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08/11/2017 | FRANCE | N°15/15386

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 08 novembre 2017, 15/15386


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 08 NOVEMBRE 2017



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/15386



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Mai 2015 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/11002





APPELANTE



SCP [Z] & [U], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cett

e qualité audit siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Christian VALENTIE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2441

Ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel SYNAN...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 08 NOVEMBRE 2017

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/15386

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Mai 2015 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/11002

APPELANTE

SCP [Z] & [U], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Christian VALENTIE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2441

Ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel SYNANE, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : T193

INTIMEE

SA POINT P agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant Me Thibaut PETITGIRARD du Cabinet LIREUX BOLLENGIER STRAGIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C995

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Sophie RICHARD, Conseillère, chargée du rapport,

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christian HOURS, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

*****

La société POINT P a confié à la SCP [Z] [U], huissiers de justice, (la SCP), l'exécution d'une ordonnance de référé condamnant la société ACHERES BATIRENOC SERVICE, (ABRS), à lui verser la somme de 82 292,03 € à titre de provision.

La SCP a procédé le 9 novembre 2012 à une saisie-attribution de la somme de 84 237,33 € sur les comptes de la ville de Villepreux tenue envers la société ABRS, en liquidation judiciaire depuis le 10 janvier 2013, du paiement de la somme de 172 310,58 €. En l'absence de contestation dans le délai d'un mois le certificat de non contestation a été dressé 17 décembre 2012 et signifié le lendemain au tiers saisi.

Reprochant à la SCP d'avoir pratiqué une saisie-attribution entachée de nullité comme mentionnant une adresse inexacte du requérant et ne respectant pas l'article R 143-3 du code des procédures civiles d'exécution qui impose à peine de nullité de l'acte de saisie une notification au comptable public assignataire de la dépense , en l'espèce le trésorier payeur de Plaisir, la société POINT P a recherché la responsabilité professionnelle de la SCP [Z] devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 21 mai 2015, a dit que la SCP avait commis une faute et l'a condamnée au paiement de la somme de 70 000 € à titre de dommages-intérêts outre la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCP [Z] [U] a interjeté appel de cette décision le 16 juillet 2015 et dans ses conclusions notifiées le 5 février 2016 demande à la cour d'infirmer le jugement, de déclarer l'action de la société POINT P irrecevable et en tout état de cause mal fondée et de la condamner au paiement de la somme de 12 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Elle soutient principalement que l'appréciation de la régularité d'un acte d'exécution appartient exclusivement au juge de l'exécution sur le fondement de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, subsidiairement que le défaut de signification de la saisie-attribution au comptable assignataire de la dépense ne constitue pas une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte mais une irrégularité de forme dont il convient d'apprécier si elle a causé un grief; qu'ainsi l'action en responsabilité est prématurée car elle repose sur la nullité d'un acte que seul le juge de l'exécution a le pouvoir de prononcer et qui , à défaut, produit son plein et entier effet; qu'en présence d'une saisie définitive qui n'a fait l'objet d'aucune contestation devant lui la société POINT P ne justifie d'aucun préjudice actuel, direct et certain puisque le tiers saisi peut toujours contester la validité de la saisie entachée d'une nullité de fond comme ayant été délivrée au mauvais tiers-saisi.

La société POINT P a conclu le 8 décembre 2015 à la confirmation du jugement à l'exception du montant des dommages-intérêts accordés dont elle sollicite qu'ils soient portés à la somme de 84 237,33 € avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2012 outre leur capitalisation.

Elle sollicite également la condamnation de l'appelante au paiement de la somme de

5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle fait valoir que c'est à juste titre que le tribunal a retenu sa compétence exclusive pour statuer sur la responsabilité professionnelle de l'huissier dès lors que la nullité de l'acte de saisie était manifeste au regard des dispositions de l'article R 143-3 du code des procédures civiles d'exécution et du siège social erroné qui y est mentionné.

Sur le préjudice elle considère que le tribunal a retenu à tort l'existence d'une perte de chance alors qu'il s'agit d'un préjudice avéré de recouvrer toute sa créance puisque la commune avait reconnu devoir la somme de 172 310,58 € à la société ABRS et que le mandataire judiciaire de cette société lui a notifié l'impossibilité de recouvrer sa créance qu'elle avait régulièrement déclarée.

MOTIFS DE LA DECISION :

- Sur l'exception d'incompétence :

Il appartenait à la SCP [Z] [U] de s'assurer de l'efficacité de la saisie-attribution qu'elle pratiquait pour le compte de la société POINT P tant au niveau de la rédaction de l'acte que dans le cadre de sa signification au comptable public et le tribunal saisi d'une action en responsabilité professionnelle de l'huissier est compétent pour apprécier l'existence des manquements aux obligations contractuelles de ce dernier alléguées par son mandant.

