Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 7
ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2017
(n° , 57 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/14038
Décision déférée à la Cour : Décision du 11 Juin 2015 - Autorité de la concurrence de PARIS - RG n° 15-D-10
PARTIES DEMANDERESSES :
La société TDF, S.A.S.
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est : [Adresse 1]
Elisant domicile au cabinet de Maître François TEYTAUD
[Adresse 2]
Représentée par :
- Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS
toque : J125
- Maîtres Emmanuel GUILLAUME et Léna SERSIRON, avocats au barreau de Paris
BAKER & MC KENZIE SCP
toque : P0445
La société TDF INFRASTRUCTURE HOLDING, S.A.S. (anciennement dénommée TYROL ACQUISITION 1, S.A.S.)
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est : [Adresse 1]
Elisant domicile au Cabinet de Maître François TEYTAUD
[Adresse 2]
Représentée par :
- Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS
toque : J125
- Maîtres Emmanuel GUILLAUME et Léna SERSIRON, avocats au barreau de Paris
BAKER & MC KENZIE SCP
toque : P0445
La société TDF INFRASTRUCTURE, S.A.S. (anciennement dénommée TYROL ACQUISITION 2, S.A.S)
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est : [Adresse 1]
Elisant domicile au cabinet de Maître François TEYTAUD
[Adresse 2]
Représentée par :
- Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS
toque : J125
- Maîtres Emmanuel GUILLAUME et Léna SERSIRON, avocats au barreau de Paris
BAKER & MC KENZIE SCP
toque : P0445
La société TOWERCAST, S.A.S.
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est :[Adresse 3]
Elisant domicile au Cabinet SCP AFG
[Adresse 4]
Représentée par :
- Me Alain FISSELIER, avocat au barreau de PARIS
SCP AFG
toque : L0044
- Maîtres Jean-Louis FOURGOUX et Leyla DJAVADI, avocats au barreau de PARIS
SELARL FOURGOUX & ASSOCIÉS
toque : P0069
INTERVENANTS VOLONTAIRES :
La société TYROL ACQUISITION 1, S.A.R.L.
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est : [Adresse 5] LUXEMBOURG
Elisant domicile au Cabinet CLEARY GOTTLIEB STEEN & HAMILTON LLP
[Adresse 6]
Représentée par Maître Davy NGUYEN, avocat au barreau de PARIS
CLEARY GOTTLIEB STEEN & HAMILTON LLP
toque : J021
La société TYROL ACQUISITION 1 & Cie, S.C.A.
Prise en la personne de son représentant légal
Dont le siège social est : [Adresse 5] LUXEMBOURG
Elisant domicile au Cabinet CLEARY GOTTLIEB STEEN & HAMILTON LLP
[Adresse 6]
Représentée par Maître Davy NGUYEN, avocat au barreau de PARIS
CLEARY GOTTLIEB STEEN & HAMILTON LLP
toque : J021
EN PRÉSENCE DE :
L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Représentée par son président
Dont le siège est : [Adresse 7]
Représentée à l'audience par M. [M] [N], muni d'un pouvoir
M. LE MINISTRE CHARGÉ DE L'ÉCONOMIE
[Adresse 8] - D.G.C.C.R.F
[Adresse 8]
Non comparant - non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Olivier DOUVRELEUR, Président de chambre
M. Philippe MOLLARD, Président de chambre
Mme Laurence FAIVRE, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU
MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Mme Madeleine GUIDONI, Avocate Générale, qui a fait connaître son avis.
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Olivier DOUVRELEUR, président et par Mme Patricia DARDAS, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * * * * *
SOMMAIRE
FAITS ET PROCÉDURE5
Le site de la tour Eiffel5
Le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel5
La procédure d'appel d'offres5
Le recours devant les juridictions administratives6
L'offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel7
Le renouvellement des autorisations d'émettre des radios FM7
La demande de la société towerCast d'offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel8
La procédure devant le Conseil puis l'Autorité de la concurrence11
La plainte de la société towerCast11
Les mesures provisoires prises par le Conseil de la concurrence12
L'expertise portant sur la valeur des actifs détenus par la société TDF sur le site de la tour Eiffel12
La notification des griefs12
La décision attaquée14
Les recours principaux et incident14
I. SUR LA JONCTION À L'INSTANCE DES SOCIÉTÉS TYROL ACQUISITION 1 & Cie ET TYROL ACQUISITION 116
II. SUR LES RECOURS DES SOCIÉTÉS TDF, TDF INFRASTRUCTURE HOLDING ET TDF INFRASTRUCTURE16
A. Sur les moyens communs aux trois griefs16
Sur la violation alléguée des droits de la défense à raison de la durée excessive de la procédure16
Sur l'inapplicabilité alléguée du droit de l'Union19
B. Sur les moyens propres au grief n° 122
Sur l'incidence des décisions des juridictions administratives sur la présente procédure22
Sur l'obligation pour la société TDF de céder ses actifs au bénéficiaire de la convention d'occupation domaniale23
Sur le caractère incomplet, tardif et erroné des informations communiquées à la société towerCast26
C. Sur les moyens propres au grief n° 239
D. Sur les moyens propres au grief n° 348
III. SUR LE RECOURS DE LA SOCIÉTÉ TOWERCAST54
IV. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS56
FAITS ET PROCÉDURE
La cour est saisie de plusieurs recours contre la décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-D-10 du 11 juin 2015 relative à des pratiques mises en 'uvre par TDF sur le site de la Tour Eiffel.
Le site de la tour Eiffel
La tour Eiffel est utilisée depuis de nombreuses années tant pour la diffusion de services de télévision par voie hertzienne terrestre ' télévision analogique, jusqu'en mars 2011, et télévision numérique, depuis mars 2005 ' que pour celle de fréquences radiophoniques.
Il est constant que, parmi les principaux sites de diffusion audiovisuelle, celui de la tour Eiffel se distingue par la couverture particulièrement étendue qu'autorisent sa hauteur et son emplacement au centre du bassin parisien. Il permet de couvrir environ 11 millions d'habitants de l'Ile-de-France, soit 18 % de la population métropolitaine.
L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ci-après l'« ARCEP ») a classé le site de la tour Eiffel au nombre des sites dits « non réplicables ».
Des contraintes fortes et particulières pèsent sur le site de la tour Eiffel, tant du fait de la configuration et de l'exiguïté des locaux que des obligations qui s'imposent à l'occupant compte tenu, d'une part, de l'existence sur ce site d'un service public touristique et, d'autre part, de contraintes de sécurité et de défense nationale.
Le site de la tour Eiffel comporte plusieurs catégories d'installations affectées à la diffusion hertzienne de programmes de radio-télévision :
' des locaux semi-enterrés, au pied du pilier Sud de la tour Eiffel, d'une superficie de 1700 m² répartis sur deux étages au sol et en sous-sol ;
' divers emplacements supports d'équipement de diffusion, aux étages, et notamment au-dessus du 3ème étage (local technique, plate-forme technique, pylônets) ;
' des cheminements de câbles entre le sol et le sous-sol.
Le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel
La procédure d'appel d'offres
Le site de la tour Eiffel est la propriété de la Ville [Localité 1].
Historiquement, les installations de diffusion audiovisuelle qu'il abrite étaient exploitées selon des modalités différentes. En effet, d'une part, les parcelles de terrain situées au pied de la tour Eiffel étaient exploitées dans le cadre de conventions successives signées par la Ville [Localité 1], à partir de 1946, avec Radiodiffusion française, à laquelle ont succédé l'Office de Radiodiffusion Télévision française (ORTF) puis la société TDF S.A.S. D'autre part, les emplacements et installations situés sur le monument, inscrits dans le périmètre de la délégation de service public pour la gestion et l'exploitation de la tour Eiffel confiée à la Société Nouvelle d'Exploitation de la Tour Eiffel (SNTE) par la Ville en 1981, étaient sous-concédés à la société TDF en vertu d'une convention d'occupation du domaine public signée en 1982. En 2005, la SNTE a été remplacée par la Société d'Exploitation de la Tour Eiffel (SETE), subrogée dans l'intégralité des droits et obligations de son prédécesseur au titre de ladite convention.
En 2006, à l'occasion du renouvellement de la convention d'occupation domaniale, la Ville [Localité 1] a souhaité unifier dans une seule convention le cadre des emprises qu'elle-même et la SNTE avaient concédées.
Le 31 mars 2006, elle a publié un avis d'appel public à la concurrence, à la suite duquel seules deux sociétés se sont portées candidates : les sociétés TDF et towerCast S.A.S.
Pour la chronologie des échanges entre la Ville [Localité 1], la société TDF et la société towerCast, la cour renvoie aux points 78 à 148 de la décision attaquée, dont l'exactitude factuelle n'est pas contestée, et se bornera à rappeler, aux points suivants, les grandes étapes de la procédure d'appel d'offres.
Le 29 août 2006, la mairie [Localité 1] a adressé aux deux candidats le cahier de consultation fixant le cadre nécessaire à l'élaboration de leurs offres respectives.
L'objet de la consultation mentionné dans le cahier de consultation était l'attribution du droit d'occuper des emprises du domaine public municipal parisien, comportant un équipement destiné à la diffusion hertzienne de programmes de radiotélévision, dans le cadre d'une convention d'occupation privative du domaine public municipal.
La future convention couvrait un domaine ainsi défini :
« 'une emprise de terrain, d'une superficie au sol de 958,20 m² et au sous-sol de 42,06 m² située [Adresse 9], à [Localité 1], ainsi que les locaux édifiés sur et sous ce terrain, l'ensemble étant ci-après dénommé le bâtiment (')
'sur la Tour Eiffel, divers emplacements, listés dans l'annexe 1 ci-après, situésdans les étages et au sommet, ainsi que les cheminements des câbles. Les emplacements comprennent notamment deux plates-formes et une structure support d'aériens nécessaires à la mise en place et à l'exploitation d'installations d'émission et de réception ».
L'article 2.6.2 du cahier de consultation prévoyait en outre une obligation pour l'opérateur retenu d'assurer la continuité du service de diffusion et précisait qu'il était attendu du précédent occupant qu'il négocie de bonne foi les actifs qu'il entendrait céder dans des conditions permettant la continuité du service public.
Initialement prévu le 11 octobre 2006, le dépôt des offres a été reporté au 31 octobre 2006, en raison des demandes d'informations complémentaires des candidats après les visites du site des 21 et 26 septembre 2006. Après le dépôt de leurs offres par les sociétés TDF et towerCast, la mairie a laissé aux candidats jusqu'au 21 décembre 2006 pour améliorer et remettre leurs offres définitives.
Le 12 février 2007, le conseil municipal a autorisé le maire [Localité 1] à signer avec la société TDF la convention d'occupation domaniale, signature intervenue le 13 février 2007.
Le recours devant les juridictions administratives
Par requête du 12 avril 2007, la société towerCast a demandé au tribunal administratif [Localité 1] d'annuler la délibération du conseil municipal de la Ville [Localité 1] en date des 12 et 13 février 2007 autorisant le maire [Localité 1] à signer avec la société TDF la convention d'occupation domaniale. Elle faisait notamment valoir qu'en exigeant du cocontractant qu'il assure la continuité du service public, obligation entraînant, selon elle, la reprise des installations du précédent occupant présentes sur le site, et en n'exerçant pas de contrôle sur les négociations en découlant, la Ville [Localité 1] avait favorisé l'abus de position dominante de la société TDF.
Par jugement du 30 octobre 2009, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Il a considéré, d'une part, qu'il ne résultait pas des stipulations de l'article 2.6.2 du cahier de consultation que la Ville [Localité 1] aurait entendu imposer le rachat des équipements appartenant à la société TDF et qu'en outre, il ne résultait pas de l'instruction que la société towerCast aurait examiné, avant le dépôt de sa candidature, des options alternatives au rachat du matériel déjà présent sur le site, tels le sous-hébergement, la cession partielle ou la location. D'autre part, le tribunal a constaté que la Ville [Localité 1] avait veillé à ce que soient communiqués à la société towerCast les éléments techniques et financiers nécessaires à l'élaboration de son offre et que, s'agissant de la méthode de valorisation des biens en cause adoptée par la société TDF, la société towerCast ne démontrait pas que cette méthode avait abouti à une surestimation de ces biens.
Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel [Localité 1] du 6 mars 2012. La cour administrative d'appel a notamment considéré que la société towerCast n'établissait pas que la société TDF se serait livrée, dans la transmission des informations demandées, à des pratiques ou des man'uvres telles qu'elles l'auraient empêchée d'améliorer l'offre ultime qu'elle a faite le 21 décembre 2006.
Enfin, par arrêt du 3 décembre 2012, le Conseil d'Etat a considéré qu'aucun des moyens invoqués par la société towerCast n'était de nature à permettre l'admission de son pourvoi.
L'offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel
Le renouvellement des autorisations d'émettre des radios FM
Le 7 novembre 2006, le CSA a lancé un appel à candidatures pour le renouvellement de la plupart des autorisations d'émettre des radios FM de la zone du ressort du comité technique radiophonique (CTR) [Localité 1], dans la perspective de l'arrivée à échéance, dans la nuit du 3 au 4 septembre 2007, de ces autorisations. Inscrit dans le cadre du nouveau plan de fréquences « FM 2006 », cet appel à candidatures portait, pour le département [Localité 1], sur 33 fréquences, dont 20 avaient pour secteur d'implantation la tour Eiffel.
Ces 20 fréquences et le nom des radios autorisées à les utiliser jusqu'au 3 septembre 2007 étaient les suivants : 90.4 (France Inter), 91.3 (Chérie FM), 94.3 (Orient), 96.0 (Skyrock), 96.9 (Voltage), 100.3 (NRJ), 100.7 (N.D./ Fréq Protestante), 101.1 (Classique), 101.5 (Nova), 101.9 (Fun Radio)102.3 (Oui FM), 102.7 (MFM), 103.1 (RMC Info), 103.6 (Europe 2), 103.9 (RFM), 104.3 (RTL), 104.7 (Europe 1), 105.9 (RTL 2), 97.4 (Rires et chansons) et 89.9 (TSF).
Techniquement, 16 de ces 20 fréquences avaient une puissance apparente rayonnée (PAR) de 10 kW et 4 une PAR de 4 kW. Une seule (89.9) de ces 20 fréquences était diffusée auparavant sur un autre site, les [Localité 2] à [Localité 3]. Toutes ces fréquences étaient diffusées par la société TDF, sauf deux, 90.9 (Chante France) et 97.4 (Rires et Chansons) qui l'étaient par la société towerCast, dans le cadre d'une convention de location conclue avec la SETE pour un emplacement réduit situé au-dessous du 3ème étage de la tour Eiffel. Du fait du manque d'énergie et d'espace disponible, ce dernier ne permettait de diffuser que des radios à une puissance de 1 kW. Aussi, cet emplacement n'a-t-il plus été utilisé lorsqu'en 2007, dans le cadre du nouveau plan de fréquences FM 2006, ces radios ont été autorisées à passer à une puissance de 4 kW.
Le CSA a arrêté la liste des radios présélectionnées le 10 mai 2007, et l'a publiée le 14 mai 2007. À partir de la notification de leur présélection, ce même 14 mai 2007, les radios présélectionnées disposaient d'un délai de quinze jours pour indiquer le ou les site(s) de diffusion qu'elles étaient en mesure d'utiliser et les caractéristiques précises de l'émetteur, ainsi que, à titre indicatif, le nom du prestataire de diffusion éventuelle, et d'un délai de huit semaines pour signer avec le CSA la convention portant sur les caractéristiques des programmes diffusés.
Les autorisations délivrées par le CSA entraient en vigueur dans la nuit du 3 au 4 septembre 2007, dite nuit d'entrée en vigueur des autorisations (ou NEVA), date à laquelle les radios devaient pouvoir diffuser leurs programmes.
La demande de la société towerCast d'offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel
L'appel à candidatures du CSA du 7 novembre 2006 a été l'occasion d'une mise en concurrence des diffuseurs par les éditeurs radios. Pour les fréquences autorisées depuis le site de la tour Eiffel en 2007, les diffuseurs devaient soit être le titulaire de la convention d'occupation du domaine public, soit être hébergés par ledit titulaire.
La convention d'occupation domaniale ayant été réattribuée à la société TDF le 12 février 2007, la société towerCast devait donc, pour proposer des offres de diffusion aux éditeurs de programmes radiophoniques en mode FM autorisés sur le secteur [Localité 1]-Tour Eiffel, être hébergée par la société TDF.
L'article 11 de cette convention prévoit que la société occupante ' TDF ' est dans l'obligation de proposer des offres d'hébergement aux diffuseurs qui en font la demande. Le paragraphe 11.1 pose le principe de non-exclusivité pour les liaisons sans fil auxquelles la tour Eiffel est susceptible de servir de support. Le paragraphe 11.2 est ainsi libellé : « La société occupante s'engage à répondre favorablement à toute demande d'accès pour l'exercice d'activités de communication électronique, intégrant, le cas échéant, l'hébergement dans les locaux, émanant d'un opérateur tiers et à mettre en 'uvre les moyens nécessaires dans la mesure des possibilités techniques. La société occupante répondra aux demandes d'accès par une offre adaptée et sur mesure et transmettra copie de cette offre à l'[ARCEP] et à la Ville [Localité 1], dans le respect du secret des affaires ».
Par courriel du 29 mars 2007, la société towerCast a demandé à la société TDF de pouvoir la rencontrer pour connaître les modalités techniques, juridiques et commerciales de l'hébergement sur le site de la tour Eiffel, que cette dernière était tenue de proposer en vertu dudit article 11.
Le 6 avril 2007, une réunion entre les sociétés towerCast et TDF a eu lieu, au cours de laquelle la société towerCast a formulé une demande d'offre de gros d'hébergement pour trente des trente et une fréquences FM devant être diffusées depuis le site de la tour Eiffel, dont certaines ne faisaient pas l'objet d'un renouvellement d'autorisation d'émettre, et a remis à la société TDF son cahier des charges.
Le 13 avril 2007, la société TDF a répondu qu'elle serait en mesure de lui fournir les premiers éléments de réponse dans un délai de deux semaines.
Le 27 avril 2007, elle a adressé à la société towerCast un courrier, doublé d'un courriel, lui indiquant qu'elle lui fournirait dans un délai d'une semaine les documents d'expression de besoins lui permettant de passer rapidement ses commandes d'études et, dans un délai de deux semaines, une offre sur mesure d'hébergement et de diffusion HF.
Ce courrier était accompagné d'un document de six pages (cotes 2721 à 2726, 07/0018M), intitulé « Premiers éléments de réponse au cahier des charges pour une prestation d'hébergement de diffuseur FM par TDF sur le site de la Tour Eiffel ' Version 1.0 » où la société TDF proposait une surface de la salle dédiée de 14 m² ou 27 m², dont les conditions d'accès seraient précisées ultérieurement, dans l'offre sur mesure. Ce document énumérait les grandes catégories de prestations incluses dans l'offre d'hébergement (mise à disposition d'emplacement et salle dédiée, énergie, ventilation, climatisation, refroidissement, raccordements, accès et sécurité) sans en détailler le contenu ni les conditions tarifaires. Pour la rubrique « Ventilation, Climatisation, refroidissement », il précisait que la salle mise à disposition serait équipée, pour le refroidissement des émetteurs, de vannes d'arrivée d'eau glacée. Il ne contenait aucune condition tarifaire sauf pour les études d'implantation et de réalisation, d'une part, et de raccordement au système antennaire, d'autre part, études dont la société TDF indiquait pouvoir transmettre les résultats dans un délai maximum d'un mois à compter de la réception de la commande de la société towerCast.
Le 4 mai 2007, la société TDF a complété son courrier du 27 avril 2007 par un courriel (doublé par un courrier le 9 mai suivant) comprenant deux modèles d'expression de besoins, sans éléments tarifaires, l'un sur l'offre sur mesure d'hébergement, l'autre sur l'offre sur mesure de diffusion hautes fréquences (DiffHF), qui doivent permettre à la société towerCast de « commander les Études d'Implantation et de Réalisation ainsi que les Études de Raccordement au Système Antennaire dans le cadre de l'Offre sur mesure d'accès FM au site de la Tour Eiffel ». La société TDF propose à nouveau deux surfaces de salle dédiée : 14 m² ou 27 m² (cotes 2727 à 2733, 07/0018M).
Le 11 mai 2007, la société TDF a transmis à la société towerCast par courriel un document intitulé « Offre sur mesure Tour Eiffel Service d'Accès FM 2006 », précisant le contenu de la prestation d'hébergement, mais sans proposition technique et commerciale (cote 2746, 07/0018M). Le document précisait en effet qu'en fonction des expressions de besoins et suite à la réalisation de l'étude de raccordement au système antennaire de diffusion FM de la société TDF et à l'étude d'implantation et de réalisation, la société TDF élaborerait, conformément au présent document, la proposition technique et commerciale pour l'offre sur mesure, adressée en même temps que les études. Cette proposition décrivait des aménagements ou travaux spécifiques qui pourraient, le cas échéant, être nécessaires, en s'appuyant sur les résultats desdites études, et seraient réalisés par la société TDF aux frais de la société towerCast. Les annexes A1 (Tarifs) et A4 à A10 (annexes techniques) n'étaient pas jointes, alors que la société TDF elle-même les présentait dans l'offre sur mesure comme des documents constitutifs de celle-ci (cote 2750, 07/0018M). Seules les annexes contenant les modèles d'expression de besoins ont été adressées à cette date. D'ailleurs, dans son courriel en date du 11 mai 2007, la société TDF indiquait qu'« un projet de contrat reprenant notamment les éléments substantiels de la présente offre sur mesure, complétée par les conditions techniques, tarifaires et juridiques vous sera communiqué d'ici à deux semaines ».
Le 15 mai 2007, la société towerCast a écrit à la société TDF pour lui dire que les informations dont elle disposait étaient incomplètes et ne lui permettaient donc pas de proposer aux éditeurs une alternative aux services de diffusion de la société TDF. Elle soulignait que la surface d'occupation dédiée proposée était insuffisante pour héberger l'ensemble des équipements nécessaires à la diffusion des fréquences pour lesquelles elle avait demandé une offre d'hébergement. Elle déplorait également que le coût et la date des travaux nécessaires à la mise à disposition de la salle dédiée ne soient pas explicités. Elle ajoutait que le système de ventilation et de climatisation par eau glacée proposé ne répondait pas à sa demande, qui portait sur des émetteurs refroidis par air, ce qui devrait la conduire à adopter des émetteurs du type et de la marque retenus par la société TDF. Elle relevait enfin que les éléments transmis par la société TDF le 11 mai 2007 ne comportaient aucun élément financier sauf sur le coût des études préalables à la fourniture des tarifs. Elle demandait donc à la société TDF de lui faire parvenir les éléments financiers manquants dans un délai de 72 heures.
Le 16 mai 2007, la société TDF a répondu à ce courrier, contestant les retards qui lui étaient reprochés, et a adressé à la société towerCast l'annexe A1 « tarifs », sur les tarifs annuels des prestations de base pour les activités de diffusion et de transport, y ajoutant les tarifs des accompagnements du personnel de la société towerCast sur le site. En revanche, les tarifs des aménagements spécifiques n'étaient pas précisés, la société TDF évoquant seulement des montants potentiellement importants, eu égard aux besoins particuliers de la société towerCast et aux caractéristiques du site (cotes 2513 à 2519, 07/0018M).
Le 24 mai 2007, la société towerCast a envoyé à la société TDF l'expression de ses besoins de services d'accès FM sur le site, sans mentionner la surface des locaux qu'elle retenait. Elle y référençait encore la quasi-intégralité des fréquences des radios privées et publiques autorisées par le CSA en mai 2007 ainsi que d'autres radios ne faisant pas l'objet d'un renouvellement, soit 30 fréquences au total. Elle réitérait ses interrogations quant à la technologie d'émetteurs imposée par la société TDF, en précisant qu'aucun industriel ne peut fournir des équipements de refroidissement par eau glacée à des conditions de marché et de délai en phase avec le besoin, un seul indiquant des délais d'environ 6 mois pour sortir les premières versions non encore éprouvées. Elle sollicitait en outre une réunion avec la société TDF.
Le 25 mai 2007, la société TDF a écrit à la société towerCast pour lui indiquer que les études de raccordement aux systèmes antennaires répondant à ses besoins formulés le 24 mai 2007 étaient lancées et l'a alertée sur la nécessité de réaliser 30 études d'hébergement différentes pour répondre à ses demandes, ce qui aboutirait à des délais de réalisation incompatibles avec ceux qu'elle avait demandés (cote 2525, 07/0018M). La société TDF rappelait le coût potentiellement élevé d'une offre sur mesure et fournissait une première estimation des travaux à effectuer, y compris ingénierie, se situant, hors adductions avec le prestataire de télécommunication retenu par la société towerCast et sur la base d'un refroidissement à eau, dans une fourchette comprise entre 200 k€ HT et 300 k€ HT pour une salle dédiée de 14 m² et entre 300 k€ HT et 400 k€ HT pour une salle dédiée de 27 m². Elle ajoutait que ces montants seraient précisément établis dans l'étude d'implantation et de réalisation (cote 2526, 07/0018M). Elle rappelait en outre que le système de refroidissement à eau était celui qui lui paraissait techniquement le plus adapté pour ce site dans une salle dédiée, mais s'engageait à rechercher de nouveau la possibilité d'autres solutions et à en communiquer les résultats à la société towerCast dès que possible. Ce courrier s'accompagnait des annexes techniques précisant les conditions de l'offre sur mesure et certaines clauses générales du futur contrat associé à cette offre sur mesure. Il se terminait par une proposition de réunion le 29 mai 2007.
Lors de cette réunion du 29 mai 2007, la société towerCast modifiait sa demande initiale et envisageait une salle commune pour ses installations. Elle demandait si les travaux d'aménagement seraient moins élevés que pour une salle dédiée, et s'ils inclueraient le déménagement/réaménagement des équipements de la société TDF situés dans la salle commune. Selon la société TDF, une salle dédiée était la solution la plus rationnelle et les travaux dans une salle commune pourraient se révéler tout aussi onéreux, le prix au m² de l'hébergement étant de même ordre dans les deux types de salles. Elle apportait des détails sur les travaux inclus dans ses premières estimations, sans pour autant être en mesure d'estimer la part de chacun des postes de coûts dans le montant total avant la réalisation de l'étude d'implantation. La société towerCast ayant aussi fait part des difficultés à déployer des émetteurs refroidis par eau glacée, la société TDF répondait que les propositions de la société towerCast d'utiliser des émetteurs refroidis par air ou de déployer des ventilo-convecteurs n'étaient pas envisageables à ce stade, mais qu'elle allait faire réaliser des études afin de rechercher des solutions alternatives de refroidissement, comme déjà suggéré dans son courrier du 25 mai 2007. Enfin, les deux entreprises reconnaissaient que la date d'entrée en vigueur des nouvelles autorisations d'émettre pourrait ne pas être tenue, en raison des délais de réalisation des travaux. Face à ce risque, la société TDF proposait d'étudier la possibilité de mettre en 'uvre des solutions transitoires aux frais de la société towerCast. D'après le compte-rendu de la réunion réalisé par la société towerCast, la société TDF aurait alors prédit des coûts importants, mais sans les estimer.
Dans ses observations du 4 juin 2007, transmises dans le cadre de l'instruction de la demande de mesures conservatoires, dont il sera fait mention ci-après, la société towerCast a indiqué toujours attendre des données techniques de la société TDF lui permettant d'estimer la faisabilité technique d'une diffusion depuis le site de la tour Eiffel, au-delà des incertitudes tarifaires et des délais de mise en 'uvre, en relevant qu'elle n'avait pu proposer une offre de diffusion même à « Rires et Chansons », la radio de son groupe, pourtant déjà sa cliente.
Le 15 juin 2007, la société TDF a envoyé à la société towerCast les 30 études techniques de raccordement aux systèmes antennaires de diffusion FM de la tour Eiffel en réponse à sa demande du 24 mai 2007, facturées 12 082 euros HT, conformément aux montants indiqués dans son courrier du 27 avril 2007. Dans ce courrier, la société TDF informe ainsi la société towerCast :
« (') nous engagerons l'étude d'implantation et de réalisation dès commandes de votre part de celle-ci et communication d'une expression de besoin Hébergement précisant vos besoins effectifs.
Dès réalisation de cette étude d'implantation et de réalisation, TDF pourra établir une proposition commerciale relative à l'ensemble des prestations composant l'offre sur mesure « Tour Eiffel Service d'accès FM 2006 ». Celle-ci précisera notamment les montants précis des travaux spécifiques à réaliser pour répondre à votre besoin.
Comme précisé dans les études jointes, le délai de réalisation des prestations de diffusion HF est de deux mois à compter de la commande par towerCast de l'ensemble des prestations relevant de la présente offre sur mesure (') » (cote 10216, 07/0017F).
Le 22 juin 2007, la société towerCast a transmis un courrier à la société TDF où elle indiquait que les conditions financières de l'offre d'hébergement l'empêchaient d'entrer sur le marché faute de pouvoir couvrir ses coûts propres. Elle ajoutait que la société TDF proposait d'ores et déjà des offres commerciales comme diffuseur et soulignait à ses clients la nécessité pour eux de signer au plus vite leurs nouveaux contrats de diffusion pour qu'ils soient opérationnels le 3 septembre suivant. Elle mentionnait que plusieurs éditeurs lui avaient indiqué que les prix proposés par la société TDF diminuaient par rapport à ceux pratiqués antérieurement. Elle demandait en conséquence à la société TDF de revoir significativement les conditions de son offre et de lui en adresser une nouvelle d'ici le 29 juin 2007. Elle lui rappelait également qu'elle attendait toujours des informations sur la faisabilité d'une mise en 'uvre d'émetteurs refroidis par air, sur le détail des travaux compris dans l'estimation de la société TDF, ainsi que sur l'impact sur cette estimation d'une installation des équipements de la société towerCast dans une salle commune. À cette date, elle ne disposait toujours d'aucun chiffrage précis du montant de ces travaux d'aménagement.
L'ensemble des radios objet du renouvellement de l'autorisation d'émettre ont finalement contracté avec la société TDF, y compris les radios détenues par le groupe NRJ, auquel la société towerCast appartient.
La procédure devant le Conseil puis l'Autorité de la concurrence
La plainte de la société towerCast
Le 16 février 2007, le Conseil de la concurrence, devenu l'Autorité de la concurrence, a été saisi d'une plainte de la société towerCast à propos de pratiques mises en 'uvre par la société TDF dans le cadre de l'appel d'offres lancé le 31 mars 2006 par la Ville [Localité 1] pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel pour la diffusion hertzienne de programmes de radio-télévision (ci-après la « convention d'occupation domaniale »). Cette plainte était assortie d'une demande de mesures conservatoires.
Selon la société towerCast, la société TDF avait abusé de sa position dominante en refusant de lui communiquer les données nécessaires à l'élaboration de son offre et en proposant des prix de cession excessifs pour les équipements devant obligatoirement être acquis par un nouvel occupant.
Dans ses observations du 4 juin 2007, la société towerCast reprochait également à la société TDF d'avoir abusé de sa position dominante sur le marché de gros amont des services de diffusion radiophonique en mode FM depuis le même site.
À cet égard, elle invoquait le délai trop tardif de communication par la société TDF de son offre de gros d'hébergement, qui lui était nécessaire pour pouvoir finaliser ses propres offres aux radios dans le cadre de l'appel à candidatures lancé le 7 novembre 2006 par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (ci-après le « CSA ») auprès des radios privées FM afin de renouveler les autorisations d'usage de fréquences.
De surcroît, elle estimait que l'offre de gros d'hébergement proposée par la société TDF était constitutive d'un ciseau tarifaire.
Les mesures provisoires prises par le Conseil de la concurrence
Par sa décision n° 07-MC-05 du 11 juillet 2007 relative à une demande de mesures conservatoires présentée par la société towerCast, le Conseil a enjoint à la société TDF, à titre conservatoire, d'une part, de lui transmettre une offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel permettant aux diffuseurs alternatifs de concurrencer effectivement, sans subir de ciseau tarifaire, les offres de détail faites par la société TDF aux radios et, d'autre part, de limiter à un an la durée des contrats que la société TDF s'apprêtait à signer avec les radios privées FM pour la diffusion de leurs programmes depuis le site de la tour Eiffel.
L'offre imposée par les mesures conservatoires a été mise à la disposition de la société towerCast le 14 août 2007.
Cette décision, contestée par la société TDF, a été confirmée par la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 24 août 2007 (RG n° 2007/13005). Elle est aujourd'hui définitive.
L'expertise portant sur la valeur des actifs détenus par la société TDF sur le site de la tour Eiffel
Dans le cadre de l'instruction de la plainte de la société towerCast, le rapporteur général de l'Autorité a, par décision du 6 décembre 2011, désigné un expert aux fins de se prononcer sur le périmètre des actifs du site de la tour Eiffel susceptibles d'être cédés par la société TDF à la société towerCast en cas de non-renouvellement de la convention d'occupation domaniale, sur la pertinence des différentes méthodes de valorisation de ces actifs, en identifiant la plus pertinente, et sur l'évaluation desdits actifs, au mois de mars 2006, au regard de ces méthodes.
L'expert, secondé par un sapiteur, a mené ses travaux contradictoirement de décembre 2011 à juin 2012. Il a rendu son rapport aux services d'instruction et aux parties le 15 juin 2012, concluant que les actifs de la société TDF sur le site de la tour Eiffel avaient été surévalués, que l'on retienne la méthode de valorisation des coûts courants comptables ou celle des coûts courants économiques.
La notification des griefs
Le 13 novembre 2013, trois griefs ont été notifiés à la société TDF, en tant qu'auteure des pratiques, ainsi qu'aux sociétés Tyrol Acquisition 2 SAS, Tyrol Acquisition 1 SAS, Tyrol Acquisition 1 & Cie SCA et Tyrol Acquisition 1 SARL, en tant que sociétés mères ayant exercé sur la société TDF, leur filiale, une influence déterminante, griefs ainsi formulés :
« Grief n° 1:
Il est fait grief à la société TDF SAS d'avoir abusé de la position dominante qu'elle détient sur le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la Tour Eiffel en fournissant tardivement et partiellement des informations indispensables à ses concurrents pour que ceux-ci soient en mesure de répondre de façon crédible à l'appel d'offres de la Mairie [Localité 1] et, pour ce qui concerne les actifs indispensables à la continuité de service que TDF aurait eu à céder au futur occupant, en fournissant un montant largement surévalué et non vérifiable.
Cette pratique est de nature à et susceptible d'avoir faussé le jeu de la concurrence sur le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale de la Tour Eiffel lancé par la mairie [Localité 1] en 2006.
Elle s'est étendue du 4 mai 2006, date de la première demande d'informations adressée par la Mairie[Localité 1] à TDF, jusqu'au 13 février 2007, date de signature de la nouvelle convention d'occupation domaniale entre la ville et TDF.
Elle a produit ses effets, à tout le moins potentiels, sur toute la durée de la convention, soit dix années. Les effets, à tout le moins potentiels, de la pratique en cause sont donc toujours d'actualité au jour de l'envoi de la notification de griefs.
Elle contrevient aux dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce et de l'article 102 du TFUE.
Grief n° 2
Il est fait grief à la société TDF SAS d'avoir abusé de sa position dominante sur le marché de gros amont des services de diffusion radiophonique en mode FM depuis le site de la Tour Eiffel en fournissant tardivement et de façon incomplète des informations indispensables à towerCast pour être en mesure de construire son offre de diffusion à destination des éditeurs radios.
Cette pratique est de nature à et susceptible d'avoir faussé le jeu de la concurrence sur le marché de gros aval des services de diffusion de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la Tour Eiffel.
Elle s'est étendue du 6 avril 2007, date de la demande de towerCast à TDF d'une offre sur mesure d'hébergement pour la diffusion de radios FM depuis le site de la Tour Eiffel, à tout le moins jusqu'au 29 mai 2007, date des dernières réponses de TDF.
La pratique aurait produit ses effets, à tout le moins potentiels, durant au moins 5 ans si le Conseil de la concurrence n'était intervenu, le 11 juillet 2007, en prononçant une décision de mesures conservatoires obligeant TDF à adresser une nouvelle offre d'hébergement à towerCast dans un délai d'un mois.
Grief n° 3
Il est fait grief à la société TDF SAS d'avoir abusé de sa position dominante sur le marché de gros amont des services de diffusion radiophonique en mode FM depuis le site de la Tour Eiffel en imposant des prix inéquitables à ses concurrents sous la forme d'un ciseau tarifaire entre le prix de détail sur le marché de gros aval des services de diffusion de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la Tour Eiffel et le prix de l'accès au marché de gros amont de ces services.
Cette pratique est de nature à et susceptible d'avoir faussé le jeu de la concurrence sur le marché de gros aval des services de diffusion de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la Tour Eiffel.
Elle s'est étendue du 31 octobre 2006 au 11 juillet 2007.
La pratique aurait produit ses effets, à tout le moins potentiels, durant au moins 5 ans si le Conseil de la concurrence n'était intervenu, le 11 juillet 2007, en prononçant une décision de mesures conservatoires obligeant TDF à adresser une nouvelle offre d'hébergement à towerCast dans un délai d'un mois.
Elle contrevient aux dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce et de l'article 102 du TFUE. »
Les rapporteurs ont déposé leur rapport le 23 juillet 2014.
La décision attaquée
A la suite de la séance du 30 janvier 2015 de son collège, l'Autorité a statué par la décision n° 15-D-10 du 11 juin 2015 relative à des pratiques mises en 'uvre par TDF sur le site de la Tour Eiffel (ci-après la « décision attaquée »).
Elle a dit établie la responsabilité de la société TDF, en tant qu'auteure des pratiques, et des sociétés Tyrol Acquisition 1 S.A.S. et Tyrol Acquisition 2 S.A.S., en leur qualité de sociétés mères de la société TDF, au regard de l'ensemble des griefs notifiés et a condamné ces trois sociétés solidairement à une sanction pécuniaire de 5 000 000 euros, au titre du grief n° 1, et de 660 000 euros, au titre des griefs n° 2 et n° 3.
Elle a en revanche mis hors de cause les sociétés de droit luxembourgeois Tyrol Acquisition 1 & Cie S.C.A. et Tyrol Acquisition 1 S.A.R.L.
Les recours principaux et incident
Par déclaration en date du 16 juillet 2015, enregistrée sous le n° RG 2015/14038, la société TDF a formé un recours en annulation, et subsidiairement en réformation, contre la décision attaquée.
Par déclarations en date du 16 juillet 2015, enregistrées sous les n° RG 2015/14039 et 2015/14043, les sociétés TDF Infrastructure Holding S.A.S., anciennement Tyrol Acquisition 1 S.A.S., et TDF Infrastructure S.A.S., anciennement Tyrol Acquisition 2 S.A.S., ont formé un recours en annulation, et subsidiairement en réformation, contre la décision attaquée.
Par ordonnance du 28 juillet 2015 du délégué du premier président de la cour d'appel, ces recours ont été joints sous le n° RG 2015/14038.
Par déclaration en date du 7 août 2015, la société towerCast a formé un recours incident tendant à l'infirmation partielle de la décision attaquée.
Par déclarations en date du 17 août 2015, les sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie et Tyrol Acquisition 1 ont déclaré se joindre à l'instance.
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LA COUR
Vu la décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-D-10 du 11 juin 2015 relative à des pratiques mises en 'uvre par TDF sur le site de la Tour Eiffel ;
Vu les déclarations de recours déposées au greffe de la cour le 16 juillet 2015 par les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding, anciennement Tyrol Acquisition 1, et TDF Infrastructure, anciennement Tyrol Acquisition 2 ;
Vu la déclaration de recours incident déposée au greffe de la cour le 7 août 2015 par la société towerCast ;
Vu les déclarations d'intervention volontaire et de jonction à l'instance, déposées au greffe de la cour le 17 août 2015 par les sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie S.C.A. et Tyrol Acquisition 1 S.A.R.L. ;
Vu le mémoire, le mémoire récapitulatif et le mémoire récapitulatif en duplique déposés respectivement les 13 août 2015, 30 juin et 29 septembre 2016 par la société TDF ;
Vu le mémoire et le mémoire récapitulatif déposés respectivement les 13 août 2015 et 30 juin 2016 par la société TDF Infrastructure ;
Vu le mémoire et le mémoire récapitulatif déposés respectivement les 13 août 2015 et 30 juin 2016 par la société TDF Infrastructure Holding ;
Vu le mémoire à l'appui du recours incident, le mémoire récapitulatif en réponse au recours principal et à l'appui du recours incident et le mémoire récapitulatif et en réponse au recours principal et à l'appui du recours incident, déposés respectivement les 10 août 2015, 15 janvier et 31 août 2016 par la société towerCast ;
Vu la lettre du Ministre chargé de l'Économie en date du 17 mars 2016, informant la cour qu'il n'entendait pas user de la faculté de présenter des observations écrites et orales ;
Vu les observations écrites déposées par l'Autorité de la concurrence le 24 mars 2016 ;
Vu l'avis du Ministère public en date du 12 octobre 2016 ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 13 octobre 2016 les conseillers des requérantes, qui ont été mises en mesure de répliquer et ont eu la parole en dernier, ainsi que le représentant de l'Autorité de la concurrence et le Ministère public ;
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SUR CE,
I. SUR LA JONCTION À L'INSTANCE DES SOCIÉTÉS TYROL ACQUISITION 1 & Cie ET TYROL ACQUISITION 1
1. Il résulte de la combinaison des articles R. 464-12 et R. 464-17 du code de commerce, que lorsque la déclaration de jonction à l'instance ne contient pas les motifs de l'intervention, ceux-ci doivent être déposés au greffe dans les deux mois qui suivent la notification de la décision de l'Autorité, sous peine d'irrecevabilité relevée d'office.
2. Les sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie et Tyrol Acquisition 1 n'ayant jamais déposé l'exposé des motifs de leur jonction, celle-ci doit être déclarée d'office irrecevable.
II. SUR LES RECOURS DES SOCIÉTÉS TDF, TDF INFRASTRUCTURE HOLDING ET TDF INFRASTRUCTURE
3. La cour relève, à titre liminaire, que, si, dans leurs mémoires déposés le 13 août 2015, les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure demandaient, à titre principal, leur mise hors de cause, sans d'ailleurs la motiver, ce chef de demande a disparu dans leurs mémoires récapitulatifs déposés le 30 juin 2016.
4. En tant que de besoin, la cour juge qu'une telle mise hors de cause doit être refusée pour les motifs développés aux points 742 à 753 de la décision attaquée, que la cour fait expressément siens.
A. Sur les moyens communs aux trois griefs
Sur la violation alléguée des droits de la défense à raison de la durée excessive de la procédure
5. Rappelant que la notification des griefs n'est intervenue que le 15 novembre 2013, près de sept ans après que le Conseil de la concurrence a été saisi par la société towerCast, le 16 février 2007, la société TDF soutient que ses droits de la défense ont été irrémédiablement compromis par la durée excessive de la phase d'enquête, qui fait obstacle à l'établissement par elle des preuves visant à réfuter l'existence des comportements qui lui sont reprochés.
6. Elle fait valoir, d'une part, que, l'ensemble des dirigeants de la société TDF et des opérationnels responsables de l'exploitation du site de la tour Eiffel en poste en 2006 avaient quitté leur emploi au moment de la notification des griefs et n'étaient plus en mesure d'apporter leur éclairage ou des explications de fait sur les faits reprochés.
7. Elle affirme, d'autre part, que la durée de la procédure ne lui a pas permis de retrouver toutes les preuves matérielles utiles pour sa défense. Elle souligne que ce constat est patent s'agissant de la procédure d'expertise décidée très tardivement par le rapporteur général, le 6 décembre 2011, plus de cinq ans après la date à laquelle l'expert devait se placer pour apprécier l'existence et la valorisation des actifs présents sur le site de la tour Eiffel, et alors que, compte tenu de la fin la télévision analogique, le 8 mars 2011, elle avait déjà démonté et retiré tous les actifs dédiés à ce mode de diffusion.
8. Elle récuse l'argument de l'Autorité selon lequel la durée de la procédure s'explique par l'ampleur et la complexité de l'affaire, affirmant que cette durée est imputable au manque de diligence des services d'instruction de l'Autorité, dont l'enquête a été interrompue pendant plus de trois ans, aucun acte n'ayant été effectué entre le 22 février 2008, date de l'envoi d'un questionnaire à plusieurs radios, et le 11 mai 2011, date de la convocation de la société towerCast pour audition.
9. Elle récuse pareillement l'argument selon lequel, étant informée de l'existence de la procédure de concurrence, il lui appartenait de prendre toute mesure appropriée pour éviter la déperdition des preuves.
10. Les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure développent le même moyen d'annulation.
11. La société towerCast et l'Autorité concluent au rejet de ce moyen.
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12. Il convient de rappeler, en premier lieu, que, hors l'hypothèse d'une atteinte aux droits de la défense, la méconnaissance éventuelle du délai raisonnable prescrit par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas sanctionnée par l'annulation ou la réformation de la décision mais par la réparation du préjudice résultant d'un délai jugé excessif.
13. En second lieu, c'est à celui qui soutient que la durée excessive de la procédure a fait obstacle concrètement et effectivement à l'exercice normal de ses droits de la défense, d'en rapporter la preuve.
14. En l'espèce, la société TDF n'établit pas la réalité de l'atteinte portée à ses droits par la durée de la phase d'enquête.
15. D'abord, même si la connaissance qu'a la partie qui prétend que ses droits de la défense ont été violés, de l'existence d'une procédure en cours, ne suffit pas à exclure la réalité de cette violation, elle n'en est pas moins un élément important d'appréciation, dans la mesure où une partie diligente ne manquera pas, dans toute la mesure du possible, de conserver les preuves destinées à combattre les accusations formulées contre elle à partir du moment où elles sont portées à sa connaissance.
16. Cela est particulièrement vrai s'agissant de la société TDF, ancien monopole légal ayant conservé une position dominante sur les marchés en cause et ayant fait, avant ou concomitamment à l'enquête ici critiquée, l'objet d'autres procédures devant le Conseil puis l'Autorité de la concurrence (décision n° 02-MC-04 du 11 avril 2002 ; décision n° 03-MC-03 du 1er décembre 2003 ; décision n° 07-D-30 du 5 octobre 2007 ; décision n°10-D-09 du 9 mars 2010).
17. Dans ces conditions, la société TDF a disposé d'emblée de tous les éléments pour apprécier le sérieux et la gravité des accusations portées par la société towerCast ainsi que le risque de sanction encouru et, partant, l'importance de conserver toute preuve en sa possession.
18. Ensuite, dès la plainte de la société towerCast, le 16 février 2007, la question de la valeur des équipements présents sur le site de la tour Eiffel s'est trouvée au centre des débats, la société towerCast accusant la société TDF d'avoir délibérément surévalué ses actifs ; en outre, dans le cadre de la contestation de la procédure d'appel d'offres, qui s'est déroulé de 2007 à 2012 devant les juridictions administratives, la société towerCast a continué de soutenir la même thèse. De même, dès les observations complémentaires de la société towerCast en date du 4 juin 2007, la société TDF a été informée que le Conseil puis l'Autorité enquêtait également sur le caractère tardif ou non de la communication de son offre de gros d'hébergement à la société towerCast, et sur la question de savoir si cette offre était ou non constitutive d'un ciseau tarifaire.
19. Dès lors, même si ce n'est que par une décision du 6 décembre 2011 que le rapporteur général a ordonné une expertise visant à établir la valorisation des actifs présents sur le site de la tour Eiffel au mois de mars 2006, la société TDF, qui savait que l'enquête toujours pendante devant les services d'instruction de l'Autorité avait notamment pour objet d'apprécier si elle avait ou non surévalué ces actifs dans ses réponses à la Ville [Localité 1] et à la société towerCast, pouvait s'attendre à une telle mesure d'instruction et, en tout état de cause, était parfaitement à même de mesurer l'importance pour elle de conserver la preuve de l'existence desdits actifs et du bien-fondé de leur valorisation jusqu'à la fin de ladite enquête.
20. Il en va de même a fortiori des éléments de preuve destinés à combattre les accusations de tardiveté de son offre de gros d'hébergement et de ciseau tarifaire, la société TDF ayant été en mesure de fournir, dès le début de l'enquête, en 2007, tous les éléments en sa possession de nature à démontrer le mal-fondé de ces accusations.
21. La cour relève que, avant même la décision n° 07-S-02 du 26 juin 2007 par laquelle le Conseil de la concurrence a renvoyé les plaintes de la société towerCast à l'instruction, la société TDF a répondu aux accusations (TDF, audition du 2 avril 2007, cote 2058, 07/0018M ; réponse du 19 avril 2007 au questionnaire adressé le 6 avril 2007 par les rapporteurs, cote 2191, 07/0018M ; observations du 21 mai 2007, cote 2403, 07/0018M, et observations du 13 juin 2007, cote 2599, 07/0018M). Elle constate, en outre, qu'entre juin 2007 et début 2008, les services d'instruction ont poursuivi l'enquête avec diligence ' ce que la société TDF ne conteste pas ', adressant notamment en février 2008 un questionnaire à plusieurs radios, auquel celles-ci ont répondu en mars 2008, et que, pendant cette même période, très proche de l'époque des faits, la société TDF a continué de fournir des éléments pour sa défense (TDF, réponses au questionnaire adressé le 1er juillet 2007 par les rapporteurs, cotes 3411 et suiv., 07/0018M ; réponse du 14 mars 2008, avec pièces jointes, au questionnaire adressé le 22 février 2008 par les rapporteurs, cote 866, 07/0017F ; réponse complémentaire du 3 juin 2008, avec pièces jointes, au même questionnaire, cote 2994, 07/0018M).
22. De surcroît, la société TDF n'allègue et a fortiori ne démontre pas que la conservation des preuves pendant toutes ces années, était techniquement ou matériellement impossible ou aurait représenté pour elle une charge excessive.
23. S'agissant plus particulièrement des équipements consacrés à la diffusion de la télévision analogique, il est constant que la fin de ce mode de diffusion est intervenu le 8 mars 2011, rendant ces équipements inutiles et justifiant leur démontage. Il ne saurait donc être reproché à la société TDF de ne pas avoir pu les présenter physiquement à l'expert.
24. Mais l'expert était tout à fait disposé à retenir, à titre de preuve de l'existence d'équipements en mars 2006, de simples preuves documentaires. Toutefois, la société TDF n'a pas été en mesure de produire la moindre preuve de l'existence de certains équipements, alors même que sa propre évaluation, comme celle de l'expert, démontrent qu'il s'agissait d'équipements de grande valeur, de surcroît souvent conçus spécifiquement pour prendre place dans les locaux exploités sur le site de la tout Eiffel, toutes circonstances permettant d'affirmer qu'il n'était pas difficile de conserver des preuves de leur existence et de leur valeur.
25. Enfin, la cour constate que, si la majorité des dirigeants et des opérationnels en poste en 2006 avaient quitté la société TDF avant la décision du rapporteur général d'ordonner une expertise, M. [H] [I], délégué Tour Eiffel, et M. [U] [Y], directeur de la Division Radio, ne sont partis, respectivement, qu'en juin 2012 et en novembre 2012 (TDF, mémoire du 13 août 2015, point 35), soit après le dépôt par l'expert de son rapport, de sorte que, nécessairement au fait, de par leurs fonctions, de l'état des actifs présents sur le site de la tour Eiffel et de son évolution dans le temps, ils ont pu fournir tous éléments utiles à l'expert.
26. Quant à M. [H] [C], directeur juridique, il n'a quitté l'entreprise qu'en août 2014 (TDF, mémoire du 13 août 2015, point 35), soit postérieurement à la notification des griefs, intervenue le 13 novembre 2013. Or, eu égard à la nature de ses fonctions, il ne pouvait qu'être conscient de la nécessité de conserver toute preuve de nature à répondre aux critiques soulevées devant le Conseil puis l'Autorité par la société towerCast, et avait le pouvoir d'imposer toute mesure de conservation aux services opérationnels.
27. Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré de la violation des droits de la défense de la société TDF à raison de la durée excessive de la procédure, est mal fondé et doit être rejeté.
Sur l'inapplicabilité alléguée du droit de l'Union
28. L'Autorité a, dans la décision attaquée (§§ 278 à 286), considéré que les pratiques en cause étaient susceptibles d'affecter sensiblement le commerce entre États membres, au sens de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après le « TFUE »), et les a donc analysées au regard des règles de concurrence tant internes que de l'Union.
29. La société TDF rappelle qu'aux termes de la communication de la Commission (2001/C 101/07) intitulée « Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité » (ci-après les lignes directrices), publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 27 avril 2007, trois éléments cumulatifs doivent être démontrés pour établir que les pratiques sont susceptibles d'affecter sensiblement le commerce intracommunautaire : (i) l'existence d'échanges entre Etats membres portant sur les produits faisant l'objet de la pratique, (ii) l'existence de pratiques susceptibles d'affecter ces échanges et (iii) le caractère sensible de cette affectation.
30. Elle fait valoir qu'en l'espèce, les marchés et les accords concernés tant par le grief n° 1 que par les griefs n° 2 et 3 ont une taille beaucoup trop limitée pour être susceptibles d'affecter sensiblement le commerce intracommunautaire, de sorte que la troisième condition portant sur le caractère sensible de la pratique fait défaut en l'espèce.
31. En effet, selon la société TDF, en premier lieu, les marchés en cause sont de dimension purement locale et représentent une part très limitée de ses ventes en France en 2006, tant sur le marché de la diffusion de radios FM (environ 5 %) que sur le marché plus large de la diffusion (environ 2 %). Or, comme le rappelle la Communication de la Commission relative à l'affectation du commerce entre Etats membres (point 99), « il est possible que le commerce ne soit pas susceptible d'être sensiblement affecté si l'abus est purement local ou ne concerne qu'une partie négligeable des ventes de l'entreprise dominante ».
32. En second lieu, la valeur des accords concernés par la présente procédure est inférieure au seuil de 40 millions d'euros fixé par la Commission dans sa « Communication de la Commission concernant les accords d'importance mineure qui ne restreignent pas sensiblement le jeu de la concurrence au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne (de minimis) », publiée au JOUE le 22 décembre 2001, (ci-après la communication de minimis). C'est ainsi que la redevance annuelle versée par la société TDF à la Ville [Localité 1] lors du renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel est de 3,7 millions d'euros ; quant à la valeur totale des offres de diffusion hertzienne envers l'ensemble des éditeurs de radios FM diffusées à partir de la tour Eiffel (31 radios), elle demeure inférieure à 7 millions d'euros par an.
33. La société TDF fait valoir, à cet égard, que le Conseil de la concurrence à déjà indiqué que le seuil de minimis est un indicateur utile pour déterminer l'existence d'une affectation sensible du commerce intra-communautaire dans le cadre de pratiques unilatérales d'un opérateur en position dominante, et que, dans sa décision n° 09-D-36 du 9 décembre 2009 relative à des pratiques mises en 'uvre par Orange Caraïbe et France Télécom sur différents marchés de services de communications électroniques dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane (§ 182), l'Autorité s'est référée expressément au seuil de 40 millions d'euros en tant qu'indicateur utile pour apprécier l'affectation du commerce intra-communautaire concernant une pratique d'abus de position dominante. Elle ajoute que, dans sa décision n° 07-MC-05 précitée (points 156 et 181), le Conseil a considéré que les pratiques reprochées à la société TDF pouvaient poser un risque uniquement au regard de l'article L. 420-2 du code de commerce, et non au regard des dispositions d'ordre communautaire.
34. Les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure développent le même moyen de réformation.
35. La société towerCast et l'Autorité concluent au rejet de ce moyen.
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36. La cour relève, à titre liminaire, que la société TDF ne conteste ni l'existence d'échanges entre Etats membres portant sur les services faisant l'objet des pratiques qui lui sont reprochées ni le fait que lesdites pratiques, à les supposer démontrées, sont susceptibles d'affecter ces échanges.
37. En premier lieu, les marchés pertinents sont, s'agissant du grief n°1, le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel et, pour les griefs n° 2 et 3, le marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la tour Eiffel.
38. Il s'agit donc, dans l'un et l'autre cas, de marchés qui ne s'étendent pas à la totalité du territoire national.
39. Cette hypothèse est envisagée dans la partie 3.2.6. des lignes directrices. Intitulée « Abus de position dominante ne couvrant qu'une partie d'un État membre », cette partie, constituée des points 97 à 99, est ainsi libellée :
« 97. Lorsqu'une position dominante ne couvre qu'une partie d'un État membre, on trouvera une orientation, comme dans le cas des accords, dans la condition énoncée à l'article 82, selon laquelle la position dominante doit couvrir une partie substantielle du marché commun. Si la position dominante couvre une partie d'un État membre qui constitue une partie substantielle du marché commun et si l'abus de cette position rend plus difficile aux concurrents d'autres États membres l'accès au marché sur lequel l'entreprise est dominante, le commerce entre États membres doit normalement être considéré comme susceptible d'être affecté de manière sensible.
98. Dans l'application de ce critère, il convient de considérer notamment la taille du marché en cause en termes de volume. Certaines régions ou même un port ou un aéroport situés dans un État membre peuvent, selon leur importance, constituer une partie substantielle du marché commun(77). Dans ces derniers cas, il convient de considérer si l'infrastructure en cause sert à la prestation de services transfrontaliers et, si oui, dans quelle mesure. Lorsque des infrastructures comme des aéroports et des ports sont importantes pour la prestation de services transfrontaliers, le commerce entre États membres est susceptible d'être affecté.
99. Tout comme pour les positions dominantes couvrant l'ensemble d'un État membre (voir paragraphe 95 ci-dessus), il est possible que le commerce ne soit pas susceptible d'être sensiblement affecté si l'abus est purement local ou ne concerne qu'une partie négligeable des ventes de l'entreprise dominante. »
40. Il est constant que le titulaire de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel se voit confier le principal site français de diffusion hertzienne analogique et numérique quant à la population desservie, celui-ci couvrant environ 11 millions d'habitants de l'Ile-de-France, soit 18 % de la population métropolitaine.
41. Ainsi que le fait justement valoir l'Autorité, sur vingt-cinq Etats constituant l'Union européenne à l'époque des faits, seize avaient une population sensiblement inférieure, et cinq autres une population approximativement égale, à celle du bassin de population desservie par le site de la tour Eiffel.
42. Dans ces conditions, la zone de diffusion à partir du site de la tour Eiffel représente une partie substantielle du marché commun, au sens du point 97 des lignes directrices, et c'est à tort que la société TDF soutient que les abus de position dominante qui lui sont reprochés sont purement locaux.
43. Par ailleurs, en raison de ses caractéristiques, le site de la tour Eiffel présente un intérêt particulier pour un opérateur d'un autre Etat membre cherchant à s'établir en France, puisqu'il lui permettrait, à partir d'un unique point de diffusion, de diffuser un grand nombre de chaînes de radio et de télévision à destination d'un nombre très important d'auditeurs. Or cette circonstance est de nature à diminuer significativement ses coûts d'établissement : en effet, en dehors de ce site unique, il lui faudrait multiplier les implantations sur l'ensemble du territoire national pour atteindre une capacité de diffusion du même nombre de radios et de télévisions à destination d'un nombre comparable d'auditeurs.
44. A cet égard, il doit être relevé que, selon les propres déclarations de la société TDF au cours de l'enquête, l'opérateur espagnol Abertis avait manifesté un intérêt pour l'appel d'offres de 2006. Certes, il ne s'est finalement pas porté candidat, mais la seule circonstance qu'il ait envisagé de concourir confirme le caractère stratégique du site de la tour Eiffel pour un nouvel entrant sur le marché de la diffusion hertzienne, terrestre comme analogique, en France.
45. Dans ces conditions, les pratiques reprochées à la société TDF, à les supposer démontrées, ne pouvaient que rendre plus difficile aux concurrents d'autres Etats membres l'accès au marché de la diffusion hertzienne à partir du site de la tour Eiffel.
46. A l'inverse, à les supposer établies, les pratiques dénoncées, en permettant à la société TDF d'échapper à une concurrence effective sur une partie très significative du marché français (près de 20 % de la population métropolitaine), plaçaient cette société en position de force pour concurrencer agressivement ses concurrents sur d'autres marchés nationaux ou européens, sur lesquels elle était d'ores et déjà présente (décision attaquée, point 57).
47. A la lumière des points précités des lignes directrices, il se déduit des constatations qui précèdent que le commerce entre Etats membres était susceptible d'être affecté de manière sensible par lesdites pratiques.
48. Vainement la société TDF fait-elle valoir, en se fondant sur le point 99 des lignes directrices, que les abus qui lui sont reprochés, à les supposer établis, ne concernaient qu'une part négligeable de ses ventes, et ce tant sur le marché de la diffusion de radios FM (environ 5 %) que sur le marché plus large de la diffusion (environ 2 %), et n'était donc pas susceptible d'affecter sensiblement le marché commun.
49. En effet, c'est au niveau du marché sur lequel l'entreprise poursuivie détient une position dominante ' lequel représente par hypothèse une partie substantielle du marché commun ' qu'il convient d'apprécier le caractère négligeable ou non de la part des ventes de l'entreprise dominante concernée par l'abus. Or, en l'espèce, c'est 100 % des prestations fournies sur les marchés définis comme pertinents par l'Autorité qui sont concernées par les abus qui sont reprochés à la société TDF.
50. En second lieu, ainsi que le fait justement valoir l'Autorité, la communication de minimis, qui se borne à définir, au moyen de seuils de part de marché, ce qui ne constitue pas une restriction sensible de la concurrence au sens de l'article 101 du TFUE (ancien article 81 du TCE), n'est pas applicable aux abus de position de dominante, prévus à l'article 102 du TFUE. Par ailleurs, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que la fixation d'un seuil de sensibilité (de minimis) en vue de déterminer une exploitation abusive d'une position dominante ne se justifie pas, car cette pratique anticoncurrentielle est, de par sa nature même, susceptible de provoquer des restrictions de concurrence non négligeables, voire d'éliminer la concurrence sur le marché sur lequel opère l'entreprise concernée (CJUE, arrêt du 6 octobre 2015, Post Danmark, C-23/14, point 73).
51. De surcroît, selon ses propres termes (point 3), la communication de minimis ne traite pas la question de savoir ce qui constitue une affectation sensible du commerce entre Etats membres, question couverte par les lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce.
52. Par ailleurs, si lesdites lignes directrices comportent également, en leur point 52, une définition négative du caractère sensible, aux termes de laquelle la Commission estime que, en principe, les accords ne peuvent pas affecter sensiblement le commerce entre États membres lorsque à la fois « la part de marché totale des parties sur un marché communautaire en cause affecté par l'accord n'excède pas 5 % » et « dans le cas des accords horizontaux, le chiffre d'affaires annuel moyen réalisé dans la Communauté par les entreprises en cause avec les produits concernés par l'accord n'excède pas 40 millions d'euros » ou « [d]ans le cas des accords verticaux, le chiffre d'affaires annuel total réalisé dans la Communauté par le fournisseur avec les produits concernés par l'accord n'excède pas 40 millions d'euros », la portée de ce point est expressément limitée aux « accords » entre entreprises, de sorte qu'il n'est pas applicable lorsqu'est en cause un abus de position dominante.
53. Cette analyse n'est nullement contraire à la pratique décisionnelle de l'Autorité. C'est ainsi que, au paragraphe 182 de sa décision n° 09-D-36, l'Autorité a expressément dit que la présomption d'affectation sensible du commerce en cas de dépassement du seuil de 40 millions d'euros n'était pas applicable aux abus de position dominante. Le fait que, dans cette même décision, elle ait considéré qu'un chiffre d'affaires de 300 millions réalisé par l'entreprise sur le marché sur lequel elle détient une position dominante constitue un indice que l'abus commis sur ce marché est susceptible d'affecter sensiblement les échanges entre Etats membres ne peut en aucun cas être interprété en ce sens que, selon l'Autorité, il n'y aurait pas d'affectation sensible lorsque le chiffre d'affaires est inférieur à 40 millions d'euros.
54. La cour constate en outre que, dans sa décision n° 07-MC-05, le Conseil de la concurrence n'a nullement exclu l'application de l'article 82 du traité CE, le fait qu'il se soit borné à constater que les pratiques en cause étaient susceptibles d'être regardées comme abusives au regard des dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce s'expliquant par le fait que, statuant sur une demande de mesures conservatoires, il n'avait pas à analyser l'affaire dans tous ses aspects.
55. Dès lors, c'est à juste titre que l'Autorité a fait application tant de l'article L. 420-1 du code de commerce que de l'article 102 du TFUE.
B. Sur les moyens propres au grief n° 1
56. A titre liminaire, la cour relève que les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure ne contestent pas que la société TDF détenait, à la date des faits, une position dominante sur le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel.
Sur l'incidence des décisions des juridictions administratives sur la présente procédure
57. Dans le cadre de la description du contexte factuel et procédural, les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure font valoir que, alors même que, devant les juridictions administratives, la société towerCast avait invoqué, à l'appui de sa demande en annulation de la procédure d'appel d'offres, l'attitude prétendument dilatoire de la société TDF, la prétendue surévaluation du prix et la prétendue absence d'alternative à une cession, l'ensemble de ces moyens ont été rejetés par les juridictions administratives, qui ont notamment jugé que la cession de l'intégralité des équipements appartenant à la société TDF ne s'imposait pas, que la société towerCast n'apportait aucun élément de nature à démontrer que le prix de cession de ces équipements avait été surévalué par la société TDF et que la société towerCast avait reçu les informations en temps utile pour construire son offre définitive.
58. Elles soulignent que, dans le cadre d'une procédure de mise en concurrence, l'autorité délégante est tenue de faire respecter le principe d'égalité des concurrents et qu'aux termes du code des marchés publics, l'information des candidats relève de sa responsabilité. Ainsi, la finalité du contrôle opéré par les juridictions administratives sur la régularité d'un appel d'offres serait notamment de s'assurer que la concurrence n'a pas été faussée entre les candidats, notamment du fait d'une asymétrie d'informations. Partant, en l'espèce, les juridictions administratives auraient bien pris en compte les impératifs du droit de la concurrence, mais constaté que la société towerCast n'avait pas été désavantagée par rapport à la société TDF.
59. Or, selon les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure, l'Autorité n'apporte aucun élément pertinent permettant de s'écarter de l'analyse des juridictions administratives, aux termes de laquelle aucun abus de position dominante n'entachait la régularité du renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel.
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60. Mais, d'une part, il appartenait aux juridictions administratives de déterminer si la Ville [Localité 1], autorité délégante, avait violé les règles de concession du domaine public, et non d'apprécier si la société TDF avait abusé de sa position dominante. A l'inverse, l'Autorité et, sur recours, la cour, doivent rechercher si la société TDF a commis un abus de position dominante. Or l'absence de faute de la part d'une autorité délégante ne suffit pas à exclure qu'un abus de position dominante ait été commis par l'un des candidats à l'occasion de l'appel d'offres, a fortiori lorsque, comme en l'espèce, est en question non pas le respect de l'obligation pesant sur l'autorité délégante d'assurer un égal traitement à tous les candidats, mais le respect, par un candidat en position dominante, de l'obligation de communiquer aux autres candidats des informations dont l'autorité délégante n'a elle-même pas connaissance.
61. D'autre part, les juridictions administratives ont statué au vu des seuls éléments de preuves produits par, respectivement, la société towerCast, partie demanderesse, la Ville [Localité 1] et la société TDF, parties défenderesses, l'Autorité n'étant pas partie à la procédure ; en revanche, le collège de l'Autorité a statué au vu de l'instruction approfondie menée par les rapporteurs, qui jouissent de pouvoirs d'investigation étendus, et la cour, saisie du présent recours, se prononcera au vu du même dossier d'instruction.
62. Il découle de ce qui précède que les décisions administratives intervenues en l'espèce n'ont pas d'incidence sur l'analyse qu'il convient de mener sur l'abus de position dominante retenu à l'encontre de la société TDF.
Sur l'obligation pour la société TDF de céder ses actifs au bénéficiaire de la convention d'occupation domaniale
63. En premier lieu, la cour rappelle que la procédure d'appel d'offres était caractérisée par l'impérieuse nécessité ' que la société TDF ne conteste d'ailleurs pas ' que l'éventuel changement de concessionnaire n'entraîne pas une interruption dans la diffusion des chaînes de télévision et de radio depuis le site de la tour Eiffel.
64. La décision de l'ancien occupant de retirer l'ensemble des équipements aussitôt que la concession aurait été attribuée à un concurrent serait apparue sans conteste comme un abus de position dominante, puisqu'une telle menace aurait obligé les autorités publiques à lui renouveler la concession. La société TDF n'a d'ailleurs jamais exercé une telle menace.
65. Dans la mesure où il était techniquement impossible à l'éventuel nouvel occupant de remplacer, dès la prise d'effet de la concession d'occupation, l'ensemble des équipements, propriété de l'ancien occupant, présents sur le site de la tour Eiffel, dont certains avaient été conçus spécifiquement pour y prendre place, il apparaissait indispensable de prévoir, fût-ce temporairement, la poursuite de l'exploitation au moyen des équipements déjà en place.
66. La cour constate que, dans ses échanges avec la Ville [Localité 1] et avec la société towerCast à l'époque des faits, la société TDF admettait au moins implicitement une telle nécessité, écrivant notamment, dans un courrier à la société towerCast en date du 18 septembre 2006, que, s'agissant de « la continuité des activités, TDF estime que celles-ci peuvent être assurées de plusieurs façons ».
67. Dans la décision attaquée, l'Autorité a considéré qu'il découlait tant de l'article 6 de l'arrêté d'autorisation d'occupation du site de la tour Eiffel en date du 27 décembre 2006 que du cahier de consultation l'obligation juridique pour la société TDF, au cas où elle ne serait pas attributaire de la convention d'occupation, de céder ses actifs présents sur le site de la tour Eiffel.
68. Toutefois, rien dans cet arrêté ou dans ce document n'excluait la possibilité, par exemple, d'une location par la société TDF au nouvel occupant de tout ou partie des équipements dont elle était propriétaire.
69. D'une part, l'article 6 de l'arrêté prévoyait certes l'obligation pour la société TDF d'enlever la totalité de ses installations dans un délai de trois mois, sous peine de voir ceux-ci devenir la propriété de la Ville [Localité 1]. La cour relève au passage l'inanité de la sanction prévue, alors qu'il ne fait aucun doute que les autorités auraient refusé à la société TDF le droit d'enlever ses installations dans un délai de trois mois dans la mesure où cela n'aurait pu que conduire à une interruption de la diffusion de la quasi-totalité des chaînes de télévision et de radio en Île-de-France.
70. Mais, d'autre part, l'article 2.6.2. du cahier de consultation prévoyait expressément que « [l]'occupant prendra les lieux libres de toutes les installations appartenant à l'occupant précédent [c'est-à-dire la société TDF] sauf accord passé avec ce dernier ». Or, les modalités de cet accord ne sont pas précisées dans ce document, de sorte qu'il était loisible à l'ancien et au nouvel occupant de convenir d'une location ou d'une cession des équipements, ou encore d'une location d'une partie d'entre eux et d'une cession du reste.
71. Cette interprétation n'est en rien infirmée par la dernière phrase du point 2.6.2., aux termes de laquelle « [c]ompte tenu du contexte nouveau d'ouverture à la concurrence il est attendu du précédent occupant qu'il négocie de bonne foi la cession des actifs dont il entendrait se défaire dans des conditions permettant la continuité du service public sans aucune interruption ». Le fait que la Ville [Localité 1] ait spécifiquement envisagé la possibilité d'une cession n'interdisait pas à l'ancien et au nouvel occupant de convenir de tout autre arrangement à leur convenance.
72. De surcroît, l'emploi, dans cette même phrase, des termes « la cession des actifs dont il entendrait se défaire », et notamment l'usage du conditionnel, démontre sans équivoque que le précédent occupant était laissé libre de refuser de céder les équipements dont il avait la propriété.
73. Certes, l'article 2.5.2 du cahier de consultation visait « [l]e droit d'utilisation des emplacements sur la tour Eiffel ['] qui sera accordé à l'occupant pour lui permettre d'y exploiter ses installations », mais une telle stipulation n'avait ni pour objet ni pour effet de déterminer les modalités juridiques de détention des installations par l'occupant, rien n'interdisant à celui-ci de louer, plutôt que d'acheter, les équipements qu'il entendait exploiter sur le site de la tour Eiffel.
