que la SAS GROUPE M SERVICE a communiqué à Madame [M] [L] le projet d'avenant à son contrat de travail.

Madame [M] [L] a, par lettre du 24 septembre 2013, aussitôt sollicité de la SAS GROUPE M SERVICE un certain nombre de précisions quant à ses conditions de travail :

-serait-elle remisant ou non remisant,

-si elle n'est pas remisant, sur quel lieu d'exploitation,

-lieu d'affectation concernant l'établissement à desservir,

-décomposition de ses horaires hebdomadaires,

-durée mensuelle et annuelle contractuelle,

-calendrier annuel de travail.

Sa lettre se termine par ces mots : « dans le souci de prendre une décision peut-être favorable à votre offre, j'attends de vos nouvelles ».

Ce même 24 septembre 2013, la SAS GROUPE M SERVICE a adressé à Madame [M] [L] une lettre recommandée la mettant en demeure de se présenter à [Localité 2] le lendemain de sa réception.

Le 2 octobre 2013 la SAS GROUPE M SERVICE a adressé à Madame [M] [L] une lettre en réponse à celle que cette dernière lui avait envoyée le 24 septembre précédent qui ne contient aucune réponse précise aux questions posées par la salariée dans ce courrier.

La SAS GROUPE M SERVICE a engagé une procédure de licenciement disciplinaire le 14 octobre 2013, en convoquant la salariée à un entretien préalable et en prononçant une mise à pied conservatoire.

Le transfert du contrat de travail à un nouvel employeur est susceptible d'entraîner, pour le salarié, des changements de ses conditions de travail. Il importe donc, pour que le salarié concerné puisse accepter ou refuser l'avenant qui lui est proposé, que l'intéressé dispose des éléments nécessaires à sa prise de décision quant aux changements de ses conditions de travail qu'entend lui fixer le nouvel employeur.

Au cas d'espèce, Madame [M] [L] travaillait à temps partiel et assurait des transports d'enfants à proximité de son lieu de résidence, à [Localité 3]. Le nouvel employeur avait son lieu d'exploitation à [Localité 2], localité éloignée d'[Localité 3], et il lui a donné pour instruction, à plusieurs reprises, de se rendre à cet endroit. C'est donc à juste titre que Madame [M] [L], avant d'exercer son option, a réclamé des précisions sur d'éventuels changements de ses conditions de travail. La SAS GROUPE M SERVICE n'y a pas répondu, se bornant à citer les articles 2 et 10 du contrat de travail, sans aborder la question des conditions de travail, objet de la demande d'information.

En conséquence, la SAS GROUPE M SERVICE ne peut reprocher à faute à Madame [M] [L] de n'avoir pas fait connaître sa position quant au transfert du contrat de travail.

S'agissant de l'absence de Madame [M] [L], la SAS GROUPE M SERVICE ne peut se prévaloir de mises en demeures antérieures à la date à laquelle Madame [M] [L] devait faire connaître sa décision, de sorte que celle du 24 septembre 2013, postérieure de moins de 10 jours à la réception par Madame [M] [L] de l'avenant au contrat de travail posté le 18 septembre précédent, n'est pas opérante.

En revanche, par une lettre recommandée du 2 octobre 2013, la SAS GROUPE M SERVICE a demandé à Madame [M] [L] de se présenter au lieu d'exploitation de la société, le lendemain de la réception de cette lettre et qu'à défaut elle serait contrainte de tirer toutes conséquences de son absence.

Madame [M] [L] n'a pas satisfait à cette instruction, alors qu'il lui appartenait de prendre son poste, pour ensuite, le cas échéant, tirer elle-même toutes conséquences d'éventuelles inéquations entre celui-ci et son contrat de travail.

Ce faisant, elle a commis une faute qui, compte tenu de la réticence de la SAS GROUPE M SERVICE à lui communiquer les éléments réclamés, ne revêt pas un caractère de gravité tel qu'il faisait obstacle au maintien de la salariée dans l'entreprise.

Il s'ensuit que le licenciement de Madame [M] [L] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Il y a donc lieu d'infirmer la décision déférée en ce qu'elle a considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a alloué à Madame [M] [L] d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de rappel de salaire

La SAS GROUPE M SERVICE reste devoir à Madame [M] [L] le salaire de la période durant laquelle elle ne lui a pas adressé, contrairement à ses obligations, d'avenant à son contrat de travail ainsi que celui afférent à la période de réflexion accordée au salarié. Elle lui doit également le salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire dans la mesure où le licenciement n'est pas justifié par une faute grave.

Compte tenu du montant du salaire mensuel de Madame [M] [L], il reste dû à celle-ci 1947,27 euros ainsi que 194,72 euros au titre des congés payés afférents.

Il y a lieu d'infirmer la décision des premiers juges sur ce point.

Sur le cours des intérêts

Conformément aux dispositions des articles 1153 et 1153-1 (anciens) du code civil, recodifiés sous les numéros 1231-6 et 1231-7 du code civil, le rappel de salaire ainsi que l'indemnité de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis seront assortis d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 7 mai 2014.

Sur les frais irrépétibles

C'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la SAS GROUPE M SERVICE à payer à Madame [M] [L] la somme de euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Leur décision sera confirmée à ce titre.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont pu exposer à l'occasion de la procédure d'appel.

Sur les dépens

Compte tenu de la solution du litige, chacune des parties conservera la charge des dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

ORDONNE la jonction des procédures RG 15/11369 et RG 15/12319 sous le premier de ces numéros ;

INFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la SAS GROUPE M SERVICE à payer à Madame [M] [L] 10 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et a débouté Madame [M] [L] de sa demande de rappel de salaire et de congés payés afférents ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

DIT le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE a SAS GROUPE M SERVICE à payer à Madame [M] [L] les sommes de :

-1947,27 euros bruts à titre de rappel de salaire,

-194,72 euros bruts à titre de rappel d'indemnité de congés payés afférents,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2014 ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

LAISSE à chacune des parties les dépens par elles exposés en cause d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/11369
Date de la décision : 22/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/11369 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-22;15.11369 ?
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