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02/11/2017 | FRANCE | N°15/15377

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 02 novembre 2017, 15/15377


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 02 NOVEMBRE 2017



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/15377



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013016990





APPELANTE



SAS BELFOR FRANCE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRE

T : 327 753 281

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PA...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 02 NOVEMBRE 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/15377

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013016990

APPELANTE

SAS BELFOR FRANCE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 327 753 281

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

INTIMÉES

SA HELVETIA ASSURANCES, venant aux droits de GAN EUROCOURTAGE venant elle-même aux droits de GROUPAMA TRANSPORTS

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 339 489 379

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par MaîtreNadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Ayant pour avocat plaidant Maître Nicolas MULLER, avocat au barreau de PARIS, toque: A0139

SARL AGENCE TRANSPORTS CARAÏBES- ATC

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 3]

N° SIRET : 495 252 587

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Ayant pour avocate plaidante Maître Séverine GAUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Anne DU BESSET, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère

Madame Anne DU BESSET, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Belfor (France) (ci-après Belfor) a pour activité la rénovation et la décontamination de biens mobiliers et immobiliers.

La société Agence Transports Caraïbes (ci-après ATC) qui est assurée auprès de la compagnie Groupama Transport, devenue Gan Eurocourtage, puis Helvetia Assurances (ci-après Helvetia), a pour activité le transport, le déménagement et la manutention.

Le 14 mai 2011, la société Belfor a été chargée par la société Carlson [Adresse 4] (ci-après Carlson) de décontaminer les 252 chambres de l'hôtel '[Établissement 1]', situé [Adresse 4], contaminées à la suite de la mauvaise installation du système de climatisation.

Les prestations confiées à la société Belfor impliquaient, notamment, de déménager et réaménager le mobilier des chambres de l'hôtel.

Aux termes d'un contrat dit 'de sous-traitance' du 16 mai 2011, la société Belfor a confié à la société ATC l'exécution des prestations suivantes :

- le déménagement du mobilier de l'hôtel vers le lieu de stockage convenu, à savoir dans le périmètre de l'hôtel,

- le stockage du mobilier dans le lieu de stockage, sans pour autant que le sous-traitant soit dépositaire du mobilier,

- le réaménagement du mobilier de l'hôtel.

L'article 5.1 du contrat précisait que le sous-traitant était tenu à une obligation de résultat dans l'exécution des prestations mises à sa charge.

Par courriels intervenus en juillet, septembre et décembre 2011, la société ATC a fait état auprès de la société Belfor de difficultés de stockage, les emplacements prévus étant pleins, et a proposé des lieux alternatifs.

Le 12 décembre 2011, a été établi à la requête de la société Belfor un procès-verbal de constat d'huissier sur le site de l'hôtel [Établissement 1] faisant état de :

- la présence sur le parking de containers, dont l'un, très humide, renfermait des meubles dont certains étaient non protégés ou moisis ou portant des traces de coups,

- la réfection récente visible du sol du restaurant, qui aurait été rendue nécessaire suite à son absence de protection lors de l'entreposage de mobilier par la société ATC et à sa détérioration consécutive,

- la présence à l'intérieur du bâtiment 'Salon Caraïbes' ou 'Ballroom', dans le couloir, de meubles posés à même le sol sans protection et présentant d'importantes marques de moisissures et des coups.

Le 19 janvier 2012, un procès-verbal de réception partielle des travaux a été signé entre le maître de l'ouvrage, la société Carlson, et l'entrepreneur, la société Belfor, concernant les bâtiments ouest et 'Marina' de l'hôtel ; des réserves étaient alors formulées et acceptées par l'entrepreneur qui s'engageait à y remédier sous 45 jours ; il y était également signalé des inexécutions relatives aux prestations de réaménagement, à savoir des mobiliers et équipements endommagés ou manquants, dont l'entrepreneur était tenu pour responsable.