74. Il est encore vrai que, dans un courrier à la société TDF en date du 23 octobre 2006, cité au point 368 de la décision attaquée, la Ville [Localité 1] a indiqué qu'elle « n'entend pas dissocier le droit d'occupation de celui d'exploitation attribué au futur occupant ». Mais une telle dissociation n'aurait pas eu lieu si le nouvel occupant avait fait le choix de louer les installations propriété de l'ancien occupant, rien, ainsi qu'il a été dit, ne lui interdisant d'exploiter le site de la tour Eiffel au moyen d'équipements loués plutôt qu'achetés. D'ailleurs, comme le rappelle justement la société TDF, lors de leur audition en 2007 par les services d'instruction, les représentants de la mairie [Localité 1] ont indiqué que, « pour nous, la cession des équipements n'était pas la seule solution envisagée. La clause relative à l'hébergement des tiers que nous avions inséré dans le cahier de consultation permettait de négocier d'autres solutions (cession partielle, location, sous-hébergement, etc.) » (cote 3653, 07/0018M).
75. La cour ajoute, à titre surabondant, que, à supposer même que la Ville [Localité 1] ait entendu imposer à la société TDF l'obligation de céder les équipements présents sur le site de la tour Eiffel, une telle exigence aurait manifestement constitué une atteinte illicite au droit de propriété de cette dernière, droit de valeur constitutionnelle.
76. C'est donc à tort que, dans la décision attaquée, l'Autorité a considéré que la société TDF aurait eu l'obligation de céder les équipements indispensables à la continuation du service public si la concession d'occupation avait été attribuée à la société towerCast, et la société TDF fait valoir à juste titre que d'autres solutions étaient envisageables.
77. L'Autorité fait encore valoir que la cession de ses actifs par la société TDF était en tout état de cause la seule solution possible d'un point de vue économique, l'alternative étant soit le démontage et l'enlèvement des équipements, que la société TDF n'aurait pas pu utiliser sur un autre site, puisqu'ils avaient été conçus spécifiquement pour celui de la tour Eiffel, soit leur abandon sur place entraînant leur appropriation par la Ville [Localité 1].
78. Mais, si le caractère non économiquement viable pour la société TDF de ces solutions alternatives ne fait aucun doute, la cour constate que la solution d'un démontage et d'un enlèvement des équipements aurait été encore plus dommageable pour le nouvel occupant que pour la société TDF ' et d'ailleurs inacceptable pour les autorités publiques ', puisque, compte tenu de la complexité du site, elle aurait impliqué l'interruption de toute diffusion depuis le site de la tour Eiffel pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, de sorte que la société TDF aurait été en mesure d'imposer la solution de la location si elle avait décidé de ne pas céder tout ou partie de ses actifs.
79. La cour relève, à titre surabondant, que, au moins pour les équipements dévolus à la télévision analogique, dont la cessation de la diffusion était programmée pour 2011, leur location pouvait apparaître économiquement plus intéressante que leur achat pour le nouvel occupant.
80. En second lieu, nonobstant les considérations qui précèdent, il appartenait à la société TDF de fournir une évaluation de la valeur des équipements nécessaires à la continuité du service.
81. D'une part, la cour relève qu'à aucun moment, la société TDF n'a exprimé un refus clair de céder quelque équipement que ce soit.
82. C'est ainsi que, par courrier du 10 octobre 2006 à la société towerCast, la société TDF, se plaçant dans l'hypothèse où la concession d'occupation domaniale serait attribuée à un nouvel occupant, écrit: « TDF n'a pas encore défini, à ce stade, la liste des équipements qu'elle déciderait éventuellement de céder dans une telle hypothèse. Il est évident que cette liste ne pourrait être établie qu'après une discussion approfondie avec le nouvel occupant. Cependant, si la cession de certains biens était envisagée, sous toutes réserves et sans que cela vaille engagement de TDF d'une quelconque manière, TDF n'excluerait pas de céder les équipements listés en annexe 3 qui pourrait être revue dans le cadre de négociations ». Ce courrier était accompagné d'une annexe 3 comportant une liste d'équipements de cinq lignes.
83. De même, dans un courrier à la Ville [Localité 1] en date du 16 octobre 2006, la société TDF opère une distinction entre les « équipements qui permettent d'assurer la fourniture d'énergie et de climatisation nécessaires à l'activité de diffusion » et les « autres équipements listés dans [le] courrier [de la Ville [Localité 1] du 12 octobre 2006] (aériens, feeders, multiplexeurs, FR) ». Si, pour les premiers, la société TDF se dit « prête bien sûr à assurer elles-même ces prestations pour le compte d'un nouvel occupant, dans le cadre d'un contrat de prestations de services », elle n'exclut pas formellement leur cession et évalue leur valeur globale à 15 millions d'euros. A l'inverse, pour les seconds, elle précise qu' « [ils] nous semblent pouvoir rester propriété de TDF et être traités vis-à-vis d'un éventuel nouvel occupant du site par des offres d'hébergement et de diffusion HF », et ne fournit aucune évaluation les concernant.
84. Compte tenu du flou sur les intentions de la société TDF quant à la cession d'une partie au moins de ses actifs, il était indispensable à la société towerCast, qui souhaitait acquérir l'ensemble des équipements nécessaires à la continuité du service public, d'obtenir une évaluation précise desdits équipements.
85. D'autre part, et en tout état de cause, ainsi que l'a justement souligné l'Autorité au point 361 de la décision attaquée, quelles qu'aient pu être les modalités visant à assurer la continuité du service public en cas de changement d'occupant, il appartenait à la société TDF de fournir une évaluation de la valeur des équipements nécessaires, celle-ci étant évidemment un paramètre essentiel de fixation du montant des loyers, en cas de conclusion d'un contrat de location, ou du coût de la prestation, en cas de conclusion d'un contrat de prestation de services.
86. Ainsi, bien qu'aucune obligation de cession de ses actifs ne pesât sur la société TDF, elle devait néanmoins fournir à la société towerCast une information complète et précise sur les caractéristiques et la valeur des équipements nécessaires à la continuité du service public, ainsi que cela lui avait été réclamé à maintes reprises au cours de la procédure de renouvellement de la convention d'occupation domaniale, et ce, dans des délais suffisants pour permettre à la société towerCast d'exploiter ces informations dans le cadre de l'élaboration de son offre.
Sur le caractère incomplet, tardif et erroné des informations communiquées à la société towerCast
87. A titre liminaire, la cour constate que, si le refus initial de la société TDF de communiquer à la Ville [Localité 1] les informations indispensables pour permettre à cette dernière d'élaborer le cahier de consultation, a indubitablement retardé la procédure d'appel d'offres ' la Ville [Localité 1] n'ayant remis le cahier de consultation à chaque candidat que le 29 août 2006, alors qu'elle comptait le faire dès le 15 mai 2006 (décision attaquée, point 404) ', il n'est pas établi que ce retard s'est répercuté sur le délai dont a bénéficié la société towerCast pour remettre son offre.
88. En effet, il ne résulte d'aucun des éléments de la procédure d'appel d'offres que la Ville [Localité 1] aurait été tenue de respecter une date butoir pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale et aurait donc été obligée de réduire le délai dont disposaient les candidats pour présenter leur offre. A cet égard, la cour rappelle que la précédente convention d'occupation domaniale, arrivée à échéance le 31 décembre 2005, avait été prolongée jusqu'au 31 décembre 2006 par un premier arrêté d'autorisation d'occupation temporaire (cote 3552, 07/0018M) et l'a de nouveau été jusqu'au 28 février 2007 par un second arrêté d'autorisation d'occupation temporaire (décision attaquée, point 363), ce qui a permis à la société TDF d'occuper les emprises de la tour Eiffel jusqu'à cette dernière date, sans que rien ne permette de douter que la Ville [Localité 1] aurait pu décider, si nécessaire, d'une troisième prolongation. La Ville [Localité 1] a d'ailleurs prolongé les délais initialement fixés dans le cahier de consultation, reportant du 11 au 31 octobre 2006 le dépôt des offres, puis accordant aux candidats un délai supplémentaire jusqu'au 21 décembre 2006 pour améliorer les offres initiales, faisant ainsi preuve de souplesse par rapport au calendrier initial.
89. C'est donc au 29 août 2006, date de remise du cahier de consultation aux deux candidats et point de départ du délai de dépôt des offres, et non au 4 mai 2006, date de la demande d'informations adressée par la Ville [Localité 1] à la société TDF, qu'il convient de se placer pour apprécier les délais de transmission par la société TDF des informations qu'elle détenait.
90. Pour autant, l'Autorité a à juste titre considéré que cet épisode illustrait la réticence de la société TDF à communiquer les informations en sa possession.
91. A cet égard, la société TDF ne pouvait se prévaloir de son secret industriel et commercial à l'égard de la Ville [Localité 1], dès lors que celle-ci était légalement tenue de veiller au respect de ce secret. En effet, aux termes de l'article 80 III a) du code des marchés publics, alors applicable, « [l]e pouvoir adjudicateur ne peut communiquer les renseignements dont la divulgation [' s]erait contraire à la loi, en particulier violerait le secret industriel et commercial ». De surcroît, la société TDF reconnaît qu'elle a finalement transmis à la Ville [Localité 1] tout ou partie des informations demandées par cette dernière, ce qui suffit à prouver le mal-fondé de son refus initial.
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92. La société TDF soutient qu'elle a transmis à la société towerCast des informations suffisamment détaillées et en temps utile pour lui permettre de déposer une offre.
93. En premier lieu, la société TDF fait valoir que tout candidat potentiel à un appel d'offres n'a pas un droit d'accès illimité aux informations détenues par le titulaire sortant sur les infrastructures mises en place par ce dernier.
94. Seule pourrait lui être reprochée la non-transmission d'informations strictement indispensables à la société towerCast pour répondre à l'appel d'offres. Or, l'Autorité n'aurait pas établi en quoi les informations réclamées par la société towerCast lui étaient strictement indispensables et, partant, ne caractériserait pas l'abus de position dominante qu'elle reproche à la société TDF.
95. A cet égard, s'agissant des équipements, la société TDF rappelle qu'elle a fourni le 10 octobre 2006 un état des lieux de tous les équipements qu'elle détenait sur le site de la tour Eiffel et a communiqué les 16 et 23 octobre 2006 une estimation globale de leur valeur, à l'exclusion des émetteurs que la société towerCast ne souhaitait pas reprendre.
96. Selon la société TDF, ces valorisations globales suffisaient à la société towerCast ' professionnel de la diffusion hertzienne, et par ailleurs éclairée par ses visites sur le site ' pour construire son offre, de sorte que la non-transmission d'une valorisation détaillée ne saurait lui être reprochée ; elle souligne que, dans son offre finale, la société towerCast a pris pour hypothèse un prix de reprise des actifs égal à 17 millions d'euros, ce qui montre qu'elle a pu procéder en toute connaissance de cause à sa propre évaluation du futur prix d'achat des actifs de la société TDF. Quant aux demandes de la société towerCast relatives aux marques, à l'âge des équipements, aux conditions de garantie associées aux équipements, elles étaient déraisonnables et ces informations inutiles pour établir son plan d'affaires.
97. La société TDF ajoute que c'est à tort que l'Autorité lui reproche de ne pas avoir entamé des négociations sur la cession des équipements en amont des résultats de l'appel d'offres. D'abord, de telles négociations auraient été en contradiction avec le cahier de consultation, qui prévoyait que le précédent occupant négocie de bonne foi avec le nouvel occupant la cession de certains de ses équipements dont il souhaiterait se départir, ce qui supposait de connaître le nouvel occupant. Ensuite, des négociations en amont des résultats de l'appel d'offres auraient été impossibles si d'autres opérateurs que la société towerCast avaient candidaté, la société TDF ne pouvait se voir imposer de négocier simultanément avec plusieurs interlocuteurs la cession des mêmes équipements. Enfin, la société towerCast ayant elle-même envisagé une transition de six mois avec l'ancien occupant pour assurer la continuité du service, elle n'avait pas besoin de connaître en détail les caractéristiques de chacun des actifs avant le résultat de l'appel d'offres pour donner des garanties au concédant sur le principe de continuité du service.
98. S'agissant du personnel, la société TDF fait valoir qu'elle n'était pas tenue de transmettre les informations nécessaires dans le cadre de l'obligation légale de reprise prévue à l'article L. 122-12 du code du travail, devenu article L. 1224-1 du même code, une telle obligation n'étant pas applicable en l'espèce.
99. Elle explique, que, même en cas de perte de la convention d'occupation domaniale, elle aurait continué son activité de diffusion pour ses clients, en étant hébergée sur le site de la tour Eiffel par la société towerCast, ce qui aurait nécessité la conservation de son personnel.
100. Selon la société TDF, les informations qu'elle a transmises, le 30 novembre 2006, sur le nombre de salariés employés sur la site de la tour Eiffel et la masse salariale étaient suffisantes pour permettre à la société towerCast de construire son offre. De plus, elle a encore communiqué, les 4 et 11 décembre 2006, des informations sur la nature des contrats, sur la classification des salariés au regard de la convention collective nationale des télécommunications ainsi que sur la répartition de la masse salariale selon le type d'emploi et selon le type d'activité.
101. La société TDF souligne que l'ensemble des informations ainsi transmises dépasse les standards fixés par le Conseil d'Etat concernant l'obligation d'information sur la masse salariale des salariés à reprendre, qui pèse sur les collectivités territoriales lors du renouvellement d'une délégation de service public.
102. S'agissant, enfin, des contrats de maintenance, la société TDF fait valoir, d'une part, qu'elle disposait de contrats de maintenance nationaux avec ses prestataires et non de contrats spécifiques au site de la tour Eiffel. D'autre part, la société towerCast ayant finalement fait le choix de recourir à deux spécialistes, les sociétés Ginger et Forclum, avec lesquelles elle est en relation depuis dix ans, elle n'aurait jamais relancé la société TDF pour obtenir le nom de ses prestataires.
103. L'affirmation que des informations précises sur les contrats de maintenance étaient indispensables ne serait donc pas démontrée.
104. En deuxième lieu, la société TDF fait valoir que l'écoulement d'un certain délai entre la date de la demande d'information et la réponse, comme le fait qu'elle aurait pu répondre plus vite, ne suffisent pas à établir l'existence de man'uvres dilatoires, seul important de savoir si la société towerCast a reçu les informations suffisamment tôt pour pouvoir les exploiter utilement dans sa réponse à l'appel d'offres.
105. Elle affirme que tel a bien été le cas, ainsi que l'ont jugé les juridictions administratives, soulignant que les informations sur les équipements sont parvenues à la société towerCast, au plus tard, près de deux mois avant l'offre ultime de la société towerCast, le 21 décembre 2006, et que celles sur les salariés lui sont parvenues, au plus tard, près de trois semaines avant cette même date.
106. Dès lors, les prétendues man'uvres dilatoires de la société TDF n'auraient produit aucun effet d'éviction.
107. En dernier lieu, la société TDF conteste avoir fourni à la société towerCast un montant surévalué et non vérifiable de ses actifs.
108. Elle soutient d'abord que l'expertise commandée par les services d'enquête était viciée dès l'origine non seulement par sa tardiveté, mais également par l'invitation faite à l'expert d'opérer une redéfinition à la baisse de l'étendue des actifs valorisés.
109. Selon TDF, c'est la société towerCast elle-même qui avait défini le périmètre des actifs qu'elle souhaitait reprendre et dont elle demandait la valorisation. Au surplus, une telle réduction du périmètre de cession à la société towerCast reviendrait à considérer que la société TDF aurait dû soit démonter certains actifs, soit les abandonner gratuitement à la Ville [Localité 1], plutôt que de chercher à négocier leur reprise, hypothèses dont l'Autorité elle-même a souligné le caractère irrationnel d'un point de vue économique.
110. Ensuite, se fondant sur les notes économique du Cabinet Tera, la société TDF fait valoir que, en raisonnant à périmètre constant, et après la rectification des nombreuses erreurs dont l'expertise est entachée, il apparaît que l'évaluation réalisée par l'expert se situe dans une fourchette raisonnable, par rapport à la valorisation de 27 millions à laquelle elle avait procédé en 2006, et exclusive de toute caractérisation d'un abus.
111. Enfin, la société TDF argue de ce que la société towerCast s'étant fondée sur une hypothèse de reprise des actifs d'un montant de 17 millions d'euros, le débat sur le bien-fondé de la valorisation à laquelle elle-même avait procédé en 2006 est sans objet. Elle ajoute que l'examen de l'offre de la société towerCast démontre que, même si cette société avait acquis l'ensemble des actifs pour un prix égal à zéro, le montant de la redevance qu'elle aurait offert à la Ville [Localité 1] serait demeuré très largement inférieur à celui proposé par la société TDF.
112. Les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure développent les mêmes moyens d'annulation du grief n° 1.
113. La société towerCast répond que la chronologie relatée dans la notification des griefs, la synthèse du rapport et la décision attaquée permettent de constater qu'elle n'a jamais obtenu dans les délais les informations complètes et nécessaires à la formation de son offre.
114. S'agissant de l'évaluation des actifs présents sur le site de la tour Eiffel, elle fait valoir que la société TDF ne produit aucun élément de preuve permettant d'établir que la valorisation à 27 millions d'euros était correcte.
115. Selon la société towerCast, c'est à juste titre que l'expertise a retenu un périmètre de cession circonscrit aux seules installations indispensables à la continuité du service, et à ce titre conforme au cahier de consultation de la Ville [Localité 1], alors que le périmètre choisi par la société TDF dans la valorisation qu'elle a effectuée en 2006 incluait des immobilisations qu'un repreneur n'aurait eu ni l'intention d'utiliser ni l'obligation d'acheter.
116. Elle objecte qu'est fallacieux l'argument de la société TDF selon lequel l'Autorité n'aurait pas démontré l'effet anticoncurrentiel de la surévaluation des actifs, au motif que la société towerCast aurait été en mesure de procéder à sa propre évaluation. Selon elle en effet, la question est de savoir si elle a disposé des informations complètes et nécessaires pour adapter son offre et tenter de remporter le marché dans des conditions loyales, ce qui n'a pas été le cas.
117. L'Autorité répond, en premier lieu, que la notion d'« exploitation abusive d'une position dominante » est une notion objective, de sorte qu'elle n'était pas tenue de démontrer l'existence d'une intention anticoncurrentielle chez la société TDF, raison pour laquelle elle n'a pas qualifié les pratiques en cause de « man'uvres dilatoires », et s'est contentée d'établir le caractère tardif et insuffisant des informations transmises à la société towerCast.
118. S'agissant des équipements, l'Autorité fait valoir que les concurrents de la société TDF devaient donner des garanties au concédant sur leur capacité à assurer la continuité du service, ce qui supposait une connaissance précise des actifs qu'ils seraient amenés à acquérir. Elle précise qu'elle n'a pas reproché à la société TDF de ne pas avoir transmis toutes les informations en sa possession, mais seulement de ne pas avoir transmis la liste complète des équipements présents sur le site, la liste complète des équipements dont la société TDF envisageait la cession et l'évaluation décomposée de la valeur des équipements dont la cession était envisagée. Elle ajoute qu'il aurait été cohérent qu'une négociation sur les prix d'acquisition des équipements pût s'engager avant le résultat de l'appel d'offres, compte tenu de l'exigence de continuité du service.
119. Selon l'Autorité, la société TDF ne saurait justifier le caractère incomplet des informations transmises par le fait qu'une période transitoire aurait en tout état de cause été nécessaire après l'appel d'offres et aurait été mise à profit pour négocier les conditions de reprise des actifs de la société TDF par le nouveau concessionnaire. En effet, une telle période de transition postérieurement à l'appel d'offres, outre qu'elle ne reposait sur aucune base légale, ne remettait pas en cause la nécessité pour la société towerCast d'avoir accès aux informations nécessaires pour construire son offre.
120. En ce qui concerne plus particulièrement la valorisation des actifs de 27 millions transmise par la société TDF, l'Autorité considère que la société TDF n'est pas fondée à se prévaloir d'un lancement prétendument tardif de l'expertise dès lors qu'elle a forcément réuni les informations nécessaires à la valorisation de ses actifs pour l'étude qu'elle a faite réaliser pour son propre compte en février 2008 et que, par suite, elle ne pouvait exclure qu'une expertise soit diligentée par l'Autorité.
121. Au sujet du périmètre des actifs à valoriser, l'Autorité fait valoir, d'une part, que la société TDF ne pouvait exiger qu'un nouvel entrant lui rachète l'intégralité des actifs qu'elle détenait sur le site de la tour Eiffel depuis soixante ans, y compris ceux obsolètes ou n'étant pas nécessaire à la continuité du service. D'autre part, elle conteste que l'expert ait exclu des actifs que la société towerCast aurait revendiqué dans le cadre de la procédure d'appel d'offres. Dès lors, ce serait à bon droit que l'expert a écarté les immobilisations non indispensables à la continuité du service par un éventuel successeur de la société TDF, ainsi que les immobilisations hors périmètres, à savoir les équipements liés à l'activité d'émission proprement dite qui ne faisaient pas partie de la mission du repreneur.
122. S'agissant du personnel employé sur le site par la société TDF, l'Autorité fait valoir qu'outre le fait que la Ville [Localité 1] avait estimé applicable l'article L. 122-12 du code du travail, la société TDF elle-même n'en avait pas expressément exclu l'application, se bornant à émettre tardivement des doutes sur son application. Elle considère qu'en tout état de cause, la société towerCast avait besoin de connaître la liste anonymisée des personnels susceptibles d'être repris, ainsi que leur emploi, leur qualification et leur rémunération, afin de pouvoir appréhender son organisation et ses coûts futurs en personnel. Or la société TDF aurait fourni des informations à la fois erronées, tardives et incomplètes.
123. S'agissant des contrats de maintenance, l'Autorité fait valoir qu'il ressort du courrier de la société TDF à la Ville [Localité 1] en date du 10 octobre 2006 que certains contrats de maintenance n'étaient pas des contrats nationaux. Elle ajoute que, même si les contrats de maintenance n'auraient pas été transmis de plein droit à un nouveau concessionnaire, la communication d'information sur ces contrats n'en restait pas moins nécessaire.
124. En second lieu, concernant les effets des pratiques, l'Autorité rappelle qu'aux fins de l'établissement d'une violation des articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce, il n'est pas nécessaire de démontrer que le comportement abusif de l'entreprise en position dominante a eu un effet anticoncurrentiel concret sur les marchés concernés ; il suffit de démontrer que le comportement de l'entreprise en position dominante tend à restreindre la concurrence.
125. Elle considère que cette preuve est rapportée, dès lors que la fourniture tardive d'informations partielles et erronées par la société TDF a renforcé l'asymétrie d'informations entre elle et ses concurrents en ne permettant pas à ces derniers d'apprécier, d'un point de vue tant technique que tarifaire, leurs coûts d'investissement et d'exploitation. Le montant de la redevance proposée par la société towerCast dans ses offres aurait nécessairement intégré une prime de risque lié au contexte de forte incertitude dans lequel elle se trouvait placée.
126. L'Autorité objecte que, dans la mesure où l'offre de la société TDF est endogène aux pratiques, elle ne peut constituer un contrefactuel fiable pour apprécier l'effet des pratiques sur tout concurrent potentiel, de sorte que l'argument tiré de ce que la redevance proposée par la société towerCast dans son offre était inférieure à celle proposée par la société TDF dans la sienne n'est pas recevable. Elle ajoute que le montant de la redevance n'était pas l'unique critère à l'aune duquel la Ville [Localité 1] a opéré son choix, que l'autre critère que constituait le calendrier d'aménagement et de mise en service de l'équipement dépendait clairement des informations à la disposition des candidats concernant la nature et la valeur des équipements en place, et qu'ainsi, le comportement de la société TDF, notamment le fait de fournir un montant non vérifiable et largement surévalué de ses actifs, à céder a eu pour effet, au moins potentiel, d'empêcher ses concurrents de pouvoir déposer une offre remplissant les critères figurant dans le calendrier de consultation, et notamment celui du calendrier d'aménagement et de mise en service.
127. À titre liminaire, il convient de rappeler que la notion d'« exploitation abusive » est une notion objective qui vise les comportements d'une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d'un marché où, à la suite précisément de la présence de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou des services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien du degré de concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence (TUE, arrêt du 29 mars 2012, Telefónica et Telefónica de España/Commission, T-336/07, point 170 ; CJUE, arrêts du 6 décembre 2012, AstraZeneca/Commission, C-457/10 P, point 74, et du 16 juillet 2015, Huawei Technologies, C-170/13, point 45).
128. S'il est vrai que la constatation de l'existence d'une position dominante n'implique par elle-même aucun reproche à l'égard de l'entreprise concernée, le comportement d'une telle entreprise, du fait que la structure concurrentielle du marché est déjà affaiblie, peut donner lieu à une exploitation abusive de sa position dominante (CJUE, arrêt Post Danmark, précité, point 70).
129. C'est pourquoi pèse sur l'entreprise qui détient une position dominante la responsabilité particulière de ne pas porter atteinte par son comportement à une concurrence effective et non faussée dans le marché commun (TUE, arrêts Telefónica et Telefónica de España/Commission, précité, point 171, et du 17 décembre 2015, Orange Polska/Commission, T-486/11, point 177 ; CJUE, arrêts du 2 avril 2009, France Télécom/Commission, C-202/07 P, point 105 ; Post Danmark, précité, point 71, et du 6 septembre 2017, Intel/Commission, C-413/14 P, point 135).
130. De plus, dans la mesure où la structure concurrentielle du marché est déjà affaiblie par la présence de l'entreprise dominante, toute restriction supplémentaire de cette structure concurrentielle est susceptible de constituer une exploitation abusive de position dominante (TUE, arrêt du 12 juin 2014, Intel/Commission, T-286/09, point 116 ; CJUE, arrêt Post Danmark, précité, point 72).
131. A cet égard, si tout opérateur économique, y compris lorsqu'il jouit d'une position dominante, a en principe droit au respect de son secret des affaires, en l'espèce, la rétention par la société TDF des informations techniques et financières relatives au site de la tour Eiffel, qu'elle seule détenait, aurait empêché tout autre opérateur de la concurrencer utilement à l'occasion de l'appel public à la concurrence pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale.
132. Dans la mesure où la communication de ces informations par la société TDF à ses concurrents éventuels était l'unique moyen d'ouvrir ce marché, tout refus de sa part de les transmettre, fussent-elles couvertes par le secret des affaires, aurait constitué une exploitation abusive de sa position dominante. Au demeurant, la société TDF a implicitement admis que pesait sur elle une obligation de communication : elle a en effet transmis un certain nombre d'informations que, dans un autre contexte, elle aurait pu refuser de communiquer en se prévalant de la protection du secret des affaires.
133. La cour ajoute surabondamment que la société TDF n'a jamais démontré que ladite communication lui a ' pour les informations effectivement transmises ' ou lui aurait ' pour les informations non transmises ' causé un préjudice ou permis le dévoilement d'informations sensibles pour elle.
134. Dès lors, il convient de vérifier si les informations transmises par la société TDF l'ont été dans un délai permettant le maintien du degré de concurrence existant encore sur le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la convention d'occupation domaniale et, à l'inverse, si la rétention d'autres éléments d'information, à la supposer établie, a affaibli ledit degré de concurrence.
135. En premier lieu, la cour juge que l'ensemble des informations sollicitées par la société towerCast lui étaient indispensables pour construire l'offre la plus compétitive possible.
136. Tel était d'abord le cas des informations sur les équipements tant d'environnement (ventilation/climatisation, groupes électrogènes, transformateurs, monte charges, caméras de surveillance, détection incendie) que de diffusion (aériens, feeders, multiplexeurs) installés sur le site, leurs spécificités techniques et leur valorisation.
137. Ainsi que le fait justement valoir l'Autorité, la construction d'un plan d'investissement et d'un compte de résultat prévisionnel, sans lesquels la société towerCast n'aurait pas été en mesure de faire une offre précise à la Ville [Localité 1], exigeait que cette société disposât d'une connaissance fine de l'ensemble des équipements nécessaires à la continuation du service, au cas où elle serait attributaire de la concession domaniale.
138. Le coût du rachat de ces équipements, ou de leur location, ou encore de la conclusion d'un contrat de prestation de services avec la société TDF, aurait représenté un poste financier très important, que la société towerCast avait besoin d'évaluer le plus précisément possible. A cet égard, la communication d'une valeur globale des équipements ne pouvait satisfaire la société towerCast, qui avait besoin de vérifier, pour chaque matériel, le sérieux de la valorisation retenue par la société TDF.
139. Les caractéristiques des équipements, et notamment leur âge, étaient également indispensables, ne serait-ce que pour permettre à la société towerCast de déterminer les coûts de leur maintenance et les délais dans lesquels ils devraient être remplacés.
140. Sans des informations très précises sur tous ces points, la société towerCast se trouvait en difficulté pour calculer la redevance à proposer à la Ville [Localité 1], étant dans l'impossibilité d'apprécier finement quels coûts elle devrait supporter pendant la durée de la concession.
141. La cour ajoute que l'affirmation des sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure, selon laquelle des informations aussi détaillées étaient inutiles à la société towerCast, sont contredites par l'insistance avec laquelle, dans ses rapports avec la Ville [Localité 1], la société TDF a souligné sa parfaite connaissance des équipements présents sur le site de la tour Eiffel.
142. Quant à l'argument selon lequel la société towerCast ayant elle-même envisagé une transition de six mois avec l'ancien occupant pour assurer la continuité du service, elle n'avait pas besoin de connaître en détail les caractéristiques de chacun des actifs avant le résultat de l'appel d'offres pour donner des garanties au concédant sur le principe de continuité du service, il ne peut qu'être écarté. En effet, les informations étaient indispensables à la société towerCast avant le dépôt de son offre à la fois pour évaluer ses coûts, évaluation sans laquelle elle ne pouvait proposer une offre compétitive, et démontrer à la Ville [Localité 1], qu'elle était apte à assurer la continuité du service, garantie sans laquelle ses chances d'être choisie par le concédant étaient nulles.
143. Ensuite, la société towerCast avait également besoin des informations relatives au personnel employé par la société TDF sur le site de la tour Eiffel.
144. Les conditions d'application de l'article L. 122-12 du code du travail (devenu article L. 1224-1 du même code), aux termes duquel « [s]'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise », se seraient trouvées réunies au cas où la société towerCast serait devenue le nouvel occupant du site de la tour Eiffel.
145. En effet, il résulte de cet article que les contrats de travail sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise, et que constitue une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre, que celle ci soit principale ou accessoire.
146. Tel était bien le cas de l'ensemble organisé constitué par la société TDF pour l'exploitation du site de la tour Eiffel.
147. Si la société TDF a soutenu, devant l'Autorité et dans le cadre du présent recours, que, même en cas de perte de la convention d'occupation domaniale, elle aurait conservé son personnel aux fins de poursuivre son activité de diffusion pour ses clients, en étant hébergée sur le site de la tour Eiffel par la société towerCast, force est de constater qu'elle n'a pas été aussi affirmative au cours de la procédure d'appel d'offres, n'excluant pas l'application de l'article L. 122-12 du code du travail.
148. A cet égard, il n'est pas vraisemblable que la société TDF, qui, en 2006, outre sa qualité de concessionnaire du site de la tour Eiffel, était déjà le diffuseur de vingt-huit des trente radios alors diffusées depuis ce site, aurait eu besoin de la totalité du personnel qu'elle employait après la perte de la concession.
149. Quoi qu'il en soit, la société towerCast était tenue d'envisager l'hypothèse, hautement plausible, qu'au cas où elle deviendrait le nouveau concessionnaire, elle soit tenue de reprendre tout ou partie des salariés jusque-là employés par la société TDF. La Ville [Localité 1] elle-même l'y invitait, l'interrogeant, par courrier du 14 novembre 2006, sur la politique envisagée de reprise des salariés de l'ancien concessionnaire.
150. Subsidiairement, à supposer même que l'article L. 122-12 du code du travail fût inapplicable en l'espèce, la société towerCast n'en avait pas moins besoin des mêmes informations.
151. En effet, afin de pouvoir bâtir l'offre la plus compétitive, elle devait impérativement être en mesure de déterminer précisément les moyens notamment humains qu'elle devrait affecter à l'exploitation du site de la tour Eiffel, et leur coût. D'où la nécessité d'obtenir communication de la masse salariale par catégories et par âges, les types d'emplois, leur classification dans la convention nationale des télécommunications, la répartition entre les contrats à durée déterminée ou indéterminée, à temps plein ou à temps partiel, etc.
152. Le caractère indispensable de ces informations pour tout nouvel occupant résultait encore de l'obligation pesant sur ce dernier de poursuivre, sans solution de continuité, l'exploitation du site. Il lui fallait donc connaître avec la plus grande précision le nombre et les fonctions de chacun des salariés employés par l'ancien occupant ' TDF ' afin que, dans l'hypothèse où ce dernier aurait conservé à son service l'ensemble de son personnel affecté au site de la tour Eiffel, il puisse recruter de nouveaux salariés jouissant de toutes les compétences requises, ce qui supposait évidemment d'obtenir ces informations plusieurs mois avant l'entrée en vigueur de la nouvelle convention d'occupation domaniale.
153. En tout état de cause, les informations sollicitées par la société towerCast lui étaient indispensables afin de pouvoir répondre aux questions que lui avaient posées la Ville [Localité 1], par courrier du 14 novembre 2006, et qui concernaient notamment la nature des contrats de travail des personnes qui seraient employées sur le site, la politique envisagée de reprise des salariés de l'ancien concessionnaire, les garanties apportées pour assurer la continuité du service et le degré de recours à la sous-traitance. Il doit être souligné que ces questions ont été posées à un moment où les services de la Ville [Localité 1] examinaient les offres déposées le 31 octobre 2006 par les sociétés TDF et towerCast, de sorte qu'une absence de réponse ou des réponses incomplètes ne pouvait qu'affaiblir l'offre du candidat.
154. Enfin, les informations relatives aux contrats de maintenance des équipements sollicitées par la société towerCast lui étaient tout aussi nécessaires.
155. La nécessité impérieuse, pour tout successeur de la société TDF sur le site de la tour Eiffel, d'assurer la continuité du service ' ainsi que de justifier dans son offre de son aptitude à le faire ', lui imposait d'organiser la mise en place d'un système de maintenance dès le premier jour de la concession.
156. Or il est constant que le site de la tour Eiffel présente de nombreuses particularités, au point qu'un certain nombre d'équipements ont été conçus spécifiquement pour lui. Dans ces conditions, il était à l'évidence important pour tout candidat de pouvoir prendre attache avec les entreprises chargées par la société TDF de la maintenance de ses équipements, qui étaient celles qui connaissaient le mieux les besoins en maintenance du site, peu important que les contrats de maintenance passés par la société TDF fussent des contrats nationaux nationaux et non des contrats spécifiques au site de la tour Eiffel.
157. En outre, ainsi que le fait valoir l'Autorité, il ressortait des propres déclarations de la société TDF devant les enquêteurs que les entreprises de maintenance pouvaient avoir besoin d'une « habilitation en terme de défense » pour intervenir sur le site (cote 2051, 07/0018M VNC) ' hypothèse également prévue dans un courrier de la société TDF à la Ville [Localité 1] en date du 13 décembre 2006 (cote 9304, 07/0017F) ' ce qui était de nature à contraindre le nouvel occupant de conserver les mêmes prestataires, au moins dans un premier temps.
158. En deuxième lieu, force est de constater que les informations transmises par la société TDF sont restées incomplètes.
159. S'agissant d'abord des équipements présents sur le site de la tour Eiffel, la société TDF a, le 10 octobre 2006, adressé à la société towerCast un courrier dont, notamment, l'annexe 2 comportait « à titre purement informatif » une liste des équipements sensiblement identique à la liste de six pages et 91 lignes qui avait été communiquée à la Ville [Localité 1] le 8 juin 2006, mais jamais été transmise par celle-ci à la société towerCast.
160. Or la liste communiquée à la Ville [Localité 1] le 8 juin 2006 était, selon les propres termes de la société TDF, une liste indicative et elle ne comportait aucun détail sur les caractéristiques techniques des équipements recensés, et aucun élément de valorisation.
161. Quant aux informations sur la valorisation des équipements présents sur le site de la tour Eiffel, la société TDF a fourni, par courriers des 16 octobre et 23 octobre 2006, adressés à la Ville [Localité 1] et transmis par celle-ci à la société towerCast, une évaluation globale de 15 millions d'euros des équipements d'environnement (ventilation/climatisation, groupes électrogènes, transformateurs, monte charges, caméras de surveillance, détection incendie), et une évaluation globale de 12 millions d'euros des équipements de diffusion (aériens, feeders, multiplexeurs), sans aucun détail permettant à la société towerCast de vérifier le bien-fondé de ces évaluations ni de connaître l'estimation individualisée de chaque équipement.
162. De surcroît, dans un courrier du 30 novembre 2006 à la société towerCast, la société TDF a indiqué qu'il n'y avait pas identité entre les biens figurant dans la liste de l'annexe 2 au courrier du 10 octobre 2006, et ceux intégrés dans les valorisations de, respectivement, 15 et 12 millions d'euros, sans expliciter ces différences, rendant plus difficile encore l'exploitation des informations transmises.
163. Finalement, l'information la plus complète fournie par la société TDF l'a été par courrier du 21 décembre 2006 à la Ville [Localité 1]. Ainsi que l'Autorité l'a justement relevé au point 423 de la décision attaquée, ce document ne comportait aucune liste exhaustive des actifs concernés, ni d'indication de nature à éclairer la valorisation de chacun de ces équipements. Au surplus, cette information, parvenue trop tard à la Ville [Localité 1], n'a pas pu être portée à la connaissance de la société towerCast avant le dépôt de son offre définitive.
164. Pourtant, ainsi que l'a souligné l'Autorité, au point 420 de la décision attaquée, la société TDF disposait, pour ses besoins propres, d'un document comptable détaillé de 1028 lignes et a indiqué, dans sa note communiquée le 22 mars 2007 à l'Autorité, avoir utilisé pour son évaluation « une extraction de toutes les lignes de biens comptables répertoriées dans la base des immobilisations sur l'IG [Implantation Géographique] de la Tour Eiffel, complétés par les biens dûments immobilisables », ce qui suffit à démontrer qu'elle détenait des informations bien plus précises que celles qu'elle a communiquées à la Ville [Localité 1] et à la société towerCast, s'agissant tant de la liste et des caractéristiques des équipements que de la valorisation de chacun d'entre eux.
165. S'agissant, ensuite, des informations sur le personnel, l'Autorité relève à juste titre, au point 438 de la décision attaquée, que la société towerCast n'a jamais obtenu une liste exhaustive non nominative des emplois localisés sur le site de la tour Eiffel, alors même que cette information était disponible ; en effet, l'information la plus détaillée sur ce point, à savoir celle communiquée le 11 décembre 2006, n'était, aux dires même de la société TDF qu'« une première approximation qui demanderait à être affinée » du nombre de salariés et de la masse salariale par domaine d'activité.
166. En outre, ainsi que l'a souligné l'Autorité au point 435 de la décision attaquée, les informations transmises par la société TDF étaient contradictoires et, partant, sujettes à caution : dans son courrier du 10 octobre 2006, la société TDF indiquait à la société towerCast qu'elle employait une quarantaine de personnes sur le site de la tour Eiffel, tandis que, dans son offre du 31 octobre 2006 adressée à la Ville [Localité 1], elle faisait état de trente et une personnes employées à temps plein.
167. La circonstance que les informations effectivement transmises auraient dépassé les standards fixés par le Conseil d'Etat concernant l'obligation d'information sur la masse salariale des salariés à reprendre, qui pèse sur les collectivités territoriales lors du renouvellement d'une délégation de service public, n'est pas de nature à démontrer qu'elles suffisaient à la société towerCast pour construire son offre dans le contexte particulier d'une mise en concurrence l'opposant à l'entreprise en position dominante.
168. Enfin, s'agissant des contrats de maintenance, il est constant que la société TDF n'a jamais communiqué à la société towerCast le nom des entreprises chargées de la maintenance des équipements, empêchant cette dernière de prendre attache avec elles pour apprécier les modalités de conclusion de contrats de maintenance identiques ou similaires à ceux que la société TDF avait passés avec elles et évaluer les coûts afférents.
169. La société TDF ne saurait se prévaloir de ce que la société towerCast aurait finalement fait le choix de recourir à deux prestataires avec lesquelles elle était en relation depuis dix ans, alors que son refus de communiquer toute information sur ses propres prestataires de maintenance peut suffire à expliquer un tel choix.
170. En troisième lieu, la cour constate que les informations effectivement transmises par la société TDF l'ont été avec beaucoup de retard.
171. La cour rappelle, à titre liminaire, qu'il s'est écoulé moins de quatre mois entre la remise du cahier de consultation aux deux candidats, le 29 août 2006, et la date ultime qui leur avait été accordé pour améliorer leur offre, le 21 décembre 2006.
172. La brièveté du délai dont ont bénéficié les candidats, délai dont la Ville [Localité 1] a reconnu qu'il était particulièrement court au regard des enjeux techniques et de la complexité du dossier, a accentué l'inégalité entre les deux candidats, puisque la société TDF connaissait parfaitement le site, dont les nombreuses spécificités ont été rappelées, et les équipements qui y étaient installé, tandis que la société towerCast les a découverts pour la première fois lors de la visite du 21 septembre 2006, la circonstance que cette société diffusait déjà deux radios à partir d'un emplacement réduit situé en-dessous du 3ème étage de la tour Eiffel, n'ayant pas été de nature à lui donner la connaissance du site tout entier, et notamment des locaux semi-enterrés au pied du pilier sud qui en constituent la partie essentielle.
173. Pesait donc sur la société TDF, en position dominante sur le marché pertinent, la responsabilité particulière de communiquer avec la plus grande diligence les informations indispensables à la société towerCast pour lui permettre de construire une offre concurrentielle.
174. Force est de constater que la société towerCast a eu le plus grand mal à les obtenir, malgré le soutien de la Ville [Localité 1], alors même que la société TDF disposait des informations réclamées et pouvaient les communiquer aussitôt qu'elles lui étaient demandées.
175. A cet égard, est mal fondé l'argument selon lequel le refus de la société TDF de répondre directement aux demandes d'informations de la société towerCast était justifié par l'obligation pour la société TDF de respecter les règles de concurrence et le principe d'égalité entre les candidats. En effet, d'une part, la prohibition des échanges entre concurrents ne s'appliquait évidemment pas à la communication d'informations qui ne dévoilaient pas la stratégie de la société TDF dans le cadre de l'appel d'offres et sans lesquelles les candidats à l'appel d'offres n'étaient pas en mesure de concurrencer utilement la société TDF. D'autre part, la Ville [Localité 1] avait expressément invité la société TDF à répondre directement à la société towerCast, dont la société TDF ne pouvait ignorer, par ses échanges avec l'autorité délégante, qu'elle était sa seule concurrente.
176. S'agissant, tout d'abord, des équipements, le cahier de consultation ne renseignait pas la société towerCast de façon complète sur la liste des équipements présents sur le site, leurs caractéristiques techniques et leur valorisation, seule la liste incomplète d'une page fournie par la société TDF à la Ville [Localité 1] par courrier du 9 mai 2006 y ayant été annexée.
177. Certes, la Ville [Localité 1] a fait le choix de ne pas annexer audit cahier de consultation la liste de six pages et 91 lignes ' liste au demeurant incomplète ', que la société TDF lui avait communiquée par courrier du 8 juin 2006. Mais force est de constater que la raison de cette omission ressort des termes mêmes de ce courrier : la société TDF y précise que ladite liste est destinée « aux seules personnes de la Ville ayant besoin de la connaître », que les informations qu'elle contient constituent « des éléments stratégiques de [son] fonds de commerce ['] voire plus » et relèvent « du strict secret des affaires », et en interdit toute copie et/ou toute transmission.
178. Finalement, alors que, par courrier du 13 septembre 2006, la société towerCast a réclamé à la société TDF toutes les informations sur les équipements et que, par courriers des 28 septembre et 5 octobre 2006, la Ville [Localité 1] a demandé à la société TDF de communiquer à la société towerCast les informations sollicitées par cette dernière, ce n'est, ainsi qu'il a déjà été dit, que le 10 octobre 2006, vingt et un jours avant la date limite de dépôt des offres initiales, que la société TDF a adressé à la société towerCast une liste des équipements plus détaillée que celle annexée au cahier de consultation, mais néanmoins incomplète.
179. Quant à l'évaluation globale des équipements, elle n'a été fournie par la société TDF que par deux courriers adressés à la Ville [Localité 1] les 16 et 23 octobre 2006, et transmis par celle-ci à la société towerCast les 23 et 26 octobre suivant, soit, respectivement, huit et cinq jours avant la date limite de dépôt des offres initiales.
180. Enfin, le courrier transmettant l'information la plus développée ' quoique toujours incomplète ' sur les équipements, adressé à la Ville [Localité 1] le 21 décembre 2006, jour même du dépôt des offres définitives, n'a même pas pu être communiqué à la société towerCast.
181. Pourtant, l'ensemble de ces informations était disponible depuis le premier jour de la procédure d'appel d'offres et leur communication sans délai n'aurait représenté aucun effort particulier pour la société TDF.
182. S'agissant des informations sur le personnel employé par la société TDF sur le site de la tour Eiffel, malgré une première demande d'information de la société towerCast, par courrier du 13 septembre 2006 adressé directement à la société TDF, demande relayée par un courrier de la Ville[Localité 1] du 28 septembre 2006, ce n'est que le 10 octobre 2006, vingt et un jour avant la date limite de dépôt des offres initiales, que la société TDF a fourni quelques éléments de réponse.
183. Certes, la société TDF a répondu dès le 30 novembre 2006 à une nouvelle demande d'informations que la société towerCast lui avait adressée par courrier du 23 novembre 2006, mais sa réponse a été jugé à ce point insuffisante par la Ville [Localité 1] que, par courriers des 1er et 8 décembre 2006, celle-ci lui a demandé de lui adresser, d'abord, les informations demandées par la société towerCast au sujet des personnels employés par la société TDF pouvant être transférés, en particulier la masse salariale par catégories et par âges, ainsi que la répartition entre les contrats à durée déterminée ou indéterminée, ensuite, pour chacune des activités de diffusion et d'hébergement développées sur le site, les effectifs salariés et la masse salariale chargée non environnée par catégorie d'emplois (agents de contrôle de sécurité, techniciens, etc.) ainsi que leur classification CCNT. Les réponses de la société TDF en date des 5 et 11 décembre 2006, seront transmises à la société towerCast le jour même de leur réception, soit, respectivement, seize et dix jours avant le 21 décembre 2006, date du dépôt des offres définitives.
184. Là encore, il n'est pas contesté que la société TDF disposait d'emblée de l'ensemble de ces informations.
185. Il résulte donc du rappel de la chronologie des échanges qui précède que la société TDF n'a transmis qu'avec retard des informations dont elle disposait avant même l'appel d'offres et qui étaient indispensables pour permettre à la société towerCast de bâtir son offre.
186. En dernier lieu, l'incomplétude des informations transmises par TDF sur des sujets techniques et de coûts n'a pu que gêner la société towerCast dans la construction de son offre.
187. S'agissant, en particulier, des actifs présents sur le site de la tour Eiffel, à supposer même que leur évaluation à 27 millions d'euros transmise par la société TDF soit exacte, la société towerCast n'a pas été placée en mesure d'apprécier quels équipements elle reprendrait, et pour quel coût unitaire, faute d'une liste exhaustive des équipements et d'une évaluation individualisée de chacun d'eux. Il convient d'ajouter que la seule comparaison entre la liste de 91 lignes figurant en annexe 2 au courrier de la société TDF du 10 octobre 2006, qui est la plus complète fournie à la société towerCast, et celle de 1028 lignes que la société TDF a produite, une fois qu'elle a gagné le marché, dans le cadre de l'enquête menée par les services de l'instruction afin de justifier son évaluation de 27 millions d'euros, suffit à démontrer la légitimité des doutes de la société towerCast quant à cette évaluation, dont la société TDF admet qu'elle ne correspondait pas à la valeur des seuls équipements portés à sa connaissance.
188. Ainsi que le fait justement valoir l'Autorité, les interrogations persistantes sur les coûts d'investissement et d'exploitation que la société towerCast aurait à supporter si elle remportait l'appel d'offres ne pouvait que l'obliger à intégrer une prime de risque dans le montant de la redevance proposée à la Ville [Localité 1], ce qui s'est répercuté sur sa compétitivité.
