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12/09/2017 | FRANCE | N°16/09281

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 12 septembre 2017, 16/09281


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 12 Septembre 2017



(n° , 08 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/09281



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Mai 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F14/07052





APPELANT

Monsieur [X] [O]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 1]

comparan

t en personne,

assisté de Me Valérie DUBAILE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0444





INTIMEE

SARL COFFIM VENTE

[Adresse 2]

[Adresse 1]

N° SIRET : 499 472 991

représentée par Me ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 12 Septembre 2017

(n° , 08 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/09281

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Mai 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F14/07052

APPELANT

Monsieur [X] [O]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Valérie DUBAILE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0444

INTIMEE

SARL COFFIM VENTE

[Adresse 2]

[Adresse 1]

N° SIRET : 499 472 991

représentée par Me Hugues BOUGET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1752

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Juin 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence SINQUIN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Valérie LETOURNEUR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [X] [O], engagé par la société COFFIM VENTE, à compter du 12 février 2010, en qualité de Directeur Commercial, disposait en vertu du dernier avenant à son contrat de travail d'un salaire mensuel brut fixe de 42000 euros auquel s'ajoutait une part variable.

Monsieur [O] a été licencié par un courrier du 3 juin 2014. La lettre de rupture était rédigée dans les termes suivants :

« Vous avez été convoqué par lettre remise en main propre contre décharge, en date du 19 mai 2014, à un entretien préalable le mardi 27 mai 2014 à 17 heures, sur votre lieu habituel de travail, dans la perspective éventuelle de votre licenciement.

Lors de cet entretien vous étiez accompagné de Monsieur [H], conseiller du salarié n'appartenant pas au personnel de l'entreprise et figurant sur la liste établie à cet effet par le préfet.

Je vous ai rappelé tout d'abord, le cadre de votre collaboration avec la société et vos responsabilités au sein de celle-ci.

Vous êtes depuis le 8 mars 2010, engagé par la société en qualité de directeur commercial, statut cadre, soumis à la convention collective de l'immobilier, ce qui vous situe à un niveau élevé de responsabilité et de rémunération dans l'entreprise.

Ce qui avait notamment pour corollaire, comme votre contrat de travail l'indique expressément, l'exercice de vos fonctions « sous l'autorité dans le cadre des instructions données par son supérieur hiérarchique ».

Ainsi la société était en droit d'attendre votre participation au développement commercial dans le respect des instructions de la direction générale ainsi que des règles de l'entreprise, et plus largement dans une communauté de vue.

Tel n'a malheureusement pas été le cas.

Je vous ai alors exposé que la société ne pouvait tolérer votre refus de suivre et de respecter ses directives et/ou instructions.

C'est ainsi que du 14 au 19 mai 2014, vous avez catégoriquement refusé malgré les demandes orales et écrites de la société, de vous rendre au plus vite à [Localité 2] pour superviser et accompagnée, le lancement du programme de [Localité 2] Vaise Quai du commerce à compter du 16 mai 2014.

Et ce alors que notamment :

' vous connaissez ce programme pour l'avoir physiquement visité en début d'année, vous saviez parfaitement, avant même votre arrêt maladie que ce programme était une des priorités de la direction générale et qu'il vous reviendrait (à tout le moins dans sa part majoritaire constitué par la vente en réseau) et vous saviez que la date de lancement était imminente ;

' cette mission, conforme à vos fonctions, était plus que justifiée par l'intérêt de la société, s'agissant d'une opération très importante pour elle d'un point de vue commercial et financier mais aussi en termes d'image ;

' la spécificité de vos fonctions implique de votre part une certaine mobilité géographique, surtout s'agissant de déplacements occasionnels et provisoires comme vous l'avez toujours fait dans le cas de l'exécution de votre contrat de travail (à [Localité 2], [Localité 3] ou ailleurs).

