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20/09/2017 | FRANCE | N°15/07344

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 20 septembre 2017, 15/07344


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 20 Septembre 2017



(n° , 06 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07344



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS RG n° 13/17528





APPELANTE

SA FRANCE TOURISME IMMOBILIER (FTI) anciennement FRANCE DESIGN ET CREATION

N° SIREN : 380 345 256

[Adresse 1]

[Adresse

2]

[Adresse 3]

représentée par Me Loïc HERON, avocat au barreau de PARIS, toque : G0668

substitué par Me Margaux CHAIGNEAU, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE

Madame [T] [M]...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 20 Septembre 2017

(n° , 06 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07344

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS RG n° 13/17528

APPELANTE

SA FRANCE TOURISME IMMOBILIER (FTI) anciennement FRANCE DESIGN ET CREATION

N° SIREN : 380 345 256

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

représentée par Me Loïc HERON, avocat au barreau de PARIS, toque : G0668

substitué par Me Margaux CHAIGNEAU, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [T] [M]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

représentée par Me Jean-louis MARY, avocat au barreau de PARIS, toque : C1539

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 juin 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Françoise AYMES BELLADINA, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, président de chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, conseiller

Madame Stéphanie ARNAUD, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 31 mars 2017

Greffier : Madame Christelle RIBEIRO, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, président de chambre et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les conclusions de la SA France TOURISME IMMOBILIER et celles de Madame [T] [M] visées et développées à l'audience du 21 juin 2017.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [M] a été embauchée par la société POIRAY JOAILLER, devenue France DESIGN et CREATION puis France TOURISME IMMOBILIER, par un contrat à durée indéterminée, le 18 novembre 2008, en qualité de vendeuse, statut employé niveau 2, échelon 1, coefficient 155 moyennant une dernière rémunération de 1.950 € bruts mensuels sur 13 mois (soit 2112,50 €) pour 35 heures par semaine et une rémunération variable sur objectifs qui a fait l'objet d'un avenant daté du même jour.

La convention collective applicable est celle du commerce de détail de l'horlogerie, bijouterie.

Madame [M] a été affectée sur le site de la boutique POIRAY située [Adresse 6]. Elle a été en congé parental depuis le 15 mars 2013.

Par lettre du 9 octobre 2013, la société France DESIGN et CREATION a convoqué Madame [M] à un entretien préalable fixé au 21 octobre 2013 au cours duquel elle lui a proposé un contrat de sécurisation professionnelle, que la salariée a accepté par lettre du 23 octobre 2013.

Par lettre du 6 novembre 2013, l'employeur a adressé une lettre de licenciement pour motif économique fondé sur la fin du bail commercial de la boutique de la rue de la paix, la cession des boutiques de la société et des fonds de commerce décidée par assemblée générale du 31 juillet 2013, l'arrêt de l'activité de la société et donc la suppression du poste attaché au local commercial. L'employeur évoque aussi une tentative de reclassement externe.

Contestant le bien fondé de son licenciement pour motif économique, Madame [M] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 1] le 5 décembre 2013 de diverses demandes au titre de la rupture, en inexécution fautive du contrat de travail, en rappel de salaires sur la base du principe « à travail égal salaire égal » et en rappel de prime.

Par jugement rendu le 22 septembre 2014, le conseil de prud'hommes a condamné la société France TOURISME IMMOBILIER à payer à Madame [M] les sommes de :

- 12.725,18 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté Madame [M] du surplus de ses demandes, ainsi que la société France TOURISME IMMOBILIER de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société France TOURISME IMMOBILIER a interjeté appel le 16 juillet 2015 et demande à la cour d'infirmer le jugement, subsidiairement, elle propose la réduction de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou des dommages et intérêts pour non respect de l'ordre des licenciements,

Elle s'oppose à la demande de rappel de primes, subsidiairement, elle entend voir limiter à 5.556 € le montant des rappels de primes.

Elle conteste le bien fondé du surplus des demandes et réclame 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [M] a formé appel incident, conclut à la confirmation du jugement sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse et les frais irrépétibles, à son infirmation pour le surplus, et à la condamnation de la société France TOURISME IMMOBILIER à lui verser les sommes suivantes :

- 20.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement, à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'ordre des licenciements,

- 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail,

- 13.650 € sauf à parfaire, à titre de rappel de salaire sur la base du principe, « à travail égal, salaire égal »,

- 1.365 € au titre des congés payés afférents,

- 1.137,50 € à titre de rappel du 13ème mois,

- 8.081 € à titre de primes d'objectifs et de produits du 1er janvier 2009 au 31 octobre 2013,

- 808 € au titre des congés payés afférents,

- 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur le rappel de salaire sur la base du principe, « à travail égal, salaire égal »

Madame [M] fait valoir que bien qu' exerçant le même travail que plusieurs collègues, elle a subi une différence de traitement caractérisée par l'application d'un taux horaire de base inférieur à celui qui a été retenu pour les autres salariées. Elle précise avoir sollicité diverses pièces que l'employeur n'a pas communiquées. Pourtant, devant la cour, l'employeur a produit un document annexé à l'acte de vente qui justifie ses affirmations.

Outre qu'elle fait état du fait que son salaire n'a pas été augmenté en cinq ans, elle procède à une comparaison avec le salaire versé à Madame [Q] engagée en qualité de vendeuse en mai 2013 et qui était payée 29.900 € par an alors que son propre salaire annuel ressortait à 25.350 € soit une différence annuelle de 4.550 €.

Elle considère que compte tenu de sa formation et de son expérience, elle aurait dû être embauchée ou au moins promue à un niveau de vendeur qualifié et bénéficier d' un salaire supérieur.

Elle réclame une somme de 13.650 € correspondant à la différence précitée de traitement annuel sur 3 ans, outre les congés payés et le 13ème mois.

La société réplique que les situations des salariés ne sont pas comparables, que Madame [M] était seule dans sa catégorie, que consciente de la faiblesse de son argumentation, elle se limite à remettre en cause sa qualification mais sans préciser le niveau et l'échelon auxquels elle prétend, empêchant ainsi une réelle comparaison.

En tout état de cause, la société rappelle que la classification s'apprécie en fonction des fonctions réellement exercées lesquelles n'impliquaient concrètement aucune initiative ou autonomie. Elle ajoute que la salariée était payée bien au-delà des minima conventionnels même pour les échelons et niveaux supérieurs de sorte que Madame [M] doit être déboutée de cette demande.

L'examen des éléments communiqués de part et d'autre montre que Madame [M] était effectivement payée bien au-delà des minima de la convention collective, son salaire étant supérieur à celui que la convention prévoit pour un vendeur qualifié niveau III auquel la salariée se compare au vu de ses diplômes et de son expérience.

Toutefois, l'employeur ne justifie pas de façon objective la différence de traitement opérée avec Madame [Q] engagée en qualité de vendeuse en mai 2013 pour un salaire bien supérieur à celui de la salariée qui avait elle-même une ancienneté de plus de quatre années au sein de la société.

En conséquence, la demande fondée sur la différence de traitement en application du principe « à travail égal, salaire égal » doit être accueillie et l'employeur sera condamné à verser à Madame [M] la somme de 2.275 € outre 227,50 € à titre de congés payés et 189,58 € à titre de rappel de 13ème mois.

Sur la prime d'objectifs et de produits

Madame [M] fait valoir qu'elle avait droit à des primes d'objectifs et de produits sur la base du contrat de travail et de l'avenant pour la période du 1er novembre 2008 au 15 décembre 2013, même si ledit contrat de travail et l'avenant date du 18 novembre 2008 et ses calculs ne concernent que la période de janvier 2009 à décembre 2012. Elle sollicite à ce titre une prime mensuelle sur objectifs de 300 € par mois pour un taux de 100% de l'objectif et une prime produits forfaitaire de 200 € par mois. Elle soutient que les modalités d'attribution et de versement devaient être définies d'un commun accord entre les parties, qu'aucun accord n'a été sollicité par l'employeur et qu'en communiquant tardivement les objectifs, l'employeur pouvait donc les adapter unilatéralement pour limiter ou annuler le montant de la prime à lui revenir.

En supposant même que l'employeur ait gardé la maîtrise de la fixation des objectifs, la salariée soutient qu'il est dans l'incapacité de rapporter la preuve de l'avoir informée en temps utile.

Elle ajoute que le même système a été mis en place pour la prime 'produits' , que, faute pour l'employeur d'avoir respecté les dispositions contractuelles, elle est foncée en sa réclamation de la somme de 8.081 € calculée par la différence entre les primes dues et celles qu'elle a perçues durant la période de janvier 2009 à décembre 2012 selon son tableau (13.500 € - 2.820€ - 2.599 € ).

En réponse, la société indique qu'il était convenu que les objectifs seraient fixés unilatéralement et n'étaient pas subordonnés à l'accord de la salariée, que les objectifs pour l'obtention de la prime produit, était fixée par boutique et non par vendeur. Elle ajoute que la salariée était informée tous les mois des objectifs à poursuivre, qu'elle avait parfaite connaissance des modalités de calcul et de fixation de sa rémunération variable puisqu'elles étaient définies dans les avenants.

Elle observe que Madame [M] n'a jamais contesté les primes versées. 

Elle ajoute à titre subsidiaire qu'il y a lieu de faire application de la prescription et du fait que la salariée avait été en congé maternité sur la période d'avril 2010 à septembre 2011 puis absente les mois de juin, juillet et octobre 2012 ce qui limiterait à 5.556 € brut le rappel à lui revenir.

Il résulte du contrat de travail et de l'avenant du 18 novembre 2011 que la salariée bénéficiait en plus de son salaire d'une rémunération variable se décomposant en primes mensuelles sur objectifs et en primes produits. Si les objectifs étaient atteints à 100 % ; les primes versées devait atteindre 300 € par mois pour les objectifs et 200 € par mois pour les produits.

La société ne justifie pas que la salariée connaissait les objectifs à atteindre avant la fin de chaque mois ou en début d'année pour percevoir cette rémunération variable contractuellement prévue.

Au regard des éléments produits, des explications fournies et nonobstant le moyen tiré de la prescription dès lors que la prescription applicable reste celle de 5 années en application des dispositions transitoires, il sera fait droit à la demande de Madame [M] sur la base d'un objectif atteint à 100%. dans la limite de la somme de 5.556 € à titre de rappel de salaire sur les primes plus les congés payés soit 555,60 €.

Sur le licenciement pour motif économique

Madame [M] a été convoquée par courrier du 9 octobre 2013 à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique prévu le 21 octobre 2013 au cours duquel lui a été présenté le dispositif de sécurisation professionnelle.

La salariée a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle par courrier du 23 octobre 2013 ainsi que le rappelle l'employeur dans la lettre de licenciement qui porte la date du 6 novembre 2013.

Mais lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur le contrat de sécurisation professionnelle remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai dont dispose le salarié pour faire connaître sa réponse à la proposition de contrat de sécurisation professionnelle expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

En l'espèce, l'employeur n' établit pas avoir adressé à la salariée un document écrit énonçant le motif économique de la rupture avant son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, peu important que le délai de réflexion de 21 jours ne fut pas expiré.

Pour ce seul motif, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé, sauf sur la somme allouée au regard des éléments produits au débats et du préjudice subi par la salariée qui est restée au chômage durant un an et demi. La société France TOURISME IMMOBILIER sera condamnée à verser à Madame [M] la somme de 15.000 €.

Sur l'inexécution fautive du contrat de travail

Madame [M] reproche à son employeur de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour lui assurer le maintien de sa garantie prévoyance et maladie au-delà du 31 décembre 2013 et indique qu'elle a subi un préjudice dont elle demande réparation à hauteur de la somme de 2.000 €.

Mais c'est à juste titre que l'employeur observe que la salariée qui demande réparation d'un préjudice ne donne aucune explication et ne verse aucune pièce au soutien de sa demande. Elle en sera déboutée.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 1235 -4 du code du travail

Dans les cas prévus aux articles L. 1235 - 3 et L. 1235-11 du code du travail, l'article L. 1235- 4 fait obligation au juge d'ordonner, même d'office, le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage. Dans le cas d'espèce, l'employeur ne fournit aucune indication sur le nombre de salariés employés lors du licenciement, une telle condamnation sera prononcée à son encontre, pour les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite d'un mois.

Succombant, la société France TOURISME IMMOBILIER sera condamnée aux dépens ; il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [M] la totalité des frais irrépétibles qu'elle a dû engager pour se défendre et faire valoir ses droits ; il lui sera accordé une somme de 2.000 €, en sus de la somme allouée par les premiers juges.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré, en ce qu'il a jugé que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail et en ce qu'il a alloué à la salariée une indemnité pour les frais engagés dans la procédure,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SA France TOURISME IMMOBILIER à payer à Madame [T] [M] les sommes suivantes :

- 15.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.275 € à titre de rappel de salaire sur la base du principe, « à travail égal, salaire égal »,

- 227,50 € au titre des congés payés afférents,

- 189,58 € à titre de rappel du 13ème mois,

- 5.556 € à titre de rappel de salaire sur les primes,

- 555,60 € au titre des congés payés afférents,

- 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite d'un mois.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SA France TOURISME IMMOBILIER aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 15/07344
Date de la décision : 20/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°15/07344 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-20;15.07344 ?
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