Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2017
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00895
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Novembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/08819
APPELANTS
Monsieur [J] [T]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
Représenté et assistée sur l'audience par Me Jean-michel TROUVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0354, substitué sur l'audience par Me Anne LEDUC, avocat au barreau de PARIS, toque : A354
Madame [X] [P]
née le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 2]
Représentée et assistée sur l'audience par Me Jean-michel TROUVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0354, substitué sur l'audience par Me Anne LEDUC, avocat au barreau de PARIS, toque : A354
INTIMÉS
Monsieur [R], [V] [J]
né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 2] (ARGENTINE)
demeurant [Adresse 3]
Représenté par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
Assisté sur l'audience par Me Bernard-rené PELTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0155
Monsieur [O] [H]
né le [Date naissance 4] 1951 à [Localité 3] (ITALIE)
demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
Assisté sur l'audience par Me Cyrille ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0499
Madame [Q] [H]
née le [Date naissance 5] 1959 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 5]
Représentée par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
Assistée sur l'audience par Me Cyrille ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0499
SCP [K] [N] [D] [G] [N] [I]
N° SIRET : [N]9
ayant son siège au [Adresse 6]
Représentée par Me Marc PANTALONI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0025
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 Septembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
M. Dominique GILLES, Conseiller
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
qui en ont délibéré
M. Gilles, conseiller, a été entendu en son rapport
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT :CONTRADICTOIRE
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
Par acte authentique du 09 août 2013, reçu par M. [K] [N], notaire associé à [Localité 5], avec la participation d'un autre notaire assistant les promettants, M. [J], M. [O] [H] et Mme [Q] Achache son épouse (les époux [H]) ont promis de vendre à M. [T] et Mme [P] des locaux commerciaux et à usage de réserve situés dans un immeuble en copropriété, [Adresse 7]), pour le prix de 560 000 €. Les parties ont stipulé que la promesse expirerait le 8 novembre 2013 et ont fixé l'indemnité d'immobilisation à la somme de 56 000 € ; une somme de 28 000 € a été immédiatement versée entre les mains du notaire des promettants désigné séquestre des fonds. La promesse a été conclue sous la condition suspensive de l'octroi aux acquéreurs d'un ou plusieurs prêts par la banque HSBC, pour un montant maximum de 448 000 € remboursable sur la durée maximum de 20 ans au taux d'intérêt hors assurance de 3,30% l'an.
Reprochant à M. [T] et Mme [P], qui avaient fait état de refus de prêts, de ne pas avoir effectué de demande de prêt conforme à la promesse, M. [J] et les époux [H] ont entendu se faire payer l'indemnité d'immobilisation par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 novembre 2013.
M. [T] et Mme [P] ont saisi le tribunal, par acte extrajudiciaire des 11 et 13 juin 2014 délivrés aux promettants, pour obtenir, notamment la restitution de la somme qu'ils avaient versée. Ils estimaient que la condition suspensive n'était pas défaillie par leur faute.
C'est dans ces conditions que par jugement du 18 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :
- débouté M. [T] et Mme [P] de leurs demandes sauf à condamner M. [J] et les époux [H] à leur rembourser la somme de 335,11 € TTC au titre de frais d'huissier avancés pour le compte de l'indivision,
- condamné in solidum M. [T] et Mme [P] à payer à M. [J] et aux époux [H] la somme de 56 000 € outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 novembre 2013,
- condamné M. [T] et Mme [P], in solidum, à payer à M. [J] et aux époux [H] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné M. [T] et Mme [P] aux dépens.
Par dernières conclusions du 29 août 2017, M. [T] et Mme [P], appelants, qui ont attrait, en cause d'appel, la SCP [N] [N] [I], notaires associés demandent à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [J] et les époux [H] à leur rembourser 335,11 € ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer la somme en principal de 56 000 € correspondant à l'indemnité d'immobilisation ;
- infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuant à nouveau
- dire qu'aucun élément de fait ou de droit ne permet de retenir que la demande de prêt qu'ils ont présentée au nom d'une société civile immobilière constituée entre eux et qu'ils pouvaient se substituer n'était pas conforme aux caractéristiques prévues par la promesse ;
- retenir qu'ils n'ont pas empêché la réalisation de la condition suspensive et que le refus de prêt de la banque HSBC a résulté d'un aléa propre à toute demande de prêt ;
- déclarer recevable l'intervention forcée en cause d'appel du notaire aux fins de déclaration d'arrêt commun, en application de l'article 555 du code de procédure civile, eu égard à l'évolution du litige alors qu'ils n'étaient pas en mesure de procéder à cette mise en cause dès la première instance ;
- déclarer l'arrêt commun et opposable au notaire ;
- ordonner la restitution de la somme de 58 580,93 € par eux versée dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement entrepris ;
- y ajoutant
- condamner M. [J] et les époux [H] à leur verser une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter la charge des dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions du 12 mai 2016, M. [J] et les époux [H] prient la Cour de :
- vu les articles 1134 et 1178 du code civil ;
- confirmer le jugement entrepris ;
- condamner solidairement M. [T] et Mme [P] à leur payer la somme de 56 000 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 novembre 2013 ;
- les condamner à leur payer une somme de 6 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter la charge des entiers dépens.
Par dernières conclusions du 07 juin 2016, la SCP [N] [N] [I] demande à la Cour :
- vu les articles 554 et 555 du 'code civil' ;
- déclarer irrecevable l'assignation en intervention forcée en cause d'appel délivrée par M. [T] et Mme [P] ;
- les débouter de toutes leurs demandes dirigées à son encontre ;
- les condamner in solidum à lui verser une somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de supporter la charge des entiers dépens.