Multipliant les arguties illustrant votre particulière mauvaise foi, directement ou par l'intermédiaire de votre avocat, vous avez fini par exiger qu'on vous confie le lancement d'un autre programme (alors même que vous n'aviez déjà pas donné suite début avril à la proposition de la société de vous confier un programme à [Localité 4]) puis à vous positionner comme une victime mais vous n'avez pas pour autant respecter les instructions claires et précises de votre employeur (vous ne vous êtes à aucun moment rendu à [Localité 2] ou même renseigné plus avant sur le lancement du programme avant la remise de votre lettre de convocation à entretien préalable...).

Ce refus d'exécuter des tâches relevant de vos fonctions constitue un manquement grave à vos obligations contractuelles et eu égard à votre volonté délibérée de vous soustraire aux dites obligations contractuelles, caractérise même une insubordination.

Ceci n'est pas acceptable.

D'autant que :

' ce n'est pas la première fois : Cf. Par exemple l'avertissement du 7 avril 2014 qui avait déjà sanctionné tout à la fois votre insubordination et votre refus de suivre les directives de votre employeur et/ou les règles applicables dans l'entreprise (comme d'ailleurs pour la communication de vos arrêts maladie, celui du 1er avril 2014 ayant été reçu le 9 avril 2014 et celui du 3 mai 2004 reçu le 9 mai 2014 ...). Autrement dit, à de nombreuses reprises, vous n'avez pas suivi les instructions et/ou les directives données par votre employeur, ne vous êtes pas conformé à la discipline de l'entreprise ;

' cela s'inscrit dans un contexte conflictuel persistant que vous avez créé de toutes pièces : votre mail du 14 février 2014, avant de partir pour de longues vacances à la surprise de votre employeur, a donné le ton de cette opposition de manière délibérée à votre employeur, s'est poursuivi, après vos arrêts maladies au cours desquels vous avez trouvé le temps d'exiger que la société respecte vos desideratas pour l'exécution de votre contrat de travail, par l'envoi de lettres d'avocat contestant le maximum de points dont la conclusion de vos avenants à celui-ci.

Votre attitude volontairement contestataire apparaît peu compatible avec votre statut et les devoirs d'exemplarité et de loyauté qu'ils impliquent et plus largement ne constitue pas une attitude normale compatible avec l'exécution de votre contrat de travail.

Il apparaît ainsi très clairement que vous n'avez aucune intention de vous conformer aux engagements et de respecter les directives de la société ou encore de vous conformer à la discipline de l'entreprise.

Ce comportement répété que vous adoptez, n'est plus possible dans notre société.

Surtout que ces griefs sont encore moins admissibles eu égard à votre statut qui exige que «vous donniez l'exemple ».

À l'issu de cet exposé, je me suis ensuite entretenu avec vous à l'effet de recueillir vos observations.

Toutefois, celles-ci n'ont pas modifié mon appréciation sur les griefs que je vous reproche.

C'est pourquoi, à raison des motifs susmentionnés, je me vois donc contraint de vous notifier votre licenciement pour faute grave.

Votre licenciement prendra effet à la date de première présentation de la présente... »

Monsieur [O] a contesté son licenciement et a saisi le conseil de prud'hommes.

Par jugement du 13 mai 2016, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur [O] de ses demandes et la société de ses demandes reconventionnelles et a condamné le salarié aux dépens.

Monsieur [O] a relevé appel de cette décision.

Par conclusions visées au greffe le 12 juin 2017, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [O] demande à la Cour de fixer la moyenne brute de son salaire à la somme de 10'628,77 euros, à titre principal de prononcer la nullité du licenciement en raison de la situation de harcèlement moral dont il a été victime et de condamner la société au paiement de :

- 127 545 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

- 9 034,43 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 31 886,31 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents,

- 6 514,40 euros à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents.

À titre subsidiaire, Monsieur [O] demande à la Cour de constater que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et de condamner la société au paiement des même sommes.

En tout état de cause, il réclame la condamnation de la société à la somme de 95'239 euros à titre de rappel d'intéressement et 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 12 juin 2017, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne les moyens, la société COFFIM VENTE sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur [O] à un euro de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et à 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits de la procédure et des prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience.