Selon courrier recommandé AR du 29 février 2012, la société Belfor a reproché à la société ATC d'avoir manqué à ses obligations, notamment du fait de détériorations occasionnées au mobilier, et d'avoir abandonné le chantier depuis le 17 février 2012, alors que 84 chambres restaient à terminer ; a reconnu devoir la somme de 53.575,62 euros HT à la société ATC, celle de 39.252,65 euros ne pouvant être due que sur présentation de justificatifs ; l'a mise en demeure de reprendre le chantier sous 24 heures.

Le 31 mars 2012, un second procès-verbal de réception partielle des travaux a été signé entre le maître de l'ouvrage, la société Carlson, et l'entrepreneur, la société Belfor, concernant le bâtiment Est de l'hôtel ; des réserves étaient alors formulées et acceptées par l'entrepreneur qui s'engageait à y remédier sous 30 jours ; il y était également signalé des inexécutions relatives aux prestations de réaménagement, à savoir des mobiliers et équipements endommagés ou manquants, dont l'entrepreneur était tenu pour responsable.

Par courrier recommandé AR du 9 novembre 2012, la société ATC a mis en demeure la société Belfor de lui payer la somme de 84.657,34 euros, au titre de ses factures notamment de stockage demeurées impayées, outre pénalités de retard.

Par actes des 14 et 17 décembre 2012, la société Belfor a assigné la société ATC et son assureur, la société Helvetia Assurances, afin d'obtenir, d'une part, qu'il soit enjoint à la première de communiquer l'intégralité des documents relatifs aux états de lieux réalisés lors du déménagement et du réaménagement, et d'autre part, la condamnation solidaire des sociétés ATC et Helvetia à lui payer la somme de 600.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages intérêts, faisant valoir que du fait des manquements d'ATC, le maître de l'ouvrage avait refusé de lui régler le solde des sommes qui lui restaient dues.

Par jugement du 18 juin 2015, le tribunal de commerce de Paris a':

' débouté la société Belfor (France) de ses demandes ;

' condamné la société Belfor (France) à payer à la société Agence Transports Caraïbes la somme de 53.575,52 euros en principal avec intérêts au taux de trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 9 novembre 2012 ;

' ordonné l'exécution provisoire ;

' condamné la société Belfor (France) à payer la somme de 2.500 euros à la société Agence Transports Caraïbes et celle de 1.000 euros à la société Helvetia Assurances, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

' condamné la société Belfor (France) aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 144,84 euros dont 23,92 euros de TVA.

Vu l'appel interjeté par la société Belfor le 16 juillet 2015 à l'encontre de cette décision ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 20 juin 2017 par la société Belfor (France), par lesquelles il est demandé à la cour de':

- dire et juger la société Belfor (France) recevable et fondée en son appel,

En conséquence,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

- condamner solidairement les sociétés Agence Transports Caraïbes et Helvetia à payer à la société Belfor (France) la somme de 506.717,88 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2012, date de l'assignation, et capitalisation des dits intérêts.

- débouter tous contestants de l'ensemble de leurs prétentions, fins et conclusions,

- condamner solidairement les sociétés Agence Transports Caraïbes et HELVETIA en paiement à la société Belfor (France) de la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés pour ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Frédéric LALLEMENT, avocat.

Vu les dernières conclusions signifiées le 14 janvier 2016 par la société Agence Transports Caraïbes (ATC), par lesquelles il est demandé à la cour de':

A titre principal,

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a condamné la société Belfor (France) à payer à la société ATC une somme de 53.575,62 euros HT TGCA.

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a condamné la société Belfor (France) à payer à la société ATC une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens de première instance.

