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12/09/2017 | FRANCE | N°14/02920

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 12 septembre 2017, 14/02920


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 12 Septembre 2017



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/02920



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY RG n° F11/04421





APPELANT

Monsieur [W] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Isabelle SAMAMA SAMUEL, avocat au barreau

de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB196 substitué par Me Paméla AZOULAY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 196





INTIMEE

SA ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 12 Septembre 2017

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/02920

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY RG n° F11/04421

APPELANT

Monsieur [W] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Isabelle SAMAMA SAMUEL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB196 substitué par Me Paméla AZOULAY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 196

INTIMEE

SA ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 344 461 546

représentée par Me Georges LACOEUILHE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0105 substitué par Me Pierre-Henri LEBRUN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mai 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Valérie LETOURNEUR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [W] [V] a été engagé par la société EUROPE AIRPOST par contrat à durée déterminée à temps partiel du 24 septembre 2001 jusqu'au 31 mars 2002. Par avenant du 31 mars 2002, le contrat de travail initial s'est poursuivi à durée indéterminée à temps partiel , la date d'engagement étant fixée au 24 septembre 2001, Monsieur [V] exerçant les fonctions d'agent de trafic, le dernier salaire versé avant licenciement étant de 1538,44 euros.

Convoqué à un entretien préalable à licenciement du 26 septembre 2011, Monsieur [V] a fait l'objet d'un licenciement par lettre du 12 octobre 2011 ainsi motivée :

'Monsieur,

nous faisons suite à notre entretien du 26 septembre 2011, pour lequel vous avez souhaité être assisté par M. [A] [T].

Au cours de cet entretien, nous vous avons fait part des griefs suivants :

' le 28 juillet 2011, votre responsable hiérarchique, [U] [F], vous a affecté à la tâche de contrôle et de traitement du fret sécurisé. Lors de cette mission, vous avez laissé la porte sans surveillance des accès réservés pendant une demi-heure. Ce manquement aux règles de sûreté de la compagnie a été relevé par le service qualité de la compagnie qui assurait ce soir-là, de façon totalement transparente et annoncée au préalable, un audit portant sur la sûreté du fret. Le rapport fait état de la situation : « la porte trafic (automatique jaune) reste ouverte sans surveillance une demi-heure lors de l'audit, remarque faite aux deux agents de trafic enfermés dans leur bureau (à écouter de la musique et à jouer). »

Ce même soir, le rapport du service Qualité fait apparaître un autre manquement à la sécurité et à la sûreté : « ces deux agents sont sortis fumer en zone réservée par l'accès non surveillé alors que la réglementation de l'aéroport l'interdit. ». Cette interdiction est assortie d'une amende pour le contrevenant et pour la compagnie.

' 17 août 2011, votre responsable hiérarchique, [U] [F] vous a affecté ainsi que deux de vos collègues agents de trafic pour assurer l'archivage des données qui répond à une exigence réglementaire émise par l'autorité afin de résorber un retard dans le classement des dossiers de vols. Cette tâche a littéralement été sabotée ce qui a donné lieu à un rapport édifiant du superviseur escale et a nécessité l'engagement de plusieurs personnes après votre départ afin de remettre de l'ordre dans ledit classement et de récupérer des données réglementaires qui avaient été jetées dans diverses poubelles. Ces faits ont eu lieu après que l'ensemble des cadres et salariés de la direction ait été sensibilisé par écrit à l'imminence d'un audit à venir, conduit par les représentants de l'autorité et qui porterait immanquablement sur l'archivage et la conservation de ces données.

Convoqué par [U] [F] au cours de la vacation suivante pour avoir des explications, vous avez reconnu les faits et avoir refusé d'obtempérer à la demande du superviseur escale qui vous demandait de rester pour récupérer vos erreurs au prétexte d'avoir agi ainsi par lassitude et au prétexte que vous n'êtes pas archiviste.

Ce comportement s'inscrit dans une attitude non professionnelle qui fait peser des risques sur le fonctionnement des procédures de la compagnie et pourrait mettre cette dernière dans l'impossibilité de répondre aux demandes réglementaires de l'autorité.

Pour ces motifs et compte tenu de la gravité des faits reprochés et des explications recueillies au cours de l'entretien du 26 septembre 2011, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible, nous vous notifions votre licenciement pour faute grave qui prendra effet à la première présentation de la présente sans indemnité de préavis ni de licenciement.

Nous vous rappelons que vous faites l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire. Par conséquent, la période non travaillée à partir du 14 septembre 2011 nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée. (...)'