MOTIFS

Sur le harcèlement moral

Il appartient au salarié qui se prétend victime de harcèlement moral d'établir la matérialité de faits précis et concordants faisant présumer l'existence de ce harcèlement ; celui-ci se définit, selon l'article L 1152-1 du code du travail, par des actes répétés qui ont pour objet ou pour effet, indépendamment de l'intention de leur auteur, une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque les faits sont établis, l'employeur doit démontrer qu'ils s'expliquent par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Une situation de harcèlement moral se déduit ainsi essentiellement de la constatation d'une dégradation préjudiciable au salarié de ses conditions de travail consécutive à des agissements répétés de l'employeur révélateurs d'un exercice anormal et abusif par celui-ci de ses pouvoirs d'autorité, de direction, de contrôle et de sanction.

Selon les dispositions de l'article R 1452-6 du code du travail, toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font l'objet d'une seule instance qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur. Même en appel, les parties peuvent soulever toutes demandes ou prétentions nouvelles dès lors qu'elles ont trait au même contrat de travail.

La demande formulée par le salarié au titre du harcèlement moral en appel est en conséquence recevable.

Monsieur [O] prétend avoir été victime de harcèlement moral et demande en conséquence la nullité de son licenciement.

A l'appui de sa demande, il transmet deux avenants du 2 novembre 2010 et 14 janvier 2014 et plusieurs courriers de son avocat invoquant des pressions pour obtenir ces modifications de sa rémunération et reprochant à l'employeur d'avoir vider de sa substance ses fonctions de directeur commercial, depuis janvier 2014.

Il communique aussi la note du 14 mai 2014, qui lui attribue à son retour d'arrêt maladie, la prise en charge d'un important projet de plusieurs semaines sur [Localité 2]. Il verse au débat les échanges consécutifs à son refus.

Il produit enfin, le certificat d'arrêt de travail du 1er avril au 2 mai 2014 portant la mention ' état anxio-dépressif -Burn-out'.

L'ensemble de ces éléments laisse présumer une dégradation des conditions de travail du salarié, ayant eu pour conséquence une altération de sa santé physique ou mentale.

Néanmoins au travers des éléments communiqués par l 'employeur, il est démontré que cette situation s'explique par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

S'agissant de la modification de la rémunération de Monsieur [O], l'employeur justifie à travers l'attestation de Monsieur [V] que l'avenant du 2 novembre 2010 a été pris en concertation avec le salarié.

Il est également démontré que la modification de la part variable n'a pas conduit à une diminution du salaire de Monsieur [O] entre 2010 et 2011.

Pour l'avenant du 14 janvier 2014, l'employeur prouve, à travers les relevés d'agendas professionnels, que les modifications du contrat de travail ont fait l'objet de plusieurs réunions avec le service des ressources humaines avant d'être régulièrement signé par le salarié.

Si le salarié se plaint d'avoir été contraint à la signature de ces avenants, il ne transmet aucun élément révélateur de pressions quelconques de la part de l'employeur et les pièces adverses contredisent cette affirmation.

En ce qui concerne les fonctions exercées par Monsieur [O], il convient d'emblée de relever que dans le cadre du compte rendu d'entretien préalable versé aux débats, le salarié reconnaît qu'il n'y avait plus d'opérations de vente en réseau et il apparaît que l'activité de la société se trouvait à cette date en net infléchissement.

Malgré cette situation, l'employeur justifie avoir proposé à Monsieur [O] plusieurs projets - notamment le 1er avril 2014, un programme dans le 10e arrondissement de [Localité 4] prévu pour un lancement au mois de mai 2014 - puis celui de [Localité 2]. Il transmet également plusieurs messages électroniques. Ceux relatifs au projet lyonnais et plus spécialement celui 14 février 2014 attestent de l'exercice effectif par le salarié de ses fonctions de directeur commercial et l'existence sous sa hiérarchie d'une équipe commerciale.

S'agissant du projet situé à [Localité 2], les termes de la note du 14 mai 2014, comme les nombreux mails et échanges intervenus au moment de l'entretien préalable, font apparaître que la directive de la société ne constituait pas une mutation mais bien l'attribution à Monsieur [O] d'un important projet dont il avait déjà assuré le suivi.

Monsieur [O] conteste les conditions de travail et contraintes liées à ce projet.

