La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2017 | FRANCE | N°14/07347

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 05 juillet 2017, 14/07347


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 05 Juillet 2017

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07347



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/07723





APPELANTE

Madame [N] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Hubert MAZINGUE, avocat au barreau de PARIS, toque

: K0008 substitué par Me Patrick LEROYER-GRAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0008





INTIMEE

SAS NATURA EUROPA SAS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° RCS : 453 986 994

co...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 05 Juillet 2017

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07347

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/07723

APPELANTE

Madame [N] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Hubert MAZINGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0008 substitué par Me Patrick LEROYER-GRAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0008

INTIMEE

SAS NATURA EUROPA SAS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° RCS : 453 986 994

comparante en personne, assistée de Me Laëtitia BONCOURT, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1857

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Madame Séverine TECHER, Vice-présidente placée

Greffier : Mme Eva TACNET, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Eva TACNET, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Madame [N] [N] a été embauchée par la SAS Natura Europa, dont l'activité est la commercialisation, la distribution de produits d'hygiène, de cosmétiques, de compléments alimentaires..., par contrat de travail à durée indéterminée en date du 10 septembre 2007 en qualité de responsable réseau commercial, statut cadre.

Mme [N] était placée en arrêt maladie ordinaire à compter du 04 juin 2010 jusqu'au 15 juin 2010, arrêt régulièrement prolongé à treize reprises.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 octobre 2010 la SAS Natura Europa convoquait Madame [N] à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 21 octobre 2010.

Suite à ce dernier par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 novembre 2010 la SAS Natura Europa proposait à Madame [N] de reprendre son poste sous forme de mi-temps thérapeutique à partir du 13 décembre 2010 en précisant les conditions et la durée de celui-ci. Mme [N] refusait cette proposition par lettre datée du 15 décembre 2010. Son arrêt maladie était prolongé.

Par décision en date du 30 décembre 2010 la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) [Localité 1] reconnaissait à Madame [N] la qualité de travailleur handicapé pour une durée de 2 ans avec effet à compter du 10 septembre 2010.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 janvier 2011 la SAS Natura Europa convoquait Madame [N] à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 17 janvier 2011. Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 janvier 2011 la SAS Natura Europa notifiait à Madame [N] son licenciement pour absence prolongée désorganisant le fonctionnement de la société rendant nécessaire son remplacement définitif.

Le 20 mai 2011, Madame [N] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris en annulation de son licenciement et en réintégration, et subsidiairement en contestation du bien-fondé de son licenciement.

Par décision en date du 25 novembre 2013, notifiée le 20 juin 2014, le Conseil de Prud'hommes a dit que le licenciement de Madame [N] est nul, a rejeté sa demande en réintégration et a condamné la SAS Natura Europa à lui payer les sommes suivantes :

- 30'000 €à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

et a débouté les parties de leurs autres demandes.

Le 27 juin 2014, Madame [N] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 26 mai 2017, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Madame [N] conclut à la réformation du jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit son licenciement nul.

Elle demande à la cour d'ordonner sa réintégration sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir outre le paiement d'une somme de 176'806 € en réparation du caractère illicite du licenciement. À titre subsidiaire elle maintient sa demande en annulation du licenciement et sollicite le paiement de la somme de 60'000 €en réparation du caractère illicite du licenciement et en tout état de cause le paiement d'une indemnité de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle demande à la cour de se réserver le contentieux lié à l'exécution de sa décision.

Par conclusions déposées le 26 mai 2017 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SAS Natura Europa demande l'infirmation du jugement entrepris et le rejet de toutes les demandes formées par Madame [N]. Subsidiairement elle demande à la cour de constater que la réintégration est impossible et que le manque-à-gagner de la salariée s'élevait à la fin de l'année 2012 à la somme de 8786,28 euros. Elle demande de limiter le montant des dommages intérêts alloués à une somme correspondant aux salaires des 6 derniers mois, ce, sans intérêt. Enfin en tout état de cause elle demande la condamnation de Madame [N] à lui payer une indemnité de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* Sur la nullité de la rupture du contrat de travail

Mme [N] prétend que la décision de la licencier est discriminatoire et fondée sur son handicap.

Aux termes des dispositions de l'article L 1132-1 du code du travail aucun salarié ne doit faire l'objet d'une mesure discriminatoire notamment en matière de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de licenciement, en raison de son handicap.

L'article L5213'6 du code du travail précise que pour garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard du travailleur handicapé l'employeur prend, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser.

Le refus de prendre des mesures au sens du premier alinéa peut-être constitutif d'une discrimination au sens de l'article L 1133-3 du même code.

Ce dernier texte spécifie que les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées.

Mais il résulte des propres explications de Mme [N], et des pièces qu'elle fournit, que la décision de la MDPH lui reconnaissant la qualité de travailleur handicapé lui a été confirmée par attestation en date du 30 décembre 2010, décision qu'elle a porté à la connaissance de la SAS Natura Europa par courriel en date du 11 janvier 2011 et par l'envoi d'une lettre recommandée reçue le 12 janvier 2011.

Ainsi résulte des propres explications de la salariée que lorsque l'employeur a repris la procédure de licenciement en la convoquant le 5 janvier 2011 à un entretien préalable à celui-ci il était dans l'ignorance de son statut de travailleur handicapé. La décision de la SAS Natura Europa d'engager la procédure de licenciement est donc étrangère à celui-ci.

Surtout Mme [N] ne peut reprocher à l'employeur de ne pas avoir pris en compte cet élément nouveau pour rechercher son reclassement. En effet, elle était alors toujours en arrêt maladie et son contrat de travail était suspendu depuis le 04 juin 2010, soit sept mois, l'adoption d'une mesure de type aménagement de poste pour pallier à l'impact du handicap n'était pas d'actualité puisqu'aucune reprise de poste n'était alors envisagée.

Etant observé qu'antérieurement et alors même que la salariée était en toujours en arrêt maladie, l'employeur avait accepté de renoncer à la procédure de licenciement initiée en octobre 2010, pour absence prolongée désorganisant l'entreprise et rendant nécessaire le remplacement de la salariée. Après l'entretien du 21 octobre 2010 les parties ont échangé afin d'envisager une reprise de Mme [N] dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique d'abord mi novembre puis fin novembre et enfin le 13 décembre 2010, il apparaît que l'employeur était alors en lien avec le médecin du travail régulièrement informé de ce projet.

Si Mme [N] a fait savoir que les conditions de celui-ci telles que proposées par l'employeur ne lui convenaient pas, force est de constater que de nouvelles prolongations de son arrêt maladie ont fait en tout état de cause échec à sa reprise et à l'adoption de la mesure envisagée.

La reconnaissance du statut de travailleur handicapé n'a pas pour effet d'interdire à l'employeur de licencier un salarié dont l'absence désorganise l'entreprise de telle sorte qu'elle rend son remplacement permanent nécessaire, en le contraignant à attendre la reprise éventuelle du salarié pour lui proposer une mesure d'adaptation de poste à son handicap. En l'espèce la cause du licenciement n'est pas en lien avec l'impact du handicap sur l'aptitude au poste mais avec l'absence prolongée de la salariée.

L'employeur n'a pas manqué aux obligations nées de l'article L 5213-6 du code du travail.

Sa décision est fondée sur l'absence prolongée de la salariée pendant sept mois, son retour envisagé à différentes reprises à compter du début du mois de septembre 2010 ayant été régulièrement reporté.

Or, Mme [N] occupait le poste de responsable régionale réseau chargée de l'animation du réseau commercial de la société dans deux départements, de l'animation et de la supervision d'une équipe de conseillères et conseillères seniors. Il est démontré qu'en son absence l'organisation du travail a été déficiente et que les objectifs commerciaux n'ont été atteints qu'à 94 % (contre 110 % l'année précédente sous sa supervision), les courriels échangés et versés aux débats démontrent l'usure et la lassitude de son équipe face aux efforts consentis pour pallier son absence. Le délégué du personnel le 16 décembre 2010 préconisait lui-même une reprise de la procédure de licenciement pour ne pas 'mettre en péril la région Alsace' il se faisait le relai de la démoralisation des salariés de son réseau et disait craindre une aggravation de la situation.

Enfin la SAS Natura Europa justifie avoir embauché Mme [U] dès le 28 mars 2011 pour remplacer Mme [N] en qualité de responsable réseau sur son secteur.

Dans ces conditions la société justifie que le licenciement de Mme [N] est bien fondé sur son absence prolongée qui a désorganisé le fonctionnement de l'entreprise et a nécessité son remplacement définitif. Ce motif est une cause objective, réelle et sérieuse de licenciement étrangère à toute discrimination fondée sur le handicap.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Mme [N] de toutes ses demandes.

* Sur les autres demandes

Mme [N] qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

L'équité et les circonstances de la cause ne commandent pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

RÉFORME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

et statuant de nouveau,

DÉBOUTE Mme [N] de toutes ses demandes,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [N] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/07347
Date de la décision : 05/07/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°14/07347 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-07-05;14.07347 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award