189. Par ailleurs, l'incertitude où s'est trouvée la société towerCast en raison de ce manque d'informations, s'est traduite dans son offre déposée le 31 octobre 2006 : six simulations en fonction des différentes hypothèses de prix d'acquisition des équipements de la société TDF y sont envisagées. Dans son offre définitive déposée le 21 décembre 2006, elle a encore dû envisager divers scénarios.
190. Or, une telle présentation n'a pu qu'affaiblir les offres successives de la société towerCast aux yeux de la Ville [Localité 1], en ce qu'elle révélait une moindre maîtrise des questions techniques et financières, comparé à la société TDF.
191. Cette asymétrie dans la détention des informations, à soi seule préjudiciable à la compétitivité de l'offre de la société towerCast, s'est trouvée aggravée par le retard avec lequel cette société a reçu les informations qui lui ont été transmises.
192. Ainsi qu'il résulte des constatations qui précèdent, la société towerCast n'a reçu les informations transmises par TDF sur les équipements que, respectivement, vingt et un jours avant la date limite de dépôt des offres initiales, en ce qui concerne la liste ' d'ailleurs incomplète ' des équipements, et huit et cinq jours avant cette même date, en ce qui concerne l'évaluation ' non ventilée ' des équipements. Quant aux informations sur le personnel, un certain nombre d'informations lui ont été transmises vingt et un jours avant la date limite de dépôt des offres initiales.
193. S'agissant de prendre en compte et d'intégrer dans la construction de son offre initiale des informations relatives à des postes de coûts d'une particulière importance, la société towerCast a été nécessairement handicapée par des délais aussi courts.
194. Ces délais doivent de surcroît être rapprochés du délai dont a pleinement bénéficié la société TDF, soit deux mois ' du 29 août au 31 octobre 2006.
195. Le délai supplémentaire dont ont bénéficié les candidats jusqu'au 21 décembre 2006 pour améliorer leur offre initiale n'a pas pu effacer le handicap qu'a subi la société towerCast lors du dépôt de l'offre initiale, ne serait-ce que parce que, s'agissant des informations sur le personnel, la société towerCast n'a reçue des informations complémentaires ' mais toujours incomplètes ' que, respectivement, seize et dix jours avant le 21 décembre 2006, date du dépôt des offres définitives.
196. Il est indifférent que la société towerCast ait été en mesure de déposer une offre, le 31 octobre 2006, puis une offre améliorée, le 21 décembre 2006, la question étant de savoir si elle disposait de toutes les informations qui lui étaient nécessaires pour proposer l'offre la plus compétitive qu'elle était capable de produire. Tel n'a pas été le cas, pour les raisons qui viennent d'être exposées.
197. Il s'ensuit qu'en n'ayant pas communiqué sans délai l'ensemble des informations indispensables à la société towerCast pour construire l'offre la plus compétitive, la société TDF a amélioré sa position concurrentielle sur le marché de l'appel d'offres pour le renouvellement de la concession d'occupation domaniale. Ce faisant, elle a encore affaibli la structure de concurrence sur ce marché, sur lequel elle détenait une position dominante, et ce par des moyens autres que ceux qui relèvent d'une concurrence par les mérites.
198. Ce constat suffit à établir la réalité du grief n° 1, sans qu'il soit nécessaire de démontrer que, à défaut d'une communication sans délai de l'ensemble des informations nécessaires à la société towerCast, l'offre de cette dernière aurait été choisie par la Ville [Localité 1].
199. Il résulte des considérations qui précèdent que le bien-fondé du grief n° 1 est établi, quand bien même la valorisation des actifs à 27 millions d'euros, transmise par la société TDF en octobre 2006, serait exacte.
200. Dès lors que les moyens des sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure concernant la mise en cause par l'Autorité de cette évaluation, même à les supposer fondés, ne sont pas de nature à entraîner l'annulation de la décision attaquée, la cour ne les examinera pas.
201. Les demandes d'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle a dit établi le grief n° 1 seront donc rejetées.
C. Sur les moyens propres au grief n° 2
202. A titre liminaire, la cour relève que les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure ne contestent pas que la société TDF détenait, à la date des faits, une position dominante sur le marché de gros amont des services de diffusion radiophonique en mode FM depuis le site de la tour Eiffel.
203. Il est également constant que l'accès audit marché était indispensable pour concurrencer le ou les opérateurs, dont la société TDF, déjà présents sur le marché de gros aval des services de diffusion depuis le même site.
204. La société TDF soutient, en premier lieu, qu'elle a répondu dans des délais raisonnables aux demandes de la société towerCast.
205. Tout d'abord, la société TDF fait valoir que, si, dans l'offre provisoire adressée le 31 octobre 2006 à la Ville [Localité 1], dans le cadre du renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel, elle indiquait avoir « mis au point l'ensemble des éléments techniques, économiques et juridiques qui lui permettent de présenter une offre sur mesure répondant aux exigences et aux particularités du site complexe de la Tour Eiffel », elle ajoutait qu'elle s'engageait à répondre favorablement au souhait d'autres opérateurs de diffuser à partir de la tour Eiffel et à mettre en 'uvre les moyens nécessaires « dans la mesure des possibilités techniques, notamment en matière de place disponible et de compatibilité électromagnétique ». Elle rappelle encore que l'article 11.2 de la convention d'occupation domaniale conclue avec la Ville [Localité 1] spécifiait expressément que la société TDF devait remettre « une offre sur mesure dans la mesure des possibilités techniques » afin de répondre aux demandes d'accès des autres diffuseurs.
206. Ainsi, selon la société TDF, l'obligation pesant sur elle n'était pas de publier une offre standard ne tenant pas compte des besoins propres d'un opérateur tiers, mais de remettre une offre sur mesure répondant à une demande d'accès spécifique, sous réserve des possibilités techniques.
207. Elle en déduit qu'elle ne pouvait remettre une offre sur mesure à la société towerCast qu'après avoir reçu de cette dernière une demande d'hébergement précise, de sorte que son délai de réponse doit s'apprécier à compter de cette demande, soit le 6 avril 2007 au plus tôt, et non à compter du 31 octobre 2006.
208. Ensuite, la société TDF fait valoir que, si, ainsi que l'a souligné l'Autorité au point 514 de la décision attaquée, la plupart des conditions d'accès imposées à un opérateur tiers étaient indépendantes du nombre de clients diffusés, l'ensemble des éléments tarifaires de l'offre sur mesure effectivement indépendants du nombre de clients diffusés ' prix des études, prix des prestations de base, tarifs d'accompagnement, tarifs des badges et dispositifs d'accès ' ont été fournis à la société towerCast dans un délai raisonnable, le 16 mai 2007.
209. Enfin, rappelant que, dans son cahier des charges, la société towerCast réclamait une salle dédiée de 20 m² à 30 m² pour y héberger entre un et trente émetteurs, la société TDF fait valoir, d'une part, que cette demande était irréaliste : la société towerCast ne pouvait sérieusement envisager de remporter tous les contrats de diffusion radio à l'occasion de la NEVA, et il est impossible d'héberger les équipements nécessaires à la diffusion de trente radios dans un local de 30 m².
210. D'autre part, selon la société TDF, ladite demande était beaucoup trop imprécise pour lui permettre de connaître les besoins de la société towerCast, de sorte qu'elle était fondée à demander à celle-ci de préciser ses besoins réels, s'agissant du nombre d'émetteurs et de leur puissance, pour décider de la superficie de la salle à lui allouer.
211. Eu égard à cette nécessité d'obtenir des précisions de la société towerCast, la société TDF considère qu'elle a répondu avec diligence aux demandes d'accès de la société towerCast, en dépit de leur caractère déraisonnable.
212. En second lieu, la société TDF fait valoir qu'en tout état de cause, elle a répondu aux demandes de la société towerCast en temps utile pour permettre à celle-ci de prospecter les émetteurs radios.
213. D'une part, l'offre d'hébergement ayant été remise à la société towerCast le 16 mai 2007 et l'estimation du coût des travaux d'aménagement d'une salle dédiée le 25 mai 2007, celle-ci disposait à cette dernière date de l'ensemble des informations financières de l'offre d'hébergement pour commencer à démarcher les radios.
214. La société TDF conteste l'affirmation de l'Autorité selon laquelle son offre à la société towerCast était encore incomplète au 25 mai 2007.
215. S'agissant de l'estimation du coût des travaux d'aménagement d'une salle dédiée de 27 m², entre 300 000 et 400 000 euros, la société TDF considère que cette fourchette de prix est raisonnable, compte tenu de la durée d'amortissement de dix ans de ces travaux. Elle souligne que cette estimation a été jugée suffisamment précise pour être intégrée dans le test de ciseau tarifaire mené par l'Autorité, et qu'elle ne représente qu'un différentiel de 1 % sur le total des coûts supportés par la société TDF.
216. Quant aux études de raccordement aux systèmes antennaires FM lancées à la demande de la société towerCast, la société TDF fait valoir qu'elle ne portaient que sur des éléments purement techniques, de sorte que la remise des résultats de ces études à la société towerCast le 15 juin 2007 n'empêchait pas cette dernière de démarcher les radios sur la base des informations financières qu'elle détenait depuis le 25 mai 2007.
217. D'autre part, la société TDF soutient qu'à la date du 25 mai 2007, la société towerCast disposait de plus de trois mois avant la NEVA, ce qui représentait un délai suffisant pour démarcher les vingt radios concernées par le renouvellement des autorisations de diffusion.
218. La société TDF souligne qu'à la date du 25 mai 2007, elle-même n'avait transmis une proposition commerciale qu'à deux radios ' Skyrock et Orient ', sur les vingt concernées, et n'avait signé aucun contrat de diffusion. Elle fait encore valoir que, le 5 juin 2007, RTF et Lagardère Active ont sollicité de la société towerCast une offre de diffusion, preuve qu'à cette date, la société towerCast était encore en mesure de contracter avec les radios concernées.
219. Faisant valoir que les propositions commerciales qu'elle a adressées aux vingt radios concernées précisaient que l'offre de diffusion était valable jusqu'au 31 août 2007, la société TDF conteste l'affirmation de l'Autorité selon laquelle elle aurait, dans ces propositions, présenté la date du 30 juin 2007 comme une date butoir afin d'inciter les émetteurs à contracter avec elle avant cette date. Selon la société TDF, cette date du 30 juin 2007 n'a concerné que cinq radios sur vingt, à savoir celles dont le site de diffusion ou la puissance de diffusion seraient modifiés lors de la NEVA.
220. La société TDF conteste également l'affirmation, figurant au point 546 de la décision attaquée, selon laquelle un délai inférieur à deux mois et demi entre la signature d'un contrat de diffusion et la NEVA aurait fait courir au client éditeur un risque important de ne pouvoir émettre à compter de la NEVA, eu égard à la nécessité de mener des travaux liés à la modification des conditions de diffusion. Selon la société TDF en effet, un changement de diffuseur n'implique pas une modification des conditions de diffusion (laquelle suppose soit un changement de puissance d'autorisation d'émettre 'ci-après la PAR ', soit un changement de site de diffusion). En outre, la société towerCast aurait pu entamer les travaux d'aménagement pour préparer l'installation de ses émetteurs avant la conclusion de contrats de diffusion, notamment avec les quatre radios du groupe NRJ à laquelle elle appartient. La société TDF ajoute que le 29 mai 2007, elle avait proposé à la société towerCast des solutions transitoires pour la sécuriser sur les délais qui lui seraient nécessaires pour être opérationnelle dès la NEVA.
221. La société TDF conclut qu'elle n'a pas mis en place de stratégie dilatoire à l'égard de la société towerCast et que celle-ci disposait du temps nécessaire pour prospecter les radios dans la perspective de la NEVA. Elle demande en conséquence l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle l'a condamnée au titre du grief n° 2.
222. Les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure développent les mêmes moyens d'annulation.
223. La société towerCast conclut à la confirmation de la décision attaquée.
224. Elle explique que, si elle n'a pas adressé à la société TDF dès la fin de l'année 2006 une demande d'offre d'hébergement, c'est qu'elle était dans l'attente de la décision du juge administratif sur le recours qu'elle avait introduit contre la procédure d'appel d'offres pour la concession du site de la tour Eiffel.
225. Elle fait valoir que, dès le 6 avril 2007, elle a remis à la société TDF son cahier des charges décrivant les conditions techniques et de service d'accueil du site de la tour Eiffel ; que ce cahier était très précis, comprenant une description précise des besoins d'hébergement (local dédié) et des besoins en énergie, ventilation et climatisation, une demande de tarif et un tableau de synthèse complet (émetteurs, fréquence, etc.) ; que les informations sollicitées par les modèles d'expression des besoins concernant la liste des fréquences, la gamme de puissance et le poids des équipements, y figuraient déjà ; que la société TDF, qui affirmait, dans sa réponse à l'appel d'offres du 31 octobre 2006, disposer déjà de tous les éléments techniques, économiques et juridiques lui permettant de présenter une offre sur mesure, et qui s'y engageait à « anticiper les demandes d'accès », aurait dû lui communiquer immédiatement les informations attendues, sans s'octroyer un délai de quinze jours comme elle l'a fait dans sa lettre du 13 avril 2007 ; que, de surcroît, la société TDF n'a pas respecté ce délai, puisque ce n'est que le 25 mai 2007 qu'elle a adressé son tarif à la société towerCast ; que le 22 juin 2007, lors du dernier échange avec la société TDF, la société towerCast ne disposait toujours pas des informations complètes.
226. La société towerCast conteste que ses demandes aient présenté un caractère anormal. Elle argue notamment de ce que la demande d'une salle dédiée n'était pas de nature à empêcher la remise d'informations par la société TDF, dès lors que cette dernière avait admis qu'une salle dédiée était « plus rationnelle ».
227. La société towerCast souligne que l'efficacité de l'obstruction de la société TDF est corroborée par les déclarations des éditeurs, qui ont indiqué qu'au 28 juin 2007, ils restaient dans l'attente d'une proposition commerciale de la société towerCast et ont déclaré que la société TDF les incitait à la signature d'un contrat de diffusion avant le 30 juin 2007, alors qu'à cette date, le caractère partiel des informations fournies par la société TDF ne lui permettaient pas de construire une offre de diffusion. De plus, selon les propres indications de la société TDF dans son courrier du 15 juin 2007, le délai de réalisation des travaux était d'au moins deux mois à compter de la commande par la société towerCast, alors que les éditeurs radios avaient insisté sur l'importance des délais d'installation des équipements pour un diffuseur nouvel entrant. Ainsi, selon la société towerCast, la société TDF a sciemment empêché la concurrence de s'exercer sur le marché aval des services de diffusion radiophonique en mode FM depuis le site de la tour Eiffel.
228. L'Autorité objecte d'abord que la demande de la société towerCast n'était ni irrationnelle ni imprécise. D'une part, il ne saurait lui être reproché d'avoir demandé une salle dédiée de 30 m², alors que la société TDF a à la fois admis qu'une salle dédiée était la solution la plus rationnelle et affirmé que la surface maximale disponible pour une telle salle était de 27 m². D'autre part, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir précisé le nombre et les caractéristiques de ses clients avant d'avoir disposé de l'offre complète d'hébergement de la société TDF, sans laquelle elle ne pouvait démarcher les radios.
229. Elle ajoute que la plupart des conditions d'accès imposées par la société TDF étaient indépendantes du nombre de clients diffusés et que, dans l'offre sur mesure que la société TDF a adressée à la société towerCast le 14 août 2007, en application de la décision de mesures conservatoires n° 07-MC-05, le tarif des travaux et aménagements spécifiques de la salle dédiée demandée par la société towerCast était précisément chiffré et ne dépendait pas des besoins exprimés par la société towerCast en termes, notamment, de fréquences effectivement diffusées.
230. Ensuite, l'Autorité fait valoir que la société TDF n'a adressé à la société towerCast une première estimation chiffrée des différents éléments constitutifs de son offre de gros d'hébergement que le 16 mai 2007, alors que la société towerCast en avait fait la demande le 29 mars 2007, ce qui constitue un délai excessif dès lors que la société TDF détenait toutes les informations nécessaires dès le 31 octobre 2006, ainsi qu'il résulte de son offre faite à cette date à la Ville [Localité 1] dans le cadre du renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel.
231. De plus, l'offre d'hébergement la plus aboutie remise à la société towerCast le 25 mai 2007 demeurait incomplète, s'agissant notamment du montant des travaux d'aménagement de la salle dédiée de 27 m², puisqu'a seulement été communiquée à la société towerCast une fourchette indicative entre 300 000 et 400 000 euros, sans aucun détail sur la nature des travaux. Selon l'Autorité, un différentiel de 100 000 euros, représentant un quart du montant total des travaux, n'est pas négligeable au regard du niveau de marge qu'un diffuseur hébergé peut raisonnablement escompter.
232. Même après le 15 juin 2007, la société towerCast n'aurait pas bénéficié d'une offre complète dès lors que le montant des travaux d'aménagement serait resté imprécis.
233. Enfin, l'Autorité considère que les délais de réalisation des travaux nécessaires à l'hébergement de la société towerCast, lesquels n'auraient pu commencer au plus tôt que le 15 juin 2007, auraient été nettement supérieurs à deux mois. Elle en veut pour preuve que, dans les offres de diffusion que la société TDF a adressées aux éditeurs, y compris ceux qu'elle diffusait déjà et pour lesquels n'était en jeu qu'un simple renouvellement de contrat, la société TDF précisait que, « compte tenu de la complexité du site, le délai à compter de la date de votre confirmation de la commande est de 3 mois ». Or, un changement de diffuseur aurait impliqué des travaux liés à la modification des conditions de diffusion. Elle en déduit qu'un diffuseur nouvel entrant ne pouvait proposer à un client éditeur un délai inférieur à deux mois et demi, voire même trois mois, entre la signature du contrat de diffusion et la NEVA, sauf faire courir à son client un risque opérationnel important.
234. L'Autorité conclut que, compte tenu du caractère tardif et incomplet des informations transmises, un concurrent de la société TDF ne pouvait pas adresser des propositions commerciales aux éditeurs en même temps que la société TDF ' qui a adressé les siennes entre le 22 mai et le 19 juin 2007.
235. La situation de la société towerCast aurait été aggravée par la pression que la société TDF a exercée sur les éditeurs, en indiquant, dans toutes ses propositions commerciales, que « TDF vous assure que pour toute commande reçue avant le 30 juin, votre programme sera diffusé dans les conditions nouvelles de son autorisation dès la NEVA », la date du 30 juin 2007 étant même une date butoir pour les cinq radios qui changeaient de PAR ou de site de diffusion.
236. Selon l'Autorité, il est indifférent que la société TDF ait proposé le 29 mai 2007 à la société towerCast d'étudier des solutions transitoires, dans l'hypothèse où les délais de réalisation des travaux auraient été trop importants pour permettre à la société towerCast de disposer d'une salle dédiée à compter de la NEVA, dans la mesure où ces solutions transitoires auraient été « aux frais de towerCast » et n'auraient de toute façon pas garanti le démarrage de toutes les radios ayant confié leur diffusion à la société towerCast « dans les conditions nominales ».
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237. A titre liminaire, la cour relève qu'il n'est pas contesté qu'un délai de cinq mois avant la NEVA était suffisant pour permettre à la société TDF d'informer un diffuseur des modalités techniques, juridiques et financières de son offre sur mesure d'hébergement sur le site de la tour Eiffel, tout en laissant à ce dernier le temps d'élaborer une offre de diffusion, contracter avec les éditeurs et faire procéder aux travaux nécessaires. Dès lors, il est indifférent que la société towerCast n'ait approché la société TDF que le 29 mars 2007 pour connaître les modalités de l'hébergement sur le site de la tour Eiffel en vue de la diffusion de programmes radios FM.
238. En premier lieu, la cour relève que, dans son courrier du 18 avril 2007 (cote 2510, 07/0018M), la société TDF écrivait à la société towerCast : « Une offre sur mesure d'hébergement et de diffusion HF sur le site de la Tour Eiffel vous sera adressé d'ici à deux semaines dans une perspective de contractualisation de notre prestation. » la société TDF ajoutait : « Des documents d'expression de besoins vous seront communiqués dès la semaine prochaine afin de vous permettre de passer rapidement les commandes d'études. »
239. Il ressort sans équivoque de ce courrier que la transmission d'une offre sur mesure d'hébergement et de diffusion était décorrelée des résultats des études de raccordement aux systèmes antennaires FM et des études d'implantation et de réalisation, destinées à apprécier le coût des travaux éventuellement nécessaires.
240. Ainsi, devaient être chiffrés séparément, d'une part, le coût de la prestation d'hébergement et de diffusion hors travaux de raccordement et d'aménagement éventuels et, d'autre part, le montant des travaux spécifiques éventuellement nécessaires.
241. Une telle interprétation est confirmée par le contenu de l'offre faite par la société TDF le 31 octobre 2006, dans le cadre du renouvellement de la convention d'occupation domaniale du site de la tour Eiffel, où elle écrivait : « TDF entend anticiper le traitement de toute demande d'accès qui lui serait faite par un de ses concurrents à des fins de diffusion de programmes radio en FM. Elle a donc mis au point l'ensemble des éléments techniques, économiques et juridiques qui lui permettent de présenter une offre sur mesure répondant aux exigences et aux particularités du site complexe de la Tour Eiffel. » Il en ressort que, à cette date, la société TDF disposait déjà d'un ensemble d'informations, notamment tarifaires, dont la communication à un diffuseur permettait à ce dernier de connaître le coût exact, hors travaux, de l'offre sur mesure répondant à sa demande d'hébergement spécifique, et à tout le moins d'en avoir une estimation fine.
242. Elle l'est encore au seul vu de la chronologie des échanges entre les sociétés TDF et towerCast, la première ayant effectivement adressé à la seconde une offre sur mesure à un moment où aucune étude n'avait été lancée.
243. A cet égard, contrairement à ce qui avait été annoncé par la société TDF dans son courrier du 18 avril 2007 ' la transmission d'une offre sur mesure d'hébergement « d'ici à deux semaines » ', ce n'est que le 11 mai 2007, après plus de trois semaines, qu'elle a transmis à la société towerCast, par courriel (cote 2512, 07/0018M), un document intitulé « Offre sur mesure 'Tour Eiffel Service d'Accès FM 2006' ».
244. De surcroît, si ce document précisait le contenu de la prestation d'hébergement, il ne comportait aucune proposition technique et commerciale. Faisaient notamment défaut les annexes A1 (Tarifs) et A4 à A10 (Annexes techniques), pourtant présentées par la société TDF dans son offre sur mesure comme des documents constitutifs de celle-ci. La société towerCast s'est d'ailleurs plainte, dans son courrier du 15 mai 2007, de ce que les éléments transmis le 11 mai, ne comportaient aucun élément financier, sauf sur le coût des études préalables à la fourniture des tarifs.
245. Ce n'est que le 16 mai 2007 que la société TDF a transmis à la société towerCast l'annexe A1 (Tarifs) de son offre sur mesure, soit près d'un mois et demi après avoir pris connaissance de la demande d'offre d'hébergement de la société towerCast, lors de la réunion du 6 avril 2007, et plus d'un mois après avoir formellement reçu cette même demande, par courrier du 11 avril 2007.
246. Dès lors que la société TDF disposait, avant même de recevoir la demande de la société towerCast, à tout le moins des éléments d'information concernant le contenu et les tarifs, hors travaux éventuels, de la prestation d'hébergement, elle aurait dû les communiquer aussitôt après avoir reçu cette demande, le 11 avril 2007.
247. Les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure échouent à justifier ce retard, qui est entièrement imputable à la société TDF.
248. En deuxième lieu, force est de constater que la société towerCast a exprimé ses besoins de service d'accès FM ' de un à trente émetteurs ' dès la réunion du 6 avril 2007, au cours de laquelle elle a remis à TDF son cahier des charges pour une prestation d'hébergement de diffuseur sur le site de la tour Eiffel.
249. Dès ce moment, et à tout le moins dès le 11 avril 2007, date à laquelle elle a formellement reçu de la société towerCast une demande d'offre d'hébergement incluant le même cahier des charges, la société TDF était en mesure de lancer les trente études de raccordement aux systèmes antennaires de diffusion FM.
