RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 14 septembre 2017
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/13329
Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 31 Août 2016 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° R16/02049
APPELANT
Monsieur [L] [F]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Marie-sophie VINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1858
INTIMEE
FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Antoine SAPPIN de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 mai 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine MÉTADIEU, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine MÉTADIEU, Président
Madame Martine CANTAT, Conseiller
Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller
GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.
********
Statuant sur l'appel interjeté par [L] [F] à l'encontre d'une ordonnance de référé rendue le 31 août 2016 par le conseil de prud'hommes de PARIS qu'il avait saisi de demandes de réintégration, de rappel de salaires et de dommages-intérêts et qui a dit n'y avoir lieu à référé ;
Vu les conclusions signifiées par RPVA par [L] [F] qui demande à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau, de :
- constater l'existence d'un trouble manifestement illicite
A titre principal,
- ordonner sa réintégration dans l'emploi qu'il occupait antérieurement à son éviction ou sur un poste équivalent sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la décision
- condamner la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL à lui verser:
' 116 493,18 € bruts à titre d'indemnité provisionnelle réparant son préjudice matériel et moral subi pendant la période courant du 4 mai 2012 au 2 mars 2016, sous déduction de la somme de 53 800,64 € nets correspondant aux revenus perçus
' 45 433,05 € au titre des salaires dus depuis le 2 mars 2016 à mai 2017 inclus, outre 4 543,30 € de congés payés afférents
ce sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la décision
- ordonner à la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL de lui remettre les bulletins de salaire conformes au titre des mois de mars 2106 à mai 2017 inclus ainsi que ceux des mois à venir jusqu'à sa réintégration effective, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification de la décision
A titre subsidiaire, en cas d'impossibilité de réintégration,
- condamner la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL à lui verser la somme provisionnelle de 35 000 € en réparation de son préjudice matériel et moral causé par le caractère illicite du licenciement
En tout état de cause,
- condamner la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article L.1343-2 du code civil;
Vu les conclusions notifiées par RPVA par la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL qui demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer l'ordonnance déférée
Reconventionnellement,
- condamner [L] [F] au paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts
- condamner [L] [F] au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
A titre subsidiaire,
- juger que [L] [F] ne peut prétendre qu'à une indemnisation au titre de la période de juillet 2012 à juin 2013, sous déduction de l'indemnisation versée par Pôle emploi, soit 18 968,38 € bruts, dès lors que la rupture de son contrat de travail du fait de son départ en retraite fait obstacle au versement d'un salaire pour la période postérieure
- prendre acte de ce que [L] [F] forme, dans le cadre de ses conclusions une demande en indemnisation à titre subsidiaire, et ce en l'absence de réintégration
- limiter une éventuelle indemnisation à l'équivalent de six mois de salaire, soit la somme de 18 170 €
A titre très subsidiaire,
- juger qu'un éventuel rappel de salaire sur la période mars-mai 2017 ne pourra qu'être ordonné sous déduction de la pension de retraite perçue par [L] [F] pendant cette même période, soit 10 200 € nets ;
La cour faisant expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties
SUR CE LA COUR,
EXPOSÉ DU LITIGE
[L] [F] a été engagé à compter du 26 février 1981 par la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL, en qualité d'éducateur au sein de la maison du Sacré C'ur de THIAIS (94), selon un contrat de travail à durée indéterminée.
Il exerçait en dernier lieu les fonctions d'éducateur spécialisé administratif.
La relation de travail est régie par le «protocole social» en vigueur au sein de la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL, en date du 1er janvier 1988 et l'ensemble de ses annexes.
[L] [F] a exercé divers mandats syndicaux et représentatifs au sein de la fondation entre 1999 et 2009.
Il a engagé diverses instances au fond envers la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL dont il a été débouté.
Il a, le 14 octobre 2009, de nouveau, saisi le conseil de prud'hommes de CRÉTEIL au fond.
