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28/06/2017 | FRANCE | N°15/04003

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 28 juin 2017, 15/04003


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 28 JUIN 2017



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/04003



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15032





APPELANT



Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, HOLDING FINANCIERE RG, SA inscrite au RC

S de PARIS, SIRET n° 405 363 045 00023, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

75005 PARIS



Représenté et as...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 28 JUIN 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/04003

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15032

APPELANT

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, HOLDING FINANCIERE RG, SA inscrite au RCS de PARIS, SIRET n° 405 363 045 00023, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

75005 PARIS

Représenté et assisté de Me Delphine MONTBOBIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1600

INTIMÉES

Madame [P] [G] veuve [W]

Née le [Date naissance 1] 1924 à [Localité 1]

77 ter rue Michel Ange

75016 PARIS

Madame [U] [W] épouse [Q]

Née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 1]

[Adresse 3]

75016 PARIS

Représentées par Me Frédéric BURET, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : D1998

Représentées par Me François MEUNIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : R022 et assisté de Me BERGOUX, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 49

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mai 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Frédéric ARBELLOT, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre,

M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller,

Mme Laure COMTE, Vice-présidente placée,

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président et par Mme Stéphanie JACQUET, Greffier présent lors du prononcé.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon un acte notarié du 2 décembre 1997, Mme [P] [G], veuve [W], et Mme [U] [W], épouse [Q], sa fille, (les consorts [W]) sont propriétaires dans l'immeuble en copropriété sis [Adresse 1] des lots n° 102, correspondant à un local commercial avec réserve, 156, constitué de deux chambres froides, 125, correspondant à une réserve au sous-sol, et 122, correspondant à une chambre de service au 7ème étage.

La société Charif qui louait ces locaux et les exploitait sous forme d'épicerie, a cédé son fonds de commerce à la société Carrefour France Proximité (la société Carrefour) au mois de janvier 2013 pour qu'elle y exploite un magasin alimentaire sous l'enseigne Carrefour Express.

Compte tenu des travaux engagés dès le 23 janvier 2013 sans autorisation par la société Carrefour et portant selon le syndicat des copropriétaires sur les parties communes, ce dernier a d'abord obtenu, par ordonnance sur requête du 15 février 2013, la désignation d'un huissier de justice qui a établi son constat le 21 février 2013, révélant que le plafond de la cave était fortement fissuré, que des équipements de plomberie étaient en attente de pose au sous sol, ainsi qu'un extracteur d'air, qu'un percement de mur porteur avait été réalisé pour le passage de câbles, qu'une poutre métallique était posée sur la poutre maîtresse des caves, qu'une trémie avait été percée entre le rez-de-chaussée et le sous-sol, et que les soupiraux avaient été bouchés.

A la suite de ces constatations, le syndicat des copropriétaires a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 2 avril 2013, a désigné M. [S] en qualité d'expert afin d'examiner notamment si les travaux effectués ont eu un impact sur les parties communes. Déposant son rapport le 18 novembre 2014, l'expert a relevé des modifications d'affectation des locaux, l'agrandissement de la trémie, le remplacement de la porte d'accès au sous-sol, l'obturation des soupiraux, la modification des portes d'accès de l'immeuble.

Le 20 juin 2014, l'assemblée générale des copropriétaires a voté la résolution n° 25-1 afin de "supprimer dans le règlement de copropriété la mention "immeuble à usage mixte" qui sera remplacé par "immeuble à usage principalement d'habitation bourgeoise" et pour les lots 101 et 102 à usage commercial tel que défini dans le règlement de copropriété".

En revanche, la même assemblée générale a rejeté la résolution n° 29 par laquelle les consorts [W] sollicitaient l'autorisation de réaliser les "travaux suivants touchant les parties communes de l'immeuble et modifiant son aspect extérieur : (...)

- aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,

- pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation et qui sont annexés au procès verbal de l'assemblée générale et conformément aux autorisations administratives obtenues,

- création d'une pente de 3% à l'entrée du magasin en conformité avec la réglementation sur l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite,

- agrandissement des deux grilles existantes en façade,

- utilisation de la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours,

- percement de 100 mm de diamètre du plancher séparatif des lots du rez de chaussée avec ceux du sous-sol pour le passage des canalisations de froid alimentaire".

Par ordonnance sur requête du 8 octobre 2014, les consorts [W] ont été autorisées à faire assigner à jour fixe le syndicat des copropriétaires.

Le 9 octobre 2014, les consorts [W] ont fait assigner ce dernier pour la date du 27 novembre 2014 afin d'obtenir l'annulation des résolutions n° 25-1 et 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014, et l'autorisation judiciaire sur le fondement de l'article 30 loi du 10 juillet 1965 de faire réaliser les travaux demandés à l'assemblée générale sous la surveillance de l'architecte de l'immeuble si besoin. Elles ont également demandé la condamnation du syndicat des copropriétaires à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile, le tout assorti de l'exécution provisoire.

Par jugement du 29 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré recevables les demandes en annulation des résolutions n° 25-1 et 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 des consorts [W] ;

- annulé la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 du syndicat des copropriétaires ;

- débouté les consorts [W] de leur demande en annulation de la résolution n° 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 du syndicat des copropriétaires ;

- accordé aux consorts [W] l'autorisation judiciaire de :

faire réaliser les travaux d'aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble, de pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et de remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues,

et de transformer la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture conformément aux préconisations de l'expert [S] dans son rapport du 18 novembre 2014, le tout à leurs frais et sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble ;

- débouté les consorts [W] de leur demande d'autorisation judiciaire portant sur le surplus des travaux réclamés ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages-intérêts ;

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision';

- fait masse des dépens et dit qu'ils seront partagés par moitié entre le syndicat des copropriétaires, d'une part, et les consorts [W], d'autre part ;

- dit qu'il seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats l'ayant demandé.

Le 19 février 2015, le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions signifiées le 26 avril 2017, le syndicat des copropriétaires, appelant, demande à la cour de (d') :

- le dire et juger recevable et bien fondé en son appel, ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- infirmer la décision rendue le 29 janvier 2015 en ce qu'elle a :

annulé la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014,

autorisé judiciairement les consorts [W] à faire réaliser les travaux d'aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher la structure porteuse de l'immeuble, de pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et de remplacement du store existant suivants les plans joints à la convocation,

débouté le syndicat de sa demande de dommages-intérêts,

débouté le syndicat de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire ;

Et statuant et jugeant à nouveau,

- dire et juger valable la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 ;

- débouter les consorts [W] de leur demande d'autorisation judiciaire de travaux ;

- ordonner la remise en état des lieux, tels qu'ils étaient avant la décision du 29 janvier 2015 pour le cas où les travaux autorisés auraient été effectués, en se conformant aux conclusions de l'expert judiciaire M. [S] (rapport du 18 novembre 2014) ;

- débouter les consorts [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner les consorts [W] solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

- condamner les consorts [W] solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Montbobier, avocat, au titre de la procédure de 1ère instance ;

- condamner les consorts [W] solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Montbobier, avocat, au titre de la présente procédure d'appel.

Par conclusions signifiées le 11 avril 2017, les consorts [W], intimés, demandent à la cour de :

- confirmer le jugement du 29 janvier 2015 ;

- débouter Ie syndicat des copropriétaires de toutes ses fins demandes et prétentions ;

- le condamner au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- condamner le syndicat des copropriétaires au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Buret, avocat, par application de l'article 699 du même code.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mai 2017.

SUR CE,

Sur la recevabilité de la demande en annulation des résolutions n° 25-1 et 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014

Selon l'article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, : "Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale." ;

Il est constant que la recevabilité d'une action en annulation de décisions d'assemblée générale dépend donc exclusivement de la qualité de copropriétaire de celui qui agit et de son absence lors de l'assemblée générale ou de l'opposition manifestée lors de cette assemblée générale aux résolutions attaquées ;

En l'espèce, les consorts [W] produisent à la cour (pièce n° 12 des intimés) l'acte notarié de donation du 2 décembre 1997, qui démontre que Mme [P] [G], veuve [W], auparavant propriétaire en propre des lots concernés, a fait donation à cette date de la nue-propriété des lots n° 2, 22, 31 et 58 à sa fille Mme [U] [W], épouse [Q] ; que ces numéros de lots correspondent dans l'ancien règlement de copropriété du 19 janvier 1966 aux nouveaux lots n° 102, 122, 156 et 125 dans le nouveau règlement de copropriété du 22 novembre 2006 ;

Le procès-verbal de l'assemblée générale du 20 juin 2014 (pièce n° 7 des intimés) précise en préambule que M. [Q], mandaté par Mme [P] [G], veuve [W], pour la représenter à cette assemblée générale, n'a pas pu voter pour le compte de cette dernière au titre des lots n° 102, 122, 125 et 156, dès lors qu'il mentionne que "l'assemblée constate que les règles de représentation pour les lots tels que mentionnés sous les numéros 2, 22, 31 et 58 totalisant 586/10003èmes des charges générales ne sont pas respectées faute d'avoir désigné un mandataire commun et d'avoir notifié au syndic la désignation d'un éventuel mandataire commun, conformément à l'article 23§2 de la loi du 10 juillet 1965 (...) En conséquence, Monsieur [Q] mandataire de Madame [W] votera avec le nombre de voix correspondant aux lots 7, 9, 28, 46, 50, 53, 54, 59, 61, 62, 662 totalisant 1716/10003èmes des charges générales pour lesquels il a été mandaté" ;

Il résulte de ces éléments que Mme [P] [G], veuve [W], et Mme [U] [W], épouse [Q], sont bien copropriétaires dans l'immeuble des lots litigieux, et qu'elles n'étaient ni présentes, ni représentées au titre de ces lots lors de l'assemblée générale du 20 juin 2014 ;

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il les a déclaré recevables à contester les résolutions n° 25-1 et 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 ;

Sur la demande en annulation de la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014

Selon l'article 26, alinéa 3, de la loi du 10 juillet 1965 : "L'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété " ;

La destination des parties privatives dépend dans le règlement de copropriété de la destination réservée à l'immeuble ;

Selon l'article 9, alinéa 1er, de la loi du 10 juillet 1965 : "Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble." ;

Il est constant que, sur le fondement de ce texte, les copropriétaires peuvent changer l'affectation de leurs lots si la nouvelle affectation prévue est conforme à la destination de l'immeuble ;

Il en résulte que lorsque l'immeuble est à destination mixte, les copropriétaires peuvent par principe changer l'affectation d'un lot d'habitation ou d'un local annexe (cave, garage, réserve, grenier...) pour le transformer en local commercial ou en annexe d'un local commercial principal, sous réserve d'une éventuelle autorisation de l'assemblée générale si le changement d'affectation du lot concerné est susceptible de porter atteinte aux droits des autres copropriétaires ou d'entraîner une modification de l'aspect ou de l'usage des parties communes ; cette possibilité est en revanche impossible lorsque la destination de l'immeuble est à usage d'habitation ou à usage commercial, à l'exception de certains lots expressément désignés dans le règlement de copropriété ;

Il est constant que le syndicat des copropriétaires ne peut pas à quelque majorité que ce soit modifier la destination de l'immeuble, en décidant par exemple d'abandonner à la majorité une clause d'habitation bourgeoise ou autoriser l'utilisation d'un lot à des fins commerciales, alors que le règlement de copropriété prévoit que les appartements et leurs dépendances doivent être habités bourgeoisement ;

En l'espèce, la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 (pièce n° 7 des intimés) dispose : "Résolution n° 25-1

Suppression de la mention d'immeuble à usage mixte qui sera remplacé par "immeuble à usage principalement d'habitation" et pour les lots n° 101 et 102 à usage commercial tels que définis dans le règlement de copropriété (page 88 annexe).