SUR CE
LA COUR
Contrairement à ce que soutiennent les intimés, le jugement entrepris doit être approuvé, en présence des clauses contradictoires du contrat qui prévoient, d'une part, que le financement objet de la condition suspensive sera accordé par la banque HSBC France et, d'autre part, que le bénéficiaire devra justifier de demandes de prêts auprès d'au moins deux banques ou établissements financiers différents, d'avoir retenu, par interprétation de la convention et pour des motifs adoptés, que le bénéficiaire s'était engagé à présenter une seule demande de financement auprès de la banque HSBC France.
Les parties ont encore stipulé, à la fois, que 'la réalisation des présentes par acte authentique pourra avoir lieu, soit au profit du bénéficiaire, soit au profit de toute autre personne physique ou morale que ce dernier se réserve de désigner', sous réserve d'informer le promettant de cette substitution et que 'la condition suspensive de l'obtention du prêt est réputée acquise ....des lors que le refus de prét dont se prévaut le bénéficiaire a été fait au nom d'une autre personne, notamment de la personne bénéficiaire d'une faculté de substitution'.
A cet égard, c'est à tort que le tribunal a retenu qu'il n'était pas établi que M. [T] et Mme [P] avaient sollicité la banque HSBC France conformément aux prévisions de la condition suspensive, alors que, au contraire, le courrier du 3 septembre 2013 de la banque HSBC atteste de ce que Mme [P] et M. [T] ont déposé un dossier de demandes de prêts 'concernant l'acquisition des biens objets de la promesse par le biais d'une SCI en cours d'immatriculation' et que par courrier du 20 septembre 2013, qui leur est nommément adressé, cette banque précise le montant du crédit sollicité, 448 000 € et la durée de remboursement, 20 ans, tout en notifiant le refus de prêt et qu'enfin, par courrier du 4 février 2015, la banque HSBC précise encore que Mme [P] et M. [T] ont sollicité un prêt au taux de 3,30 % hors assurance.
Outre que la preuve est rapportée de ce que les caractéristiques du prêt sollicité sont conformes quant au montant, à la durée de remboursement et au taux d'intérêt, il apparaît des lettres de refus de la banque que ce furent les personnes physiques elles-mêmes, bénéficiaires de la promesse, et non la société qu'elles envisageaient de substituer en vertu d'une disposition expresse de l'avant-contrat consentie par les promettants, qui ont formé la demande de prêt et qui se sont vues notifier en leur nom le refus de crédit par la banque, sans qu'il soit établi que ce refus aurait été motivé par la circonstance que la SCI était en cours d'immatriculation ou qu'une éventuelle substitution aurait compromis les chances des bénéficiaires d'obtenir un crédit. Dès lors, les conditions d'application de la clause de l'avant-contrat prévue par les parties pour le cas où ' le refus de prêt' dont se prévaut le bénéficiaire a été fait 'au nom d'une autre personne, notamment le bénéficiaire de la faculté de substitution' ne sont pas réunies.
Il s'ensuit que la condition suspensive d'obtention de prêt ne s'est pas réalisée et qu'il n'est pas prouvé que ce fût de la faute des bénéficiaires de la promesse, de sorte le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné M. [T] et Mme [P] à payer l'indemnité d'immobilisation.
Sur les autres prétentions
La solution apportée au litige prive d'objet l'appel en intervention forcée du notaire sans qu'il soit nécessaire d'examiner la recevabilité de cet appel en intervention forcée.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [J] et les époux [H] à rembourser à M. [T] et Mme [P] une somme de 335,11 € TTC au titre de frais d'huissiers avancés dans l'intérêt de l'indivision, ainsi que le demandent les appelants et les intimés.
M. [J] et les époux [H], qui succombent, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.
Ils seront déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils seront également condamnés à verser aux appelants une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dont ils seront tenus in solidum.
En équité, il n'y a pas lieu d'allouer au notaire une indemnité de procédure en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt constitue un titre de restitution des fonds versés, en application des dispositions infirmées du jugement assorti de l'exécution provisoire, majorées des intérêts au taux légal à compter de sa signification ; il n'y a donc pas lieu d'ordonner cette restitution, mais seulement d'en rappeler le principe.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris, seulement en ce qu'il a retenu que les bénéficiaires de la promesse litigieuse s'étaient engagés, au titre de la condition suspensive d'obtention de prêts, à faire leur demande de financement auprès de la seule banque HSBC France, et en ce qu'il a condamné M. [J] et les époux [H] à leur rembourser 335,11 €,
Infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau :
Déboute M. [J] et les époux [H] de leur demande de paiement d'une somme de 56 000 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, au titre de l'indemnité d'immobilisation,
Y ajoutant :
Dit que l'appel en intervention forcée de la SCP [N] [N] [I] est sans objet, et dit n'y avoir lieu à statuer sur sa recevabilité,
Déboute M. [J], les époux [H] et la SCP [N] [N] [I] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,
Condamne in solidum M. [J] et les époux [H] à payer à M. [T] et Mme [P], pris ensemble, une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [J] et les époux [H] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
Rappelle que le présent arrêt constitue un titre de restitution des fonds versés en application des dispositions infirmées du jugement assorti de l'exécution provisoire, assortis des intérêts au taux légal à compter de sa signification,
Rejette toute autre demande.
Le Greffier, La Présidente,