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12/10/2017 | FRANCE | N°11/04057

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 12 octobre 2017, 11/04057


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 12 Octobre 2017



(n° , 11 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/04057



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Mars 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 09-01213





APPELANT

Monsieur [C] [Y]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1] - ITALIE

[Adresse 1]

[L

ocalité 2]

comparant en personne, assisté de Me Béatrice PEREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D1101



INTIMES

SARL WALICKI FRERES

[Adresse 2]

[Localité 3]

non représentée à l'audience



C...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 12 Octobre 2017

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/04057

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Mars 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 09-01213

APPELANT

Monsieur [C] [Y]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1] - ITALIE

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Béatrice PEREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D1101

INTIMES

SARL WALICKI FRERES

[Adresse 2]

[Localité 3]

non représentée à l'audience

CPAM 93 - SEINE SAINT DENIS (BOBIGNY)

[Adresse 3]

SERVICE CONTENTIEUX

[Localité 4]

représenté par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substitué par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS

Maître [M] [G], liquidateur judiciaire de l'Entreprise P. FERNANDES

[Adresse 4]

[Localité 5]

non comparante, non représentée

SA FUCHS LUBRIFIANTS FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 6]

non représentée à l'audience

COMPAGNIE AXA FRANCE

[Adresse 6]

[Localité 7]

représentée par Me Audrey BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815 substitué par Me Nejya KHELLAF, avocat au barreau de PARIS, toque : D0450

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 7]

[Localité 8]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue en audience publique le 15 juin 2017, devant la cour composée de :

Madame Claire CHAUX, présidente de chambre

Madame Marie-Odile FABRE DEVILLERS, conseillère

Madame Chantal IHUELLOU LEVASSORT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRET :

- DEFAUT

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Claire CHAUX, présidente de chambre et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [Y]O [C] à l'encontre d'un jugement rendu le 24 mars 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de BOBIGNY dans un litige l'opposant à la SARL WALICKI FRERES , la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis , Maître [G] [M] ès qualité de liquidateur de l'entreprise P. FERNANDES , la SA FUCHS LUBRIFIANTS FRANCE , la Compagnie AXA France .

FAITS , PROCEDURE , PRETENTIONS DES PARTIES

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard .

Il suffit de rappeler que le 31 juillet 2002, M. [Y] , salarié de la société WALICKI Frères en qualité de serrurier, intervenait au sein de la société Fuchs Lubrifiants pour procéder à une modification de la tuyauterie de plusieurs cuves quand au cours d'une opération de soudure, il a été victime d'un accident du travail provoqué par l'explosion soudaine d'une cuve .

Gravement brûlé au niveau de la face et des membres supérieurs , M. [Y] s'est vu reconnaître un taux d'incapacité de 94%. Son état de santé a été déclaré consolidé au 29 juin 2006 .

Cet accident a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis ( la caisse ) au titre de la législation professionnelle . M. [Y] a saisi la caisse d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur . En l'absence de conciliation , il saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny aux mêmes fins le 10 juin 2009.

Par jugement du 24 mars 2011, ce tribunal a débouté M. [Y] de sa demande .

Celui - ci a interjeté appel .

Par arrêt du 25 septembre 2014 , la présente Cour a infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau a :

- dit que l'accident du travail dont a été victime M. [Y] le 31 juillet 2002 est du à la faute inexcusable de la société Walicki Frères,

- fixé la majoration de rente à son taux maximum,

- déclaré inopposable à la société Walicki Frères la prise en charge de l'accident du travail

Avant dire droit sur le préjudice de M. [Y] , tous droits et moyens des parties étant réservés ,

- ordonné une expertise médicale judiciaire et désigné pour y procéder le Docteur [V] avec pour mission de donner son avis sur les souffrances endurées , le préjudice d'agrément , la perte ou diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, le préjudice esthétique , le préjudice sexuel et en outre sur les chefs de préjudices complémentaires suivants : déficit fonctionnel temporaire , assistance tierce personne , frais de logement et / ou de véhicule adapté , les préjudices permanents exceptionnels atypiques directement liés aux handicaps permanents

- dit que les frais d'expertise seront avancés par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis et fixé la consignation à 800 €

- alloué à M. [Y] la somme provisionnelle de 20 000€ laquelle versée par la caisse et sera imputée sur les préjudices réparés ,

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie ne pourra récupérer auprès de l'employeur les conséquences financières de la faute inexcusable ,

- renvoyé l'affaire à l'audience du 4 juin 2015 à 13 h 30 ,

- dit que la notification de l'arrêt aux parties vaut convocation régulière à l'audience de renvoi ci - dessus fixée ,

- condamné la société Walicki Frères à payer à M. [Y] la somme de 2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté les autres demandes .

L' expert a établi son rapport le 21 mars 2017 .

M. [Y] fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions par lesquelles il demande à la Cour :

- de fixer l'évaluation indemnitaire de son préjudice corporel à la somme totale de

409 598,41€ + réserves et de lui allouer cette somme + réserves en réparation de son préjudice corporel,

- de dire que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis fera l'avance des fonds ,

- de condamner la société Walicki Frères à lui payer la somme de 4000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la Cour de :- de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à la sagesse de la Cour eu égard à l'indemnisation des frais divers ,

- de ramener à de plus justes proportions les sommes allouées à la victime au titre des souffrances endurées, de la tierce personne, du déficit fonctionnel temporaire, du préjudice esthétique et du préjudice sexuel,

- de dire que l'indemnisation de la tierce personne temporaire ne saurait excéder la somme de 37 440 € en tenant compte des périodes de cure thermale et à défaut , la somme de

40 110 € ,

- dire que l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire ne saurait excéder la somme de 18 718€ ,

- débouter M. [Y] de ses demandes d'indemnisation au titre des dépenses de santé actuelles et futures , du préjudice d'agrément et des pertes de chance de promotion professionnelle .

Aux termes de ses écritures reprises oralement à l'audience , la compagnie AXA France IARD , assureur du liquidateur de la société WALICKI Frères, demande que soit actée sa mise hors de cause , la décision du 25 septembre 2014 étant définitive à l'égard de la société Walicki et de la compagnie Axa France IARD .

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

SUR CE , LA COUR ,

Sur les dépenses de santé actuelles et futures :

Monsieur [Y] sollicite que lui soient allouées les sommes suivantes:

- au titre des dépenses de santé actuelles : 4986,50€

- au titre des dépenses de santé futures : 20 946,69€ + réserves

Les dépenses de santé actuelles se décomposent comme suit :

- pour la période antérieure à la consolidation :

* frais de crèmes hydratantes : 220€

* prothèses auditives : 3959€

* lunettes de vue : 807,50€

Les dépenses de santé futures, se décomposent comme suit:

- frais de crèmes hydratantes : 1432,74€

- prothèses auditives : 15 572,94€

- lunettes de vue : 3941,01€

Soit la somme totale de 20 946,69€ + réserves, ces réserves correspondant au suivi dermatologique, de chirurgie, kinésithérapie, soutien psychologique .

Il fait valoir que les dépenses de santé actuelles et futures qui restent à sa charge exclusive doivent donner lieu à indemnisation, notamment les frais de crèmes hydratantes, indispensables dans le cadre du parcours thérapeutique d'un grand brûlé, lesquelles ne sont pas remboursées par la sécurité sociale, les frais de prothèses auditives dont l'expert a estimé que son état médical nécessitait la prise en charge , entretien avec piles et renouvellement et les frais de lunettes de vue , dans la mesure où il a été opéré le 7 octobre 2003 d'un ptégyrion à l'oeil droit dû à son accident .

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis s 'oppose à ces demandes au motif que les frais médicaux divers ainsi que les frais de santé et d'appareillage font déjà l'objet d'une prise en charge par la caisse et qu'ils ne sauraient faire l'objet d'une indemnisation au titre de la faute inexcusable .

Il résulte de l'article L 431 - 1, 1° figurant au chapitre I du titre III du livre IV du code de la sécurité sociale, qu'en cas d'accident du travail, les frais médicaux, chirurgicaux , pharmaceutiques et accessoires, les frais de transport et d'une façon générale, les frais nécessités par le traitement , la réadaptation fonctionnelle , la rééducation professionnelle et le reclassement de la victime sont pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie .

Ce poste de préjudice réparé même partiellement au titre du livre IV du code de la sécurité sociale n'est pas un préjudice non couvert par le livre IV et ne peut dès lors ouvrir droit à indemnisation .

La demande présentée par Monsieur [Y] à ce titre doit donc être rejetée.

Sur la tierce personne temporaire , avant consolidation :

Monsieur [Y] demande à ce titre le paiement de la somme de 53 480€ faisant valoir que ce poste de préjudice n'est pas couvert par les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale, qu'il convient de l'évaluer à la somme de 20 € par jour, que le médecin a reconnu la nécessité d'une tierce personne compte tenu de son état , de son retour à domicile le 1er novembre 2002 jusqu'à la date de consolidation le 29 juin 2006 , soit 1337 jours au rythme de 2 heures par jour, 7 jours sur 7 .

Il ajoute que l'assistance tierce personne n'est pas diminuée en cas d'aide par un membre de la famille , que le remboursement des sommes exposées n'est pas soumis à production de justificatifs de la part de la victime, que l'aide par tierce personne mérite d'être fixée à 20 € de l'heure .

La caisse primaire d'assurance maladie précise que le taux horaire sollicité par Monsieur [Y] est plus élevé que celui habituellement octroyé par la présente Cour .

Elle ajoute que si la Cour devait considérer à l'instar de M. [Y] que les périodes pendant lesquelles ce dernier a effectué une cure thermale devaient s'apparenter à des périodes d'hospitalisation et donc de déficit fonctionnel temporaire total , il conviendrait de déduire lesdites périodes dans l'évaluation de la tierce personne temporaire , que sur la période de 1337 jours qui se sont écoulés entre le retour à domicile de M. [Y] après son hospitalisation et la date de consolidation de son état de santé , il a effectué 4 cures thermales , pour un total de 89 jours , de sorte que l'indemnisation de la tierce personne temporaire ne pourra excéder la somme de 37 440 € ( 1337 jours - 89 jours de cure thermale = 1248 jours x 2heures par jour x 15 € )

Si la Cour ne devait pas comptabiliser lesdites périodes au titre du déficit fonctionnel temporaire, l'indemnisation ne pourrait excéder la somme de 40 110 € ( 1337 x 2h par jour x 15€ )

Il ressort des conclusions de M [Y] que celui - ci demande l'indemnisation de ses périodes de cure thermale au titre du déficit fonctionnel temporaire .

Il n'y a pas lieu de considérer ces périodes de cure thermale comme des périodes d'hospitalisation , la prise en charge n'étant pas complète . Elles ne seront donc pas prises en compte au titre du déficit fonctionnel temporaire.

Il est constant que les frais d'assistance d'une tierce personne temporaire ne doivent pas être réduits en cas d'assistance d'un membre de la famille ni subordonnés à la production de justificatifs de dépenses effectives .

Il ressort du rapport d'expertise qu'une assistance non médicalisée , non spécialisée a été nécessaire à compter du retour à domicile, le 1er novembre 2002, jusqu'à la date de consolidation le 29 juin 2006 , au rythme moyen de 2 heures par jour , 7 jours sur 7 , pour l'aide aux transports extérieurs dès lors que M. [Y] ne conduisait pas de véhicule automobile, l'aide à la toilette, l'habillage, le déshabillage, la préparation des repas, les courses alimentaires et domestiques, l'aide à l'alimentation ( couper la viande etc ....) , l'entretien du cadre de vie et des vêtements .

Il convient de fixer le taux horaire à 15€ / heure , au titre des 1337 jours , correspondant à la période de la sortie de l'hôpital le 1er novembre 2002 jusqu'au 29 juin 2006, date de la consolidation , de sorte que le préjudice subi par M. [Y] doit être indemnisé comme suit : 1337 jours x 2 h par jour x15€/ h = 40 110 €

Sur les frais divers :

M. [Y] sollicite à ce titre :

- 1500€ d'honoraires d'assistance à expertise du 27 octobre 2016 ,

- 25, 78€ de frais de déplacement auprès du médecin conseil à cette même date

- 16,19 € de frais de déplacement à l'expertise judiciaire .

Il fait valoir que ces frais ne font l'objet d'aucune couverture par les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale et qu'il en justifie .

La caisse primaire d'assurance maladie s'en rapporte à la sagesse de la Cour s'agissant des frais d'assistance de médecin conseil, dans la limite des pièces justificatives versées par la victime. En revanche , elle s'oppose à la demande formé au titre des frais de déplacement , ceux ci ne faisant l'objet d'aucune indemnisation au titre de la faute inexcusable et M. [Y] ne produisant pas de pièces permettant de chiffrer le montant des frais de déplacement réellement exposés .

Au vu du justificatif produit en date du 12 novembre 2016 , il convient de faire droit à la demande présentée au titre de l'assistance à expertise pour un montant de 1500 € . En revanche , la demande présentée au titre des frais de déplacement sera rejetée , en l'absence de justificatifs produits .

Sur les frais d'aménagement du véhicule :

M. [Y] sollicite la somme de 21 975,25€ représentant :

- arrérages échus ou à échoir: du 30 octobre 2014 ( date d'achat du véhicule ) au 30 octobre 2019 66236,24€

- Pour l'avenir , en capitalisation ( à compter de l'année 2019 )

soit ( 6636,24€ / 5 ans ) x 11,557 ( Barème de capitalisation GP2016- tx 1,04 % - âge 72 ans en 2019 = 15 339,01 €

Soit un total de 21 975,25€

Il fait valoir que l'expert retient la nécessité d'un véhicule équipé d'une boule au volant , d'une boîte automatique et d'une caméra de recul , qu'il a acheté un véhicule aménagé et équipé comme préconisé par l'expert au prix de 18 898 € alors qu'un véhicule sans équipement coûte 12 261,76€ soit un surcoût de 6636, 24 € , qu'il y a lieu de considérer que l'acquisition d'un véhicule doit faire l'objet d'un renouvellement tous les 5 ans .

La caisse primaire d'assurance maladie demande que les sommes éventuellement allouées soient ramenées à de plus justes proportions .

L'expert conclut à la nécessité de l'aménagement du véhicule consistant en une boule au volant , la boîte automatique et la caméra de recul . Il souligne que la conduite automobile reste très réduite, que M. [Y] ne peut exercer une conduite au - delà de quelques kilomètres , que du fait de l'enraidissement cervical associé .

Au regard des conclusions du rapport d'expertise et des pièces justificatives produites , il convient de faire droit à la demande présentée et d'allouer à M. [Y] de ce chef la somme de 21 975,25 € .

Sur le déficit fonctionnel temporaire :

Monsieur [Y] sollicite l'allocation de la somme de 31 668 € représentant :

- déficit fonctionnel temporaire total durant 182 jours ( hospitalisation du 31 juillet 2002 au 31 octobre 2002 et 4 cures thermales à la [Localité 9] : du 28 janvier au 19 février 2003 , du 15 octobre au 5 novembre 2003 , du 28 janvier au 18 février 2005 et du 26 avril au 17 mai 2006 soit 89 jours de cure et 93 jours d'hôpital soit 182 jours

182 jours x 30€ = 5460€

- déficit fonctionnel temporaire partiel à 70% :

1248 jours x 30 € x 70% = 26 208 € .

La caisse offre de verser à ce titre la somme de 20 578 € selon le calcul suivant:

- déficit fonctionnel temporaire total du 31 juillet 2002 au 31 octobre 2002 :

93 jours x 20€ = 1860€

- déficit fonctionnel temporaire de 70% : du 1er novembre 2002 au 29 juin 2006 = 1337 jours x 20 € x 70% = 18 718 € .

Le déficit fonctionnel temporaire inclut , pour la période antérieure à la consolidation , l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que les temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique et jusqu'à la date de consolidation .

Le rapport d'expertise conclut à une période de déficit fonctionnel temporaire total du 31 juillet au 31 octobre 2002 , correspondant aux hospitalisations complètes, suivies d'une période de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux global de 70% initialement plus important mais plus réduit en fin de période, s'étendant du 1er novembre 2002 jusqu'à la consolidation le 29 juin 2006 . Durant cette période , M. [Y] a été pris en charge en hospitalisation de jour avec des quantités horaires variables et devant être transporté en VSL ou taxi , initialement 5 jours par semaine , puis 2 ou 3 jours par semaine .

Au regard de ces éléments , il convient de l'indemniser à hauteur de 25 € par jour de sorte que son indemnisation s'établit comme suit :

- déficit fonctionnel temporaire total : 93 jours x 25€= 2325€

- déficit fonctionnel temporaire partiel : 1337 jours x 25 € = 23 397,50€

Soit un total de 25 722,50€

Sur les souffrances endurées :

Monsieur [Y] , rappelant que l'expert les a évaluées à 6 sur une échelle de 7, demande l'indemnisation de ses souffrances physiques à hauteur de 90 000 € et de ses souffrances morales à hauteur de 40 000 € faisant valoir que la nature des lésions qu'il a subies

et l'extrême lourdeur de son parcours thérapeutique ont généré des souffrances très importantes à la fois sur le plan physique et sur le plan moral .

La caisse primaire d'assurance maladie rappelle que l'article L 452 - 3 du code de la sécurité sociale ne prévoit qu'un seul et même poste de préjudice correspondant aux souffrances endurées , lequel ne peut faire l'objet d'une double indemnisation , qu'au regard de l'évaluation faite par l'expert à 6 sur une échelle de 7 , elle demande que les sommes allouées soient ramenées à de plus justes proportions et tiennent compte des montants habituellement accordés en la matière.

L'expert relève que les souffrances endurées sont constituées par l'accident , les hospitalisations prolongées , les soins en service de grand brûlé, les interventions de nettoyage et pansement sous anesthésie, les soins infirmiers prolongés, les vêtements compressifs, la rééducation fonctionnelle, la prise en charge en centre antidouleur, la prise en charge ophtalmologique avec les soins correspondants ( larmes artificielles ), la prise en charge ORL avec appareillage auditif , le suivi pneumologique avec les traitements correspondant , le ressenti psycho - traumatique jusqu'à la consolidation, l'état anxieux et dépressif avec le suivi psychiatrique et les traitements spécialisés adaptés. L'expert conclut que l'ensemble de ces éléments justifie des souffrances endurées compte tenu de la durée des soins, des hospitalisations , des éléments douloureux et psycho traumatiques, qualifiables d'importantes ou de 6 sur une échelle de 7 .

Il convient de souligner que M. [Y] a supporté des lésions de brûlures affectant 18% de la surface corporelle avec inhalation de vapeurs toxiques touchant les deux mains , les deux avant bras, le cou et la face, qu'il est resté hospitalisé au centre de traitement des brûlés de L'HIA [Établissement 1] à [Localité 10] , du 31 juillet au 12 septembre 2002 , que son séjour a été marqué par un état de choc septique qui a justifié le recours à une trachéotomie percutanée, qu'à sa sortie , il a rejoint le centre de rééducation fonctionnelle de [Localité 11] où il est resté jusqu'au 31 octobre 2002.

Il a ensuite été pris en charge en hospitalisation de jour au centre hospitalier de [Localité 12] en rééducation fonctionnelle pendant plus de 2 mois à titre externe.Il a fait l'objet de séances de kinésithérapie en libéral à raison de 2 séances par semaine. Il a été contraint de porter en permanence pendant près de 2 ans des vêtements compressifs sur mesure ( cagoule, deux manchettes et gants , une ortèse dynamique d'enroulement de la main droite) , il a du supporter au cours des cures thermales des massages , douches et soins quotidiens . Il a en outre fait l'objet d'une prise en charge au centre anti douleur, d'une prise en charge ophtalmologique avec les soins correspondant et d'une prise en charge ORL avec appareillage auditif, d'un suivi pneumologique avec les traitements correspondant . Sur le plan moral, il a subi un ressenti psycho traumatique jusqu'à la consolidation et un état anxieux et dépressif avec le suivi psychiatrique et les traitements spécialisés adaptés .

Au regard de ces éléments qui établissent la réalité et l'importance des souffrances physiques et morales endurées , il convient d'indemniser ce préjudice par l'allocation d'une somme de 100 000 € .

Sur le préjudice esthétique :

M. [Y] sollicite la somme de 30 000€ en réparation du préjudice esthétique temporaire et 40 000 € en réparation du préjudice esthétique permanent .

Il fait valoir que l'expert a estimé son préjudice esthétique temporaire à 5 sur une échelle de 7 retenant la même évaluation pour le préjudice esthétique définitif estimant que ces deux postes de préjudices se confondaient alors qu'il s'agit de deux préjudices distincts .

La caisse primaire d'assurance maladie demande que les sommes allouées à M. [Y] soient ramenées à de plus justes proportions .

La réparation du préjudice esthétique temporaire relève des dispositions de l'article L 452 - 3 du code de la sécurité sociale . Il est constant que le préjudice esthétique temporaire est un préjudice distinct du préjudice esthétique permanent , qui doit être évalué en considération de son existence avant consolidation de l'état de la victime .

Préjudice esthétique temporaire :

L'expert conclut son rapport en faisant référence aux éléments de préjudice esthétique temporaire et permanent , se confondant , qualifiables d'assez important ou de 5 sur une échelle de 7 et constitué des éléments suivants:

- les atteintes cutanées du visage , ophtalmologique, irritation cornéenne ,

- les cicatrices des membres supérieurs : bras, avant bras, doigts longs,

- l'impotence du membre supérieur droit ,

- l'aspect figé de la main droite en rectitude et enraidissement ,

- les éléments cicatriciels pré- thoraciques , genou et jambe gauches,

- les contentions et vêtements compressifs au membre supérieur droit,

- le masque de tristesse lié à l'état dépressif maintenant chronicisé .

Cependant , il convient de souligner que les brûlures ont concerné plus de 18% de la surface corporelle et qu'elles ont affecté plus précisément les deux mains , les deux avant bras, le cou et la face soit des parties du corps visibles du regard d'autrui , que la date de consolidation fixée au 29 juin 2006 se situe 4 ans après le fait traumatique, que les séquelles initiales esthétiques ont été particulièrement marquées . En effet , pendant cette période , M. [Y] a été contraint de porter en permanence ( 23 h sur 24 h ) pendant près de 2 ans , des vêtements compressifs sur mesure ( cagoule , deux manchettes et gants ) , une ortèse dynamique et d'enroulement de la main droite , que le port de vêtements compressif dégrade l'image corporelle .

Il convient d'indemniser ce poste de préjudice esthétique temporaire par l'allocation d'une somme de 20 000 € .

Sur le préjudice esthétique permanent :

Les éléments relevés par l'expert dans ses conclusions relèvent plus précisément du préjudice esthétique permanent. Ces cicatrices , qui affectent les parties visibles du corps , notamment le cou et le visage , ont un impact important en ce que le visage constitue l'identité de chacun . En outre , M. [Y] est contraint de porter un appareil auditif.

Au vu de ces éléments , il convient d'indemniser ce préjudice esthétique permanent par l'allocation d'une somme de 20 000 € .

Sur la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle :

M. [Y] sollicite à ce titre la somme de 15 000 € faisant valoir qu'à la date des faits, il était en contrat à durée indéterminée dans la même entreprise depuis 1985 , que suite à l'accident , il a été en arrêt de travail de 2002 à 2006 avant d'être licencié , qu'il était ensuite inscrit à Pôle Emploi avant d'être mis en position statutaire de retraite depuis l'âge de ses 60 ans en 2007.

La caisse primaire d'assurance maladie s'oppose à cette demande au motif que M. [Y] ne justifie pas l'existence réelle d'une perte de chance de promotion professionnelle ni dans son principe ni dans son quantum .

Le préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle est distinct de celui résultant de la perte de gains professionnels futurs, indemnisé par la rente . Il appartient à la victime d'établir qu'elle aurait eu, au jour de l'accident, de sérieuses chances de promotion professionnelle .

Force est de constater que M. [Y] ne produit aucun justificatif en ce sens .

La demande présentée de ce chef doit être rejetée.

Sur le préjudice d'agrément :

M. [Y] sollicite de ce chef la somme de 30 000€ faisant valoir qu'avant l'accident, il faisait du vélo, du bricolage et était entraîneur de football pour enfants et que l'expert conclut à l'existence d'un préjudice d'agrément en retenant qu'il n'est plus en mesure de reprendre ni l'activité de vélo qu'il pratiquait régulièrement avec des amis de façon hebdomadaire ni son activité d'entraîneur de football pour les enfants dans un club [Localité 13] et qu'il est réduit dans les activités de jardinage et de bricolage du fait qu'il ne peut plus utiliser son membre supérieur dominant .

La caisse s'oppose à cette demande au motif que les photographies produites par M. [Y] sont insuffisantes à rapporter la preuve d'une pratique antérieure et avérée d'une activité spécifique de sport ou de loisir .

Le préjudice d'agrément réparable en application de l'article L 452 - 3 du code de la sécurité sociale est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisir .

Les constatations de l'expert ne valent que pour sa spécialité médicale. C'est à M. [Y] qu'il appartient de démontrer qu'avant l'accident il pratiquait régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisir et que du fait de l'accident il ne peut plus.

Les photos produites par M. [Y] sont insuffisantes à établir la réalité du préjudice allégué . Sa demande sera donc rejetée .

Sur le préjudice sexuel :

M. [Y] sollicite la somme de 30 000€ à ce titre . Il fait valoir qu'au delà des constatations de l'expert , la sphère sexuelle ne se résume pas à une seule fonction reproductive , que les lésions extra génitales peuvent avoir des conséquences psychologiques graves du fait de l'impossibilité ou de la difficulté d'accomplir l'acte sexuel tant sur le plan affectif que sur le plan du plaisir physique.