L'assemblée générale, après en avoir délibéré, décide de supprimer dans le règlement de copropriété la mention "immeuble à usage mixte' qui sera remplacé par "immeuble à usage principalement d'habitation bourgeoise", et pour lots n° 101 et 102 à usage commercial, tel que défini dans le règlement de copropriété. [...]" ;

Il ressort de la rédaction même de cette résolution que le syndicat des copropriétaires, en supprimant la mention "d'immeuble à usage mixte d'habitation et de commerce" et en réservant la qualité de local commercial aux seuls lots n° 101, et 102, alors que ces derniers étaient destinés jusqu'à cette résolution à un usage mixte d'habitation et de commerce comme les autres lots, a nécessairement restreint la destination de ces parties privatives et ne s'est pas contenté, contrairement à ce qu'il soutient, de modifier les dispositions du règlement de copropriété relatives à l'usage des parties communes ;

Aussi, conformément aux dispositions de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, cette décision ne pouvait être votée qu'avec l'approbation de l'ensemble des copropriétaires des autres lots et non à la simple majorité des deux tiers ;

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a annulé la résolution n° 25-1 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 sur ce fondement ;

Sur la demande en annulation de la résolution n° 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014

Par jugement du 29 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Paris a débouté les consorts [W] de leur demande en annulation de la résolution n° 29 de l'assemblée générale du 20 juin 2014 du syndicat des copropriétaires ;

Le syndicat des copropriétaires, appelant, ne demande pas à la cour d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de son dispositif ;

Les consorts [W], qui demandent à la cour de confirmer le jugement du 29 janvier 2015 dans son ensemble, ne lui demandent pas davantage d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de son dispositif ;

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les consorts [W] de leur demande en annulation de la résolution n° 29 ;

Sur la demande de travaux fondée sur l'article 30, alinéa 4, de la loi du 10 juillet 1965

Selon l'article 30 de loi du 10 juillet 1965 : "L'assemblée générale des copropriétaires, statuant à la double majorité prévue à l'article 26, peut, à condition qu'elle soit conforme à la destination de l'immeuble, décider toute amélioration, telle que la transformation d'un ou de plusieurs éléments d'équipement existants, l'adjonction d'éléments nouveaux, l'aménagement de locaux affectés à l'usage commun ou la création de tels locaux.

Elle fixe alors, à la même majorité, la répartition du coût des travaux et de la charge des indemnités prévues à l'article 36 ci-après, en proportion des avantages qui résulteront des travaux envisagés pour chacun des copropriétaires, sauf à tenir compte de l'accord de certains d'entre eux pour supporter une part de dépenses plus élevée.

Elle fixe, à la même majorité, la répartition des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés.

Lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu'il est possible d'en réserver l'usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu'en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée." ;

Il convient de rappeler que l'autorisation judiciaire de travaux visée à l'article 30, alinéa 4, de loi du 10 juillet 1965 peut être accordée à un copropriétaire en cas de refus de l'autorisation prévue à l'article 25 b) (c'est à dire autorisation d'effectuer à ses frais des travaux affectant les parties commues ou l'aspect extérieur de l'immeuble et conformes à la destination de celui-ci) ; les travaux envisagés doivent être des travaux d'amélioration, et être conformes à la destination de l'immeuble et aux droits des autres copropriétaires ;

Il est constant que des travaux peuvent être considérés comme des travaux d'amélioration même s'ils ne présentent aucun intérêt pour la collectivité ou les parties communes et ne concernent que l'amélioration des parties privatives du copropriétaire concerné ;

En l'espèce, l'assemblée générale du 20 juin 2014 a rejeté la résolution n° 29 par laquelle les consorts [W] sollicitaient l'autorisation de réaliser les "travaux suivants touchant les parties communes de l'immeuble et modifiant son aspect extérieur : (...)

- aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,

- pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation et qui sont annexés au procès verbal de l'assemblée générale et conformément aux autorisations administratives obtenues,

- création d'une pente de 3% à l'entrée du magasin en conformité avec la réglementation sur l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite,

- agrandissement des deux grilles existantes en façade,

- utilisation de la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours,

- percement de 100 mm de diamètre du plancher séparatif des lots du rez de chaussée avec ceux du sous-sol pour le passage des canalisations de froid alimentaire" ;

Les travaux projetés, visant à aménager le local commercial dans l'intérêt de la clientèle sont des travaux d'amélioration des lots appartenant aux consorts [W] ;

En outre, ces travaux sont conformes à la destination de l'immeuble, dès lors que l'usage mixte des lots prévu par le règlement de copropriété autorise le changement d'affectation de certains des locaux accessoires aux locaux commerciaux principaux, sous réserve de l'atteinte aux droits des autres copropriétaires ;

Néanmoins, il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise du 18 novembre 2014 de M. [S] (pièce n° 13 des intimés), que, compte tenu des libertés déjà prises par la société Carrefour dans la réalisation de sa première phase de travaux en violation des droits de la copropriété, les consorts [W] ne peuvent reprocher au syndicat des copropriétaires un refus fondé sur son défaut d'information des travaux projetés ;

En effet, tant la note de synthèse de M. [S] du 29 avril 2014 (pièce n° 9 des intimés) que les pièces jointes à la convocation de l'assemblée générale du 20 juin 2014 ont en effet laissé certains points de la demande de travaux totalement obscurs ; s'agissant d'une demande d'autorisation portant sur la globalité des travaux, le syndicat des copropriétaires a ainsi légitimement pu, dans l'intérêt d'une copropriété déjà victime d'atteintes portées à ses parties communes et contrainte d'agir en justice pour la protection de ses droits, refuser l'autorisation sollicitée ; il en aurait été autrement si chacun de ces postes de travaux avait fait l'objet d'une résolution particulière puisque le syndicat des copropriétaires disposait pour certains d'entre eux des plans nécessaires et de l'avis de l'expert ;

S'agissant de certains des travaux projetés (pente, agrandissement des grille, percement de la dalle), les consorts [W] ne fournissent à la cour aucune autre pièce pertinente, plan ou note d'un architecte, pour compléter l'information lacunaire présentée à l'expert et à l'assemblée générale et pour statuer ; il en résulte que seuls les travaux d'aménagement de la façade et les travaux visant à l'utilisation de la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture, apparaissent comme ne portant pas atteinte aux droits des autres copropriétaires, conformément à l'avis exprimé par M. [S] ;

En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a uniquement autorisé les consorts [W] à faire réaliser les travaux d'aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble, de pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et de remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues, et à utiliser la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture conformément aux préconisations de l'expert [S] dans son rapport du 18 novembre 2014 et en ce qu'il les a déboutées de leurs autres demandes de travaux ;

Sur les demandes de dommages-intérêts

Le syndicat des copropriétaires demande à la cour de condamner les consorts [W] solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Les consorts [W] demandent à la cour de condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

En l'espèce, chacune des parties, succombant au moins partiellement, il convient donc d'exclure le caractère abusif de leur droit d'agir en justice dans la présente procédure ;

Le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts de 5000 euros présentée par le syndicat des copropriétaires en première instance ;

Pour le même motif, les demandes réciproques, en cause d'appel, des parties d'obtention de dommages-intérêts à concurrence de 5 000 euros, chacune, seront également rejetées ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

En l'espèce, chaque partie succombant au moins partiellement, il sera fait masse des dépens d'appel qui seront partagés par moitié entre elles, tandis que l'équité commande de rejeter leurs demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par mise à disposition au greffe et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette l'ensemble des demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1], représenté par son syndic, le Cabinet Holding Financière RG ;

Rejette la demande en dommages-intérêts à concurrence de 5 000 euros de Mme [P] [G], veuve [W], et de Mme [U] [W], épouse [Q], dirigée, en appel, contre le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1], représenté par son syndic, le Cabinet Holding Financière RG ;

Rejette les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Dit qu'il sera fait masse des dépens d'appel qui seront partagés par moitié entre elles et qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 15/04003
Date de la décision : 28/06/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°15/04003 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-28;15.04003 ?
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