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04/10/2017 | FRANCE | N°16/00063

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 04 octobre 2017, 16/00063


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 04 Octobre 2017

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/00063



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° F14/02371









APPELANT

Monsieur [V] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Loc

alité 1] (Maroc)

comparant en personne, assisté de Me Maylis KAPPELHOFF-LANÇON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0840





INTIMEE

SA ALTRAN TECHNOLOGIES La société ALTRAN TECHNOLOGIES vient ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 04 Octobre 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/00063

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° F14/02371

APPELANT

Monsieur [V] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 1] (Maroc)

comparant en personne, assisté de Me Maylis KAPPELHOFF-LANÇON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0840

INTIMEE

SA ALTRAN TECHNOLOGIES La société ALTRAN TECHNOLOGIES vient aux droits de la société ALTRAN CIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 702 012 956

représentée par Me Cécile CAPSAL, avocat au barreau de PARIS, toque : R109

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 juin 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laure TOUTENU, vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Laure TOUTENU, conseillère

Greffier : Mme Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMME, Présidente et par Madame Aurélie VARGAS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [V] [E] a été engagé par la société Altran CIS, pour une durée indéterminée à compter du 1er mars 2011, en qualité de consultant, avec le statut de cadre. La relation de travail était régie par la convention collective SYNTEC.

La société anonyme Altran Technologies est venue aux droits de la société Altran CIS.

Par lettre du 20 novembre 2012, M. [E] était convoqué pour le 29 novembre 2012 à un entretien préalable à son licenciement, et était mis à pied à titre conservatoire.

Son licenciement lui a été notifié le 10 décembre 2012 suivant pour cause réelle et sérieuse.

La société employait plus de dix salariés à la date de la rupture.

Le 17 février 2014, M. [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris . Il a formé des demandes en paiement à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappel de salaires et congés payés afférents, avec exécution provisoire.

Par jugement du 30 octobre 2015 notifié le 7 décembre 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté M. [E] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

M. [E] a interjeté appel de cette décision le 4 janvier 2016.

Aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement le 12 juin 2017, M. [E] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de :

- dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- condamner la société Altran Technologies à lui payer les sommes suivantes :

40 248 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

22 275,74 € à titre de rappel de salaires bruts

2 227,57 € au titre des congés payés afférents

1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La société Altran Technologies reprend les termes de ses conclusions visées par le greffier et demande la confirmation du jugement, le rejet de l'ensemble des demandes de M. [E], outre sa condamnation au paiement de la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de rappel de salaires

M. [E] sollicite un rappel de salaire à hauteur de 22 275,74 € correspondant à la différence entre le salaire perçu et le salaire minimum conventionnel de la position conventionnelle 3.1 majoré de 120%, outre 2 227,57 € au titre des congés payés afférents.

Il soutient que la classification 2.1 coefficient 115 de la convention collective lui a été attribuée alors que le forfait annuel jours de 218 jours par an, tel qu'imposé par l'employeur, implique nécessairement que le salarié bénéficie de la classification minimum de la position 3 de la convention collective en vertu de l'article 4 de l'accord de la branche SYNTEC du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail et que selon l'article 4.4 de cet

accord, le personnel concerné doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 120% du minimum conventionnel de sa catégorie. M. [E] précise que les dispositions de l'article 3 du même accord, dont se prévaut l'employeur, ne le concernent pas en ce qu'elles sont relatives au forfait en heures sur la semaine avec un plafond annuel en jours.

La société Altran Technologies souligne que le salarié ne prétend pas avoir occupé un poste de qualification 3.1, ni ne revendique d'heures supplémentaires, mais qu'il déclare seulement que les forfaits jours seraient réservés aux salariés de la position 3. La société Altran Technologies conteste cette affirmation en indiquant que l'article 3 relatif aux modalités 2 de l'accord national du 22 juin 1999 sur la durée du travail dispose que ces modalités s'appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. Elle fait valoir que ce montant n'est qu'une condition d'entrée dans la catégorie, que l'article 3 de l'accord prévoit par ailleurs qu'un salarié en modalités 2 doit toucher un salaire égal à 115% du minima conventionnel et que le salaire de M. [E] était largement au-dessus de ces seuils.

La qualification d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions qu'il exerce effectivement et selon les critères fixés par la convention applicable. Il appartient au salarié qui revendique une classification supérieure à celle qui lui est attribuée de rapporter la preuve qu'il remplit les conditions prévues par la convention collective applicable.

