Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRÊT DU 29 JUIN 2017
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02907
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Janvier 2016 - Tribunal de Commerce de Paris - RG n° 2015000100
APPELANTS
Monsieur [T] [H]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 2]
SARL DTMB PRODUCTIONS
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 3]
N° SIRET : 477 936 464
prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Représentés par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Assistés de Me Eric ZENOU, avocat au barreau de PARIS, toque : G0064
INTIMÉES
SAS LES MARECHAUX
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 419 025 242
prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
EURL L'ARC CLUB
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 804 088 151
prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistées de Me Solène DELAFOND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0341, substituant Me Dominique BORDES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0341
SAS L'ATELIER MONTAIGNE anciennement dénommée MANKO MONTAIGNE
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 801 644 295
prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
SASU MOMA LIEUX
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 790 992 572
prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
SAS L'ARC HOLDING
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 412 067 670
prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistées de Me Solène DELAFOND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0341, substituant Me Dominique BORDES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0341
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Avril 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère, chargée du rapport, et Madame Anne DU BESSET, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente
Madame Anne DU BESSET, Conseillère
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé parMadame Fabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Monsieur Vincent BRÉANT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société DTMB Productions (ci-après dénommée DTMB), dirigée par M. [T] [H], assure notamment la promotion commerciale d'établissements festifs.
Les sociétés Les Maréchaux, L'Arc Club, L'Atelier Montaigne, L'Arc Holding et Moma Lieux, gérées par M. [I] [C] (ci-après dénommées les sociétés Moma), interviennent dans le domaine de la gestion de bars, brasseries et discothèques et gèrent en particulier des établissements de nuit à [Localité 5].
Au cours du printemps 2014, MM. [T] [H] et [I] [C] se sont rapprochés en vue d'une collaboration pour l'animation dans un premier temps de L'Arc Club, fermé depuis plusieurs mois suite à un incendie et dont la réouverture était prévue à l'automne, puis dans un second temps de L'Atelier Montaigne (dont le lancement était prévu début 2015).
Selon acte du 31 juillet 2014 intitulé 'Avant contrat - Term Sheet' signé, d'une part, par M. [T] [H] et DTMB, et d'autre part, par M. [I] [C] et les sociétés Moma, cette collaboration a été encadrée.
Aux termes de cet acte, expressément qualifié d'intuitu personae, DTMB se voyait confier, pour une durée de 4 années tacitement reconductible par périodes d'un an, moyennant rémunération, la direction marketing, commerciale et artistique, ainsi que la communication, des sociétés L'Arc Club et L'Atelier Montaigne, et devait notamment pour l'exécution de sa mission apporter aux sociétés Moma sa base de données contenant les adresses de sa clientèle nationale et internationale. L'acte prévoyait également un pacte d'actionnaires.
La réouverture de l'établissement L'Arc Club a eu lieu le 2 octobre 2014.
Selon courrier recommandé avec avis de réception du 3 novembre 2014, les sociétés Moma, sous la plume de M. [I] [C], ont notifié à DTMB et à M. [T] [H] la résiliation immédiate de toutes leurs relations contractuelles, écrites et non écrites, aux torts exclusifs de ces derniers, aux motifs que les événements du week-end intervenus au sein de l'établissement L'Arc Club ayant donné lieu au dépôt d'une plainte pour agression sexuelle contre M. [T] [H] étaient d'une exceptionnelle gravité et radicalement incompatibles avec leurs valeurs, ce dernier étant en outre sommé de ne plus se présenter dorénavant dans les différents établissements gérés par les sociétés Moma.
C'est dans ces conditions que DTMB et M. [T] [H] ont assigné, le 29 décembre 2014, les sociétés Moma pour voir reconnaître que cette rupture avait été faite au mépris de leurs droits.