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la société Belfor (France) de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire,

- condamner la société Helvetia à garantir ATC de toutes sommes qu'elle serait condamnée à payer à la société Belfor (France)

L'infirmant pour le surplus,

- condamner la société Belfor (France) à payer à la société ATC la somme de 39.252,65 euros à titre principal outre les intérêts de retard conventionnels,

En tout état de cause,

- condamner la société Belfor (France) au paiement d'une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Jean-Didier Meynard ' SCP BRODU CICUREL MEYNARD GAUTHIER, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 4 novembre 2015 par la société Helvetia Assurances, par lesquelles il est demandé à la cour de':

- dire et déclarer la société Belfor irrecevable et subsidiairement mal fondée en toutes ses demandes,

- l'en débouter,

- mettre, en conséquence, hors de cause la société ATC et la compagnie Helvetia,

- condamner la société Belfor à payer à la compagnie Helvetia une indemnité de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner la société Belfor à payer à la compagnie Helvetia une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Très subsidiairement,

- dire et juger que l'indemnité pouvant être mise à la charge de la compagnie Helvetia sera déterminée en application des termes de la police souscrite et notamment du capital maximum garanti applicable en fonction du risque considéré, à hauteur de 75.000 euros.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 juin 2017.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Motifs :

Sur la demande de la société Belfor :

La société Helvetia soutient que la société Belfor serait irrecevable en sa demande, faute de justifier que la société Carlson lui aurait infligé une retenue de 600.000 euros sur les sommes qu'elle lui aurait payées ; or, ce moyen relève du fond et ne constitue pas une fin de non recevoir ; par suite, la société Belfor est recevable en sa demande.

Vu les articles 1315 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Aux termes de l'article 5 du contrat de sous-traitance, le sous-traitant, la société ATC, était tenu, outre à une obligation de résultat, de prendre toutes précautions afin de ne pas endommager le mobilier et d'assurer sa conservation et sa sécurité, ainsi que de procéder avec l'entrepreneur principal à l'inventaire de sortie du mobilier à stocker.

En l'espèce, la société Belfor fait valoir que des états des lieux de déménagement et de réaménagement ont été établis, à des dates non précisées, contradictoirement entre elle-même et la société ATC, qui les auraient indûment conservés ; pour sa part, la société ATC ne prend pas clairement position sur l'existence de tels états des lieux, dont elle semble douter, employant le conditionnel pour les évoquer et prétendant que 's'ils existent', ils ont été laissés en possession de la société Belfor.

Or, il résulte des stipulations précitées qu'il appartenait à la société ATC d'effectuer l'inventaire des meubles à stocker, contradictoirement avec la société Belfor, ce, à la 'sortie' du stockage, c'est-à-dire lors du ré-emménagement, mais nécessairement aussi lors de leur déménagement et de leur 'entrée' au stockage, aux fins de pouvoir utilement comparer l'état et la nature du stock de meubles avant et après l'exécution de sa prestation.

Par suite, il apparaît, que des états des lieux contradictoires aient ou non été dressés et indûment conservés ou non par la société ATC, étant observé que dans ce dernier cas, une négligence de la société Belfor serait à déplorer, consistant à ne pas avoir pris la précaution de faire établir ces inventaires en deux originaux, afin que chaque partie en conserve un, que la société ATC a en toutes hypothèses manqué à ses obligations soit en s'abstenant de faire établir ces inventaires, comme elle en avait la charge contractuelle, soit en refusant de les produire s'ils ont effectivement été établis.

Il s'avère donc que la société Belfor a été contrainte de suppléer la carence de son sous-traitant en faisant dresser un inventaire par un huissier, ce qu'elle a tenté de faire par constat du 12 décembre 2011. Sur ce point, s'il est certes regrettable que ce procès-verbal de constat ait été établi de façon non contradictoire à l'égard de la société ATC, qui n'y était ni présente, ni appelée, cet élément du dossier demeure toutefois recevable pour ce qu'il est, à savoir une mesure de constatations effectuée in situ par un auxiliaire de justice sur la base des déclarations unilatérales d'une partie, dès lors que sa teneur est à même d'être discutée contradictoirement par la société ATC dans le cadre du présent procès.