La classification attribuée contractuellement à M. [E] était la position 2.1, coefficient 115.

M. [E] revendique une qualification supérieure au moins de niveau 3, déclarant que du fait de l'application par l'employeur du régime forfaitaire en jours de la durée du travail, il doit bénéficier au moins de la position 3 sur le fondement de l'article 4 de l'accord de la branche SYNTEC du 22 juin 1999.

Il ressort du contrat de travail de M. [E] que sa durée de travail est prévue selon un forfait en jours dans la limite de 218 jours par an, englobant les variations éventuellement accomplies dans une limite dont la valeur est au maximum de 10% pour un horaire hebdomadaire de 35 heures.

M. [E] invoque l'application de l'article 4 susmentionné, relatif à la 'réalisation de missions avec autonomie complète' dont les dispositions prévoient notamment que ces salariés 'doivent également bénéficier de la position 3 de la convention collective (en général les positions 3.2 et 3.3 et dans certains cas 3.1) ou avoir une rémunération annuelle supérieure à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale ou être mandataire social'.

Il n'est pas contesté ni par le salarié, ni par l'employeur que M. [E] avait un statut de cadre autonome.

Cependant, le salarié n'allègue ni ne démontre qu'il occupait réellement des fonctions correspondant à la position 3.1.

Si le salarié est soumis à un régime forfaitaire en jours de durée du travail et que sa qualité de cadre autonome n'est pas contestée, il ne peut s'en déduire que l'employeur lui a nécessairement reconnu la position 3.

En effet, le bénéfice de la position 3 de la classification des cadres et le niveau de rémunération minimum correspondant ne peuvent être interprétés comme une obligation d'assurer une telle classification et un tel niveau de rémunération à un cadre n'entrant pas dans le champ d'application de cet article.

Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté M. [E] de ses demandes en rappel de salaires et congés payés afférents, en ce que M. [E] ne rapporte pas la preuve qu'il aurait dû bénéficier d'une position supérieure et d'un rappel de salaires en conséquence.

Sur la cause du licenciement

En l'espèce, la lettre de licenciement du 10 décembre 2012, qui fixe les limites du litige en application des dispositions de l'article L1232-6 du code du travail, est libellée dans les termes suivants :

« ... Votre Business Manager opérationnel, sur la division Datacep pour laquelle vous intervenez, vous a positionné sur la mission BE COM pour le compte de notre client RENAULT. Cette prestation qui a débuté le 19 mars 2012, et qui devait se terminer à la fin de l'année 2012, a finalement été écourtée au regard de votre attitude non professionnelle.

Ainsi, vous avez commencé une prestation au sein de la « digital Factory », pour le compte de Renault, et plus précisément pour le projet « Be Com ».

Or, à partir du mois de mai 2012, plusieurs alertes sont remontées de la part du donneur d'ordres Renault. Votre chef de projet, Madame [N] a notamment évoqué avec vous et le Project Leader ALTRAN, Madame [K], des problèmes liés à votre comportement sur le projet.

De même, Monsieur [M], chef de service « Digital Factory » de Renault, s'est également plaint de votre attitude non professionnelle, au point de demander votre sortie de mission à votre manager.

Dans son mail daté du 06 novembre, il fait part notamment d'un manque de rigueur et d'une piètre qualité dans le travail fourni, de l'état d'avancement des déploiements jamais à jour, d'un manque d'autonomie malgré de nombreux briefs, d'une attitude nonchalante conduisant à des plaintes de la part des utilisateurs de la hotline que vous gérez.

Ce comportement nuit à l'image du groupe Altran, et a été consigné par notre client dans une évaluation de la satisfaction de la prestation générale, où il est fait référence de manière explicite que votre attitude est un élément majeur de cette insatisfaction.

Une telle attitude ne correspond pas à la démarche conseil que nous demandons à l'ensemble de nos collaborateurs consultants.

Déjà en 2011, votre précédent client, la CNP, avait demandé que vous quittiez prématurément le projet pour les mêmes reproches qu'aujourd'hui et conduisant notre société à procéder, avec votre accord, au renouvellement de votre période d'essai.

Lors de votre période d'inter contrat, entre les mois de septembre 2011 et février 2012, nous avons dû vous relancer à de très nombreuses reprises afin que vous participiez aux différents événements mis en 'uvre par la société afin de vous proposer de nouveaux besoins de missions. C'est ainsi que, le 22 février, notre service des ressources humaines a dû déclencher un rendez-vous téléphonique avec vous pour vous rappeler à vos obligations.