250. Or ce n'est que 25 mai 2007, un mois et demi plus tard, que la société TDF a lancé lesdites études.
251. C'est en vain que les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure arguent de ce qu'ayant reçu de la société towerCast l'expression de ses besoins de services d'accès FM sur le site de la tour Eiffel le 24 mai 2007, la société TDF ne pouvait pas lancer avant cette date les études de raccordement au système antennaire de diffusion FM.
252. D'une part, si on ne saurait reprocher à la société TDF d'avoir voulu rationaliser ses rapports avec les diffuseurs souhaitant être hébergés sur le site de la tour Eiffel, en établissant un modèle d'expression de besoins, elle ne pouvait, eu égard à la proximité de la NEVA, refuser de traiter une demande d'offre d'hébergement au seul motif que son auteur n'avait pas eu recours à ce modèle, a fortiori lorsque ledit modèle n'avait pas été communiqué au diffuseur. A cet égard, il n'est pas allégué par les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure que la demande de la société towerCast reçue le 11 avril 2007 était incomplète en ce qui concerne l'expression de ses besoins de services d'accès FM, la société towerCast ayant d'emblée indiqué le nombre ' trente ' et la fréquence des radios pour lesquelles elle sollicitait une offre d'hébergement, ainsi qu'un ensemble de spécifications techniques. Au demeurant, à supposer même que toutes les précisions nécessaires à la société TDF pour présenter son offre sur mesure n'aient pas figurées dans la demande de la société towerCast reçue le 11 avril 2007, il appartenait à la société TDF, qui était seule en mesure de connaître les éléments d'informations dont elle estimait avoir besoin, de les réclamer rapidement, au lieu de laisser s'écouler un délai de plus de trois semaines.
253. D'autre part, en effet, ce n'est que le 4 mai 2007, plus de trois semaines après avoir reçu la demande de la société towerCast, que la société TDF lui a adressé le modèle d'expression de besoin relatif à l'offre sur mesure de diffusion hautes fréquences (DiffHF) ; or un tel retard est injustifiable, alors qu'il ne s'agissait que d'adresser à la société towerCast un imprimé à remplir.
254. Certes, la société towerCast n'a pas elle-même fait preuve de diligence, en laissant passer vingt jours entre la réception, le 4 mai, du modèle d'expression de besoin relatif à l'offre sur mesure de diffusion hautes fréquences, et le renvoi, le 24 mai 2007, de l'expression de ses besoins à la société TDF. Mais, ayant transmis à la société TDF dès le 11 avril, sinon dès le 6 avril 2007, l'essentiel, voire la totalité, des informations nécessaires, elle a pu légitimement juger de peu de conséquence le fait de ne pas renvoyer immédiatement les mêmes informations sur le modèle d'expression des besoins fourni par la société TDF. En tout état de cause, son comportement ne saurait dédouaner la société TDF du retard que cette dernière a mis à traiter sa demande d'hébergement.
255. C'est tout aussi vainement que les sociétés TDF TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure arguent du caractère irréaliste de la demande de la société towerCast ' tenant à l'impossibilité de remporter tous les contrats de diffusion radio à l'occasion de la NEVA ' et de son imprécision, qui n'aurait pas permis à la société TDF de connaître les besoins réels de la société towerCast, de sorte qu'elle aurait été fondée à lui demander de préciser le nombre d'émetteurs dont elle souhaitait disposer ainsi que leur puissance, pour décider de la superficie de la salle qui lui serait allouée.
256. Outre que la société TDF n'avait pas à se faire juge du caractère réaliste ou non de la demande de la société towerCast, la cour relève que cela ne l'a pas dissuadée de faire réaliser, et de facturer à la société towerCast, trente études de raccordement aux systèmes antennaires de diffusion FM.
257. Au demeurant, la cour n'a aucun doute que la société towerCast était consciente de l'impossibilité de remporter l'ensemble des contrats de diffusion radios mis en concurrence à l'occasion de la NEVA, mais elle constate que la demande d'une offre d'hébergement pour trente radios a permis à la société towerCast d'obtenir une évaluation du coût du raccordement aux systèmes antennaires spécifique à chacune d'elle, ce qui lui aurait été utile si elle avait été en mesure de démarcher les éditeurs radios et suffit à expliquer la teneur de cette demande.
258. L'établissement des études de raccordement aux systèmes antennaires de diffusion FM ayant pris une vingtaine de jours (du 25 mai au 15 juin 2007), sans qu'il soit démontré que ce délai aurait pu être plus court, la société towerCast aurait pu les recevoir au tout début du mois de mai 2007, si la société TDF avait fait diligence.
259. L'argument selon lequel la société towerCast n'avait pas besoin d'attendre le résultat des études de raccordement aux système antennaires pour démarcher les clients, est sans valeur. Au point 3 .2.1.2. du document « Offre Sur Mesure 'Tour Eiffel Service d'accès FM 2006' », transmis le 11 mai 2007, il est indiqué que « [l]'Etude de Raccordement au Système Antennaire FM de TDF, réalisée par TDF, permet, pour chaque fréquence de diffusion souhaitée, de se prononcer sur la faisabilité et le contenu des aménagements spécifiques à réaliser pour fournir les prestations [de prise en charge et diffusion du signal HF] », Le point 3.2.1.3. du même document précise que « [d]es aménagements ou travaux spécifiques peuvent, le cas échéant, être nécessaires », « sont décrits dans la Proposition Technique et Commerciale, en s'appuyant sur les résultats de l'étude de raccordement au système antennaire de diffusion FM de TDF et de l'étude d'implantation et de réalisation, et sont réalisés par TDF aux frais de towerCast ». Il s'ensuit que les résultats des études de raccordement au système antennaire étaient indispensables à la société towerCast pour connaître le montant exact des travaux éventuellement mis sa charge.
260. En troisième lieu, concernant les besoins d'hébergement exprimés par la société towerCast, les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure font valoir que la demande de la société towerCast, qui réclamait, dans son cahier des charges remis les 6 et 11 avril 2007, une salle dédiée de 20m² à 30m² pour y héberger de un à trente émetteurs, était également irréaliste, compte tenu de l'impossibilité de diffuser trente radios depuis un local de 30 m².
261. Mais, tout d'abord, la cour constate que la société towerCast n'envisageait pas de diffuser trente radios depuis une salle dédiée de 30 m² : il ressort en effet du point 2.1 de son cahier des charges que la salle dédiée réclamée par la société towerCast n'était pas destinée à héberger les émetteurs, mais exclusivement les « équipements de réception, traitement du signal, amplification, modulation », ainsi qu'« un poste de travail technique et administratif ainsi que pour le stockage de matériel de secours ».
262. Quant à la surface dont la société towerCast aurait eu besoin pour ses émetteurs, le même cahier des charges contenait toutes les informations dont la société TDF avait besoin pour proposer une offre sur mesure à la société towerCast et évaluer le coût des éventuels travaux d'aménagement : il y était en effet précisé qu'un émetteur d'une puissance de 10 kW occuperait une baie, d'un encombrement de « 600 (largeur) x 800 (profondeur) », et qu'un émetteur de 5 kW occuperait une demi-baie, la société towerCast n'ayant exprimé aucune préférence quant à l'installation de ces émetteurs dans une salle commune ou dans une salle dédiée.
263. La société TDF n'a pas pu se méprendre sur les besoins de la société towerCast, qui n'étaient pas irréalistes.
264. Il s'ensuit que la société TDF pouvait lancer dès le 11 avril 2006 les études d'implantation et de réalisation afin de chiffrer les éventuels coûts d'aménagement. S'agissant en particulier de l'espace nécessaire aux émetteurs, des lors que les radios pour lesquelles la société towerCast demandait une offre d'hébergement sur mesure représentaient la quasi-totalité ' trente sur trente et une ' des fréquences diffusées à partir du site de la tour Eiffel, la société TDF, qui avait une parfaite connaissance des lieux, était en mesure d'apprécier les surfaces correspondantes, à savoir la quasi-totalité des espaces pouvant être dévolus à la diffusion.
265. Il est donc indifférent que la société towerCast n'ait jamais rempli le modèle d'expression de besoins relatif à l'offre sur mesure d'hébergement, que la société TDF lui avait transmis le 4 mai 2007. A cet égard, la cour renvoie aux développements qu'elle a consacré ci-dessus au modèle d'expression de besoin relatif à l'offre sur mesure de diffusion hautes fréquences (DiffHF).
266. Ensuite, s'agissant plus particulièrement de la demande de salle dédiée, la société TDF n'ayant cessé de répéter qu'elle était uniquement en mesure de proposer à la société towerCast soit une salle de 14 m² soit une salle de 27m², et seule la seconde répondant à la demande de la société towerCast d'un local dédié de 20 à 30 m², il n'existait aucune imprécision quant à la salle dédiée pouvant être allouée à la société towerCast, et à sa superficie.
267. Enfin, s'agissant du coût des travaux d'aménagement, d'une part, la « fourchette indicative » comprise entre 300 000 et 400 000 euros pour le seul aménagement d'une salle dédiée de 27 m², communiquée à la société towerCast le 25 mai 2007, était bien trop approximative. Outre que le détail du calcul ayant permis à la société TDF d'aboutir à cette fourchette de prix n'a pas été communiqué, c'est à juste titre que l'Autorité souligne qu'un différentiel de 100 000 euros, représentant un quart du montant total des travaux, n'est pas négligeable au regard du niveau de marge qu'un diffuseur hébergé peut raisonnablement escompter.
268. D'autre part, l'impossibilité d'un chiffrage plus précis du coût des travaux d'aménagement d'une salle dédiée est contredite par le contenu de l'offre sur mesure que celle-ci a adressée à la société towerCast le 14 août 2007, en application de la décision de mesures conservatoires n° 07-MC-05.
269. L'Autorité a relevé, au point 517 de la décision attaquée, que, dans cette offre sur mesure, le tarif des travaux et aménagements spécifiques était précisément chiffré et ne dépendait pas des besoins exprimés par la société towerCast en termes de fréquences effectivement diffusées, de puissance admissible sur les antennes, de puissance appelée en énergie, de consommation électrique et de nombre d'émetteurs installés, la formule retenue par la société TDF dans ladite offre étant la suivante : « Plafonnement (exprimé en €HT) = 2 400 x surface salle mise à disposition (exprimée en m²) 44 400 ».
270. Force est de constater que les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure ne contestent pas cette analyse de l'Autorité ni n'allèguent que cette formule, utilisée en août 2007, n'aurait pas pu l'être en avril ou mai 2007.
271. Ainsi, dès le 11 avril 2007 ' en tout cas au plus tard le 27 avril 2007, date à laquelle elle était déjà en mesure de proposer à la société towerCast une salle dédiée de 27m², proposition réitérée le 16 mai 2007 ', la société TDF était en mesure de calculer le coût des travaux d'aménagement spécifiques sur la seule base de la surface de cette salle.
272. A supposer même que, contrairement à l'analyse de l'Autorité, la formule « Plafonnement (exprimé en €HT) = 2 400 x surface salle mise à disposition (exprimée en m²) + 44 400 » ne permette pas de chiffrer le montant exact des travaux d'aménagement, mais serve seulement à déterminer le montant maximal de la contribution du diffuseur client de la société TDF à la réalisation des travaux et aménagements spécifiques nécessaires pour lui permettre de fournir le service aux éditeurs, la preuve n'en est pas moins rapportée que la société TDF aurait pu communiquer à la société towerCast, au plus tard le 27 avril 2007, le montant maximal susceptible de rester à sa charge au titre des travaux d'aménagement de la salle dédiée de 27 m², ce qui aurait grandement aidé cette dernière à construire sa propre offre de diffusion, grâce à la meilleure connaissance des coûts de la prestation d'hébergement fournie par la société TDF.
273. A cet égard, la cour relève que pour une salle dédiée de 27 m², le montant maximal de la contribution de la société towerCast aux travaux d'aménagement aurait été de 109 200 euros (2 400 x 27 = 64 800 + 44 400 = 109 200), montant très inférieur à la fourchette de 300 000 à 400 000 euros annoncée à la société towerCast.
274. En partant du postulat que la réalisation des études d'implantation et de réalisation aurait nécessité le même délai d'une vingtaine de jour que les études de raccordement, la société towerCast aurait pu les recevoir au début du mois de mai 2007, si la société TDF avait fait diligence.
275. Il ressort des constatations qui précèdent que les informations transmises par la société TDF à la société towerCast l'ont été avec plus d'un mois de retard et que, de surcroît, s'agissant des coûts éventuels d'implantation que la société towerCast aurait eu à supporter, les informations transmises, outre leur caractère tardif, étaient imprécises, voire inexactes.
276. N'ayant jamais reçu l'information complète qu'elle était en droit d'attendre sur les coûts de la prestation d'hébergement, travaux compris, proposée par la société TDF en réponse à sa demande d'offre d'hébergement sur mesure, la société towerCast s'est trouvée dans l'impossibilité de construire une offre de diffusion, a fortiori une offre concurrentielle.
277. Même à supposer qu'elle ait finalement reçu les informations suffisantes pour lui permettre d'élaborer une offre de diffusion à destination des éditeurs, la tardiveté de leur communication ne lui aurait pas permis de concourir à armes égales avec la société TDF, compte tenu du calendrier très contraint qui s'imposait aux éditeurs.
278. Ainsi qu'il a été constaté ci-dessus, la société towerCast aurait pu et dû être en possession au plus tard dans la première quinzaine du mois de mai 2007, de la totalité des éléments, notamment de coût, dont elle avait besoin pour construire son offre de diffusion, ce qui lui aurait laissé un délai suffisant pour démarcher les éditeurs radios, conclure des contrats de diffusion avec certains d'entre eux, et faire réaliser l'ensemble des travaux et aménagements nécessaires pour assurer la diffusion desdites radios à partir de la NEVA.
279. N'ayant obtenu les tarifs de l'offre d'hébergement sur mesure que le 16 mai 2007, l'information sur les coûts éventuels d'aménagement le 25 mai 2007 et le montant des coûts de raccordement aux systèmes antennaires le 15 juin 2007, et quand bien même l'information sur les coûts d'aménagement aurait été complète, la société towerCast n'aurait pas pu proposer aux éditeurs une offre de diffusion avant la seconde moitié du mois de juin, à une date déjà trop tardive pour pouvoir concurrencer à armes égales la société TDF auprès des éditeurs radios.
280. En effet, la société TDF indiquait elle-même, dans son offre de diffusion adressée à l'éditeur de MFM, sous le titre « Délais de réalisation », « [c]ompte tenu de la complexité du site, le délai de réalisation à compter de la date de votre confirmation de commande est de 3 mois », ajoutant que, « [c]ompte tenu de la proximité de la date de la NEVA prévue par le CSA (dans la nuit du 4 au 5 septembre 2007) et de l'organisation des travaux préalables nécessaires, TDF vous assure que pour toute commande reçue avant le 30 juin, votre programme sera diffusé dans les conditions nouvelles de son autorisation dès la NEVA » (cotes 480 et 481, 07/0017F). Au-delà de la contradiction entre ces deux affirmations, il peut en être déduit qu'à tout le moins un délai de neuf à dix semaines ' correspondant au délai courant entre le 30 juin et le 4 septembre 2007 ' était jugé nécessaire par la société TDF elle-même pour garantir à MFM la diffusion de ses programmes à partir de la NEVA.
281. Or, MFM était déjà diffusée par la société TDF et n'a connu ni changement de PAR ni changement de site de diffusion lors du renouvellement des autorisations de diffusion.
282. Même en admettant qu'un changement de diffuseur n'entraîne aucun allongement de la durée des travaux, comme l'affirme la société TDF, cela signifiait, pour la société towerCast, qu'elle aurait dû achever l'élaboration de son offre de diffusion, démarcher les éditeurs radios et finaliser les négociations par la passation d'un contrat en bonne et due forme, le tout entre le 16 et le 30 juin 2007, du moins pour les radios ne connaissant ni changement de PAR ni changement de site de diffusion, et ce dans un contexte de très forte concurrence de la part de la société TDF, qui avait commencé à démarcher les éditeurs radios à compter du 22 mai 2007, près d'un mois plus tôt.
283. Dans un tel contexte, et avec un calendrier à ce point contraint, les chances de la société towerCast de convaincre un éditeur de contracter avec elle plutôt qu'avec la société TDF étaient à tout le moins très faibles. A fortiori étaient-elles nulles s'agissant des radios faisant l'objet d'un changement de PAR ou de site de diffusion (dont la radio Rire et Chansons, jusque-là diffusée par la société towerCast), puisque la société TDF reconnaît qu'un tel changement avait des répercussions sur le délai nécessaire pour garantir une diffusion dans les conditions nouvelles dès la NEVA.
284. Il ne saurait être reproché à la société towerCast de ne pas avoir ordonné le lancement des travaux nécessaires dès le 15 juin 2007, alors qu'elle ne savait pas encore combien d'éditeurs, et lesquels, lui confieraient la diffusion de leurs radios.
285. Enfin, l'Autorité souligne à juste titre que la proposition faite par la société TDF à la société towerCast, le 29 mai 2007, d'étudier des solutions transitoires, dans l'hypothèse où les délais de réalisation des travaux auraient été trop importants n'était pas de nature à rétablir une concurrence non faussée, alors que ces solutions transitoires, au demeurant jamais précisées, auraient été « aux frais de towerCast » et n'auraient de toute façon pas garanti le démarrage de toutes les radios ayant confié leur diffusion à la société towerCast « dans les conditions nominales ».
286. Le recours des sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure en annulation de la décision attaquée en tant que celle-ci a dit le grief n° 2 établi, seront rejetés.
D. Sur les moyens propres au grief n° 3
287. Ainsi qu'il a déjà été souligné, il est constant que l'accès au marché de gros amont de la diffusion de radios FM depuis le site de la tour Eiffel, sur lequel la société TDF avait une position dominante en 2006, était indispensable pour concurrencer le ou les opérateurs, dont la société TDF, déjà présents sur le marché de gros aval des services de diffusion depuis le même site.
288. Afin de vérifier si, ainsi que le soutenait la société towerCast, les prix de l'offre de gros d'hébergement sur le site de la tour Eiffel proposée par la société TDF aux opérateurs souhaitant entrer sur le marché de gros aval ne produisaient pas un effet d'éviction, l'Autorité a appliqué un test de ciseau tarifaire.
289. A l'issue de ce test, elle a constaté qu'en 2006, un opérateur aussi efficace que la société TDF ne pouvait entrer sur le marché de gros aval des services de diffusion depuis le site de la tour Eiffel qu'en subissant des pertes.
290. La société TDF, qui ne conteste pas le principe même de la mise en 'uvre du test de ciseau tarifaire, fait valoir que celui pratiqué par l'Autorité est entaché d'erreurs.
291. D'une part, elle soutient que l'Autorité a augmenté de façon abusive le nombre de visites de maintenance et de contrôle des équipements d'environnement et de diffusion que devrait effectuer un opérateur aussi efficace que TDF hébergé sur le site de la tour Eiffel : alors que son étude économique réalisée en 2006, dite « retail minus », évaluait le nombre d'interventions, pour dix émetteurs, à 8,5 par an, et que la société towerCast elle-même estimait n'avoir besoin que de 144 visites par an, l'Autorité a retenu le chiffre de 374 visites annuelles.
292. Selon la société TDF, la surveillance des équipements de diffusion par télégestion ' et donc sans visites ' est la solution la plus efficiente pour un opérateur hébergé qui, comme la société towerCast, ne possède pas de personnel sur le site. Ce serait donc à tort que l'Autorité s'est fondée sur le fait que la société TDF, qui a, quant à elle, de nombreux personnels sur le site, et dont les opérations de contrôle portent principalement sur les équipements d'environnement et non sur ceux de diffusion, procède à des visites quotidiennes, pour retenir la même fréquence dans son test.
293. En retenant l'hypothèse de la société towerCast ' 144 visites de maintenance et de contrôle par an pour dix émetteurs ' le résultat du test de ciseau pour un scénario à huit émetteurs ferait apparaître une marge positive et permettrait d'exclure tout phénomène d'éviction par les prix du marché de gros aval.
294. La société TDF ajoute que l'effet de ciseau est d'autant moins établi au cas présent que le volume d'activité pris en compte par l'Autorité pour effectuer le test de ciseau ' huit radios diffusées par le concurrent aussi efficace ' est faible. Selon la société TDF en effet, c'est au regard du nombre total de radios hébergées sur le site ' trente et une radios ', et non au regard du seul nombre de radios concernées par la NEVA ' vingt radios ' qu'il y a lieu d'apprécier le nombre de radios potentiellement adressables par le nouvel entrant. Elle souligne à cet égard que, dans sa demande d'hébergement, la société towerCast avait réclamé une salle dédiée pour héberger de un à trente émetteurs, preuve qu'elle entendait également prospecter les radios qui n'étaient pas concernées par la NEVA.
295. D'autre part, la société TDF soutient que l'Autorité a procédé à des modifications de paramètres injustifiées dans son test de ciseau tarifaire et renvoie, à cet égard, à l'étude établie, à sa demande, par le cabinet Terra Consultants le 10 octobre 2014, d'où il ressort que, même en retenant le chiffre de 374 visites par an, aucun ciseau tarifaire ne peut être établi une fois corrigés lesdits paramètres erronés.
296. Les sociétés TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure développent les mêmes moyens d'annulation.
297. La société towerCast fait valoir que, pour effectuer le test de ciseau tarifaire, l'Autorité s'est fondée sur l'étude « retail minus » produite par la société TDF, que si elle a été amenée à modifier certains des paramètres retenus dans cette étude lorsqu'il apparaissait qu'ils étaient inexacts, elle a retenu l'hypothèse la plus favorable à la société TDF à chaque fois que des doutes subsistaient, qu'ainsi le test réalisé est incontestable en ce qu'il démontre l'effet de ciseau tarifaire.
298. Elle ajoute que l'étude établie à sa demande par le cabinet CRA en janvier 2014 et l'étude actualisée du même cabinet de juillet 2015, qu'elle produit, confirment la réalité et la persistance de cet effet après le prononcé des mesures conservatoires.
299. L'Autorité fait valoir que, s'agissant du nombre de visite de vérification retenu dans le test de ciseau, dès lors que la société TDF a fait le choix d'assurer des actions de vérification quotidiennes réalisées par un personnel sur place, et fait valoir cette prestation dans son argumentaire commercial auprès de ses clients, et eu égard à l'importance que revêt le site de la tour Eiffel pour les éditeurs, soucieux d'anticiper toute perturbation éventuelle de la diffusion par des contrôles préventifs récurrents, le contrôle quotidien doit être pris en compte dans le test de ciseau.
300. S'agissant du volume d'activité pris en compte dans le test de ciseau, l'Autorité fait valoir, d'une part, que le volume d'activité maximal d'un diffuseur hébergé par la société TDF sur le site de la tour Eiffel est d'abord déterminé par la surface limitée mise à sa disposition. Or, la salle dédiée de 27 m² que la société TDF proposait à la société towerCast ne peut recevoir que huit émetteurs au maximum. A cet égard, l'Autorité souligne que, dans son étude « retail minus », la société TDF elle-même avait retenu deux hypothèses à huit points de service.
301. D'autre part, un test de ciseau fondé sur une volumétrie de dix émetteurs reviendrait à diffuser 50 % des fréquences renouvelées par le CSA, autodiffusion incluse. Attendre d'un diffuseur nouvel entrant qu'il conquiert, dès la première année, 50 % des contrats de diffusion remis en jeu serait irréaliste et disproportionné en raison des désavantages de coûts subi par un concurrent et des parts de marché qu'un nouvel entrant est susceptible d'atteindre sur le site de la tour Eiffel.
302. S'agissant enfin de la critique des autres paramètres retenus dans le test de ciseau, l'Autorité souligne qu'elle a déjà répondu dans la décision attaquée à l'ensemble des objections soulevées par l'étude du 10 octobre 2014.
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303. A titre liminaire, la cour souligne qu'il convient de raisonner en se plaçant dans l'hypothèse où l'opérateur aussi efficace que TDF a reçu de celle-ci l'ensemble des informations nécessaires pour construire son offre de diffusion et ce, dans un délai lui permettant de la proposer utilement aux éditeurs.
304. En premier lieu, la cour souligne que c'est à juste titre que, aux points 609 à 613 de la décision attaquée, l'Autorité a analysé le volume d'activité à prendre en compte pour effectuer le test de ciseau par référence au nombre de fréquences renouvelées par le CSA ' vingt ' et non par référence au nombre total de radios pouvant être hébergées sur le site de la tour Eiffel ' trente et une.