Or, ce procès-verbal de constat fait état d'avaries sur les biens meubles, de même que de conditions de stockage des meubles défectueuses (absence de protection et taux d'humidité excessif) et de la rénovation récente d'un parquet.

En outre, l'existence de ces avaries, ainsi que des pertes, au demeurant non contestée par la société ATC, est confirmée par les deux procès-verbaux de réception partielle des travaux intervenus entre les sociétés Carlson et Belfor les 19 janvier et 31 mars 2012 (le second étant définitif), faisant état d'une liste de biens endommagés ou manquants, ainsi que par le courrier RAR du 29 février 2012, portant mise en demeure par la société Belfor à la société ATC de reprendre les travaux.

Par suite, il s'avère que la société ATC, qui était expressément tenue à une obligation de résultat dans l'exécution de ses obligations contractuelles et n'excipe, ni ne justifie que ces pertes et avaries ne lui sont pas imputables, comme existant avant son intervention ou pour être dues à un cas de force majeure, seules hypothèses de nature à l'exonérer de sa responsabilité, a manqué à ses obligations contractuelles, ce qui engage sa responsabilité à l'égard de son donneur d'ordre. En effet, si la société ATC démontre certes avoir rencontré des difficultés de stockage consécutifs à la saturation des lieux prévus, au vu des échanges de mails produits, elle ne prétend, ni ne justifie pour autant que ces difficultés relèveraient de la force majeure (faute de remplir à tout le moins les critères de l'irrésistibilité et de l'imprévisibilité).

S'agissant du quantum du préjudice consécutif à ces manquements pour la société Belfor, celle-ci allègue qu'il s'établit à la somme de 507.717,88 euros qui correspond à l'indemnité mise à sa charge par la société Carlson en dédommagement des pertes et avaries, en vertu d'un protocole d'accord transactionnel mettant fin à leur litige, régularisé entre elles en 2014, que la société Carlson n'aurait pas formellement signé, mais qui aurait été exécuté, ce qui n'est pas contesté par la société ATC. La cour observe toutefois que selon ce protocole transactionnel, la somme de 507.717,88 euros se décompose en six postes, dont seuls deux relèvent de la réparation des biens immobiliers endommagés (pour 48.177,14 euros) et de la réparation ou du remplacement des biens mobiliers endommagés ou manquants (pour 112.822,80 euros) ; que s'agissant du poste des pénalités de retard (213.535,31 euros), seule la moitié s'avère imputable à la société ATC ; et, que pour le surplus, cette imputabilité n'est pas démontrée.

Par suite, le préjudice de la société Belfor imputable à la société ATC se limite à la somme de 48.177,14 + 112.822,80 + (213.535,31 : 2) = 267.767,59 euros. En conséquence, le société ATC et son assureur, la société Helvetia, seront condamnées solidairement à payer cette somme à l'appelante, outre intérêts au taux légal à compter du

12 décembre 2012, date de l'assignation, avec capitalisation annuelle des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, le jugement étant donc infirmé sur ce point.

La garantie de la société Helvetia sera toutefois limitée à la somme de 75.000 euros, conformément aux stipulations des conditions particulières de la police d'assurance la liant à la société ATC (pages 3 et 7) relatives aux 'pertes ou dommages aux marchandises confiées' en matière de 'transferts industriels/administratifs', ici applicables.

Sur la demande de la société ATC :

La société Belfor soutient que la demande de paiement de ses factures formée par la société ATC serait irrecevable comme prescrite, s'agissant d'un contrat de transport soumis à la prescription annale prévue à l'article L.133-6 du code de commerce.

Or, ainsi que l'a justement retenu le tribunal de commerce, le contrat de sous-traitance litigieux porte de façon prépondérante sur du déménagement (aller/retour) et s'analyse donc en un contrat d'entreprise, la prestation de transport qu'il inclut étant très secondaire, en ce que des précautions particulières devaient être prises pour assurer l'intégrité et la sécurité des meubles et en ce que ces derniers devaient être stockés dans l'enceinte de l'hôtel, ce qui réduit considérablement leur déplacement qui a d'ailleurs certainement pu être assuré au moins pour partie par des manutentionnaires sans transport extérieur, ni recours à un camion.

Par suite, la demande, soumise au droit commun de la prescription, se trouve recevable.

Sur le fond, la société ATC réclame le paiement de la somme de 92.828,27 euros, se décomposant comme suit :

- 53.575,62 euros HT, au titre de prestations issues du contrat principal (somme accordée par le tribunal de commerce) ;

- 39.252,65 euros HT, au titre de prestations complémentaires (somme objet d'un débouté par le tribunal de commerce),sommes dont la société Belfor se serait reconnue débitrice dans son courrier du 29 février 2012, même si elle a soumis l'acquittement de la seconde à la présentation de justificatifs.

La société Belfor s'y oppose, soutenant pour sa part que ce courrier a été mal interprété, puisque selon le propre décompte de la société ATC assortissant sa mise en demeure du 9 novembre 2012 (qui porte d'ailleurs seulement sur 84.657,34 euros), et au vu de la chronologie, elle n'était redevable que de la somme de 584 euros au 29 février 2012.

Or, le contrat prévoyait que la rémunération due au sous-traitant était globale et forfaitaire, outre frais d'acheminement aérien de l'emballage (facturés 'à part' et sur justificatifs), mais que des prestations supplémentaires pouvaient être facturées en cas d'accord écrit du donneur d'ordre sur la nature et le prix de ces prestations.

Or, la cour observe que la société ATC qui a la charge de la preuve de l'obligation dont elle se prévaut, ne produit aucune facture, ni le décompte de sa créance alléguée de 92.828,27 euros et ainsi ne justifie pas du différentiel entre cette somme et celle de 84.657,34 euros réclamée dans sa mise en demeure du 9 novembre 2012, qui est postérieure au courrier prétendument de reconnaissance de dette de la société Belfor en date du 29 février 2012. Or, la situation de compte da la société ATC jointe à ce courrier ne correspond pas exactement, à dates égales, au décompte de la créance établi par la société ATC le 9 novembre 2012.

Par suite, il s'avère que la société ATC ne justifie du détail de sa créance qu'à hauteur de 84.657,34 euros, mais qu'il convient d'en déduire toutefois les 5 factures du 12 avril 2012 pour un montant de 141.583,34 euros, par définition non reconnues par la société Belfor dans son courrier du 29 février 2012 qui est antérieur. En effet, la société ATC ne rapporte pas la preuve que ces cinq factures dont l'objet exact est ignoré seraient dues et, à supposer qu'elles concernent des 'prestations supplémentaires', elle n'établirait pas que ces prestations ont fait l'objet d'un accord de la société Belfor quant à leur nature et leur prix, conformément aux règles du contrat.

En conséquence, ATC sera déboutée de sa demande, le jugement étant infirmé sur ce point.

La société ATC et son assureur supporteront in solidum les dépens de première instance et d'appel, ainsi que, par équité, le paiement de la somme de 5.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau,

CONDAMNE les sociétés Agence Transports Caraïbes et Helvetia Assurances à payer à la société Belfor (France) les sommes de :

- 267.767,59 euros, solidairement, dans la limite de la somme de 75.000 euros concernant la société Helvetia Assurances, à titre de dommages intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2012, avec capitalisation annuelle des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

- 5.000 euros, in solidum, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE in solidum les sociétés Agence Transports Caraïbes et Helvetia Assurances aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction de ceux d'appel au profit de Maître Frédéric Lallement, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/15377
Date de la décision : 02/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°15/15377 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-02;15.15377 ?
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