Par jugement rendu le 7 février 2014, le conseil de prud'hommes de Bobigny a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur [V] et condamné la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à lui régler les sommes suivantes :

13'365,20 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1500 €au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée et 150 euros au titre des congés payés afférents,

3341,30 euros au titre du préavis et 334,13 euros au titre des congés payés afférents,

5179,01 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [V] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 12 mars 2014.

Par conclusions visées au greffe le 30 mai 2017 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [V] demande l'infirmation du jugement, la nullité de son licenciement et sa réintégration,

subsidiairement, la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement et son infirmation en ce qu'il a rejeté sa réintégration et à défaut de voir prononcer celle-ci, l'infirmation du jugement sur le montant de l'indemnité de licenciement et la condamnation de La société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à lui régler la somme de 20'000 € à ce titre, la décision de première instance étant par ailleurs confirmée s'agissant des autres sommes allouées.

À titre infiniment subsidiaire, si la nullité du licenciement ni le défaut de respect des dispositions du règlement intérieur n'étaient retenus, Monsieur [V] demande de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir prononcer la condamnation de la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à lui régler la somme de 20'000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, les autres sommes allouées étant confirmées.

Monsieur [V] sollicite par ailleurs et en tout état de cause, la condamnation de la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à lui régler les sommes suivantes :

20'000 € à titre de dommages-intérêts pour le harcèlement moral subi,

12'600 € à titre de rappel de salaire relatif à la majoration qualité d'agent de fret et 1260 € au titre des congés payés afférents,

131,97 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté (rappel de mars 2007 inclus) pour l'année 2007,

279,73 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté pour l'année 2008,

227,86 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté (rappelle d'avril, mai, juin et juillet 2009 inclus) pour l'année 2009,

384,93 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté pour l'année 2010,

118,04 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté pour l'année 2011,

3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 30 mai 2017 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST demande l'infirmation partielle du jugement, le rejet des demandes de Monsieur [V] sur la base d'un licenciement régulier et bien fondé et sa condamnation à lui régler la somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire, la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST sollicite de voir ramener à de plus justes proportions les demandes de Monsieur [V] au titre du licenciement prétendument causé, le rejet de sa demande de réintégration, de ses demandes de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, de sa demande de rappel de salaire et de rappel de primes d'ancienneté.

MOTIFS

- sur l'exécution du contrat de travail

Monsieur [V] sollicite ici un rappel de salaire sachant qu'il a été embauché en qualité d'agent de trafic mais a également exercé les fonctions d'agent de fret sans être rémunéré,

Les documents contractuels d'embauche des 24 septembre 2001 et 31 mars 2002 justifient que Monsieur [V] a été engagé en qualité d'agent de trafic;

La convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien différencie les fonction d'agent de trafic lequel établit sous la responsabilité d'un agent de qualification supérieure les documents de trafic conformément à la réglementation, éventuellement à l'aide de l'outil informatique et celles d'agent de fret lequel assure l'enregistrement du fret en s'assurant du respect des conditions d'acceptation et en contrôlant les documents d'accompagnement et de taxation;

Il est produit aux débats deux fiches de poste d'agent de trafic établis par l'employeur;

La fiche de poste en date du 1er avril 2000 retient que celui ci est chargé de préparer des documents nécessaires au chargement des actions , de superviser et de coordonner les opérations de déchargement et de chargement en piste pour assurer le départ à l'heure des avions;

La fiche de poste du 5 janvier 2011 mentionne des fonctions supplémentaires de supervision du fret de clients;

Sur ce point, il ressort du compte rendu de la 'visite trafic' du directeur d'exploitation, Monsieur [N], en date du 30 novembre 2010, qu'il a été demandé par la société aux agents de trafic d'assurer la réception , le contrôle et l'acceptation du fret de clients tiers , cette nouvelle activité étant adjointe au trafic ce, sur une durée très courte de 21h30 à 1h30, cinq jours sur sept, aux horaires pendant lesquels la cellule trafic est activée, le directeur d'exploitation explicitant que cette activité ne pouvait pas faire l'objet d'une création d'un service dédié et internalisait une activité qui, sans cela était vouée à la sous-traitance;

Étant observé par la cour qu'aux termes du contrat de travail à temps partiel, des bulletins de salaire et des plannings produits , Monsieur [V] effectuait des horaires de nuit comprenant le créneau horaire susvisé et au regard de la justification ici apportée de la réalisation par le salarié de tâches supplémentaires sans modification du travail d'origine, il doit lui être alloué la somme de 7255, 12 euros outre 725, 51 euros à titre de congés payés au regard à titre de rappel de salaire étant tenu compte d'une majoration du salaire mensuel porté sur ses bulletins de paie pour 1/8ème.

S'agissant du rappel de primes d'ancienneté, dont Monsieur [V] fait valoir qu'une telle prime doit intégrer la majoration des heures de nuit, la cour rappelle cependant qu'aux termes de l'article 10 de l'annexe III de la convention collective, le montant de la prime ne peut être inférieur au produit du nombre d'années d'ancienneté par 1% des appointements minimaux correspondant au coefficient hiérarchique de l'intéressé dans l'entreprise, qu'aux termes de l'article 2 de cette annexe, les salaires minimaux comprennent tous les éléments formant le salaire à l'exception des primes et majoration dont celle relative au travail du dimanche, de nuit et des jours fériés;

En conséquence de ces éléments, le jugement du conseil de prud'hommes a lieu d'être confirmé ce qu'il a rejeté la demande après avoir retenu que Monsieur [V] appartenait à la catégorie des ouvriers et employés visés par l'article 10 susvisé.

- sur la nullité du licenciement

Monsieur [V] fait état ici de la discrimination syndicale et du harcèlement moral dont il aurait été victime du seul fait de son affiliation syndicale;

Définie à l'article L.2141-5 du code du travail, la discrimination syndicale est le fait pour l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesure de discipline et de rupture du contrat de travail;

Conformément à l'article L.1134-1 de ce code, il appartient dans un premier temps au salarié syndicaliste qui se prétend victime d'une discrimination de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement puis, dans un second temps, à l'employeur d'établir que la disparité de situation constatée est justifiée par des critères objectifs, étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat;

Par ailleurs, en application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral , il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement;

Monsieur [V] fait ici valoir que la société EUROPE AORPOST n'avait aucun grief à lui opposer, qu'elle a sanctionné des membres de son personnel syndiqué pour avoir participé à une grève, qu'elle est d'ailleurs engagée dans d'autre procédures prud'homales contre les salariés syndiqués auprès du même syndicat auquel il appartient, que, l'appartenance à un syndicat actif était mal ressentie au sein de la compagnie

Le salarié produit aux débats un carnet de la CGT visant une date d'adhésion au 28 janvier 2011, des attestations de Messieurs [I], [C], [S], [X] , [W] , [K], Madame [Z] agents de trafic et de Monsieur [Y], sans emploi, visant que tout le personnel sol savait qu'il était syndiqué de même que les superviseurs et les cadres de la compagnie, ce tandis qu'il était mal vu de faire partie d'un syndicat actif, Monsieur [K] ajoutant que du jour où la direction a connu le syndicalisme de Monsieur [V], celui-ci était passé du 'statut d'employé modèle à celui de persona non grata';

La cour observe cependant que les termes des attestations susvisées restent généraux et ne visent aucun fait précis et circonstancié relatif à Monsieur [V];

L'entretien d'appréciation performance relatif à l'année 2010 et effectué dans la perspective de l'année 2011 produit par Monsieur [V] se limite à mentionner que l'intéressé, après une dizaine d'années au même poste, en avait visiblement fait le tour et éprouvait quelques difficultés à 'se mettre en évidence de façon positive', sa réticence au changement conduisant son superviseur Monsieur [N] à l'encourager à chercher, comme il en manifestait le souhait ,une nouvelle orientation professionnelle;

La lettre de la direction des ressources humaines de la société en date du 5 octobre 2011 relatif à un débrayage sans préavis dans la nuit du 22 au 23 septembre, produite par Monsieur [V] aux débats, est adressée à Monsieur [U] [I] et non au salarié;

La lettre de l'inspection du travail du 29 décembre 2011, postérieur au licenciement, ne mentionne pas non plus Monsieur [V] ;

Les lettres relatives à l'entretien du 2 août 2011 entre le salarié et sa hiérarchie visent l'exécution par Monsieur [V] de ses fonctions au regard de sa qualification sans autre référence;

