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09/11/2017 | FRANCE | N°15/09051

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 09 novembre 2017, 15/09051


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 09 Novembre 2017



(n° , 1 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09051



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Juillet 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 13/00292





APPELANT

Monsieur [H] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Chris

tine BALDUCCI-GUERIN, avocat au barreau de MEAUX







INTIMEES

SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE (EJF-IDF)

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Audrey DE LAVERGNE DELAGE, avocat au bar...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 09 Novembre 2017

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09051

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Juillet 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 13/00292

APPELANT

Monsieur [H] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Christine BALDUCCI-GUERIN, avocat au barreau de MEAUX

INTIMEES

SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE (EJF-IDF)

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Audrey DE LAVERGNE DELAGE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0141

CPAM 77 - SEINE ET MARNE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par Mme [T] [T], en vertu d'un pouvoir général

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 4]

[Localité 4]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Septembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Luc LEBLANC, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claire CHAUX, Présidente de chambre

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Madame Marie-Odile FABRE-DEVILLERS, Conseiller

Greffier : Mme Anne-Charlotte COS, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claire Chaux, Président, et par Mme Anne-Charlotte COS, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [Y] d'un jugement rendu le 6 juillet 2015 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux dans un litige l'opposant à la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne ;

Les faits, la procédure, les prétentions des parties :

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;

Il suffit de rappeler que M. [Y], employé par la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France en qualité de maçon, a été victime d'un accident du travail le 26 février 2007 ; qu'il a été blessé au pied gauche alors qu'il utilisait une scie à sol pour réaliser des traits dans le bitume ; que cet accident a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne qui lui a versé des indemnités journalières jusqu'au 12 septembre 2008 ; que son état de santé a été consolidé au 1er septembre 2008 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % ; qu'en octobre 2010, des poursuites pénales ont été engagées à l'encontre de la société Jean Lefebvre pour l'infraction de blessures involontaires et ont abouti à un arrêt du 23 mars 2013 reconnaissant la culpabilité de l'employeur ; que, par lettre reçue le 6 mai 2013, M. [Y] a ensuite saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître la faute inexcusable se son employeur ;

Par jugement du 6 juillet 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux a déclaré le recours de M. [Y] irrecevable pour prescription.

M. [Y] fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions tendant à infirmer cette décision, juger que la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France a commis une faute inexcusable, ordonner la majoration de sa rente et avant dire droit sur la réparation de ses préjudices personnels, ordonner une expertise médicale pour en déterminer l'étendue, tout en lui allouant une provision de 5 000 € à valoir sur l'indemnisation future. Il conclut en outre à la condamnation de la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Au soutien de son appel, il prétend en effet que la prescription de deux ans prévue à l'article L 431-2 du code de la sécurité sociale n'était pas acquise lorsqu'il a demandé la reconnaissance de la faute inexcusable. Selon lui, le délai de prescription a été interrompu une première fois le 22 avril 2009, date à laquelle il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale qui lui a répondu le 12 juin 2009. Il se prévaut ensuite du caractère interruptif de l'instance pénale engagée pour les mêmes faits contre l'employeur et prétend que cette interruption remonte au mois de janvier 2009, date à laquelle il indique avoir déposé plainte. Il ajoute que dans cette affaire, le parquet a fait citer la société Husqvarna le 9 juillet 2010 pour l'audience du 9 décembre 2010, soit avant l'expiration du délai de 2 ans et que les différents actes accomplis à la demande du ministère public avant la citation en justice de la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France ont interrompu la prescription.

Sur le fond du litige, il reproche à son employeur d'avoir loué une machine avec un disque non adapté au travail qui lui était confié. Il explique que ce matériel n'était pas conforme aux règles techniques ou de certification et que la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France a manqué à son obligation de sécurité en lui fournissant une tronçonneuse à roulette ou scie à sol non équipé des disques appropriés. Il précise qu'en raison de l'inadaptation des disques à la tronçonneuse, il ne lui était pas possible d'éteindre cet appareil ou de le faire marcher au ralenti. Il invoque enfin l'arrêt de la cour d'appel du 26 mars 2013 ayant déclaré la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France coupable des faits de blessures involontaires à son préjudice.