Néanmoins les circonstances imposées au salarié n'apparaissent pas exceptionnelles ou dérogatoires aux fonctions du salarié. En effet, l'employeur transmet un projet de même nature intervenu en 2011 à [Localité 3] et pour lequel salarié avait dû organiser son transport sur place et le suivi sur plusieurs semaines de l'opération et rien ne permet de distinguer cette situation du projet envisagé sur [Localité 2].

L'employeur établit par plusieurs pièces que les fonctions du salarié le conduisaient à assurer le suivi de projet en dehors du siège de la société et en province et que la mise en place du projet lyonnais n'était pas contraire aux dispositions du contrat de travail, ni aux fonctions habituellement exercées par le salarié.

Les arguments du salarié concernant son défaut d'information sur ce projet comme celui relatif au transfert à une collaboratrice sont contredits par les pièces transmises par l'employeur. Il en résulte que l'attribution à Monsieur [O] de l'ouverture en urgence d'un projet immobilier à [Localité 2] n'est pas révélateur d'un exercice anormal ou abusif des pouvoirs d'autorité et de direction de l'employeur.

Enfin, s'agissant de la dégradation de son état de santé, Monsieur [O] transmet lui-même l'explication en mars 2014, puisque dans le cadre d'un entretien préalable, il indique : « Toute l'année 2013, j'ai travaillé énormément sans jamais m'arrêter ni demander compensation pour les heures effectuées. Ce qui m'a d'ailleurs amené à une situation de burnout. » Rien permet en conséquence de considérer que ces problèmes de santé résultent d'agissements répétés de harcèlement moral.

Il ressort de l'ensemble de ces motifs que les prétentions du salarié au titre du harcèlement moral doivent être rejetées, les faits n'étant pas établis.

Sur le licenciement pour cause réelle et sérieuse

Monsieur [O] soutient que son licenciement serait sans cause réelle et sérieuse.

Dans le cadre de la rupture du contrat de travail, l'employeur reproche à Monsieur [O] d'avoir entretenu un contexte conflictuel au sein de la société en transmettant le 14 février 2014, un e-mail à l'ensemble de son équipe dans lequel il porte atteinte aux intérêts de la société.

Il lui est également reproché une attitude d'insubordination pour avoir refusé la prise en charge du projet d'ouverture du programme immobilier à [Localité 2].

Monsieur [O] avait pour fonction dans le cadre de son contrat de travail signé le 12 février 2010 d'assurer : « ... la commercialisation des logements ou studios de résidence services réalisés par COFFIM ou par d'autres promoteurs qui confieraient à COFFIM VENTE la commercialisation de leurs programmes. Il est notamment chargé de mettre en place un réseau de vente par prescripteurs. »

Il est incontestable au vu de cette disposition que le projet lyonnais constitué par un programme de logements en accession et en résidence étudiante rentrait dans le champ des fonctions occupées par Monsieur [O].

Ce dernier ne peut valablement prétendre qu'il n'avait pas d'information sur ce dossier et qu'il était suivi par une collègue. En effet, plusieurs messages de sa part démontrent sa connaissance de ce projet et un travail de suivi.

En outre, l'employeur n'est pas contredit lorsqu'il affirme que l'ensemble des informations pouvaient être recueillies auprès de l'assistante commerciale et au travers de l'outil intranet et que Monsieur [O] avait participé aux discussions concernant l'avancement du projet au sein du comité d'affaires, tous les lundis depuis deux ans.

Enfin, Monsieur [O] estime que cette directive constitue une mutation modificative de son contrat de travail dans la mesure où elle l'obligeait à travailler à 450 km de chez lui pendant une période de six mois.

L'ensemble des débats et des pièces produites démontrent que cette interprétation du salarié est erronée. Monsieur [O] le reconnaîtra dans le cadre de son entretien préalable puisqu'il va parler de « malentendu ». L'employeur justifie que l'organisation du lancement du projet lyonnais comme son suivi pouvait s'effectuer sur quelques semaines et par des déplacements professionnels limités.

Le refus de Monsieur [O] d'exécuter la directive de son employeur était donc illégitime.

Dès lors, le refus catégorique du salarié et l'agressivité dans les termes utilisés dans le message adressé à son supérieur hiérarchique, le 6 mai 2014, justifie que face à l'insubordination caractérisée de son salarié, la société considère que la poursuite du contrat de travail s'avérait impossible.

Au vu de l'ensemble de ces motifs, la Cour considère que le licenciement est justifié.

L'ensemble des demandes Monsieur [O] relatives à la rupture abusive seront rejetées.

Sur le rappel d'intéressement

Monsieur [O] soutient qu'en vertu des différents avenants de son contrat de travail, la société lui est redevable de 95239 euros à titre de rémunération variable.

Les bonus et primes sur objectif et commissions en pourcentage sur un chiffre d'affaires constituent une rémunération variable. Même s'il appartient au salarié qui les revendique de justifier qu'il a droit à leur attribution, en fonction de conventions ou d'usages, l'employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base de calcul de son salaire notamment de la part variable.

Monsieur [O], en produisant son contrat de travail et ses avenants établit qu'il pouvait percevoir une rémunération variable calculée jusqu'au 16 janvier 2014 en pourcentage sur l'ensemble des opérations réalisées avec un intéressement complémentaire sur les réservations fermes de logement ou studio sur un mois, et une participation au programme de ses vendeurs et au delà de cette date, le pourcentage était calculé sur les ventes réalisées, une participation aux ventes effectués par le réseau, par M. [T] ou sur certains programmes.

Toutefois, il ne communique aucun élément qui permette de justifier qu'il a obtenu ou contribué à obtenir des ventes ou des réservations fermes dans des opérations ou programmes immobiliers et que la société a été défaillante à le rémunérer à la signature de l'acte notarié.

En effet, il produit un tableau excell dénommé 'suivi de réservations 2014" dont il n'est pas possible de déterminer l'origine et qui n'a en tout état de cause aucune valeur conventionnelle.

Ce tableau semble avoir été établi unilatéralement par le salarié au moins en ce qui concerne les pourcentages réclamés.

Dans ce tableau, s'alignent le noms des collaborateurs commerciaux dont celui de Monsieur [O], des sites, des noms propres puis des chiffres sur des colonnes non identifiées. Enfin hors tableau, figure un calcul en pourcentage 5% ou 30% d'un chiffre dont il n'est pas possible de déterminer la nature.

A supposer même que l'affectation d'un dossier au profit de Monsieur [O] soit retenu, ce tableau ne permet pas de prouver à quel stade le salarié est intervenu (vente, réservation ferme, participation à une opération...) et de vérifier le calcul de sa rémunération en conséquence.

Par ailleurs, il ressort des bulletins de salaire de Monsieur [O] que depuis 2012, il a été régulièrement réglé de ses commissions sans qu'à aucun moment il n'en ait contesté le montant.

Pour les dates de signatures ouvrant droit au commissionnement antérieures au départ du salarié, rien ne permet de justifier que le règlement figurant au bulletin de salaire soit erroné.

La société relève plusieurs autres inexactitudes dans le tableau fournit par le salarié.

Il y a lieu de considérer que le tableau est insuffisant à établir les droits de Monsieur [O].

Aussi avant même d'imputer à l'employeur la charge de la preuve au niveau des calculs de la rémunération variable, il convient de constater que Monsieur [O] ne justifie pas avoir droit à une rémunération variable sur la liste des opérations qu'il transmet à la Cour.

La demande relative à l'intéressement devra en conséquence être rejetée.

Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts de la société

La société estime que l'action engagée en appel par Monsieur [O] est abusive et demande réparation de son préjudice à hauteur d'un euro symbolique.

La faculté offerte au salarié de contester en appel une décision prud'homale qui a notamment omis de motiver sa décision sur la demande de règlement des commissions, ne constitue pas un abus de droit.

La demande sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement entrepris,

Y ajoutant,

VU l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [O] à payer à la société COFFIM VENTE en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties du surplus des demandes,

CONDAMNE Monsieur [O] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/09281
Date de la décision : 12/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°16/09281 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-12;16.09281 ?
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