Le conseil de prud'hommes en sa formation de départage a rejeté l'intégralité de ses demandes, l'appel de ce jugement est pendant devant cette cour.
Après y avoir été autorisé par l'inspection du travail, la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL a notifié à [L] [F] son licenciement pour motif personnel par lettre du 4 mai 2012.
La cour administrative d'appel de Paris, par arrêt en date du 31 décembre 2015 a annulé la décision du tribunal administratif en date du 9 juillet 2014 ainsi que les décisions de l'inspecteur du travail et du ministre chargé du travail.
Par un arrêt rendu le 23 décembre 2016, le Conseil d'État a rejeté le pourvoi formé par la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL.
Par lettre recommandée en date du 29 février 2016, [L] [F] a sollicité sa réintégration à son poste dans les meilleurs délais.
Il n'a pas été donné suite à cette demande.
L'union territoriale CGT a, le 8 juin 2016, informé la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL de la désignation de [L] [F] en tant que délégué syndical.
C'est dans ces conditions qu'invoquant l'existence d'un trouble manifestement illicite, [L] [F] a le 22 juillet 2016 saisi la formation des référés du conseil de prud'hommes de CRÉTEIL.
MOTIFS
Selon l'article R.1455-6 du même code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Il est précisé à l'article R.1455-7 que dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation des référés peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
[L] [F] invoque le refus de la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL de le réintégrer comme étant constitutif d'un trouble manifestement illicite et fait valoir qu'il a formé sa demande dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt de la cour d'appel administrative effectuée le 4 janvier 2016, dès lors qu'il a adressé sa demande à la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL le 29 février 2016, et que les arguments opposés par cette dernière sont inopérants.
Il estime avoir été victime d'une discrimination en raison de l'âge et souligne que l'article L.161-22 du code de la sécurité sociale prévoit la possibilité de cumuler une activité salariale et une pension de retraite.
La FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL expose que la demande de réintégration formée par [L] [F] est tardive au motif que l'arrêt de la cour d'appel de Paris est en date du 31 décembre 2015 et que ce n'est que le 2 mars 2016 que ce dernier lui a fait parvenir une demande de réintégration.
Elle ajoute que cette demande se heurte à la situation personnelle de [L] [F], né le [Date naissance 1] 1948, qui a fait valoir ses droits à la retraite le 1er juillet 2013 et soutient donc que la demande de réintégration de [L] [F] se heurte à une impossibilité.
Elle en déduit que [L] [F] qui a librement décidé de faire valoir ses droits à la retraite.
Selon la chronologie des faits, [L] [F], licencié le 4 mai 2012, a fait valoir ses droits à la retraite le 1er juillet 2013 et il a, ce faisant, pris l'initiative de rompre tout lien professionnel avec la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL.
Il en résulte qu'il ne peut solliciter ultérieurement sa réintégration dans son emploi ou un emploi équivalent et se prévaloir par conséquent d'un trouble manifestement illicite.
Par ailleurs, il existe une contestation sérieuse concernant l'application des dispositions de l'article L.161-22 du code de la sécurité sociale relative à la situation de cumul «emploi-retraite», les éléments versés aux débats ne permettant pas de constater avec l'évidence requise en matière de référé que les conditions d'un tel cumul soient réunies.
[L] [F] a, entre la rupture de son contrat de travail et sa mise à la retraite, subi un préjudice certain résultant du caractère illicite de son licenciement.
Il convient par conséquent de condamner la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL à lui verser la somme provisionnelle de 3 500 € à titre de dommages-intérêts.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à [L] [F] la somme de 1 500 € à ce titre..
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a débouté [L] [F] de sa demande de dommages-intérêts provisionnels
Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant
Condamne la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL à payer à [L] [F] la somme provisionnelle de 3 500 € à titre de dommages-intérêts
Condamne la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL à verser à [L] [F] la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne la FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT