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26/09/2017 | FRANCE | N°14/10464

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 26 septembre 2017, 14/10464


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 26 Septembre 2017



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10464



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Mars 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/01461









APPELANT

Monsieur [P] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 1]<

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comparant en personne,

assisté de Me Pierre ROBIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0622







INTIMÉE

SA LA POSTE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Paul-andré CHARLES, av...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 26 Septembre 2017

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10464

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Mars 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/01461

APPELANT

Monsieur [P] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Pierre ROBIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0622

INTIMÉE

SA LA POSTE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Paul-andré CHARLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2138

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Juin 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Frantz RONOT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Valérie LETOURNEUR , Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [P] [T] a été engagé par contrat à durée indéterminée par LA POSTE à compter du 9 janvier 1997 en qualité de vendeur, chargé de prospecter en matière de courrier et de vendre auprès des entreprises, les produits et services courrier,

Le 3 mai 1997, un nouveau contrat de travail à durée indéterminée a été signé aux termes duquel Monsieur [T] était engagé à compter du 3 mai 1997 en tant que délégué commercial courrier entreprise classification III-2,

Par avenants, Monsieur [T] a exercé à compter du 14 septembre 1998 les fonctions de chargé de clientèle grands comptes, classification III-2, au sein de la direction de la Poste de [Localité 2] à [Localité 3],

À compter du 1er mars 2001, il a exercé les fonctions de chef d'établissement de bureau de contact, classification III-3 , au bureau de [Localité 4],

À compter du 1er mars 2006, il a occupé les fonctions de directeur d'établissement terrain, classification IV-1, catégorie ingénieur et cadre supérieur- position I, à l' établissement de [Localité 3],

À compter du 1er octobre 2008, il a été nommé directeur d'établissement terrain GP 2

(classe IV, groupe A, position I) à l'établissement de [Localité 5],

À compter du 1er mars 2009, il a exercé les mêmes fonctions en relevant du groupe A, position II , le dernier salaire mensuel brut versé étant d'un montant de 3750,79 euros.

Par lettre remise en main propre, il lui a été notifié sa mise à pied à titre conservatoire rémunérée à compter du 25 mai 2011, avec interdiction d'accès aux locaux, une enquête étant effectuée par le service national d'enquête à compter du 1er juin 2011 à la suite d'un rapport issu de la mission d'investigation managériale,

Par lettre du 8 juillet 2011 , il a été convoqué, dans l'attente d'une décision définitive, à un entretien préalable fixé le 19 juillet 2011 afin de recueillir ses explications,

Par lettre du 20 juillet 2011, il a été convoqué le 29 juillet 2011 devant la commission consultative paritaire,

Par lettre du 24 août 2011, Monsieur [T] a fait l'objet d'un licenciement dans les termes suivants :

'Monsieur,

Madame [R] [L], DRH de la DTELP [Localité 2] vous a reçu en entretien préalable le 19 juillet 2011, dans le cadre d'une procédure de licenciement envisagé à votre égard.

Conformément aux règles de la procédure conventionnelle en vigueur dans notre entreprise, vous avez été convoqué devant la commission consultative paritaire, réunie le 29 juillet dernier, afin d'examiner votre dossier et donner un avis sur la mesure de licenciement envisagé. La proposition de sanction envisagée à votre égard n'a pas recueilli la majorité des membres présents.

Cependant, les explications fournies ne nous ayant pas permis de modifier notre appréciation sur la sanction envisagée, nous sommes conduits à vous notifier par la présente, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Notre décision repose sur l'ensemble des éléments de faits rappelés ci-après :

vous avez été embauché le 9 janvier 1997, en tant que conseiller courrier. Au dernier état de votre collaboration, vous occupiez la fonction de directeur d'établissement des deux bureaux de [Localité 5].

Le 14 avril dernier, Monsieur [V] [W] , DET Adjoint placé directement sous votre responsabilité hiérarchique, a fait part de son mal-être au travail à l'un des conseillers mobilité de la direction d'appui de soutien d'Île-de-France. Il a lié explicitement son mal-être à des comportements managériaux inappropriés de votre part à son égard.

Afin d'avoir une approche et une compréhension globale, une mission managériale a été demandée par le DTELP de [Localité 2] auprès du siège de l'enseigne La Poste, afin d'assurer la neutralité de la procédure et dans un souci de protection de la santé de l'ensemble du personnel concerné.

Lors de cette mission ont été entendus :

' le directeur des ventes

' les deux encadrants des bureaux de [Localité 5]

' la gestionnaire des stocks

' le caissier

' des guichetiers

' un ancien cadre du bureau

soit un total d'une dizaine de personnes, volontaires pour s'exprimer. Vous avez vous-même été entendu le 29 avril 2011 par les deux membres de cette mission, la coordinatrice nationale des assistants sociaux de l'enseigne La Poste et les directeurs d'appui et soutien pour l'Île-de-France.

Cette mission a également mis en exergue des pratiques contraires à la déontologie et à la probité. Ce dernier élément a provoqué la demande de l'ouverture d'une enquête par le DTELP de [Localité 2] qui a saisi, pour ce faire, le service national des enquêtes le 1er juin dernier.

Il a été constaté les manquements suivants :

1-manquement au respect des règles d'un challenge commercial, au profit d'un collaborateur

Les règles du challenge commercial CAP horizon prévoient que les meilleures équipes de ventes puissent engranger des points pour les échanger ensuite contre des cadeaux. L'enquête fait apparaître que vous avez transmis les points restants et non utilisables de certains agents sur le compte d'un autre agent, afin que ce dernier bénéficie d'un cadeau. Ce transfert réalisé de manière unilatérale, contrairement aux règles applicables et au profit d'un agent choisi par vos soins, constitue une faute managériale au regard des comportements d'exemplarité attendus de la part d'un directeur d'établissement envers ses collaborateurs.

2-manquement au respect des règles de commissionnement et abus de position hiérarchique

Les règles du commissionnement financier sont établies au plan national, sur la base d'un certain nombre de critères garantissant l'équité dans le versement des montants alloués. Vous avez demandé à l'une de vos collaboratrices de transgresser ces règles, en lui faisant déclarer comme apporteurs dans le cadre de la campagne du livret A, trois agents n'ayant pas réalisé cet apportage. Cet abus de position hiérarchique, au profit de certains de vos collaborateurs, constitue une faute professionnelle non acceptable pour un manager.

Le rapport de la mission managériale fait également mention de comportements managériaux inappropriés à l'encontre du personnel des bureaux de [Localité 5]. Le médecin du travail a confirmé la souffrance au travail d'agents de ses bureaux, liée à la récurrence et à l'intensité de ces comportements de votre part à leur égard.

Ce comportement managérial inapproprié à ce que l'enseigne La Poste attend de ses managers ainsi que les manquements à la probité cités ci-dessus nous conduisent à vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, car vous ne respectez pas les obligations contractuelles liées à votre fonction, ni en terme de conformité aux procédures en vigueur dans notre entreprise, ni en terme de comportement attendu de la part de notre encadrement vis-à-vis des collaborateurs de l'entreprise.

La date prévue de première présentation de cette lettre marquera le début de votre préavis de trois mois que nous vous dispensons d'effectuer et qui vous sera néanmoins payé. (...)'

Un certificat de travail a été remis à l'intéressé visant son emploi du 3 mai 1997 au 24 novembre 2011,

Par jugement rendu le 10 mars 2014, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes.

Monsieur [T] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions visées au greffe le 20 juin 2017 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [T] demande l'infirmation du jugement et la condamnation de LA POSTE à lui régler les sommes suivantes :

91'975,40 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

13'795,41 euros à titre de dommages-intérêts en raison des conditions vexatoires de la rupture du contrat de travail,

27'590,82 euros à raison de l'exécution fautive du contrat de travail,

66'080 € au titre des astreintes outre 6608 € au titre des congés payés sur astreinte

5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

le prononcé des intérêts légaux à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes,

Par conclusions visées au greffe le 20 juin 2017 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, LA POSTE demande la confirmation du jugement, le rejet des demandes de Monsieur [T] et sa condamnation aux dépens.