La caisse primaire d'assurance maladie demande que les sommes réclamées soient réduites à de plus justes proportions .

L'expert relève que la sphère sexuelle en elle - même n'a pas été concernée par le traumatisme subi mais que compte tenu de l'état anxio- dépressif, des éléments douloureux, de l'immobilisation et de la quasi non fonctionnalité du membre supérieur droit dominant , il existe une gêne fonctionnelle notable à l'exercice d'une activité sexuelle qui puisse être pleinement épanouie . Il ajoute que la libido est très fortement altérée du fait des traitements médicamenteux neuroleptiques et antidépresseurs pris au long cours , que tous ces éléments justifient un préjudice d'ordre sexuel imputable au fait accidentel .

Au regard de l'ensemble de ces éléments et de la prise en compte de la dimension psychologique , il convient d'indemniser ce préjudice par l'allocation à M. [Y] d'une somme de 15 000€ .

Ainsi au regard de l'ensemble de ces éléments , le préjudice de M. [Y] est fixé à la somme totale de 244 307,75 € dont il convient de déduire la somme provisionnelle de

20 000€ déjà versée par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis .

Par arrêt du 25 septembre 2014 , la présente Cour a dit que la caisse ne pourra récupérer auprès de l'employeur , la société WALICKI les conséquences financières de la faute inexcusable .

En conséquence , il convient de dire que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis conservera la charge des conséquences financières de la faute inexcusable en ce compris les frais d'expertise .

Sur les autres demandes :

La compagnie AXA France IARD , assureur du liquidateur de la société WALICKI Frères, demande que soit actée sa mise hors de cause, la décision du 25 septembre 2014 étant définitive à l'égard de la société Walicki et de la compagnie Axa France IARD .

Il ne sera pas fait droit à cette demande . En effet , si la décision du 25 septembre 2014 a déclaré inopposable à la société WALICIKI Frères la prise en charge de l'accident du travail et dit que la caisse primaire d'assurance maladie ne pourra pas récupérer auprès de l'employeur les conséquences financières de la faute inexcusable , il n'en demeure pas moins que cette décision a reconnu la faute inexcusable de la société WALICKI Frères à l'origine de l'accident du travail dont a été victime M. [Y] le 31 juillet 2002 .

Il n'y a donc pas lieu de mettre hors de cause la compagnie AXA France IARD , assureur du liquidateur de la société WALICKI Frères .

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

M. [Y] demande la condamnation de la société WALICKI Frères à lui payer la somme de 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

Cette demande , présentée à l'encontre de la société WALICKI Frère , doit être rejetée , la société WALICKI Frères ayant fait l'objet d'une liquidation et étant désormais représentée par la compagnie AXA France IARD , assureur du liquidateur de la société WALICKI Frères

Il sera rappelé que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale est gratuite et sans frais .

PAR CES MOTIFS ,

LA COUR ,

Vu l'arrêt rendu par cette Cour le 25 septembre 2014 ,

REJETTE les demandes présentées par Monsieur [Y] au titre :

- des dépenses de santé actuelles et futures

- des frais de déplacement auprès du médecin conseil et à l'expertise judiciaire

- de la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle

- du préjudice d'agrément

FIXE comme suit le préjudice personne subi par M. [Y] :

- au titre de l'assistance tierce personne temporaire : 40 110 €

- au titre de l'assistance à expertise : 1500 €

- au titre des frais d'aménagement de véhicule : 21 975,25€

- au titre du déficit fonctionnel temporaire : 25 722,50€

- au titre des souffrances endurées : 100 000€

- au titre du préjudice esthétique temporaire : 20 000 €

- au titre du préjudice esthétique permanent : 20 000 €

- au titre du préjudice sexuel : 15 000 €

Soit un total de 244 307,75 €

Dit qu'il convient de déduire de ce montant la somme de 20 000€ déjà versée à titre de provision par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis ,

Dit que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis conservera la charge des conséquences financières de la faute inexcusable, en ce compris les frais d'expertise ,

Dit n'y avoir lieu d'ordonner la mise hors de cause de la compagnie AXA France IARD , assureur du liquidateur de la société WALICKI Frères ,

REJETTE la demande présentée par M. [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société WALICKI ,

Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 11/04057
Date de la décision : 12/10/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°11/04057 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-12;11.04057 ?
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