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11/09/2017 | FRANCE | N°13/05544

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 11 septembre 2017, 13/05544


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2017



(n° 257, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/05544



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Février 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/02508





APPELANTS



Monsieur [V] [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

né le [Date naissanc

e 1] 1947 à [Localité 1]



Madame [C] [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 2]



Représentés par Maître Nicolas SCHAKOWSKOY de la SELARL CHESS AVOCAT...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2017

(n° 257, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/05544

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Février 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/02508

APPELANTS

Monsieur [V] [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1]

Madame [C] [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 2]

Représentés par Maître Nicolas SCHAKOWSKOY de la SELARL CHESS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0160

INTIMÉE

MADAME LA DIRECTRICE DE LA DIRECTION NATIONALE DES VÉRIFICATIONS DE SITUATIONS FISCALES 'DNVSF'

ayant ses bureaux [Adresse 3]

[Adresse 4]

agissant sous l'autorité de Monsieur le Directeur Général des Finances Publiques, [Adresse 5]

Représentée par Maître Pascale NABOUDET-VOGEL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Mai 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Edouard LOOS, président et par Madame Clémentine GLEMET, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M et Mme [K] ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle (ESFP), au titre des années 2002 et 2003, par la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Le 26 décembre 2006, une proposition de rectification au titre de l'année 2003 leur a été notifiée, concernant trois distributions de capital effectuées par le trust Nahanni, le vérificateur ayant considéré qu'elles représentaient des donations indirectes de la part du constituant du trust, au bénéficiaire.

Le 25 octobre 2007, une mise en recouvrement a été adressé pour un montant de 1 206 510 euros en principal et de 322 989 euros en pénalités, soit un total de 1 529 499 euros pour l'année 2003.

Le 14 décembre 2007, M [K] a adressé une réclamation contentieuse à la direction nationale des vérifications de situations fiscales, celle-ci a donné lieu à une décision de rejet le 10 décembre 2008.

M [V] [K] a assigné, le 4 février 2009, l'administration fiscale aux fins de la voir déclarer non fondée en sa demande et de prononcer le dégrèvement des sommes susvisées.

Par jugement du 19 février 2013, le tribunal de grande instance de Paris a :

- confirmé la décision de rejet en date du 10 décembre 2008.

- condamné M. Mme [K] aux dépens.

Ils ont relevé appel de cette décision le 19 mars 2013.

La clôture est intervenue le 24 avril 2017.

Par conclusions signifiées en date du 14 avril 2017, MMme.[K] demandent à la cour de :

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 19 février 2013 en ce qu'il a rejeté la requête de M. et Mme [V] [K].

Et statuant à nouveau, prononcer la décharge des impositions litigieuses mises à la charge de M. [V] [K].

Débouter l'administration fiscale de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamner l'administration fiscale à payer une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner l'administration fiscale aux entiers dépens de première instance et d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions en date du 9 août 2013, la direction nationale des vérifications de situations fiscales demande à la cour de :

Dire et juger les époux [K] mal fondé en son appel du jugement rendu le 19 février 2013 par le tribunal de grande instance de Paris,

L'en débouter, ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer la décision entreprise,

Dire qu'il n'y a pas lieu au versement au profit des appelants d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamner les appelants à payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du cpc ainsi qu'aux dépens.

SUR CE,

Sur le trust

L'acte constitué le 22 mars 1995 stipule que le constituant dont l'identité est inconnue a pour objectif de réserver au profit de personnes désignées un montant qu'il a confié à un trustee ( fiduciaire ) le soin de gérer le capital et les revenus au bénéfice des personnes désignées. Il est discrétionnaire en ce que le trustee a le pouvoir de gérer le trust de la manière qu'il juge appropriée, mais il détient ces pouvoirs pour le compte des bénéficiaires ; les sommes perçues par les bénéficiaires sont qualifiées de dons ou avantages en revenu et capital.

Monsieur [K] fait valoir que : le trust est irrévocable et discrétionnaire, non testamentaire (trust Nahanni) ; qu'aucun impôt n'est exigible en 2003 à l'occasion des distributions de capital effectuées par le trust Nahanni, que le trustee n'est ni un intermédiaire ni un dépositaire.

Il conteste l'application de l'article 894 code civil, selon lui le trust Nahanni ne peut constituer une donation indirecte, sauf a méconnaitre les pouvoirs discrétionnaires du trustee ; il prétend que le dessaisissement irrévocable et définitif du constituant a entrainé un transfert de propriété, au profit du trustee, que la mise en place du trust Nahanni s'est traduite, par une véritable mutation au profit du trustee, qui est devenu le propriétaire juridique des actifs transmis ; que par les distributions de capital effectuées par le trust Nahanni, le trustee a exercé son pouvoir souverain sur les actifs du trust.

Il conteste l'intention libérale en précisant que le constituant du trust n'est pas identifié, qu'il n'est pas possible de déterminer l'intention libérale qui aurait animé l'auteur des donations, s'agissant des distributions effectuées par le trustee.

Il ajoute qu'après dessaisissement du constituant, le trustee est devenu le propriétaire des biens, de sorte que l'intention libérale ne peut émaner du constituant, qu'en outre l'acceptation du bénéficiaire, du vivant du donateur supposé, n'est pas apportée.

L'administration estime que les conditions de la donation indirecte sont réunies, que si le trust est discrétionnaire, non testamentaire, personnel et irrévocable, le trustee, n'est que le dépositaire d'une partie de cette propriété, laquelle se trouve partagée entre le trustee qui reçoit le titre et le bénéficiaire.

Elle soutient que le constituant reste propriétaire des biens mis en trust jusqu'au dénouement et que seul le bénéficiaire reçoit la propriété du bien et non le trustee qui intervient en qualité d'administrateur des biens et qui doit se conformer aux termes de l'acte de trust.

Elle affirme que le trustee doit impérativement se conformer aux termes de l'acte de trust pour effectuer les distributions en capital ou en revenus qu'il juge utiles. L'acte de trust prévoit que le trustee peut procéder à des distributions au bénéfice des personnes désignées à l'exclusion de tout autre.

Elle estime que le trust n'exclut pas la possibilité de transmettre une partie du capital, que les trois versement sont des distributions de capital, ce que M. [K] a reconnu, qu'une donation indirecte peut intervenir entre vifs et à cause de mort.

Ceci exposé, ainsi que l'a rappelé le tribunal, les parties s'accordent à reconnaître que le trust est non testamentaire, qu'il s'agit d'un acte entre vifs, que la remise des biens en trust est irrévocable, que le constituant s'est dessaisi de la propriété de ces biens.

Selon la loi d'autonomie, les biens mis en trust ne font pas partie du patrimoine du trustee et le fonctionnement du trust repose sur la confiance en la parole donnée.

En l'espèce, conformément à l'accord susmentionné, impliquant le constituant, le trustee et la désignation du bénéficiaire, une partie des biens remis au trustee par le constituant a été transmise, en capital, sans contrepartie, à M. [K], qui a accepté de recevoir les versements, les 16 avril, 23 mai et 23 juillet 2013.

Sur l'existence d'une donation indirecte :

L'existence d'une donation indirecte implique que les conditions posées par l'article 894 du code civil en vigueur, soient réunies à savoir un dessaisssement irrévocable du disposant de tout ou partie de ses biens effectué dans une intention libérale.

Selon l'administration, l'acte de constitution du trust Nahanni traduit l'existence d'une intention libérale du constituant au profit du bénéficiaire.

Il est acquis que par l'acte de trust, le constituant s'est dessaisi irrévocablement d'une partie de ses biens. L'intention libérale est exprimée par le constituant, au travers les clauses en cause, même si, il est également prévu les possibilités d'annuler cette intention conférée par le constituant au trustee.

Le fait que le trust soit 'inter vivos', n'exclut pas la possibilité de transmettre une partie de son capital. Les trois versements en capital effectués par le trust Nahanni au profit de [V] [K], ont été acceptés par celui-ci.

Si les versements en capital effectués par le trust ont été opérés par le trustee, ils ont été effectués sur la demande du constituant au profit de M. [K]. L'intervention du trustee dans l'opération, n'implique pas pour autant que le constituant ait été désinvesti de ses pouvoirs.

Le trustee se voit reconnaître certes de larges pouvoirs dans la gestion des biens qui lui ont été confiés, mais il n'en demeure pas moins que les dits biens ne font pas partie de son patrimoine et qu' il agit selon les prescriptions qui lui ont été fournies par le constituant.

S'agissant de la condition relative à l'intention libérale, selon l'appelant faute de connaître l'identité du constituant, les liens qui l'unissent au bénéficiaire ne sont pas établis. Or l'identité du constituant n'est pas déterminante à cet égard. Il est vrai que le nom du constituant n'est pas mentionné, cependant d'une part, l'existence du constituant est prouvée par la déclaration du trustee, qui indique avoir reçu les actifs qu'il détient par le constituant, d'autre part, le constituant a formellement désigné M. [K] en qualité de bénéficiaire, ce qui suffit à traduire l'intention libérale.

Enfin, la volonté du bénéficiaire d'accepter la donation, à savoir les trois versements, caractérise l'acceptation de celui-ci, quand bien même M. [K] n'est pas intervenu à l'acte. La donation indirecte a pris effet le jour de l'acceptation implicite des trois versements.

Il s'en suit que c'est à bon droit que le tribunal a jugé que l'opération pouvait être qualifiée de donation indirecte.

Sur l'article 750 ter cgi

En l'état du droit positif , avant l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative pour 2011, un trust irrévocable constituait une donation indirecte imposable en France au moment de l'appréhension des biens par le bénéficiaire, sans effectuer de distinction selon qu'il s'agisse d'un trust testamentaire ou non.

Le moyen soulevé par M. [K] de ce chef ne sera pas accueilli.

Sur l'absence de justification du taux d'imposition retenu

M. [K] reproche à l'administation d'avoir opéré un calcul des droits en faisant application du taux le plus élevé : 60 %

Il n'est pas contestable que le tarif des droits d'enregistrement dus à raison des mutations à titre gratuit est fonction du lien de parenté existant entre le donateur et le donataire.

En l'espèce, l'identité du donateur n'étant pas connue de l'administration et l'appelant ne l'ayant jamais communiquée c'est à bon droit que, l'administration a fait application du taux de 60 %

Sur l'obligation du paiement des droits de mutation

M. [K] conteste la demande en estimant qu'il n'est pas partie à l'acte.

Il résulte des developpements précédents que l'acte de trust Nahanni emporte, en France, les conséquences d'une donation indirecte.

M. [K] n'a pas souhaité révéler l'identité du constituant ainsi que ses coordonnées, dès lors il ne peut être fait grief à l'administration de poursuivre M. [K].

En conséquence le tribunal confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

M. [K] partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera tenu de supporter la charge des dépens.

Il est équitable d'allouer à l'administration la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

CONFIRME la décision entreprise,

Y ajoutant

DÉBOUTE M. [K] de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

CONDAMNE M. [K] à payer à Mme la directrice de la direction des vérifications la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE M. [K] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. GLEMET E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 13/05544
Date de la décision : 11/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°13/05544 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-11;13.05544 ?
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