305. En effet, si l'appel à candidatures du CSA de novembre 2006 a été l'occasion d'une mise en concurrence des diffuseurs par les éditeurs radios dont les autorisations d'émettre étaient renouvelées, il n'est pas allégué, ni a fortiori démontré, par la société TDF que les éditeurs radios non concernés étaient en mesure de mettre fin au contrat liant chacun d'eux avec un diffuseur pour contracter avec un nouveau diffuseur.
306. Ainsi, les éditeurs dont un opérateur nouvel entrant hébergé sur le site de la tour Eiffel pouvait espérer gagner la clientèle en 2007 n'étaient qu'au nombre de vingt.
307. En second lieu, pour justifier son choix de procéder au test de ciseau sur une volumétrie de huit radios diffusées, l'Autorité retient, d'une part, que la salle dédiée de 27 m² que la société TDF proposait à la société towerCast ne pouvait recevoir que huit émetteurs au maximum et, d'autre part, qu'il n'est pas réaliste qu'un diffuseur nouvel entrant conquière, dès la première année, 50 % des contrats de diffusion remis en jeu, compte tenu des désavantages de coûts subi par un concurrent et des parts de marché qu'un nouvel entrant est susceptible d'atteindre sur le site de la tour Eiffel.
308. Toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit dans le cadre de l'examen du grief n° 2, la salle dédiée dont la société towerCast réclamait l'attribution dans sa demande d'offre de gros d'hébergement, ne fournit aucun indice sur le nombre de radios que cette société aurait pu diffuser.
309. Par ailleurs, et surtout, ainsi que le rappelle l'Autorité, au point 578 de la décision attaquée, le test de ciseau tarifaire ne fait intervenir que les tarifs et les coûts de l'entreprise dominante, et non la situation spécifique de ses concurrents, actuels ou potentiels (sauf circonstances très particulières), en application du critère de l'opérateur aussi efficace.
310. En effet, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence des juridictions de l'Union, afin d'apprécier la licéité de la politique de prix appliquée par une entreprise dominante, il convient, en principe, de se référer à des critères de prix fondés sur les coûts encourus par l'entreprise dominante elle-même et sur la stratégie de celle-ci. En particulier, s'agissant d'une pratique tarifaire aboutissant à la compression des marges, l'utilisation de tels critères d'analyse permet de vérifier si cette entreprise aurait été suffisamment efficace pour proposer ses prestations de détail aux clients finals autrement qu'à perte, si elle avait été préalablement obligée d'acquitter ses propres prix de gros pour les prestations intermédiaires (CJUE, arrêt du 17 février 2011, TeliaSonera Sverige, C-52/09, points 41 et 42 ; TUE, arrêt Telefónica et Telefónica de España/Commission, précité, points 190 et 191).
311. Il s'ensuit que le concurrent aussi efficace est un concurrent théorique, qui se définit exclusivement par référence aux coûts de l'entreprise dominante verticalement intégrée : il est, littéralement, l'entreprise verticalement intégrée placée, contrairement à sa situation réelle, dans l'obligation de supporter ses propres prix de gros.
312. Dans ces conditions, aucune des particularités empruntées aux concurrents réels de l'entreprise dominante n'a à être prise en compte, sauf à fausser le résultat du test, dont la finalité est de mesurer l'atteinte éventuelle à la concurrence dans le but de maintenir le plus haut degré de concurrence possible, dans un contexte où celle-ci est déjà limitée par la présence de l'entreprise dominante, et non dans le but de protéger tel ou tel concurrent.
313. C'est la raison pour laquelle il n'y a pas lieu de postuler que le concurrent aussi efficace que la société TDF est un diffuseur nouvel entrant, quand bien même la société towerCast l'aurait été en 2007 (affirmation d'ailleurs discutable, puisque cette société diffusait déjà deux radios depuis le site de la tour Eiffel). Au surplus, il y a une contradiction à postuler, comme le fait la décision attaquée aux points 614 à 621 que le concurrent aussi efficace, c'est-à-dire le « concurrent ayant la même structure de coûts que celle de l'activité en aval de l'entreprise verticalement intégrée » (TUE, arrêt Telefónica et Telefónica de España/Commission, précité, point 194), est en même temps un nouvel entrant sur le marché pertinent et subit, à ce titre, des désavantages de coûts.
314. De la même manière, il n'y a pas lieu, contrairement à ce que soutiennent les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure, de postuler que le concurrent aussi efficace appartient à un groupe détenteur de fréquences radios et pourrait auto-diffuser les radios de ce groupe. Là encore, le test de ciseau tarifaire doit être fondé sur la situation d'un opérateur aussi efficace que TDF, c'est-à-dire un opérateur hypothétique qui n'appartient pas à un groupe détenteur de fréquences radios.
315. Certes, ainsi que l'a rappelée l'Autorité, au point 617 de la décision attaquée, dans la communication de la Commission (2009/C 45/02) intitulée « orientations sur les priorités retenues pour l'application de l'article 82 CE aux pratiques d'éviction abusives des entreprises dominantes », publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 24 février 2009 (ci-après les « orientations sur les pratiques d'éviction abusives »), la Commission, après avoir affirmé, au point 23 que, « [p]our éviter l'éviction anticoncurrentielle, la Commission n'interviendra normalement que lorsque les pratiques considérées ont déjà entravé ou sont de nature à entraver la concurrence d'entreprises considérées comme aussi efficaces que l'entreprise dominante », elle ajoute, au point 24 : « La Commission reconnaît cependant que, dans certaines circonstances, un concurrent moins efficace peut également exercer une contrainte qui doit être prise en considération lorsqu'il s'agit de déterminer si un comportement déterminé en matière de prix entraîne une éviction anticoncurrentielle. Elle examinera cette contrainte d'une manière dynamique, étant donné qu'en l'absence d'une pratique abusive ce concurrent peut bénéficier d'avantages liés à la demande, tels que les effets de réseau et d'apprentissage, qui tendront à renforcer son efficacité. »
316. Cette citation, ainsi que les développements figurant aux points 618 à 621 de la décision attaquée, auraient pu, le cas échéant, être analysés comme des indices que l'Autorité a voulu s'inscrire dans l'hypothèse visée au point 24 des orientations sur les pratiques d'éviction abusive et s'est employée à rechercher si les pratiques tarifaires de la société TDF n'étaient pas abusives, quand bien même elles n'évinceraient pas un concurrent aussi efficace, mais moins efficace que cette société. La cour constate toutefois que l'Autorité n'a pas cherché à démontrer et, a fortiori, n'a pas établi que, dans le cas d'espèce, étaient réunies des circonstances justifiant de sauvegarder la contrainte concurrentielle exercée par un concurrent moins efficace que la société TDF. Au surplus, la cour relève que l'Autorité n'a pas cessé de rappeler que le test mis en 'uvre aux fins d'établir la réalité du grief n° 3 était un test de ciseau tarifaire bâti par référence à un opérateur aussi efficace que la société TDF.
317. Dès lors, le choix d'une volumétrie de huit radios pour le test de ciseau ne saurait être justifié par référence aux surfaces susceptibles d'être mises à la disposition d'un concurrent par la société TDF ou au désavantage que subit un nouvel entrant en raison de l'absence de mutualisation de ses coûts sur le site de la tour Eiffel et des moindres économies d'échelles ou de gamme qui en résultent.
318. Mais, si la notion de « concurrent aussi efficace » renvoie à un opérateur hypothétique, en revanche les marchés amont et aval dans lesquels s'insèrent les pratiques dont le test vise à apprécier le caractère anticoncurrentiel, sont des marchés réels, dont les caractéristiques intrinsèques ne sauraient être ignorées lorsque sont arrêtés les paramètres du test de ciseau.
319. Or, ainsi qu'il ressort des points 50, 63 et 184 de la décision attaquée, parmi les vingt radios ayant conclu un nouveau contrat de diffusion à l'occasion du renouvellement des autorisations de diffusion, quatre appartenaient au groupe NRJ (NRJ, Chérie FM, Nostalgie et Rire & Chansons) et trois au groupe Lagardère Active (Europe 1, Europe 2 ' devenue depuis Virgin Radio ' et RFM). Il est établi qu'à l'époque des faits, ces groupes pratiquaient l'auto-diffusion.
320. Ainsi que l'a expliqué le groupe Lagardère Active, lors de son audition par les services d'enquête de l'Autorité : « Une prestation d'hébergement permet d'économiser près de 20 % par rapport à une prestation globale de diffusion. L'achat de matériel uniformisé permet notamment de négocier de meilleurs tarifs. Les prestations complémentaires de TDF (achat des traitements de son, des codeurs RDS, des traitements satellite) sont très chères. En faisant nos propres investissements, nous réalisons d'importantes économies » (cote 5814, 07/0017F, reproduite au point 835 de la décision attaquée).
321. Au vu des avantages considérables pour un groupe de radio capable d'auto-diffuser ses propres fréquences, tels les groupes NRJ et Lagardère Active, l'internalisation de la diffusion peut résulter de choix stratégiques ne dépendant pas uniquement des prix.
322. Dans le cas d'espèce, sept radios, soit 35 % des vingt radios concernées par la conclusion d'un nouveau contrat de diffusion, étaient susceptibles d'être auto-diffusées. Dans ces conditions, l'hypothèse dans laquelle la société TDF et un concurrent aussi efficace que la société TDF diffuseraient, ensemble, 100 % de ces vingt radios, soit 10 radios diffusées par chacun d'eux, n'est pas vraisemblable.
323. Dès lors, bâtir le test de ciseau sur une volumétrie de dix radios, soit 50 % des vingt radios concernées, serait effectivement irréaliste et disproportionné.
324. Vainement serait-il objecté qu'en 2007, à l'arrivée de la NEVA, l'ensemble des éditeurs radios, y compris ceux appartenant aux groupes NRJ et Lagardère Active, ont fait le choix de confier la diffusion de leurs fréquences à la société TDF. En effet, d'une part, la société towerCast, qui appartient au groupe NRJ, a cherché de façon active à souscrire une offre de gros d'hébergement auprès de TDF, et le groupe Lagardère Active, lui-même, a adressé à la société TDF l'expression de ses besoins (décision attaquée, points 516 et 520). D'autre part, les pratiques objet du grief n° 2, dont l'Autorité a constaté qu'elles avaient été, à tout le moins partiellement, les mêmes dans les rapports de la société TDF avec le groupe Lagardère Active (décision attaquée, point 516), suffisent à expliquer qu'aucune des fréquences appartenant à ces deux groupes n'ait été auto-diffusée.
325. Au regard des spécificités du marché de gros aval des services de diffusion depuis le site de la tour Eiffel en 2007, caractérisée par le fait que les éditeurs de sept des vingt radios concernées appartenaient à un groupe intégré, il est approprié de retenir, pour le test de ciseau, une volumétrie de huit radios diffusées à compter de la NEVA par un opérateur aussi efficace hébergé sur le site, ce chiffre représentant plus de la moitié (61,5%) des treize (20 - 7) radios insusceptibles d'auto-diffusion, et 40 % de l'ensemble des vingt radios pour lesquelles une mise en concurrence a eu lieu.
326. C'est au demeurant cette même hypothèse d'une volumétrie de huit radios que la société TDF a retenu dans son étude « retail minus », dont le but déclaré était de « vérifier, à partir des prix de diffusion de TDF, qu'un opérateur alternatif de diffusion, compte tenu des prestations achetées auprès de TDF (accès au système antennaire, hébergement dans un local dédié, énergie, climatisation, ...) et de ses propres coûts (émetteurs, télégestion et maintenance de ces derniers) ne réalise pas des pertes » (cote 3280, 07/0018M), ce qui en conforte le bien-fondé.
327. La cour ajoute surabondamment que, si, comme la société TDF l'avait suggéré devant l'Autorité (décision attaquée, point 622), avait été retenue la part de marché de la société towerCast dans la diffusion nationale en 2006, soit 21 %, l'application de cette part de marché à un marché de vingt fréquences aurait conduit à un volume d'activité pertinent à prendre en compte pour le test de ciseau de 4,2 radios diffusées (20 radios x 21 %), soit un chiffre inférieur à celui, plus avantageux pour la société TDF, de huit radios diffusées retenu dans le test. Il est vrai que la société TDF proposait de retenir, non pas ce pourcentage de 21 %, mais celui de 33 %, correspondant selon elle, à la part de marché de la société towerCast hors autodiffusion ; mais elle n'a jamais justifié de l'exactitude de ce chiffre de 33 %.
328. En troisième lieu, c'est à juste titre que, s'agissant, d'une part, des visites de maintenance curative (ou corrective), l'Autorité a retenu, pour les interventions curatives réalisées sur les émetteurs, un nombre de visite de 0,2 par an et par émetteur (soit le chiffre retenu par la société TDF dans son étude « retail minus » comme dans l'étude du 10 octobre 2014) et, pour les interventions curatives réalisées sur les autres équipements que les émetteurs, un nombre de trois visites par an (contre deux dans l'étude du 10 octobre 2014).
329. En effet, ainsi qu'il résulte du point 677 de la décision attaquée, l'Autorité s'est fondée sur la base de données « [P] » de la société TDF, qui recense les pannes intervenues en 2006, dont il ressort que, cette année-là, quarante et un incidents ont nécessité des interventions de maintenance curative sur trois jours, soit trois visites.
330. Force est de constater que les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure ne contestent pas l'exactitude de cette information tirée de la base « [P] ».
331. S'agissant, d'autre part, des visites de contrôle (ou actions de vérification), dans son étude « retail minus », TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure soulignent que les personnes dont la société TDF dispose sur le site de la tour Eiffel « effectuent une vérification quotidienne lors de la tournée journalière qui est réalisée sur l'ensemble du site ». Questionnée par l'Autorité, la société TDF a précisé, en juin 2013, que « chaque jour, un employé de TDF réalise une ronde d'environ 2 à 3 heures pour contrôler la bonne marche de l'ensemble des équipements d'environnement et de diffusion situés sur le site de la Tour Eiffel » et que, « [d]ans le cadre de cette visite de contrôle quotidienne, l'employé contrôle le bon fonctionnement des émetteurs situés sur le site de la Tour Eiffel » (cote 14670, 07/0017F).
332. Ainsi que l'Autorité l'a exactement relevé aux points 682 et 687 de la décision attaquée, la société TDF fait de cette vérification quotidienne, qui porte à la fois sur les équipements d'environnement et sur ceux de diffusion, un argument commercial auprès de ses clients éditeurs. Or, eu égard à l'importance que revêt pour les éditeurs le site de la tour Eiffel, une telle supervision quotidienne par un personnel présent sur place, en apportant une garantie supplémentaire que les pannes éventuelles seront évitées ou qu'il y sera immédiatement remédié, est susceptible de constituer un argument déterminant au moment où ils choisissent leur diffuseur.
333. Dans ces conditions, l'opérateur aussi efficace que TDF est celui qui propose à ses clients le même niveau de vérification des équipements de diffusion, de sorte que la question de savoir si, s'agissant de ces équipements, un opérateur tel que la société towerCast aurait techniquement pu recourir à la télégestion n'est pas pertinente.
334. La cour ajoute, subsidiairement, qu'en tout état de cause, ainsi que l'Autorité l'a rappelé au point 685 de la décision attaquée, la société TDF elle-même se sert de deux modes de contrôle, un système de télégestion et une tournée journalière de son personnel sur le site de la tour Eiffel, ce qui suffit à démontrer que, s'agissant à tout le moins du site de la tour Eiffel et en 2006, ces deux modes de contrôle n'étaient pas substituables et la télégestion, notamment des équipements de diffusion, ne pouvait pas remplacer les actions de vérification sur place.
335. Le fait que la société towerCast ait elle-même évalué ses besoins à 144 accès annuels (tous types de visites confondus) pour dix émetteurs, n'est pas de nature à remettre en cause les constatations qui précèdent. D'une part, ainsi qu'il résulte de l'examen des griefs n° 1 et n° 2, la société towerCast ne jouissait pas de toutes les informations nécessaires. D'autre part, et surtout, le test de ciseau n'est pas effectué au regard des choix stratégiques de la société towerCast, mais par référence à la situation d'un opérateur hypothétique aussi efficace que TDF.
336. Dès lors, c'est à juste titre que l'Autorité a retenu le chiffre de 365 visites de contrôle par an.
337. En dernier lieu, s'agissant des autres erreurs dont serait entaché le test de ciseau mené par l'Autorité, les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure se bornent à renvoyer à l'étude du 10 octobre 2014 produite par la société TDF.
338. Cette étude était destinée à répondre au rapport des rapporteurs. Or, dans la décision attaquée, l'Autorité a fait droit à une partie des objections figurant dans ladite étude, modifiant en conséquence les paramètres du test de ciseau dont elle a fait application, et a rejeté les autres objections par une motivation particulièrement développée, que la cour fait sienne, et à laquelle les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure n'opposent aucune contradiction.
339. Il convient dès lors de rejeter l'ensemble des moyens visant à l'annulation du grief n° 3.
III. SUR LE RECOURS DE LA SOCIÉTÉ TOWERCAST
340. La société towerCast demande à la cour d'infirmer la décision attaquée en ce qu'elle a considéré que la pratique de ciseau tarifaire entre le prix de détail sur le marché de gros aval des services de diffusion de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la tour Eiffel et le prix de l'accès au marché de gros amont de ces services, ne s'est pas étendue au-delà du 11 juillet 2007.
341. Elle fait valoir que l'étude établie à sa demande par le cabinet CRA en janvier 2014 démontrait le maintien d'un effet de ciseau tarifaire après la décision de mesures conservatoires n° 07-MC-05 du 11 juillet 2007. Selon cette étude, en effet, si la société TDF avait perdu un certain nombre de fréquences, elle aurait pu réduire son personnel assurant les opérations de maintenance. L'évolution de la masse salariale de la société TDF entre 2007 et 2014 validerait cette analyse. L'étude actualisée du cabinet CRA de juillet 2015 aboutirait au même constat.
342. La société towerCast considère que c'est à tort que l'Autorité a, au point 691 de la décision attaquée, refusé d'inclure dans son test de ciseau les frais de personnel liés aux actions de vérification, tout en reconnaissant de façon certaine qu'à tout le moins en partie, ils pourraient modifier l'effet des pratiques tarifaires de la société TDF.
343. Selon elle, les conclusions qui ont conduit l'Autorité à ne pas retenir l'existence d'un effet de ciseau tarifaire après juillet 2007 repose sur une hypothèse favorable à la société TDF qui aurait dû être vérifiée par les services d'instruction.
344. Les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure soulèvent l'irrecevabilité du recours de la société towerCast au motif que la nouvelle offre de gros d'hébergement remise par la société TDF le 11 août 2007 n'a fait l'objet d'aucun grief notifié.
345. L'Autorité objecte qu'aux points 690 et suivants de la décision attaquée, elle a dûment justifié sa décision de ne pas retenir de ciseau tarifaire postérieurement au 11 juillet 2007.
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346. Par la décision de mesures conservatoire n° 07-MC-05 du 11 juillet 2007, le Conseil de la concurrence a enjoint à la société TDF de lui transmettre, dans le délai d'un mois à compter de la notification de cette décision, une offre de gros d'hébergement de diffusion radio FM depuis le site de la tour Eiffel permettant aux diffuseurs alternatifs de concurrencer effectivement, sans subir de ciseau tarifaire, les offres de détail faites par la société TDF aux radios.
347. Il est constant que la société TDF a déféré à l'injonction de transmettre une nouvelle offre de gros d'hébergement, celle-ci ayant été mise à la disposition de la société towerCast le 14 août 2007 (décision attaquée, point 8).
348. Dès lors, à supposer que le prix de l'accès au marché de gros amont des services de diffusion de programmes radiophoniques en mode FM depuis le site de la tour Eiffel figurant dans cette nouvelle offre ait lui-même produit un effet de ciseau tarifaire, il s'agirait de faits nouveaux, sans rapport avec le grief n° 3 notifié aux sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure, qui était notamment fondé sur le prix exprimé dans l'offre sur mesure adressée par la société TDF à la société towerCast en mai 2007.
349. Partant, l'éventuel ciseau tarifaire résultant de l'offre de gros d'hébergement transmise à la société towerCast le 14 août 2007 n'ayant pas fait l'objet d'un grief notifié, il ne peut être jugé établi ni donner lieu, à l'initiative de la cour d'appel, au renvoi de l'affaire à l'instruction.
350. Subsidiairement, l'Autorité a, dans la décision attaquée, arrêté les paramètres à prendre en compte pour la mise en 'uvre du test de ciseau tarifaire, en modifiant certains d'entre eux initialement retenus par les rapporteurs.
351. Les opérateurs économiques concernés par la procédure ont tout loisir de contester chacun des paramètres retenus, comme de critiquer l'omission d'autres paramètres. Il leur appartient toutefois, dans le premier cas, d'établir le caractère erroné des paramètres critiqués et, dans le second cas, de rapporter la preuve du bien-fondé de l'introduction, dans le test, d'un paramètre omis par l'Autorité, sans qu'ils puissent exiger de cette dernière qu'elle pallie leur carence en procédant elle-même aux vérifications nécessaires.
352. En l'espèce, c'est à juste titre qu'aux points 690 et 691 de la décision attaquée, l'Autorité a constaté que les hypothèses sur lesquelles s'appuyait l'évaluation des coûts évitables de personnel, en cas de perte de dix fréquences radios par la société TDF, étaient insuffisamment étayées, l'évolution de la masse salariale de la société TDF entre 2007 et 2014 pouvant aussi bien provenir d'une amélioration de l'efficacité de la société TDF ' très vraisemblable dans un domaine où la technologie progresse rapidement et sur une période de sept années ' que d'une réduction du nombre de ses émetteurs.
353. Dans ces conditions, elle ne pouvait que refuser de faire droit à la demande de la société towerCast, sans être tenue de démontrer elle-même ce que cette dernière avait été impuissante à établir.
354. A titre infiniment subsidiaire, dans la mesure où le test de ciseau mené par l'Autorité a été justement établi sur la base du gain de huit fréquences radio par un opérateur aussi efficace que la société TDF, et donc sur la perte consécutive du même nombre de fréquences radio par la société TDF, l'étude du cabinet CRA, qui est fondée sur l'hypothèse de la perte de dix fréquences radios, échoue à établir que l'effet de ciseau tarifaire s'est poursuivi après le 11 juillet 2007 et jusqu'en 2014.
IV. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS
355. Les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure, qui succombent en leurs recours, seront condamnées aux entiers dépens.
356. Toutefois, la société towerCast qui succombe en son recours incident, conservera la charge des dépens afférent à ce recours.
357. De même, les sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie S.C.A. et Tyrol Acquisition 1 S.A.R.L. supporteront leurs propres dépens afférents à leurs déclarations de jonction jugées irrecevables.
358. Il y a lieu de condamner solidairement les sociétés TDF, TDF Infrastructure Holding et TDF Infrastructure à payer à la société towerCast la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
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* *
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE irrecevables les jonctions à l'instance des sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie S.C.A. et Tyrol Acquisition 1 S.A.R. ;
REJETTE les recours des sociétés TDF S.A.S., TDF Infrastructure Holding (anciennement Tyrol Acquisition 1 S.A.S.) et TDF Infrastructure S.A.S. (anciennement Tyrol Acquisition 2 S.A.S.) en annulation de la décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-D-10 du 11 juin 2015 relative à des pratiques mises en 'uvre par TDF sur le site de la Tour Eiffel ;
REJETTE le recours de la société towerCast S.A.S. en infirmation partielle de la décision n° 15-D-10 ;
CONDAMNE les sociétés TDF S.A.S., TDF Infrastructure Holding S.A.S. et TDF Infrastructure S.A.S. solidairement à payer à la société towerCast S.A.S. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que les sociétés Tyrol Acquisition 1 & Cie S.C.A. et Tyrol Acquisition 1 S.A.R.L. supporteront leurs propres dépens afférents à leurs déclarations de jonction ;
DIT que la société towerCast S.A.S. supportera ses propres dépens afférents à son recours incident ;
CONDAMNE les sociétés TDF S.A.S., TDF Infrastructure Holding S.A.S. et TDF Infrastructure S.A.S. solidairement aux autres dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Patricia DARDASOlivier DOUVRELEUR