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21/11/2017 | FRANCE | N°16/05843

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 21 novembre 2017, 16/05843


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 21 NOVEMBRE 2017



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05843



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15978





APPELANTE



Madame [Q] [W] [M] née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1]

(République populaire du Congo)<

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Chez Mme [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me Christian NZALOUSSOU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0361





INTIME



LE MINISTERE PUBLIC pris en la perso...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 21 NOVEMBRE 2017

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05843

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15978

APPELANTE

Madame [Q] [W] [M] née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1]

(République populaire du Congo)

Chez Mme [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Christian NZALOUSSOU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0361

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MADAME LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée à l'audience par Madame de CHOISEUL PRASLIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 octobre 2017, en audience publique, l'avocat de l'appelant et le ministère public ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique GUIHAL, présidente et Monsieur Jean LECAROZ, conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Dominique GUIHAL, présidente

Mme Dominique SALVARY, conseillère

M. Jean LECAROZ, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRÊT :- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique GUIHAL, présidente et par Mme Mélanie PATE, greffier présent lors du prononcé.

Mme [Q] [W] [M], née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1] (République populaire du Congo), de nationalité congolaise, a fait l'objet, durant sa minorité, d'une adoption par Mme [T] [K], née le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 4] (Congo), suivant jugement du tribunal de grande instance de Brazzaville du 20 juin 2008, revêtu de l'exequatur par une ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance d'Orléans du 23 mars 2011 qui précise que le jugement produit les effets d'une adoption plénière.

Un certificat de nationalité française a été délivré à Mme [Q] [W] [M] le 19 janvier 2013 par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de l'article 18 du code civil au motif que sa mère adoptive, Mme [K], avait été réintégrée dans la nationalité française par décret du 16 septembre 1999.

Le 29 octobre 2014, une action négatoire de nationalité a été engagée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris à laquelle il a été fait droit par un jugement du 27 janvier 2016 qui retient que « si la filiation adoptive de la défenderesse est bien établie du temps de sa minorité, en revanche, sa mère adoptive n'a réintégré la nationalité française que postérieurement à sa naissance, de sorte que les conditions prévues à l'article 18 du code civil, combinées aux dispositions de l'article 20 [du même code] précité, ne sont pas remplies ».

Mme [Q] [W] [M] a interjeté appel de ce jugement le 7 mars 2016.

Le 12 janvier 2017, elle a saisi la cour d'une demande tendant à la transmission à la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité « des articles 18 et 20 du code civil au regard de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, du 10e alinéa du préambule de la constitution de 1946, ainsi que de l'article 1er de la Constitution de 1958, en ce que les articles 18 et 20 du code civil, suivant l'application jurisprudentielle, excluent du bénéfice de la nationalité française de plein droit l'enfant étranger ayant fait l'objet d'une adoption plénière par un Français naturalisé et qui est né avant la naturalisation de son adoptant alors même que l'adoption est intervenue après cette naturalisation ».

Par un arrêt du 16 mai 2017, cette cour a dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité, la disposition contestée résultant d'une interprétation jurisprudentielle de la cour d'appel de Paris qui n'avait jamais été soumise à la Cour de cassation.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 6 juin 2016, Mme [M] demande à la cour de réformer le jugement, de rejeter les demandes du ministère public, de dire qu'elle est française, de condamner l'agent judiciaire du Trésor à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 3 octobre 2016, le ministère public demande à la cour, à titre principal, de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile n'a pas été délivré, de constater que la déclaration d'appel est caduque et que les conclusions d'appel sont irrecevables, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement, de constater l'extranéité de l'intéressée, d'annuler le certificat de nationalité française du 16 janvier 2013, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de condamner l'appelante aux dépens.

SUR QUOI,

Considérant que l'appelante ayant adressé une copie de son acte d'appel au ministère de la justice le 28 juillet 2017, le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré le 11 septembre 2017 par le ministère de la Justice ; que l'appel de Mme [Q] [W] [M] n'est pas caduc et ses conclusions sont recevables ;

Considérant que si, en matière de nationalité, la charge de la preuve incombe à celui qui conteste la qualité de Français à une personne titulaire d'un certificat de nationalité délivré conformément aux règles en vigueur, il en est autrement lorsque, ayant été délivré de manière erronée, le certificat a perdu toute force probante ; qu'en ce cas, il appartient à celui dont la nationalité est en cause d'établir qu'il est Français à un autre titre ;

Considérant qu'un tel certificat a été délivré par le greffier en chef du tribunal d'instance d'Orléans le 16 janvier 2013 sous le n° 10/2013 à Mme [Q] [W] [M], née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1] (République populaire du Congo), sur le fondement de l'article 18 du code civil, par filiation maternelle adoptive ;

Considérant que pour dire que Mme [Q] [W] [M] n'est pas française, les premiers juges ont retenu que si la filiation adoptive de l'appelante, née le [Date naissance 1] 1994, était établie du temps de sa minorité par l'effet du jugement d'adoption rendu le 20 juin 2008 par le tribunal de grande instance de Brazzaville revêtu de l'exequatur, sa mère adoptive n'a réintégré la nationalité française que par décret du 16 septembre 1992 publié le 18 septembre 1992, soit postérieurement à la naissance de Mme [Q] [W] [M], de sorte que les conditions prévues par l'article 18 du code civil, combinées aux dispositions de l'article 20 du même code, n'étaient pas remplies ; qu'en effet, le tribunal a estimé que la nationalité de la mère adoptive devait s'apprécier au jour de la naissance de l'enfant adopté ;

Mais considérant que la nationalité de l'adoptant doit s'apprécier, non au jour de la naissance de l'enfant, mais au jour du dépôt de la requête en adoption plénière, date à laquelle l'adoption plénière établit la filiation entre l'adopté et l'adoptant en application de l'article 355 du code civil ; que selon l'article 20, alinéa 1er, du code civil, l'enfant qui est français en vertu des dispositions des articles 18 et suivants du code civil est réputé avoir été français dès sa naissance même si l'existence des conditions requises par la loi pour l'attribution de la nationalité française n'est établie que postérieurement ; que si les alinéas 2 et 3 du même article limitent les effets de l'adoption plénière en matière de nationalité, ces textes ne visent que les cas de répudiation de la nationalité française et d'attribution de la nationalité du fait de la naissance en France ; qu'ils sont donc inapplicables à la situation de Mme [Q] [W] [M] qui est née à l'étranger sans qu'elle-même ou sa mère adoptive n'ait usé de leur faculté de répudiation ; que l'alinéa 3 de ce texte selon lequel « l'établissement de la qualité de Français postérieurement à la naissance ne porte pas atteinte à la validité des actes antérieurement passés par l'intéressé ni aux droits antérieurement acquis à des tiers sur le fondement de la nationalité apparente de l'enfant » ne tendent qu'à assurer la sécurité juridique des situations antérieurement constituées ;

Que l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance d'Orléans le 23 mars 2011 et rectifiée le 21 septembre 2011, qui a conféré l'exequatur au jugement d'adoption du tribunal de grande instance de Brazzaville du 20 juin 2008, précise que l'adoption de Mme [Q] [W] [M] par Mme [T] [K] produit les effets d'une adoption plénière effectuée le 20 juin 2008 ; qu'à cette date la mère adoptive de l'appelante étant française, Mme [Q] [W] [M] est réputée avoir été française dès sa naissance, même si l'existence des conditions requises par la loi pour l'attribution de la nationalité française n'ont été établies que postérieurement, en l'espèce, par la réintégration dans la nationalité française de Mme [T] [K] par décret du 16 septembre 1992 publié le 18 septembre 1992 ;

Qu'il convient d'infirmer le jugement ;

Considérant qu'aucune considération tirée de l'équité ne permet de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que le ministère public succombant à l'instance, les dépens seront laissés à la charge du Trésor public ;

PAR CES MOTIFS,

Constate que la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile a été accomplie,

Infirme le jugement,

Dit que Mme [Q] [W] [M], née le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1] (République populaire du Congo), est française,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Rejette les autres demandes,

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/05843
Date de la décision : 21/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°16/05843 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-21;16.05843 ?
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