Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2017
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/01599
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Octobre 2015 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 14/03453
APPELANTS :
Monsieur [U] [S]
Né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1] (93)
[Adresse 1]
[Localité 2]
SARL [U] [S] prise en la personne de ses représentants légaux
Immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro [S]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentés par Me David BOUAZIZ de la SCP BOUAZIZ - SERRA - AYALA - BONLIEU, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU, substitué par Me Diana DRAZETA DUKIC, de la SCP BOUAZIZ - SERRA - AYALA - BONLIEU, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU
INTIMÉE :
SCI PAUL BERT 37 prise en la personne de ses représentants légaux
Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 478 220 098
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant
Assistée de Me Sylvie LABONDE-RICOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P 214
substituant Me Cécile OURS, avocat au barreau de PARIS, toque : NAN362, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès THAUNAT, présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre
Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère
Madame Christine ROSSI, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Marie-Gabrielle HARDOIN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.
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FAITS ET PROCÉDURE
La SCI PAUL BERT 37 a donné à bail à la Société [U] [S] des locaux commerciaux dont elle est propriétaire [Adresse 4], pour une activité de 'vente d'armes diverses et accessoires nécessaires' ; le contrat de bail a été conclu le 16 octobre 2008 moyennant un loyer mensuel de 3 133,52 €. Par acte sous seing privé le 16 octobre 2008, M. [U] [S] s'est porté caution solidaire de L'EURL [U] [S].
La SCI PAUL BERT 37 a fait délivrer le 16 mars 2009 à la société [U] [S] un commandement de payer la somme de 6 267,04 € représentant l'arriéré des loyers et charges ; le commandement de payer visait la clause résolutoire insérée au contrat de bail.
Par acte d'huissier de justice en date du 25 mai 2009, la SCI PAUL BERT 37 a fait assigner la société [U] [S] et M. [U] [S] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et voir ordonner l'expulsion de la société [U] [S].
La société [U] [S] a fait état de désordres affectant les locaux qui lui avaient été donnés à bail.
Le juge des référés a, par ordonnance en date du 5 octobre 2009, constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail à compter du 16 avril 2009 ; dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision au titre de l'arriéré de loyers et sur la demande d'indemnité d'occupation ; désigné M. [W], comme expert aux fins d'examiner les désordres allégués par le preneur, d'en déterminer l'origine et de décrire les travaux permettant d'y remédier.
Le rapport a été déposé au greffe du tribunal de grande instance de Bobigny le 11 avril 2013.
Par acte d'huissier de justice en date du 29 janvier 2014, la SCI PAUL BERT 37 a assigné la société [U] [S] et M. [U] [S] aux fins d'obtenir le paiement de l'arriéré des loyers.
Par jugement en date du 28 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Bobigny a':
- Condamné solidairement la SOCIÉTÉ [U] [S] et Monsieur [U] [S] à payer à la SCI PAUL BERT 37 la somme représentant le montant des loyers dus de février 2009 au 31 août 2009';
- Dit que la somme due au titre des loyers dus de février 2009 au 31 août 2009 portera intérêt au taux légal à compter du 29 janvier 20l4 date de l'assignation ;
- Condamné la SCI PAUL BERT 37 à payer à la SOCIÉTÉ [U] [S] et à Monsieur [U] [S] la somme de 733,28 € à titre de dommages-intérêts ;
- Condamné la SCI PAUL BERT 37 à payer à la SOCIÉTÉ [U] [S] et à Monsieur [U] [S] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la SCI PAUL BERT 37 et la SOCIÉTÉ [U] [S] à payer chacune la moitié des dépens et ce y compris les frais d'expertise qui sont compris dans les dépens et qui seront partagés par moitié ;
- Ordonné l'exécution provisoire.
La SARL [U] [S] et M. [U] [S] ont interjeté appel de la décision par déclaration en date du 6 janvier 2016.