La société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France conclut à titre principal à la confirmation du jugement attaqué. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de débouter M. [Y] de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable. Encore plus subsidiairement, elle souhaite que la mission de l'expert soit limitée à l'évaluation des seuls postes de préjudice indemnisables sur le fondement de la faute inexcusable et s'oppose à la demande de provision dirigée directement contre elle. Enfin, elle conclut à la condamnation de tout succombant à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle considère en effet que l'action engagée par M. [Y] est prescrite. Selon elle, l'action pénale n'a pas été mise en mouvement dans le délai prévu à l'article L 431-2 du code de la sécurité sociale et l'intéressé a attendu le 30 avril 2013 pour saisir la juridiction des affaires de sécurité sociale alors qu'il devait le faire avant le 12 septembre 2010. Elle relève que la lettre adressée au tribunal par l'intéressé, en 2009, ne saisit pas cette juridiction d'une action en reconnaissance de sa faute inexcusable et n'a été suivie d'aucun effet, comme le confirme la réponse faite par le tribunal le 12 juin 2009. Elle précise aussi que la prescription était d'ores et déjà acquise lorsqu'elle a été convoquée le 20 octobre 2010 devant la juridiction pénale. Elle indique ensuite que ni les instructions adressées par le procureur de la République lors de l'enquête préliminaire, ni les procès-verbaux de l'inspection du travail ne constituent l'engagement d'une action pénale.

Sur le fond du litige, elle estime que M. [Y] n'apporte aucun élément permettant de démontrer qu'elle avait ou aurait dû avoir conscience du danger et n'a pas pris les mesures nécessaires pour empêcher la réalisation de l'accident. Il soutient que l'intéressé a bloqué délibérément l'accélérateur en position maximum et a manoeuvré en force la scie au sol, s'exposant lui-même au danger en violation des consignes de sécurité.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne conclut également à la confirmation du jugement. Subsidiairement, elle s'en rapporte à l'appréciation de la cour sur la reconnaissance de la faute inexcusable et sur la majoration de la rente ainsi que sur la fixation des éventuels préjudices, dans la limite des textes et de la jurisprudence applicables. Elle demande à la cour de mettre les frais d'expertise et leur consignation à la charge de l'employeur et de le condamner à lui rembourser le montant des sommes dont elle sera tenue de faire l'avance en application des articles L 452-2 et L 452-3 du code de la sécurité sociale.

Elle indique en effet que M. [Y] a attendu le 30 avril 2013 pour agir alors qu'il devait le faire avant le 12 septembre 2010 et rappelle que l'ouverture de l'enquête préliminaire ou le dépôt d'une plainte sans constitution de partie civile ne constituent pas l'engagement de l'action pénale. Elle précise qu'au 20 octobre 2010, date à laquelle la société Entreprise Jean Lefebvre Ile de France a été citée à comparaître devant la juridiction pénale, la prescription était déjà acquise. Enfin, elle fait observer que la lettre du 22 avril 2009 dont se prévaut M. [Y] n'a pas eu pour effet d'interrompre la prescription puisqu'il ne s'agit pas de l'exercice de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;

Motifs :

Considérant qu'en application de l'article L 431-2 du code de la sécurité sociale, l'action en reconnaissance de la faute inexcusable se prescrit par deux ans à compter de la date de l'accident, du jour de la reconnaissance de son origine professionnelle ou du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières ;

Considérant qu'en l'espèce, l'accident, dont M. [Y] a été victime le 26 février 2007, a été pris en charge le 25 avril 2007 par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne qui lui a versé des indemnités journalières jusqu'au 12 septembre 2008 ;

Considérant que c'est à partir de cette date que doit être décompté le délai de deux ans et la demande de reconnaissance d'une faute inexcusable devait donc être introduite avant le 12 septembre 2010 ;

Considérant ensuite que la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ;

Considérant que l'engagement d'une telle action résulte du réquisitoire introductif du procureur de la République, d'une citation directe du prévenu devant la juridiction pénale ou du dépôt d'une plainte de la victime avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction ;

Considérant qu'en revanche, ni les instructions adressées par le ministère public lors de l'enquête préliminaire, ni le dépôt d'une plainte simple entre les mains du procureur de la République ne déclenchent l'action pénale ;

Considérant qu'à la suite de l'accident survenu le 26 février 2007, l'inspection du travail a établi un rapport transmis au ministère public et la victime a été entendu en 2009 par les services de police mais ce n'est qu'en octobre 2010 que des poursuites ont été engagées à l'encontre de la société Entreprise Jean Lefebvre du chef de blessures involontaires dans le cadre d'une relation de travail ;

Considérant qu'il est en effet justifié du procès-verbal de convocation de cette société à comparaître devant le tribunal correctionnel pour y être jugé pour cette prévention avec la mention de la date du 20 octobre 2010 ;

Considérant qu'à cette date, la prescription de deux ans était déjà acquise et il n'est pas justifié d'une plainte antérieure de la victime avec constitution de partie civile, étant rappelé que le dépôt d'une simple plainte ne constitue pas une cause d'interruption ;

Considérant que M. [Y] se prévaut également de la convocation du fabriquant de la tronçonneuse devant le tribunal correctionnel qui a été faite, le 9 juillet 2010, dans le délai de deux ans ;

Considérant toutefois que cette citation en justice vise une personne étrangère aux relations de travail, poursuivie pour un autre chef d'infraction que celui de blessures involontaires ; qu'elle n'a donc pas pu interrompre le délai de prescription de l'action du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;

Considérant qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont décidé que l'action pénale exercée postérieurement au 12 septembre 2010 n'avait eu aucun effet interruptif ;

Considérant qu'en cause d'appel, M. [Y] dit avoir saisi la juridiction des affaires de sécurité sociale dans le délai de deux qui lui était imparti et pour en justifier produit une lettre adressée au tribunal par son conseil le 22 avril 2009 ;

Considérant cependant que si cette lettre évoque bien l'accident du travail dont le salarié a été victime le 26 février 2007, il est seulement demandé l'instauration d'une mesure d'expertise sans aucune indication sur son fondement juridique ;

Considérant que d'ailleurs, dans la réponse faite au conseil le 12 juin 2009, il lui est demandé l'attestation de non-conciliation ou la copie de la décision de la commission de recours amiable à défaut de quoi, le courrier serait classer sans suite, ce qui a été fait ;

Considérant que ce simple échange de correspondance ne permet pas à M. [Y] de rapporter la preuve de l'exercice effectif de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable dans le délai de deux ans qui lui était imparti et ce n'est en réalité qu'en 2013 que cette action a été introduite avec la précision, pour la première fois, que la faute inexcusable de la société Jean Lefebvre était recherchée ;

Considérant que dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont décidé que la prescription prévue à l'article L 431-2 s'opposait à la recevabilité de cette demande ;

Que le jugement sera confirmé :

Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile ; qu'ayant succombé en son appel, M. [Y] sera débouté de sa propre demande à ce titre ;

Considérant que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais ; qu'elle ne donne pas lieu à dépens ;

Par ces motifs :

- Déclare M. [Y] recevable mais mal fondée en son appel ;

- Confirme le jugement entrepris ;

- Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;

- Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L 241-3 et le condamne au paiement de ce droit s'élevant à 326,90 € ;

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 15/09051
Date de la décision : 09/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°15/09051 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-09;15.09051 ?
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