Au vu des faits qui vous sont reprochés, nous ne pouvons nous permettre de continuer de travailler avec vous, c'est pourquoi nous vous licencions pour cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, nous vous informons que nous levons la période de mise à pied conservatoire que nous avions prise à votre endroit. Celle-ci vous sera indemnisée dans sa totalité ... ».

M. [E] indique qu'aucun reproche ne lui a été formulé sur la qualité de son travail, qu'il n'est pas établi que sa sortie de mission CNP Assurances soit imputable à un comportement fautif, et que sa période d'essai n'a pas été renouvelée. M. [E] conteste avoir fait l'objet d'un rappel à ses obligations en période inter-contrat. Il ajoute que l'allégation de problèmes liés à son comportement signalés par le chef de projet sur la mission Renault n'est aucunement justifiée. M. [E] conclut qu'il n'a jamais reçu d'avertissement ni de mise en garde quant à de prétendus problèmes de comportement, qu'au vu de ces éléments, son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société Altran Technologies fait valoir que le salarié a fait l'objet de multiples reproches sur la qualité du travail fourni lors de sa mission auprès de la CNP, que dans ces conditions, sa période d'essai a été prolongée, qu'ensuite en période inter-contrat, M. [E] a dû être rappelé à ses obligations. La société Altran Technologies fait état de problèmes de comportement signalés par la chef de projet et le 'project leader Altran' lors de la mission Renault, le chef de service exigeant qu'il soit sorti de la mission, lui reprochant un manque de rigueur, une mauvaise qualité du travail fourni, un état d'avancement jamais à jour, un manque d'autonomie et une attitude nonchalante, ces griefs constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge, pour apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles, et, si un doute persiste, il profite au salarié.

Ainsi, dans la lettre de licenciement il est fait grief à M. [E] d'avoir fait l'objet de reproches du client sur la qualité de son travail lors des missions CNP Assurances puis Renault, et un manque d'implication par rapport aux événements proposés en période inter-contrat.

M. [E] conteste avoir fait l'objet de reproches quant à sa prestation durant les missions client CNP Assurances ou Renault, produisant un courriel de Mme [V] du 12 novembre 2012, chef de projet, concluant qu'après un début un peu difficile, elle a pu trouver un mode de fonctionnement avec lui. Cependant ce témoignage est contredit par le fait que l'employeur a dû interrompre sa mission CNP Assurances à la demande du client, ainsi qu'il ressort :

- du courriel de M. [J] du 28 juillet 2011, 'business manager' demandant le renouvellement de la période d'essai du salarié si c'est encore possible suite au fait qu'il 'vient de se faire sortir de mission' et par le fait que le client Renault s'est plaint nommément de sa prestation ;

- du courriel de M. [M], chef de service production digitale Renault, en date du 6 novembre 2012, de plainte quant aux prestations relatives au déploiement d'outils web à la fonction communication, en particulier en termes de rigueur, d'autonomie et d'attitude;

- du courriel de Mme [G], 'business manager' en date du 6 novembre 2012, indiquant que la note d'enquête satisfaction du client a diminué et que le client précise qu'elle 'a baissé à cause de la prestation d'[V]'.

M. [E] nie également avoir fait l'objet de recadrages relatifs à son manque d'implication pendant les périodes d'inter-mission, toutefois, la société Altran Technologies démontre que le services des ressources humaines ont procédé à une telle mise au point :

- au vu du courriel de M. [B] du 20 février 2012, directeur opérationnel, sollicitant un point ressources humaines avec M. [E] et mentionnant 'absence des GCO, absence réunions ic du lundi, refus de missions pour distance (faire point avant)' ;

- au vu du suivi du compte rendu de point téléphonique par courriel de M. [A], du service des ressources humaines, du 22 février 2012, faisant une synthèse de points abordés et concluant 'nous comptons sur votre implication'.

Au vu de ces éléments, les griefs reprochés au salarié sont établis.

Il y a lieu dès lors de confirmer le jugement déféré qui a dit que le licenciement de M. [E] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande afférente en paiement de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

M. [E] succombant à la présente instance, en supportera les dépens. L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE M. [V] [E] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/00063
Date de la décision : 04/10/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°16/00063 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-04;16.00063 ?
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