MOTIFS

- sur le licenciement

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié . Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables ;

En l'espèce, aux termes de la lettre de licenciement du 24 août 2011 qui fixe les limites du litige, il est reproché à Monsieur [T] un manquement au respect des règles d'un challenge commercial au profit d'un collaborateur en ce que, transgressant les règles du challenge Cap Horizon, il a transféré de manière unilatérale les points restants et non utilisables de certains agents sur le compte d'un autre agent choisi par ses soins afin que ce dernier bénéficie d'un cadeau;

Il est également reproché un manquement au respect des règles de commissionnement et abus de position hiérarchique, l'intéressé ayant demandé à l'une de ses collaboratrices de transgresser les règles de commissionnement financier en lui faisant déclarer comme apporteurs, dans le cadre de la campagne du livret A, trois agents alors que ceux ci n'avaient pas réalisé cet apportage,

L'employeur relève également des comportements managériaux inappropriés à l'encontre du personnel des bureaux de [Localité 5], le médecin du travail ayant confirmé la souffrance au travail d'agents de ces bureaux liés à la récurrence et à l'intensité des comportements de Monsieur [T];

Il résulte des termes du règlement du challenge national annuel 'CAP HORIZON' produit aux débats que les salariés participants, inscrits sur un site dédié à l'opération, bénéficiaient de points dont ils disposaient librement sur l'année leur donnant accès à des cadeaux, les points pouvant être transformés en de tels cadeaux jusqu'au 28 février 2011 et n'étant plus utilisables passé cette date;

Monsieur [T] fait ici valoir que le transfert des points qui a été réalisé l'a été au profit du bureau et non pas au profit d'un agent choisi par lui seul, ce, en reportant les points inutilisables et non portables sur la seule salariée n'ayant pas réalisé des achats et ne comptant pas en réaliser, Madame [G] [U];

Il convient cependant d'observer qu'aux termes du rapport d'enquête établi le 12 juillet 2011, dans des conditions d'impartialité, par trois personnes, Madame [R] et deux enquêteurs, Monsieur [S] et Madame [Z], les auditions de Messieurs [C], [Y], [H] et de Madame [N] ont révélé que ces derniers ne s'étaient pas vus consulter avant le transfert de leurs points au profit de Madame [U],

Le rapport mentionne que des messages visant un tel transfert avaient été envoyés sous le nom de Monsieur [T] , certains mettant même en évidence la survenance d'un désaccord sur les points ainsi transférés, l'intéressé, mentionnant lui même lors de son audition (page 7), ne pas avoir eu l'opportunité de communiquer avec les différents agents sur ces transferts ;

Il en résulte qu'en décidant du transfert de ces points, l'intéressé a transgressé les règles du réglement du challenge et pris des décisions sans l'accord de certains salariés concernés;

S'agissant de l'infraction aux règles de commissionnement financier, il résulte de la même enquête que Monsieur [T] y confirme avoir demandé à Madame [J] [A] d'alimenter la base apport avec des codes agents qu'il connaissait afin que le travail d'apport sur livret A soit quantifié à sa juste action et à sa juste mesure;

Aucun élément n'est cependant apporté sur l'irrégularité d'un tel procédé en ce qu'il aurait privé la conseillère d'un commissionnement ni en ce qu'il aurait permis de façon abusive la rétribution de trois guichetiers au titre d'un travail relatif à l'ouverture des livrets A;

La lettre de licenciement mentionne enfin que le rapport de la mission managériale fait mention de comportements managériaux inappropriés à l'encontre du personnel des bureaux de [Localité 5], le médecin du travail ayant confirmé la souffrance au travail d'agents de ces bureaux liés à la récurrence et l'intensité des comportements du salarié à leur égard;

Monsieur [T] conteste dans ses écritures avoir été avisé de la mise en place de cette mission managériale. Il en relève le caractère précipité, biaisé et accusatoire et observe que sa mise à pied le 25 mai est intervenue alors que la rédaction du rapport de synthèse des auditions n'était pratiquée que le 26;

Les pièces produites aux débats justifient cependant que Monsieur [T] a été reçu par Madame [I], coordinatrice nationale des assistants sociaux de l'enseigne de la poste et par [U] [F], directeur d'appui et de soutien relations humaines pour l'Île-de-France le 29 avril 2011, sur la base d'une alerte constituée d'un mail d'un collaborateur en date du 14 avril, le salarié étant auditionné sur son pilotage commercial, son management, ses relations avec ce cadre, Monsieur [W], Monsieur [F] évoquant notamment alors un mail adressé par l'intéressé à son supérieur hiérarchique aux termes duquel il aurait traité Monsieur [W] de 'crapule et de bras cassé';