Par jugement rendu le 26 janvier 2016, le tribunal de commerce de Paris a :
- dit qu'en rompant sans préavis et sans indemnité le contrat du 31 juillet 2014, les sociétés Les Maréchaux, L'Arc Club, L'Atelier Montaigne, et L'Arc Holding ont engagé leur responsabilité contractuelle ;
- condamné la société L'Arc Club à payer à la société DTMB Productions la somme de 30.000 euros au titre de la résiliation sans préavis de la convention du 31 juillet 2014 ;
- condamné la société L'Atelier Montaigne à payer à la société DTMB Productions la somme de 20 000 euros au titre de la résiliation sans préavis de la convention du 31 juillet 2014 ;
- condamné solidairement les sociétés Les Maréchaux, l'Arc Club, l'Atelier Montaigne, et l'Arc Holding à payer à la société DTMB Productions la somme de 80 000 euros au titre de la perte de chance liée à l'absence d'acquisition des titres de la société l'Arc Club ;
- débouté la société DTMB Productions de ses demandes :
* au titre de l'abus de droit de rupture ;
* au titre de la perte de chance liée à l'absence d'acquisition des titres de la société l'Atelier Montaigne ;
* au titre de la captation de clientèle ;
- débouté la société DTMB Productions et M. [H] de leurs demandes respectives au titre du préjudice moral et d'image ;
- débouté les défenderesses de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles ;
- condamné in solidum les défenderesses à payer à la société DTMB Productions et M. [H] la somme de 8 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires ;
- condamné in solidum les sociétés Les Maréchaux, l'Arc Club, l'Atelier Montaigne, et l'Arc Holding aux dépens.
Vu l'appel interjeté le 28 janvier 2016 par la société DTMB Productions et M. [T] [H] contre cette décision ;
Vu les dernières conclusions (n°4) signifiées par la société DTMB Productions et M. [T] [H] le 13 avril 2017 par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu l'article 12 du code de procédure civile,
Vu les articles 1101, 1134, 1149, 1154, 1589 et 1843-4 du code civil,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- d'infirmer le jugement rendu le 26 janvier 2016,
Statuant de nouveau :
- dire et juger que le contrat signé le 31 juillet 2014 a force obligatoire,
- dire et juger que les intimées n'ont pas respecté leur obligation contractuelle pour ce qui est des modalités de préavis prévues au contrat signé le 31 juillet 2014,
- dire et juger que les intimées n'ont pas respecté leur obligation contractuelle de transférer à la société DTMB Productions 10% des titres de la société l'Arc Club et 10% des titres de la société Atelier Montaigne,
- dire et juger que les intimées ont abusé du droit de résilier unilatéralement le contrat,
- dire et juger que la clientèle présentée par la société DTMB Productions a été captée par les intimées sans contrepartie financière,
- dire et juger que les intimées causent un préjudice à la société DTMB Productions et à Monsieur [T] [H],
- dire et juger les intimées irrecevables et mal-fondées en leurs demandes reconventionnelles et les débouter,
En conséquence :
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts, soit deux mois de rémunération au titre de la mission confiée par la société l'Arc Club, pour ne pas avoir respecté les modalités et le délai de préavis fixés contractuellement en cas de rupture anticipée du contrat signé le 31 juillet 2014,
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la violation de l'article 1145 du code civil,
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts, soit six mois de rémunération pour la mission confiée par la société Atelier Montaigne, pour ne pas avoir respecté les modalités contractuellement fixées en cas de rupture anticipée du contrat signé le 31 juillet 2014,
- condamner solidairement les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts pour ne pas avoir respecté l'obligation de
transférer 10% du capital social de la société l'Arc Club, le montant de son préjudice en lien de causalité étant égal au gain manqué par la société DTMB Productions au moment de la revente des actions,
- condamner solidairement les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 7.000.000 euros à titre de dommages et intérêts pour ne pas avoir respecté l'obligation de transférer 10% du capital social de la société Atelier Montaigne, le montant de son préjudice en lien de causalité étant égal au gain manqué par la société DTMB Productions au moment de la revente des parts sociales,
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 180.000 euros à titre de dommages et intérêts, soit douze mois de rémunération pour la mission confiée par la société l'Arc Club, pour abus dans l'exercice du droit de résilier unilatéralement le contrat signé le 31 juillet 2014,
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, pour la perte de rémunération variable en lien de causalité avec l'abus dans l'exercice du droit de résilier unilatéralement le contrat signé le 31 juillet 2014,
- condamner les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 276.000 euros correspondant à une année de chiffre d'affaires à titre de dommages et intérêts pour captation de sa clientèle,
- condamner solidairement les intimées à verser à la société DTMB Productions la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'atteinte à son image et à sa réputation et la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice moral subi,
- condamner solidairement les intimées à verser à monsieur [T] [H] la somme de 250.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'atteinte à son image et à sa réputation et la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice moral subi,
Y ajoutant :
- condamner les intimées à verser à chacun de la société DTMB Production et de Monsieur [T] [H] la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Eric Zenou, y compris les frais d'huissiers pour la signification de l'acte introductif d'instance et pour l'exécution de la décision à intervenir.
Vu les dernières conclusions (n°3) signifiées par les sociétés Les Maréchaux, L'Arc Club, Manko Montaigne (anciennement dénommée L'Atelier Montaigne), Moma Lieux et L'Arc Holding le 19 avril 2017, par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu les articles 1134, 1147 et 1382 du code civil, ainsi que 32-1 et 559 du code de procédure civile ;
A titre principal,
- Infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que l'avant-contrat du 31 juillet 2014 tenait lieu de loi entre les parties ;
Statuant à nouveau,
- Juger que le seul contrat né entre les parties est le contrat de prestation de services non écrit liant l'Arc Club d'une part, et DTMB Productions et Monsieur [T] [H] d'autre part ;
- Débouter Monsieur [T] [H] et la société DTMB Productions de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation, notamment de celles déduites de la prétendue rupture fautive de ce contrat.
À titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour jugeait que l'avant-contrat du 31 juillet 2014 a la nature d'un contrat au sens de l'article 1134 du Code civil,
- Infirmer le jugement en ce qu'il a :
- condamné l'Arc Club à verser une somme de 30.000 euros à DTMB Productions au titre de la rupture sans préavis du contrat du 31 juillet 2014 ;
- condamné l'Atelier Montaigne à verser une somme de 20.000 euros à DTMB Productions au titre de la rupture sans préavis du contrat du 31 juillet 2014 ;
- condamné les sociétés Les Maréchaux, l'Arc Club, l'Atelier Montaigne et l'Arc Holding, solidairement, à payer une somme de 80.000 euros à DTMB Productions au titre de la perte de chance de cette dernière d'entrer au capital de l'Arc Club ;
- condamné les sociétés du groupe Moma in solidum à verser 8.000 euros chacun à Monsieur [H] et à la société DTMB Productions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ; et
- débouté les sociétés du groupe Moma de leurs demandes reconventionnelles ;
- Confirmer le jugement attaqué de tous ces autres chefs de dispositif ayant débouté Monsieur [H] et/ou la société DTMB Productions de leurs demandes indemnitaires ;
En tout état de cause, statuant à nouveau,
- Débouter la société DTMB Productions et Monsieur [T] [H] de toutes leurs demandes ;
- Condamner la société DTMB Productions et Monsieur [T] [H] in solidum à verser 150.000 euros et 250.000 euros à l'Arc Club en réparation de son préjudice d'image et de son préjudice financier ;
- Condamner la société DTMB Productions et Monsieur [T] [H], in solidum, à verser aux intimées la somme de 25.000 euros chacune en réparation du préjudice né du caractère
abusif de leur action ;
- Condamner Monsieur [T] [H] et la société DTMB Productions, in solidum, à verser à chacune des intimées la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance et de ses suites.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 avril 2017.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a estimé, par motifs exacts et pertinents qui sont adoptés, que l'acte sous seing privé du 31 juillet 2014, peu important son intitulé ( 'Avant contrat - Term Sheet' ), constituait un contrat ayant force obligatoire entre les parties au sens de l'article 1134 ancien du code civil.
En effet, cet acte mettait à la charge de chaque partie des obligations précises, DTMB devant animer deux établissements de nuits en contrepartie de la rémunération que devaient lui verser les sociétés Moma à compter du 15 septembre 2014, obligations réciproques qui ont d'ailleurs fait l'objet d'un commencement d'exécution, et ce, jusqu'à la résiliation ; de même, il apparaît que la signature de conventions distinctes n'était pas une condition de formation du contrat, mais une simple modalité de son exécution réitérant et précisant l'accord de volontés.
Le jugement entrepris sera en revanche infirmé en ce qu'il a dit que les sociétés Moma avaient engagé leur responsabilité en rompant sans préavis, ni indemnité ce contrat le 3 novembre 2014 et accueilli partie des demandes indemnitaires consécutives de DTMB.
En effet, les sociétés Moma justifient que la résiliation immédiate du contrat le 3 novembre 2014 était justifiée par la faute grave de M. [T] [H], dont il n'est pas contesté qu'il a agi ès qualités de gérant de DTMB, à savoir un comportement caractériel et agressif incompatible avec sa mission d'animation et l'image de l'établissement L'Arc Club, ce qui les dispensaient de devoir respecter le formalisme prévu à l'article 5 du contrat, selon lequel en cas de faute de DTMB, la résiliation ne pouvait intervenir que 30 jours après une mise en demeure demeurée infructueuse.
En effet, il ressort des pièces du dossier que M. [T] [H], ès qualités de gérant de DTMB, s'est fait rappeler à l'ordre à deux reprises par les sociétés Moma sur son comportement inapproprié, comme suit :
- une première fois, par un e-mail du 11 octobre 2014 de M. [I] [C], gérant des sociétés Moma, selon lequel ce dernier lui reprochait son dédoublement de personnalité, à savoir son caractère frais et énergique le jour, et, tard dans la nuit, son comportement agressif et instable sous le coup de l'alcool, notamment à l'égard des équipes de l'établissement, et le mettait en demeure de s'améliorer ( : 'montre toi digne et montre l'exemple', ' si j'ai fais une erreur en te faisant confiance, j'en suis désolé mais l'histoire va s'arrêter net. (...) La balle est dans ton camp [T]. J'espère que tu vas capter sérieusement ce que je viens de te dire et que tu vas te montrer à la hauteur (...) Je te fais confiance pour te calmer') ;
- une seconde fois, par un courriel très détaillé et circonstancié, notamment dans le temps, du 20 octobre 2014 de M. [U] [O], directeur d'exploitation de L'Arc Club, aux termes duquel celui-ci listait différents griefs à sa charge (une prise de contrôle injustifiée des platines ou du micro, un bilan tardif inadéquat avec les serveurs, une mauvaise gestion de la clientèle, une altercation violente en public avec un des animateurs, un traitement privilégié de ses amis au détriment d'une célébrité...) et concluait ainsi : 'Tu apportes beaucoup trop d'instabilité dans le fonctionnement de l'exploitation. L'équipe a peur de toi et tu as créé un climat de méfiance et d'insécurité. L'équipe est en permanence en train de négocier avec tes sautes d'humeur et finalement nous passons notre temps à essayer de composer avec toi. (...) Je ne te permettrai pas de continuer de cette manière (...)', l'invitant enfin à mettre de côté ses 'démons' et à se ressaisir.
La cour observe à cet égard que l'argument des sociétés Moma selon lequel la gravité de ces griefs est soulignée par le fait qu'ils sont dénoncés par écrit, alors que l'oralité est la règle dans le business du milieu de la nuit, n'est pas critiqué, ni démenti par les appelants.
De plus, la réalité de ce comportement de M. [T] [H] est corroborée par les différentes attestations produites qui émanent de personnes ayant travaillé avec lui à L'Arc Club, dont le témoignage ne saurait être écarté pour la seule raison qu'elles sont ou étaient salariées des sociétés Moma, dans la mesure où ces différents éléments sont convergents à cet égard, ce qui n'empêche pas qu'ils mettent par ailleurs en exergue les qualités professionnelles réelles dont M. [T] [H] était pourtant à même de faire preuve.
Par suite, il apparaît que même si les faits de nature pénale dénoncés par M. [I] [C] dans son courrier de résiliation du 3 novembre 2014 n'ont eu aucune suite judiciaire - les parties s'accordant sur ce point - à savoir, des faits d'agression sexuelle imputés à M. [T] [H] qui auraient eu lieu à L'Arc Club dans la nuit du 31 octobre 2014 et ont fait l'objet d'une plainte par une cliente, il n'en demeure pas moins que le dépôt de cette plainte et l'enquête policière qu'elle a entraînée avec audition du personnel de l'établissement, a créé un climat de scandale autour du dit établissement et de la personne de son directeur artistique, M. [T] [H], à l'origine de ce 'tapage', et généré des rumeurs à ce propos, climat et rumeur dont les sociétés Moma étaient fondées à estimer qu'ils rendaient la poursuite de la mission de celui-ci impossible, compte tenu des 'dérapages' antérieurs de celui-ci déjà dûment dénoncés, ainsi que de l'importance de l'image de marque et de la réputation de ce type d'établissement qui se trouvaient ainsi entachées.
S'agissant de la rumeur, il est intéressant de relever que son existence - non véritablement discutée au demeurant - et sa répercussion négative en termes d'image sont attestées par les propres mails produits par les appelants (pièce n°16), mails qui émanent de relations professionnelles de M. [T] [H] et dont il résulte que les dites relations demandent à ce dernier des explications à ce sujet et même pour deux d'entre d'elles en concluent qu'il convient de mettre un terme (au moins provisoire) à la relation professionnelle entretenue.
La cour observe enfin qu'eu égard à l'intuitu personae expressément stipulé au contrat, la prestation de DTMB ne pouvait être dissociée de celle de son gérant associé, M. [T] [H], choisi pour son expertise en événementiel et qui exerce à travers la dite société.
Le contrat ayant en conséquence été dûment rompu pour faute grave de M. [T] [H] en qualité de gérant de DTMB, aux torts exclusifs de celle-ci, ces derniers seront entièrement déboutés de leurs demandes indemnitaires, le jugement étant donc infirmé sur ce point.
Les sociétés Moma réclament à titre de dommages intérêts les sommes de 150.000 euros et de 250.000 euros en réparation respectivement du préjudice économique et du préjudice d'image que leur auraient causé les appelants par la faute grave de M. [T] [H]. Or, les pièces produites sont insuffisantes à établir l'impact de la rumeur sur l'image de L'Arc Club, ainsi que la baisse du chiffre d'affaires alléguée (seuls le chiffre des mois d'octobre à décembre 2014 étant justifié, ce qui n'est pas significatif) et son imputabilité à la faute contractuelle commise, étant observé en outre que le défaut d'entrée de DTMB au capital des sociétés Moma a été suppléé par un autre actionnaire, prestigieux, le groupe Barrière, en février 2016. Le jugement entrepris est donc confirmé sur ce point par motifs propres.
Vu l'article 1382 du code civil, la demande de dommages intérêts formée par les intimées pour procédure abusive de DTMB et de M. [T] [H] sera rejetée, l'abus du droit d'ester en justice, la mauvaise foi ou l'intention de nuire de ceux-ci n'étant nullement démontrés, le jugement déféré étant également confirmé sur ce point.
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Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de DTMB. L'équité commande de faire droit à la demande des intimées fondée sur l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 8.000 euros (pour l'ensemble et non pour chacune).
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a dit qu'en rompant sans préavis et sans indemnité le contrat du 31 juillet 2014, les sociétés Les Maréchaux, L'Arc Club, L'Atelier Montaigne et L'Arc Holding avaient engagé leur responsabilité contractuelle et accueilli les demandes indemnitaires de la société DTMB Productions et de M. [T] [H], ainsi que sur la charge des dépens et sur la condamnation prononcée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
Statuant de nouveau sur les points réformés,
DÉBOUTE la société DTMB Productions et M. [T] [H] de l'ensemble de leurs demandes ;
CONDAMNE la société DTMB Productions à payer la somme de 8.000 euros aux sociétés Les Maréchaux, L'Arc Club, Manko Montaigne, Moma Lieux et L'Arc Holding, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE la société DTMB Productions aux dépens.
Le GreffierLa Conseillère faisant fonction de Présidente
Vincent BRÉANT Fabienne SCHALLER