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06/09/2017 | FRANCE | N°14/08080

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 06 septembre 2017, 14/08080


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 06 Septembre 2017

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/08080



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 12/06934





APPELANTE

Madame [Q] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

représentée par Me Etienne BATAILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0320





INTIMEE

SARL ROSENTHAL FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° RCS : 662 010 644

représentée par Me Guy MARTI...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 06 Septembre 2017

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/08080

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 12/06934

APPELANTE

Madame [Q] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

représentée par Me Etienne BATAILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0320

INTIMEE

SARL ROSENTHAL FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° RCS : 662 010 644

représentée par Me Guy MARTINET, avocat au barreau de PARIS, toque : R169 substitué par Me Charlotte ARBOGAST, avocat au barreau de PARIS, toque : P 439

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Juin 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère, rédactrice

Mme Séverine TECHER, Vice-Présidente Placée

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Eva TACNET, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES MOYENS DES PARTIES

Madame [Q] [K] a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er mai 2001 en qualité de démonstratrice au sein du grand magasin le printemps par la Sarl ROSENTHAL FRANCE qui applique la convention collective nationale du commerce de gros.

Elle a été désignée représentante de section syndicale UNSA au sein du magasin Printemps le 10 mars 2008. Ce premier mandat a pris fin le 23 mars 2010 à la date des élections au sein de l'entreprise.

Une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique de l'employeur la concernant a été refusée par l'inspecteur du travail le 2 mai 2010.

Sa désignation en qualité de représente de section syndicale a été renouvelée le 18 novembre 2010.

Cette désignation a été contestée par l'employeur devant le tribunal d'instance de STRASBOURG qui par jugement du 5 janvier 2011 a annulé la désignation de Madame [Q] [K].

Madame [Q] [K] a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement disciplinaire fixé le 15 avril 2011 et été licenciée pour faute grave le 21 avril 2011 .

Le 20 juin 2012, Madame [Q] [K] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 2] d'une demande visant à voir prononcer la nullité de son licenciement avec toutes conséquences de droit et ordonner sa réintégration en reprochant à l'employeur de l'avoir licenciée sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail.

Saisie d'un pourvoi contre la décision du tribunal d'instance annulant la désignation de Madame [Q] [K] en qualité de représentante de section syndicale, la Cour de Cassation, a par arrêt du 30 octobre 2013, cassé la décision du tribunal d'instance et confirmé la désignation de Madame [Q] [K] en qualité de représentante de la section syndicale de l'établissement pour l'UNSA au sein du magasin PRINTEMPS.

Par jugement du 30 avril 2014, auquel la cour se réfère pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le conseil de prud'hommes de Paris, considérant que le pourvoi formé par le syndicat contre le jugement du tribunal d'instance de Strasbourg annulant la désignation de Madame [Q] [K] n'avait pas d'effet suspensif et qu'en conséquence au moment de son licenciement, la salariée ne bénéficiait pas d'une protection particulière réclamant l'autorisation de l'inspecteur du travail préalable à son licenciement, considérant par ailleurs que l'employeur justifiait de la matérialité de la gravité de manquements justifiant son licenciement pour faute grave, l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes.

Madame [Q] [K] a interjeté appel de cette décision le 17 juillet 2014.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 6 juin 2017 au cours de laquelle les parties ont développé oralement leurs conclusions régulièrement déposées et visées par le greffier.

Madame [Q] [K] demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 2] du 30 avril 2014 en toutes ses dispositions, de condamner la société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE à lui payer les sommes suivantes:

*3 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*360 euros de congés payés afférents,

*3 600 euros d'indemnité de licenciement,

*90 000 euros d'indemnité pour licenciement illicite,

*65 474 euros d'indemnité pour non-respect du statut protecteur,

*4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En réponse la société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE demande à la cour,

A titre principal,

- de constater que Madame [Q] [K] ne bénéficiait pas du statut de salarié protégé au moment de son licenciement compte tenu de l'annulation de sa désignation en tant que représentante de section syndicale par jugement du tribunal d'instance de Strasbourg du 5 janvier 2011, de constater l'abandon des demandes de Madame [Q] [K] relatives au bien-fondé de son licenciement,

En conséquence,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 2] du 30 avril 2014 en toutes ses dispositions, de débouter Madame [Q] [K] de toutes ses demandes,

- de la condamner à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, si le licenciement était jugé nul,

- de limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 10 800 euros et le montant de l'indemnité du statut protecteur à la somme de 21 600 euros.

MOTIFS

Sur la nullite du licenciement

Madame [Q] [K] a été désignée représentante de section syndicale UNSA PRINTEMPS le 18 novembre 2010.

En application de l'article L2411 '3 du code du travail, le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après l'autorisation de l'inspecteur du travail.

La société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE l'a licenciée le 21 avril 2011 sans autorisation de l'inspecteur du travail en se prévalant d'un jugement contradictoire en dernier ressort du 5 janvier 2011, du tribunal d'instance de Strasbourg qui a annulé sa désignation en qualité de représentante de section syndicale.

Mais si en application de l'article 579 du code de procédure civile dont le bénéfice est invoqué par l'employeur, le pourvoi formé par le syndicat UNSA PRINTEMPS contre la décision du tribunal d'instance n'a pas suspendu les effets du jugement du tribunal d'instance et l'autorisait donc à licencier Madame [Q] [K] sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail, en revanche restent applicables les dispositions de l'article 625 dudit code qui prévoient que la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.

Ainsi un employeur qui décide de licencier un salarié avant l'expiration du délai de recours en cassation ou pendant une procédure en annulation d'un jugement devant cette cour, encourt le risque lié à une cassation du jugement qui a annulé la désignation d'un salarié protégé.

Or en l'espèce la Cour de Cassation, a par arrêt du 30 octobre 2013, cassé la décision du tribunal d'instance et confirmé la désignation de Madame [Q] [K] en qualité de représentante de la section syndicale de l'établissement pour l'UNSA au sein du magasin PRINTEMPS.

Les parties se trouvant dès lors replacées dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement, il en résulte que Madame [Q] [K] bénéficiait d'une protection syndicale au moment de son licenciement de sorte que la société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE ne pouvait la licencier sans autorisation de l'inspecteur du travail.
A défaut d'autorisation, son licenciement est nul et le jugement du conseil de prud'hommes est réformé sur ce point.

Sur l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur

Le délégué syndical qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu et sa réintégration, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection de 4 ans prévue par l'article L2411-1 du code du travail, augmentée de six mois telle que prévue par l'article L2411-5, dans la limite de la durée minimale de 2 ans du mandat des délégués du personnel posée par l'article L2314-27 du dit code.

En conséquence Madame [Q] [K], élue déléguée syndicale le 18 novembre 2011, protégée pendant 4 ans et 6 mois soit jusqu'au 18 mai 2016 et dont le contrat a été illégalement rompu le 21 avril 2011, peut dès lors réclamer une indemnité pour violation de son statut protecteur correspondant aux rémunérations qu'elle aurait touchées dans la limite de 2 ans et 6 mois soit du 21 avril 2011 jusqu'au 21 octobre 2013.

En conséquence considérant la rémunération mensuelle de de Madame [Q] [K] qui ne fait pas débat et la période de 30 mois retenue, l'indemnité due au titre de la violation de son statut protecteur est fixée à la somme de 1 828,74 euros X 30 = 54 862,20 euros.

Sur les indemnités de rupture

Le salarié protégé dont le licenciement est nul est fondé à obtenir réparation de son préjudice pour un montant au moins égal à 6 mois de salaires sur le fondement de l'article L1235-3 du code du travail.

Considérant que Madame [Q] [K] justifie d' une longue période de chômage après son licenciement, considérant son ancienneté de 10 ans et son salaire moyen, la cour trouve les éléments pour fixer son préjudice à la somme de 15 000 euros.

Par ailleurs termes de l'article L 1234 '1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave un salarié licencié s'il justifie d'une ancienneté de service continu d'au moins 2 ans a droit à 2 mois d'indemnités compensatrices de préavis de sorte qu'est fondée la demande de Madame [Q] [K] visant à obtenir à ce titre la somme de 3 600 euros outre un montant de 360 euros à titre de congés payés afférents.

Enfin sur le fondement des dispositions des articles L 1234 ' 9 et R1234-1 du code du travail qui prévoient que le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement qui est fonctions de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail et qui ne peut être inférieure à 1/5 de mois de salaire par année d'ancienneté auquel s'ajoute 2/15 de mois par année au-delà de 10 ans d'ancienneté, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement étant selon la formule la plus avantageuse pour le salarié soit le 12e de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ,le tiers des 3 derniers mois, il est fait droit aux prétentions de Madame [Q] [K] au paiement de la somme de 3 600 euros.

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles et en conséquence de les débouter de leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE succombante est condamnée au paiement des dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 2] en toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau et ajoutant,

DIT que le licenciement de Madame [Q] [K] est nul,

CONDAMNE la société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE à payer à Madame [Q] [K] les sommes suivantes :

*3 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*360 euros à titre de congés payés afférents,

*3 600 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul

*54 862,20 euros à titre d'indemnité pour non-respect du statut protecteur,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2012 s'agissant des créances salariales et à compter de ce jour pour les créances indemnitaires,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs prétentions,

CONDAMNE la société SAMBONET ROSENTHAL FRANCE venant aux droits de la Sarl ROSENTHAL FRANCE aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/08080
Date de la décision : 06/09/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°14/08080 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-06;14.08080 ?
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