S'agissant des faits à l'origine de la rupture, il convient d'observer qu'aux termes de la lettre de licenciement du 12 octobre 2011 qui fixe les limites du litige, il est reproché à Monsieur [V] un manquement aux règles de sûreté en ce qu'il aurait laissé la porte sans surveillance des accès réservés pendant une demi-heure le 28 juillet 2011 et en ce qu'il serait sorti fumer en zone réservée par l'accès non surveillé alors que la réglementation de l'aéroport l' interdit, l'employeur faisant également grief à Monsieur [V] d'avoir saboté le 17 août 2011 l'archivage de données, jetant notamment dans diverses poubelles des données réglementaires malgré l'imminence d'un audit à venir dont les salariés avaient connaissance, le salarié ayant refusé d'obtempérer à la demande de son superviseur de rester pour récupérer ses erreurs;

La cour observe que s'agissant des faits du 28 juillet 2011, un entretien a eu lieu entre l'intéressé et Monsieur [Q] le 2 août, que la lettre de Monsieur [V] en date du 11 août écrite à cette occasion ne fait aucune référence à son appartenance syndicale tandis que l'exercice ou non de fonctions de l'intéressé en magasin apparait avoir focalisé le débat entre les parties,

Les faits en date du 17 août 2011 sont quant à eux reprochés non seulement à Monsieur [V] mais également à deux autres salariés dont il n'est pas justifié d'une appartenance syndicale,

De même, aucune attestation ne permet d'établir des faits concernant un harcèlement de l'intéressé , les courriels communiqués aux débats se limitant pour leur part à mentionner des instructions collectives de la part de la hiérarchie, les évaluations du salarié faisant état d'un climat constructif, tandis que son avis d'arrêt de travail du 5 août 2011 délivré par le docteur [G] mentionne une asthénie, sans lien apparent avec les conditions d'emploi, le certificat médical du médecin délivré le 13 février 2012 se bornant quant à lui à reproduire des déclarations de l'intéressé quant à l'existence d'un syndrôme dépressif;

Il s'en déduit qu'aucun élément ne permet en l'espèce de relier les faits à l'origine de la rupture avec l'appartenance syndicale de Monsieur [V] tandis que la matérialité d'éléments de faits précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée

Les demandes de nullité de la rupture , de réintégration sur le fondement de l'article 7.2.3 du règlement intérieur en visant la possibilité en cas d'annulation de la peine prononcée outre la demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral seront en conséquence rejetées.

- sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

Il est ici rappelé que lorsque le licenciement est prononcé par une personne non habilitée pour le faire en application d'un texte particulier, le manquement rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Monsieur [V] a, en l' espèce, été licencié pour faute grave par lettre du 12 octobre 2011 signée de la directrice des ressources humaines,

Le règlement intérieur du 11 avril 2011 ici applicable porte des restrictions au licenciement et retient que ceux fondés sur une cause réelle et sérieuse et sur une faute grave constituent des sanctions du troisième degré devant être prononcées par le directeur général de la compagnie;

Il s'en déduit que le signataire de la lettre de licenciement n'avait pas le pouvoir , à l'époque, de licencier en vertu du règlement intérieur, celui ci ayant d'ailleurs fait l'objet d'une modification sur ce point au mois d'août 2012;

Etant surabondamment constaté que la lettre de licenciement n'est fondée sur aucun des cas contractuellement énumérés dans le règlement intérieur en son article 7.2.3 , il s'ensuit que le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse car non conforme aux stipulations conventionnelles.

Le jugement de première instance a donc lieu d'être confirmé sur ce point.

L'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité légale de licenciement, le rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents tels qu'alloués par le conseil de Prud'hommes seront ici confirmés, l'intimée ne présentant pas d'observations à cet égard;

L'employeur refusant la réintégration et compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié (moyenne des trois derniers mois de 1499,51 euros) , de son âge, de son ancienneté depuis le 24 septembre 2001 , du défaut d'emploi fixe de Monsieur [V] depuis la rupture et des conséquences du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces et des explications fournies, le jugement de première instance a lieu d'être confirmé en ce qu'il a condamné la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à régler au salarié la somme de 13'365,20 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il est rappelé que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit en l'espèce le 19 novembre 2011 et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant soit en l'espèce le 7 février 2014.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris excepté s'agissant du rejet de la demande de rappel de salaire relatif à la majoration en qualité d'agent de fret,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à payer à Monsieur [V] la somme de 7255,12 euros à titre de majoration en qualité d'agent de fret outre 725,51 euros au titre des congés payés afférents

Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2011 et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter du 7 février 2014,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST à payer à Monsieur [V] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les autres demandes,

Condamne la société ASL AIRLINES anciennement dénommée EUROPE AIRPOST aux dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/02920
Date de la décision : 12/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°14/02920 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-12;14.02920 ?
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