Il en résulte que l'intéressé a été à même de s'expliquer sur les éléments relatifs à son comportement managérial avant sa mise à pied, étant ici observé que l'employeur, en procédant à une telle mission d'analyse, ne contrevenait pas aux termes de l'instruction du 15 juin 2009 visant la seule prévention du harcèlement;

Ces pièces justifient que l'enquête a ensuite donné lieu , avant la mise à pied conservatoire de Monsieur [T] le 25 mai, à l'audition de Monsieur [J], directeur des ventes et supérieur hiérarchique de Monsieur [T], le 3 mai 2011, de Monsieur [G] et de Monsieur [W], directeur d'établissement terrain adjoint , alors en arrêt maladie, le 5 mai ;

Les pièces communiquées justifient que l'appelant a fait ensuite l'objet d'un entretien le 19 juillet par la directrice des ressources humaines, Madame [L], puis d'une convocation devant la commission consultative paritaire le 29 juillet , sur la base d'une enquête du service national d'enquêtes effectuée à compter du 1er juin dont le rapport a été rédigé le 12 juillet et d'un rapport établi le 20 juillet 2011 par le directeur des ressources humaines adjoint visant un comportement managérial inapproprié et des irrégularités dans le traitement des commissionnements du bureau ;

Il s'en déduit que le licenciement de Monsieur [T] est intervenu aux termes d'entretiens s'étant tenus le 29 avril 2011, 19 juillet 2011, 29 juillet 2011 durant lesquels l'intéressé était présent ou représenté , le principe du contradictoire étant respecté , le salarié étant à même de présenter sa défense;

S'agissant des faits reprochés, l'employeur se réfère , pour fonder le licenciement, aux comportements managériaux inappropriés rapportés dans la mission managériale;

À cet égard, l'employeur produit l'audition de Monsieur [W] , dans le cadre de cette mission, visant la dégradation de ses conditions de travail, le salarié mentionnant des insultes proférées par Monsieur [T] à l'encontre d'agents, l'utilisation d'expression du type « ta gueule », des recadrages et des humiliations devant le public, les agents et des clients, le favoritisme dont profitaient certains salariés, des reproches portant sur son incompétence , celle de Monsieur [G] et d'autres salariés comme Madame [N], traitée une fois de 'pute , salope';

La cour observe que ce témoignage est corroboré par ceux , circonstanciés et concordants, d'autres salariés du bureau, Messieurs [D], [G] , [Q], [B], [Y], [C] et Madame [N], reçus lors de la mission et mettant notamment l'accent sur les emportements de Monsieur [T], ses insultes à l'égard de salariés ( 'gros nul', 'je veux casser [V]') voire de clients ( 'on n'a pas besoin de clients comme vous');

L'employeur produit enfin aux débats des courriels de Madame [K], médecin du travail, confirmant avoir rencontré Monsieur [W] et visant les troubles dont il justifiait au regard des conflits qu'il était amené à relater, le médecin du travail mentionnant dans un courriel du 7 juillet 2011 avoir par ailleurs vu des agents de l'agence [Localité 5] ayant dans leur ensemble mis en cause leur directeur, parlant également d'un langage grossier irrespectueux, de favoritisme, des agents lui semblant notamment marqués par cette situation;

Ces éléments, qui par leur concordance, justifient d'un comportement managérial inadapté conduiront à confirmer le conseil de prud'hommes, qui par des motifs pertinents que la cour adopte par ailleurs, a retenu la cause réelle et sérieuse du licenciement ,

-Sur le caractère vexatoire du licenciement,

La cour a d'ores et déjà rappelé la chronologie des faits précédant la notification du licenciement le 24 août 2011 et visé le caractère contradictoire de la procédure mise en place ainsi que le nombre des enquêtes internes;

La cause réelle et sérieuse du licenciement ayant été par ailleurs retenue, la demande fondée sur le caractère vexatoire de la rupture a lieu d'être rejetée, aucun élément ne venant non plus justifier de propos ou d'attitudes déplacés;

-sur les conditions d'exécution du contrat de travail,

Monsieur [T] fait ici valoir que son évaluation 2010 procède d'une véritable provocation et d'une discrimination, qu'il n'a pas été donné suite à sa demande d'un entretien d'évaluation tripartite, que le choix d'une mission managériale a constitué une man'uvre déloyale pour le détruire, qu'il a pour sa part toujours évoluée dans un contexte difficile subissant les pression de sa hiérarchie et mettant tout en 'uvre afin de maintenir au bureau dont il avait la responsabilité, une organisation pérenne, en veillant notamment au bien-être des salariés placés sous sa responsabilité;

la cour observe cependant que la fiche d'évaluation de Monsieur [T] au titre de l'année 2010 a été signée le 10 mars 2011 et que la procédure disciplinaire a été mise en 'uvre à partir d'avril 2011, que dès lors, le défaut de réunion d'une audience tripartite ne constitue pas, dans ce contexte, un manquement de l'employeur;

L'examen de l'évaluation permet de retenir la reconnaissance des performances commerciales économiques de l'intéressé mais le maintien de son appréciation dans un rôle 'tenu', son supérieur hiérarchique mentionnant qu'il devait veiller à prendre du recul dans des situations difficiles ou actuelles et à travailler son côté diplomatique ainsi qu'à laisser un peu plus les idées émerger de ses collaborateurs;

Aucun élément ne permettant de retenir le caractère discriminatoire d'une telle évaluation, antérieure au signalement d'avril 2011 et dont les termes restent nuancés, la demande de Monsieur [T] visant l'exécution déloyale du contrat de travail doit être rejetée étant par ailleurs constaté par la cour qu'aucun élément ne vient justifier des pressions invoquées, les objectifs donnés au salarié n'apparaissant jamais discutés non plus que les moyens donnés, un nouveau conseiller clientèle venant notamment renforcer ses équipes en 2011.

- Sur le rappel de salaire au titre des astreintes

Il est rappelé qu'une période d' astreinte se définit comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise ;

Monsieur [T] fait valoir qu'en sa qualité de directeur d'établissement terrain, il a été d'astreinte à compter du 1er juillet 2008 jusqu'à la date de sa mise à pied le 25 mai 2011, qu'en effet, LA POSTE lui demandait de se tenir à disposition de la société de télésurveillance du bureau chaque nuit et chaque week-end en dehors de ses horaires de travail;

Il fonde sa demande sur les termes de l'accord d'entreprise sur les modalités de mise en place d'un régime d'astreinte du 30 juin 2008;

Aux termes de l'article 2 de l'accord susvisé, les astreintes sont mises en place pour les personnels dans les fonctions sont indispensables pour assurer la continuité du service, la maintenance, la sécurité, la santé, la logistique et l'informatique, étant précisé que chaque métier pouvait préciser les fonctions, services et domaines pouvant être soumis à des astreintes,

Au titre des modalités d'organisation des astreintes, l'accord vise qu'une programmation individuelle des périodes d'astreinte est portée à la connaissance de chaque agent, la POSTE mettant à leur disposition les moyens nécessaires pour assurer l'astreinte, chaque métier devant définir le taux applicable relativement à la compensation financière due;

Si Monsieur [T] justifie aux débats de la décision du 19 juillet 2010 portant délégation d'attribution en matière d'hygiène et de sécurité dont il a bénéficié en qualité de directeur d'établissement de [Localité 5] , il doit être observé qu'au titre des moyens techniques et humains internes et externes mis à sa disposition pour assurer cette mission, il est seulement mentionné l'assistance dont il faisait l'objet par d'autres directions des ressources internes tel le médecin de prévention sans autres moyens nécessaires à des interventions,

Il n'est pas précisé , à la suite de l'accord susvisé, de la mise en place d'astreintes dont relèveraient les directeurs d'établissement les obligeant à rester constamment à la disposition de l'employeur , à leur domicile ou à proximité, en vue notamment de répondre à des appels, ce alors qu'était mis en place un système propre de télésurveillance , Monsieur [T] ne justifiant d'ailleurs pas aux débats des circonstances et dates précises auxquelles les astreintes auraient été effectuées ;

Ces éléments conduiront à confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a écarté la demande.

Le salarié qui succombe en son appel supportera la charge des dépens d'appel, sa demande, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris,

Condamne Monsieur [T] aux dépens.

LA GREFFIERE LA CONSEILLÈRE FAISANT FONCTION DE PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/10464
Date de la décision : 26/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°14/10464 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-26;14.10464 ?
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