Dans leurs dernières conclusions signifiées par le RPVA le 7 juillet 2016 au visa des articles 1719 et 1721 du code civil, la SARL [U] [S] et M. [U] [S] demandent à la Cour de':
- Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Bobigny le 28 octobre 2015 en toutes ses dispositions ;
Statuer à nouveau,
- Déclarer la SARL [U] [S] et M. [U] [S] recevables et bien fondés en leurs écritures ;
- Constater que les graves désordres tenant en des infiltrations récurrentes subies par la SARL [U] [S] au sein des locaux qui lui ont été donnés à bail par la SCI PAUL BERT 37, résultent de vices de la couverture des locaux auxquels la bailleresse s'est abstenue de remédier nonobstant les nombreuses mises en demeure qui lui ont été adressées ;
- Constater que la SCI PAUL BERT 37 s'est abstenue d'assurer la jouissance paisible des locaux qu'elle a donné à bail à la SARL [U] [S] pendant son temps d'occupation des lieux ;
En conséquence,
- Constater que la SCI PAUL BERT 37 est entièrement responsable du préjudice de jouissance et de la perte d'exploitation subis par la SARL [U] [S] entre le 1er novembre 2008 au 31 août 2009 ;
- Débouter la SCI PAUL BERT 37 de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
- Condamner la SCI PAUL BERT 37 au paiement d'une indemnité de 31 335,20 € en réparation du préjudice de jouissance subi par la SARL [U] [S] et M. [U] [S] ;
- Condamner la SCI PAUL BERT 37 au paiement d'une indemnité de 27 617,92 € (26 396 € + 1 221,92 €) en réparation de la perte d'exploitation subie par la SARL [U] [S] du fait des graves désordres ayant affecté les locaux donnés à bail augmenté des frais de dépose des équipements et du procès-verbal de constat d'huissier dressé le 8 juin 2009 ;
- Condamner la SCI PAUL BERT 37 à verser à la SARL [U] [S] une somme de 9.400,56 € correspondant au montant du dépôt de garantie, avec intérêts au taux légal à compter de la résiliation du bail ;
- Condamner la SCI PAUL BERT 37 au paiement d'une indemnité de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- La voir condamner aux entiers dépens dont distraction au bénéfice de Maître David BOUAZIZ, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 28 avril 2017 au visa de l'article 1754 du code civil, la SCI PAUL BERT 37 demande à la Cour de':
- Dire et juger recevables mais mal fondés la société [U] [S] et Monsieur [S] dans leur appel,
- Les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
A titre d'appel incident,
- Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a limité la dette de loyers à laquelle la société [U] [S] et M. [S] ont été solidairement condamnés au montant des loyers dus de février 2009 au 31 août 2009,
Y procédant et statuant à nouveau,
- Condamner solidairement la société [U] [S] et M. [S] à payer à la société PAUL BERT 37 le montant de l'arriéré des loyers, charges et indemnités d'occupation dû sur la période de février 2009 au 19 janvier 2011, soit au paiement de la somme de 74 166,75 €,
- Dire et Juger que ladite somme portera intérêt au taux légal à compter du 29 janvier 2014, date de l'assignation de première instance, jusqu'à parfait paiement,
- Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société PAUL BERT 37 à payer à la société [U] [S] et M. [U] [S] la somme de 733,28 €, à titre de dommages et intérêts,
Y procédant et statuant à nouveau,
- Dire et Juger que la société [U] [S] et M. [U] [S] ne justifient d'aucun préjudice,
- Les débouter par conséquent de toute demande formulée de ce chef,
A titre très subsidiaire, si par impossible, la Cour devait retenir l'existence d'un préjudice,
- Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a limité le montant de la condamnation de la SCI PAUL BERT 37 à la somme de 733,28 €, à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues,
- Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SCI PAUL BERT 37 à payer à la société [U] [S] et M. [U] [S] la somme de 1 500 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Infirmer également la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SCI PAUL BERT 37 à devoir supporter la moitié des dépens,
Y procédant et statuant à nouveau,
- Condamner solidairement la société [U] [S] et M. [U] [S] à verser à la société PAUL BERT 37 une somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance, en ceux compris les frais d'expertise judiciaire,
En tout état de cause,
- Condamner solidairement la société [U] [S] et M. [U] [S] à verser à la société PAUL BERT 37 une somme de 3 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner solidairement la société [U] [S] et M. [U] [S] aux entiers dépens de l'appel, dont distraction pour ceux-là concernant à la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avocats aux offres de droit, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile.
La SARL [U] [S] et M. [U] [S] soutiennent que la bailleresse a violé son obligation d'assurer une jouissance paisible des lieux loués. En ce cas, ce n'est pas au preneur d'apporter la preuve d'un manquement du bailleur à ses obligations. Si le préjudice résulte de vices ou défauts quelque perte pour le preneur, le bailleur est tenu de l'indemniser. Ce préjudice de jouissance doit alors être réparé dans son intégralité.
En l'espèce, l'expert a conclu à l'existence de vices de construction affectant la couverture du local donné à bail à la locataire et de désordres tenant en des infiltrations rendant le local impropre à sa destination. Ces dernières, qui ont débuté en novembre 2008, ont affecté l'ensemble du local donné à bail selon le rapport de l'expert et ont empêché la poursuite de l'activité de vente d'armes de 5ème, 6ème, 7ème et 8ème catégorie (poudre noire, bille de peinture, taser, fusils').
Les mises en demeure et injonction adressées par les appelants à sa bailleresse intimée pour faire cesser les désordres subis au sein des locaux se sont avérées infructueuses (Pièces n° 3 et 4).
L'intimée n'a ainsi pas mandaté en temps utiles une entreprise pour remédier à ces désordres.
Le préjudice de jouissance existe en conséquence du 1er novembre 2008, début des infiltrations, au 31 août 2009, date de la remise des clefs du local. L'appelante demande une indemnité équivalente au montant du loyer.
En plus du préjudice de jouissance, les appelants soulèvent le fait qu'ils ont subi d'autres préjudices du fait de la nécessité de déménager et de l'obligation de démonter les appareils et du fait de l'atteinte à la réputation de la société et à l'obligation de sécurité. En outre, ils indiquent avoir subi un préjudice commercial.
Les appelants soutiennent avoir remis les clefs le 31 août 2009. Ils rappellent que la restitution des clés entre les mains du mandataire du bailleur n'est libératoire que si le mandataire a été dûment habilité par le bailleur et que le locataire peut invoquer l'existence d'un mandat apparent
En l'espèce, les appelants ont bien procédé à la remise des clés du local donné à bail auprès de l'agence immobilière [G] [F] (Pièce n°26) en sa qualité de mandataire de l'intimée qui l'avait, en son temps, chargée de procéder à la recherche d'un locataire (Pièce n° 25).
La SCI PAUL BERT 37, intimée soutient que la remise des clefs n'a pas eu lieu le 31 août 2009. En conséquence, cette date ne peut permettre de déterminer la dette courant entre les parties.
En effet, les clefs ont été remises à un tiers et non à l'intimée bailleresse alors que pour être valable, la remise des clefs doit être faite au bailleur ou à son représentant et il appartient au preneur de prouver qu'il a satisfait à son obligation de restitution des clés. En l'espèce, le tiers à qui les clefs ont été remises n'a pas été mandaté par l'intimée.
De plus, les appelants possédaient deux jeux de clef. Or, la restitution des lieux suppose leur libération totale. L'intimée indique que, grâce au second jeu de clef, les appelants ont pu prêter les locaux à un voisin pour qu'il y entrepose le rouleau de son store métallique.
L'intimée soutient que le premier jeu de clef lui a été personnellement et directement remis le 8 avril 2010 et le second le 19 janvier 2011. La restitution des lieux est donc intervenue à cette dernière date qui permet de déterminer les loyers, charges et indemnités d'occupation dûs.
L'intimée conteste l'existence d'infiltrations d'eau. Les conclusions de l'expert se fondaient uniquement sur des malfaçons qui seraient à l'origine de désordres allégués par les appelants mais les infiltrations en elles-mêmes n'ont pas été constatées.
Elle conteste aussi le constat d'huissier établi non-contradictoirement le 8 juin 2009, c'est-à-dire postérieurement à l'assignation en justice des parties. De plus, elle y oppose un constat d'huissier en date du 7 juin 2011 d'où il ressort que les murs étaient secs.
A titre subsidiaire, si la Cour retenait l'existence d'infiltrations d'eau, l'intimée estime qu'un trouble de jouissance ne peut être caractérisé car les infiltrations ont été limitées mais aussi aggravées par les négligences des appelants qui n'ont pas respecté leurs obligations d'entretien des lieux, selon l'expert, et de déclaration de sinistre. Or le bail contient une clause d'exclusion de la responsabilité du bailleur en présence de problèmes d'infiltrations d'eau lorsqu'ils résultent d'un défaut d'entretien du preneur.
En tout état de cause, l'intimée soutient que le trouble de jouissance ne dispensait pas les appelants du paiement du loyer. Ne démontrant pas en quoi les lieux étaient impropres à la poursuite de l'activité (infiltrations peu importantes) ni les préjudices subis (pas de lien de causalité démontré entre des pertes d'exploitation non démontrées et les infiltrations), les appelants ont continué à occuper les locaux et à exploiter le fonds de commerce. Le paiement du loyer en est la contrepartie.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 juin 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la restitution des clés :
Le 31 août 2009, M. [S] gérant de L'EURL [U] [S] a remis à M. [G] [F], de l'agence IMMOBILIÈRE [G] [F], un jeu de six clés du local sis [Adresse 4]. Il n'est pas contesté que cette agence n'était plus le mandataire du bailleur. Selon l'attestation de M. [F] (pièce 26 de la SARL [S]), celui-ci déclare avoir reçu ce jeu de clé le 31 août 2009 "à titre de garde". Dans ces conditions, L'EURL [U] [S] n'a pu se méprendre sur la qualité de M. [F], celui-ci ne s'étant pas présenté comme mandataire du propriétaire et n'avait accepté les clés qu'à "titre de garde".
Il ressort du rapport de M. [W], expert judiciaire, que le deuxième jeu de clé n'a été remis au bailleur qu'à l'issue de la réunion du 19 janvier 2011.
Dans ces conditions, toutes les clés n'ayant été remises qu'au 19 janvier 2011, c'est à juste titre que le bailleur prétend obtenir le paiement des loyers et des indemnités d'occupation jusqu'au 19 janvier 2011 soit la somme de 74.166,75 €.
Sur le trouble de jouissance :
Il ressort des pièces produites aux débats que le preneur a effectué des travaux d'aménagement dans le local à son entrée dans les lieux; que dès le mois de mars 2009 des infiltrations affectaient le plafond, le revêtement mural et le sol ; que ces désordres ont persisté malgré une première intervention sur la toiture et qu'enfin l'expert [E], mandaté par le locataire a indiqué que les infiltrations étaient dues aux nombreuses malfaçons et non façons de la toiture.
L'expert judiciaire [W] a noté lors de sa visite des lieux le 19 janvier 2011, qu'il existait sur le mur latéral droit, dans la zone située à l'aplomb de la brisure du toit une humidité montant jusqu'à 20%, des traces de coulure d'eau étant d'ailleurs visibles sur cette verticale; que l'humidité montait en partie basse jusqu'à 60%-70% et était proche de la saturation au niveau de la plinthe et du sol; que de même, une importante humidité variable entre 30% et 70% imprégnait la partie du mur de façade située à droite de la porte de droite du local, côté [Adresse 4] ; que sur le mur du fond, une saturation d'humidité était observée en partie basse à l'endroit où la moquette était fortement marquée.
L'expert a noté que la couverture du local était viciée par les malfaçons et non façons suivantes :
- dans l'angle supérieur gauche, deux tuiles sont cassées et ont été arrachées du fait de la prise au vent que les tuiles de tête subissent à cause de la non conformité du faîtage, laissant un trou béant ;
- la rive de tête n'a pas été réalisée conformément aux règles de l'art :
avec faîtière de terre cuite ; ou adjonction d'un tasseau et d'une garniture métallique ;
- la rive latérale gauche, en regardant de la rue, vient s'appuyer contre une couverture très ancienne en amiante-ciment ondulé. La jonction avec cette couverture en amiante-ciment ondulé a été réalisée au moyen d'une sorte de ruellée plate qui s'est naturellement fissurée à la jonction et qui n'assure plus aucune étanchéité ; c'est la raison de l'humidité retrouvée à l'aplomb de cette zone.
Plusieurs tuiles sont cassées.
- la rive latérale droite, côté [Adresse 4], qui vient s'appuyer contre le mur du bâtiment voisin plus élevé a été réalisée au moyen d'une bande d'aluminium bitumé. Le revêtement du mur a été réalisé avec un enduit partiellement dégradé qui n'assure pas l'étanchéité dans certaines zones ; des détritus sont venus s'accumuler et se glisser sous la partie horizontale de l'aluminium bitumé en provoquant une infiltration à ce niveau.
Les malfaçons sont de deux ordres :
l'insuffisance de pente en partie haute car le 21cms par mètre existant sont insuffisants en cas d'absence de sous-toiture, comme c'est le cas en l'espèce.
La laine de verre a été mise en oeuvre sans contre litonnage de surélévation et vient en de nombreuses zones au contact de la face interne des tuiles.
Ces risques potentiels de passages d'eau sont également aggravés par présence d'une multitude de feuilles mortes provenant de l'arbre poussant sur la propriété voisine.