Dès lors, si le juge de l'exécution est compétent pour apprécier la validité des actes d'exécution contestés devant lui à l'occasion de l'exécution forcée, seul le juge de la responsabilité peut statuer sur les manquements éventuels de l'huissier dans la rédaction et la délivrance de tels actes de nature à engager la responsabilité contractuelle de leur auteur sur le fondement du mandat qui a été confié à ce professionnel.

C'est donc par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a écarté l'exception tirée de la compétence exclusive du juge de l'exécution soulevée par la SCP.

- Sur la faute :

En application des dispositions de l'article R 143-3 du code des procédures civiles d'exécution, tout acte de saisie notifié à un comptable public doit à peine de nullité être signifié ou notifié au comptable assignataire de la dépense.

Il n'est pas contesté en l'espèce que la SCP n'a pas notifié la saisie-attribution qu'elle a diligentée le 9 novembre 2012 entre les mains du comptable assignataire de la dépense qui était le trésorier payeur de Plaisir mais directement à la commune de Villepreux tenue envers la société ABRS de la somme de 172 310,58 €.

Ainsi en ne respectant pas les dispositions ci-dessus imposées à peine de nullité, l'huissier a manqué à ses obligations professionnelles puisqu'il n'a pas assuré l'efficacité de l'acte qu'il diligentait en ne le notifiant pas à la bonne personne.

La SCP a également commis une faute en délivrant l'acte avec la mention d'une adresse erronée du créancier même si l'absence de conséquence d'une telle erreur sur l'efficacité de l'acte ne permet pas de retenir l'existence d'un préjudice en découlant.

- Sur le préjudice :

La SCP soutient que le tiers saisi ayant seulement la faculté de soulever la nullité de la saisie devant le juge de l'exécution le préjudice allégué n'est qu'éventuel, la saisie attribution signifiée avant le placement de la société ABRS en liquidation judiciaire produisant tous ses effets et la commune de Villepreux ne pouvant se défaire des fonds en sa possession tant qu'il n'a pas été statué sur la validité de la saisie par le juge de l'exécution.

La société POINT P fait valoir que son préjudice qui est entier ne résulte pas d'une perte de chance et qu'elle ne dispose plus d'aucune action pour agir contre la commune qui détenait pourtant une somme supérieure à sa créance, régulièrement déclarée à la liquidation de la société ABRS dont le mandataire liquidateur lui a notifié le 10 juillet 2014 qu'elle était irrecouvrable.

C'est à juste titre que le tribunal a retenu que par la faute de l'huissier la société POINT P avait perdu une chance très sérieuse d'obtenir le paiement de sa créance, faute de pouvoir se prévaloir de cet acte inefficace.

En effet contrairement à ce que soutient l'huissier, le tiers saisi qui a en l'espèce respecté le délai prévu à l'article R 211-4 du code des procédures civiles d'exécution et qui n'est pas soumis au délai d'un mois prévu à l'article R 211-11 du même code, peut toujours en vertu de l'article R 211-9 invoquer la nullité de la saisie-attribution devant le juge de l'exécution et la lettre adressée par le conseil de la ville de [Localité 1] en date du 17 janvier 2013 démontre que le tiers saisi aurait très certainement usé de cette faculté.

En outre la somme détenue par la ville de [Localité 1] au titre de la créance de la société ABRS à son encontre était supérieure à la créance de la société POINT P.

Enfin il sera rappelé qu'en vertu de l'article R 211-8 du code des procédures civiles d'exécution le créancier saisissant qui n'a pas été payé par le tiers saisi conserve ses droits contre le débiteur sauf si le défaut de paiement est imputable à la négligence du créancier qui perd alors ses droits à concurrence des sommes dues par le tiers saisi de sorte qu'il importe peu de savoir d'une part si la ville de [Localité 1] détenait toujours cette somme et d'autre part si la liquidation judiciaire de la société ABRS rendait impossible le recouvrement de sa créance par la société POINT P.

Et le fait qu'un certificat de non-contestation ait été établi ou que le comptable public ait été avisé de la saisie sont sans conséquence sur l'inefficacité de l'acte puisque la nullité de la saisie pourrait toujours être opposée au créancier saisissant par le tiers saisi.

Ainsi la notification erronée effectuée par l'huissier a fait perdre à la société POINT P une chance de recouvrer sa créance d'un montant de 84 237,33 € qui sera évaluée à la somme de 70 000 €.

En application de l'article 700 du code de procédure civile la SCP [Z] [U] sera condamnée à payer à la société POINT P la somme de 3 000 €.

La SCP [Z] [U] qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- Condamne la SCP [Z] [U] sera condamnée à payer à la société POINT P la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamne la SCP [Z] [U] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/15386
Date de la décision : 08/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°15/15386 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-08;15.15386 ?
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