L'expert note également qu'il est vraisemblable que les racines de cet arbre poussent au-dessous du bâtiment et aggravent les passages d'eau qui remontent par capillarité contre le mur du fond du bâtiment du fait de l'absence d'étanchéité de la parcelle voisine.
L'expert conclut que le défaut de conformité de la couverture et les importantes malfaçons qui l'affectent rendent le local non-conforme à sa destination et que dans ces conditions, l'EURL [U] [S] ne pouvait pas continuer à l'occuper. L'expert note également qu'en raison du défaut de pente la couverture n'est pas réparable et doit impérativement être entièrement remplacée pour devenir conforme et assurer le clos et le couvert du local.
Le rapport de l'expert judiciaire permet de conclure que dès lors qu'il pleuvait le local était affecté d'infiltrations d'eau, si bien que la société [U] [S] est fondée à faire valoir un préjudice de jouissance.
Contrairement à ce que soutient le bailleur le fait que des feuilles n'aient pas été retirées de la couverture, ce qui serait imputable au preneur, n'est pas la cause principale du sinistre et ne peut exonérer le bailleur de son obligation de délivrer au preneur un local dont le clos et le couvert sont assurés permettant de lui assurer une jouissance paisible des lieux en application de l'article 1719 du code civil.
Par ailleurs, le fait que le preneur ne justifie pas d'une déclaration de sinistre à sa compagnie d'assurance, ne saurait d'avantage exonérer le bailleur de sa responsabilité.
Compte tenu de l'activité exercée dans les lieux selon le bail, les locaux ne devaient pas présenter d'infiltrations récurrentes d'eau. Dans ces conditions, la société [U] [S] est bien fondée à demander une réfaction sur le prix des loyers évaluée à la somme de 20.000 €.
Sur le préjudice résultant de la perte d'exploitation :
La société [U] [S] sollicite la condamnation de la bailleresse à lui régler une somme de 27.617,92 € au titre de son préjudice lié à la perte d'exploitation qu'elle aurait subie, augmentée des frais de dépose des équipements et du coût du procès verbal de constat d'huissier dressé le 8 juin 2009.
Ainsi que l'ont constaté avec pertinence les premiers juges, par des motifs que la cour adopte, la société [U] [S] ne fait pas la preuve d'un lien causal entre la prétendue baisse de son chiffre d'affaires et les infiltrations d'eau qu'elle a subies. Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté cette société de chef de demande.
Sur le préjudice lié au déménagement et au démontage :
Dès lors que les locaux donnés à bail étaient sujets à des infiltrations récurrentes et que ces infiltrations étaient dues à un vice affectant le toit, la société [U] [S] pouvait légitimement considérer que les infiltrations allaient perdurer et lui causer un préjudice, elle est donc bien fondée à demander la condamnation du bailleur à lui payer les frais de démontage des appareils de sécurité soit 733,28 € HT et 877 € TTC selon une facture de DELTA SECURITY du 11 septembre 2009.
Par ailleurs, la société [U] [S] est bien fondée à solliciter le remboursement du coût du procès verbal d'huissier qu'elle a fait dresser pour établir la réalité des infiltrations d'eau dont elle était victime.
Sur la restitution du dépôt de garantie :
Selon le bail le montant du dépôt de garantie s'élève à la somme de 9400 €. La société locataire sollicite le remboursement de cette somme sur laquelle le bailleur ne conclut pas.
Dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de remboursement du dépôt de garantie.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SCI PAUL BERT 37 et la société [U] [S] à payer chacune la moitié des dépens en ce compris les frais d'expertise qui sont compris dans les dépens et qui seront partagés par moitié,
Statuant à nouveau,
Constate que les clés n'ont été remises que le 19 janvier 2011,
Condamne solidairement l'EURL [U] [S] et M. [U] [S] à payer à la SCI PAUL BERT 37 une somme de 74.166,75 € au titre des loyers et indemnités d'occupation dus pour la période de février 2009 au 19 janvier 2011, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 29 janvier 2014 ;
Condamne la SCI PAUL BERT37 à payer à l'EURL [U] [S] les sommes suivantes :
- 20.000 € en réparation du préjudice de jouissance,
- 1221,92 € TTC correspondant aux frais de dépose des équipements et au coût du procès verbal dressé le 8 juin 2009,
- 9400 € correspondant au dépôt de garantie,
Ordonne une compensation entre ces créances réciproques,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties avec distraction pour ceux les concernant à la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, d'une part et à Maître David BOUAZIZ, d'autre part, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE