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07/06/2017 | FRANCE | N°16/02846

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 07 juin 2017, 16/02846


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 07 JUIN 2017



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02846



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2012F00045





APPELANTS :



Monsieur [H] [U]

Né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

[Adresse 1]

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EURL ILE DE FRANCE ASSUR prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 537 452 039

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentés par Me Frédéric G...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 07 JUIN 2017

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02846

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2012F00045

APPELANTS :

Monsieur [H] [U]

Né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

EURL ILE DE FRANCE ASSUR prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 537 452 039

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentés par Me Frédéric GICQUEL, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

INTIMÉE :

SARL SOCIÉTÉ DE COURTAGE ET DE GESTION D'ASSURANCES (SCGA)

prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Nantes sous le numéro 502 531 049

[Adresse 3]

[Localité 4]

Monsieur [T] [Z]

Né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 4]

Intervenant volontaire

Monsieur [C] [W]

Né le [Date naissance 3] 1966 à [Localité 1]

[Adresse 5]

[Localité 6]

Intervenant volontaire

Représentée par Me Lamia BADKOUF, avocat au barreau de PARIS, toque : C0193, avocat postulant

Assistée de Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0483, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Avril 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Chantal BARTHOLIN, Présidente de chambre, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre

Madame Agnès THAUNAT, présidente

Madame Brigitte FRÉMONT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle HARDOIN

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.

*****

Vu le jugement rendu le 18 novembre 2013 par le tribunal de commerce de Créteil qui a :

- débouté la société Ile de France assur de sa demande de nullité de l'assignation en intervention forcée,

- débouté M. [U] de sa fin de non recevoir pour défaut de qualité à agir à son encontre,

- débouté M. [U] et la société Ile de France assur de leur demande de suris à statuer,

- constaté la réalisation de la cession du fonds de commerce de la Société de courtage et de gestion d'assurances suivant protocole d'accord du 1er août 2011,

- condamné solidairement M. [U] et la société Ile de France assur à payer à la Sociét de courtage et de gestion d'assurances la somme de 205.000 €, avec intérêts au taux légal : pour M. [U] à compter du 1 er décembre 2011 sur la somme de 125.000 € et à compter du 15 mai 2012 sur le solde, pour la société Ile de France assu à compter du 13 mars 2013, les intérêts se capitalisant conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,,

- débouté M. [U] et la société Ile de France assu de leur demande reconventionnelle de rétrocession de la somme de 9.566,19 € et autorisé la Société de courtage et de gestion d'assurances à conserver cette somme, à titre de dommages-intérêts, la déboutant du surplus de sa demande,

- débouté M. [U] et la société Ile de France assur du surplus de leurs demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire, sous réserve de la fourniture d'une caution en cas d'appel,

- condamné solidairement M. [U] et la société Ile de France assur aux dépens et à payer à la Société de courtage et de gestion d'assurances la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'appel relevé par M. [U] et la société Ile de France assur qui demandent à la cour, dans leurs dernières conclusions signifiées le 20 mars 2017, d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté la Société de courtage et de gestion d'assurances (SCGA) de sa demande de dommages-intérêts et, statuant à nouveau :

A titre principal, au visa des articles 1177 et 1178 du code civil, de

constater que la clause suspensive d'obtention d'un ou plusieurs prêts n'a pas été réalisée,

en conséquence, dire que l'acte de cession du 1er août 2011 est caduc et de nul effet et débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de l'ensemble de leurs demandes,

Subsidiairement, au visa des articles 1584, 1168 et 1134 du code civil, de :

constater que les conditions de l'article 3.4 de l'acte de cession ne sont pas remplies

dire que l'acte de cession du 1er août 2011 est caduc et de nul effet et débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de l'ensemble de leurs demandes,

Encore plus subsidiairement :

au visa des articles 1101, 1177 et 1178 du code civil, du projet de cession du 13 octobre 2011 non signé, de constater qu'il n'y a pas eu d'accord sur la chose et sur le prix et débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de l'ensemble de leurs demandes,

au visa de l'article 1134 du code civil, de dire que M. [U] n'a pas donné 'force exécutoire' à l'acte de cession du 1er août 2011 et débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de l'ensemble de leurs demandes,

A titre encore plus subsidiaire, au visa des articles 1109,1589,1110, 1116, 1603 et 1134 du code civil, de :

dire que leur consentement a été vicié par erreur ou par dol,

en tant que de besoin, dire sue SCGA n'a pas satisfait à son obligation de délivrance conforme et de garantie de fait personnel,

en conséquence, prononcer la nullité de la vente qu'elle soit intervenue le 1er août 2011 ou après cette date et débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de l'ensemble de leurs demandes,

En tout état de cause, au visa des articles 564 du code de procédure civile et subsidiairement des articles 1156,1161et 1162 du code civil, de :

déclarer irrecevable et en tout cas mal fondée la demande en paiement de la somme de 1.708.500€ formée pour la première fois en cause d'appel,

débouter SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] de 'leurs demandes de dommages-intérêts pour manoeuvres dolosives, résistance abusive, rupture des pourparlers e préjudice moral et de leur intervention volontaire',

A titre reconventionnel, de condamner solidairement SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] à procéder au remboursement de la somme de 15.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2011, date de mise en demeure,

A titre infiniment subsidiaire, de condamner solidairement SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] à leur rétrocéder les commissions versées par les compagnies d'assurance jusqu'à la date du transfert effectif des contrats SCGA, soit en l'état la somme de 9.566,19 €, sauf à parfaire,

En tout état de cause :

condamner solidairement SCGA ainsi que Mrs [W] et [Z] au paiement de la somme de 30.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,

les condamner solidairement aux dépens, en ce compris le coût de l'établissement du procès-verbal de constat de Me [M], huissier de justice ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 26 mars 2017 par la Société de courtage et de gestion d'assurances (SCGA), M. [W] et M. [Z] qui demandent à la cour, au visa des articles 66,325,328,329 et 554 du code de procédure civile ainsi que des articles 1101,1134,1147 et suivants,1382 et suivants du code civil :

A titre principal de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- constaté la réalisation de la cession du fonds de commerce de SCGA suivant protocole d'accord du 1er août 20111,

- condamné solidairement M. [U] et la société Ile de France assur à payer à SCGA la somme de 205.000 € avec intérêts au taux légal pour M. [U] à compter du 1er décembre 2011 sur 125.000 € et à compter du 15 mai 2012 pour le surplus, pour la société Ile de France à compter du 13 mars 2015, avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- débouté M. [U] et la société Ile de France assur de leur demande reconventionnelle de rétrocession de la somme de 9.566,19 € et autorisé SCGA à conserver cette somme à titre de dommages-intérêts,

A titre subsidiaire, si la cour devait considérer les conditions suspensives issues du contrat de cession du 1er août 2011 comme acquises, leur donner acte qu'ils en demandent l'exécution et condamner solidairement les appelants à payer à SCGA l'indemnité de 1.500 € par client extourné, soit la somme globale de 1.708.500 €,

A titre très subsidiaire, désigner un expert avec mission de déterminer le nombre de clients détournés et transférés par les appelants dans leur portefeuille et celui des différentes entités complices, à savoir M. [U] exerçant en qualité de courtier, la sarl à associé unique Ile de France assur, l'eurl Ile de France assur er la société PL Assurances,

En tout état de cause :

débouter les appelants de leurs demandes reconventionnelles,

condamner solidairement M. [U] et la société Ile de France assur à payer à SCGA la somme de 30.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour manoeuvres dolosives et résistance abusive dans l'exécution de ses engagements issus du contrat du 1er août 2011, et la somme de 25.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture abusive des pourparlers,

déclarer M. [W] et M. [Z] recevables et bien fondés en leur intervention volontaire, dire qu'ils ont subi un préjudice distinct de celui de SCGA et condamner solidairement M. [U] et la société Ile de France assur à payer à chacun d'eux la somme de 25.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour préjudice moral,

condamner solidairement les appelants aux dépens et à payer, par application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 45.000 € à SCGA ainsi que la somme de 8.000 € chacun à M. [W] et M. [Z] ;

SUR CE

Considérant que la société de courtage et de gestion d'assurances (SCGA), dont M. [W] et M. [Z] détiennent chacun la moitié des parts, a pour activité le courtage en opérations d'assurances ; qu'en 2008, elle a acquis un fonds de commerce de courtier en assurances exploité à [Localité 7] pour le prix de 360.000 € financé par des emprunts contractés par ses deux associés co-gérants ; qu'au cours de l'année 2011, ceux-ci ont décidé de vendre le fonds de commerce de la société ; que M. [U], lui-même courtier en assurances exerçant sous le nom commercial Ile de France assur, ayant manifesté son intérêt pour son acquisition, des discussions se sont engagées entre eux;

Que le 1er août 2011, un acte sous seing privé intitulé 'contrat de cession de fonds de commerce- Protocole d'accord' a été signé par SCGA et M. [U] ; qu'il y est stipulé :

- que SCGA cède à M. [U], qui l'accepte, son fonds de commerce à l'exclusion du droit au bail, pour le prix de 220.000 €, soit 215.000 € au titre des actifs incorporels et 5.000 € au titre du matériel et des biens mobiliers,

- que sont cédés les contrats de courtage d'assurances conclus avec les clients, dont la liste figure en annexe 2 avec le montant de la prime et les montants annuels de commissionnement ainsi que les contrats conclus avec les compagnies d'assurance et les courtiers grossistes en annexe 4, laquelle indique ' conventions à fournir',

- que sont cédés les copies des contrats souscrits, l'ensemble des codes de gestion auprès des compagnies d'assurances et des courtiers grossistes, les contrats de distribution de produits d'assurances et les codes affinitaires de Generali auprès de Disney-Land,

- que l'acquéreur versera la somme de 15.000 € à titre de dépôt de garantie par virement du 2 août 2011,

- que l'acte est soumis à la condition suspensive de l'obtention par l'acquéreur au plus tard le 30 septembre 2011 d'un ou plusieurs prêts d'un montant maximum de 250.000 €, sur une durée minimale de 7 ans et avec un taux d'intérêt maximum de 6%, l'acquéreur s'engageant à déposer au moins deux dossiers de demande de prêts au plus tard dans le délai de 15 jours à compter de la date de signature de l'acte,

- que le vendeur et l'acquéreur reconnaissent qu'ils n'ont pas encore eu connaissance des informations comptables et financières pour l'exercice 2010-2011, clos le 30 juin 2011, et que l'acquéreur les fournira préalablement à la date de cession, à savoir la date de réalisation des conditions suspensives ;

Que l'article 3.4 du contrat précise que le prix a été fixé de manière forfaitaire et définitive mais que, par exception, si entre la date de l'extraction visée en annexe 2 (juin 2011) et la date de cession, les contrats résiliés ou non reconduits représentent 15% ou plus en volume des commissions perçues annuellement l'acquéreur aura le choix, soit d'acquérir sur la base du prix convenu minoré du pourcentage du commissionnement annuel que représente les contrats résiliés ou non reconduits par rapport au commissionnement annuel des contrats, soit de renoncer purement et simplement à son acquisition sans indemnités ni perte de son dépôt de garantie ;

Que l'article 5.6 du contrat, intitulé 'contrats de distribution de produits d'assurance' mentionne :

- que le vendeur s'engage à ce que les compagnies d'assurance et les courtiers grossistes acceptent le transfert à l'acquéreur de leurs contrats conclus avec le vendeur,

- que l'acquéreur devra avoir obtenu au plus vite le contrat et les codes de gestion avec la compagnie Generali,

- que dans le mois suivant la levée des conditions suspensives, l'ensemble des codes de gestion du vendeur auprès de l'ensemble des compagnies d'assurance et des courtiers grossistes sera transféré au vendeur,

- qu'à défaut d'accord pour la transmission des contrats, des codes et de la perception des commissions de la part des compagnies, l'acte sera caduc et de nul effet, chacune des parties se trouvant déliées de ses obligations sans indemnité de part et d'autre, le montant du dépôt de garantie ou le prix de vente seront restitués à l'acquéreur et ce dernier aura toujours la possibilité de renoncer au bénéfice du présent engagement valant condition suspensive stipulée en sa faveur et ce dans le délai de réalisation de la présente promesse ;

Que sous la rubrique 'mise au courant à compter du protocole' insérée à l'article 5.1 de l'acte, le vendeur accorde à l'acquéreur l'accès au fichier client et lui permet de réaliser toutes démarches commerciales à ses frais; qu'il y est encore prévu que, si par suite de l'absence de réalisation des conditions suspensives prévues à l'acte la cession est anéantie, l'acquéreur s'engage à :

- remettre l'ensemble de la documentation qui lui a été communiquée concernant la clientèle du fonds, sans en conserver copie,

- rétrocéder l'ensemble des contrats conclus avec les clients visés en annexe 2 et à indemniser le vendeur à hauteur de 1.500 € 'par client extourné',

- à ne réclamer aucune indemnité tant au titre du travail effectué pendant la période intermédiaire que du développement de clientèle réalisé sur le fonds, les primes et commissions afférentes au fond acquittées auprès de l'acquéreur préalablement à la défaillance de la condition suspensive restant siennes ;

Considérant que par lettre recommandée du 30 septembre 2011, M. [U] a notifié à SCGA la défaillance de la condition suspensive relative au prêt; que par courriel du 11 octobre 2011, il lui a envoyé un nouveau projet d'acte de cession aux mêmes conditions que précédemment sauf pour le prix ramené à 140.000 € ; que par courriel du 13 octobre 2011, il a proposé le paiement de la somme de 140.000 €, l'acquéreur du fonds n'étant plus lui-même, mais la société Ile de France assur ; qu'aucun de ces deux actes n'a été signé ;

Que par lettre recommandée du 6 novembre 2011, la société Ile de France assur, sous la signature de M. [U], a informé SCGA de la rupture de leur négociation en vue de l'acquisition du fonds de commerce ;

Que le 8 novembre 2011, SCGA a mis en demeure M. [U] de lui payer la somme de 140.000 € en règlement du prix de cession du fonds de commerce; que le 1er décembre suivant elle a saisi le juge des référés pour obtenir paiement du solde du prix, soit 125.000 € ; que par ordonnance du 4 janvier 2012, ce magistrat a dit n'y avoir lieu à référé et renvoyé l'affaire devant le tribunal ;

Que le 9 juin 2012, SCGA a fait assigner la société Ile de France assur devant le tribunal qui, par le jugement déféré, après jonction des instances, a pour l'essentiel constaté la réalisation de la cession du fonds en vertu de l'acte de cession du 1er août 2011 et condamné solidairement M. [U] et la société Ile de France assur au paiement de la somme de 215.000 € au titre du solde restant dû sur le prix ;

1- Sur les demandes de SCGA au titre de l'acte de cession du 1er août 2011 :

Considérant que SCGA soutient en premier lieu que c'est par la faute de M. [U] que la condition suspensive relative à l'octroi d'un prêt ne s'est pas réalisée et qu'en conséquence, conformément à l'article 1178 du code civil elle est réputée accomplie ; que SCGA expose en ce sens :

- que M. [U] a fait une demande de prêt non conforme aux stipulations de l'acte de cession en écrivant au Crédit agricole, le 1er septembre 2011, que le but était de racheter le crédit en cours, de moins de 60.000 €, de le regrouper avec le nouveau et d'étudier le dé-nantissement de son PEA, une EURL étant créée pour la signature définitive de l'acte de cession et son fonds étant apporté à cette EURL,

- que par courriel du 28 septembre 2011 à 0h28, M. [U] a demandé au Crédit agricole une confirmation de son refus de prêt en précisant : 'afin de ne pas être piégé par le vendeur avec qui je dois renégocier le prêt'et en mentionnant que la clause suspensive arrivait à terme sous 48 heures et que SCGA n'avait toujours pas envoyé son bilan,

- que par courriel du même jour à 9 h17, le Crédit agricole a établi une attestation de refus mentionnant : 'votre dossier est ajourné car nous avons besoin de votre dernier bilan',

- que les échanges de courriels du 28 septembre à 17h14 et 18h47, dont se prévaut M. [U], n'ont pas été communiqués en première instance que les intimés sont en droit de se poser des questions sur la réalité de ces pièces ;

Mais considérant qu'il apparaît des pièces 5c, 34 et 45 que le 4 août 2011, M. [U] a déposé une demande de prêt d'un montant de 250.000 € pour une durée de 7 ans au taux de 3,95% auprès du Crédit agricole qui, après avoir reçu le bilan de SCGA par courriel de M. [U] du 28 septembre 2011 à 17h14, lui a répondu le même jour à 18h47 - sans qu'aucun élément ne puisse mettre en cause la véracité de ces deux dernières pièces - que son dossier était maintenant complet, mais que la commission de crédit ne se réunissant qu'une fois par semaine, il était impossible d'obtenir une décision avant la fin du mois, le dernier bilan étant arrivé trop tard ;

Que de plus les appelants justifient :

- par leurs pièces 5a,5b et 89 que M. [U] avait déposé une demande de financement d'un montant de 240.000 € d'une durée de 3 à 7 ans pour l'acquisition d'un porte feuille d'assurances dès le 4 juin 2011 auprès de la société Axa qui l'a refusée le 23 septembre 2011,

- par leurs pièces 49 et 50, qu'une demande de prêt d'un montant de 250.000 €, d'une durée de 7 ans, au taux de 3,87% effectuée auprès de BNP Paribas le 11 août 2011 a été refusée le 1er octobre 2011, les données du dernier bilan de SCGA reçu le 28 septembre 2011 ne permettant pas à cette banque d'émettre un avis favorable,

- par leur pièce 64, qu'une demande de financement conforme au protocole de cession qui avait été communiqué, à savoir 240.000 € sur une durée de 7 ans au taux maximum de 6%, a été déposée début août 2011 auprès de HSBC qui a notifié un refus le 15 septembre 2011 après étude du dossier,

- par leurs pièces 66 et 67, qu'une demande de prêt d'un montant de 240.000 € pour une durée de 7 ans au taux maximum de 6 % a été déposée le 8 août 2011 auprès de Montepaschi banque et que celle-ci a opposé un refus le 9 septembre 2011 après étude de son pôle d'analyses concernant la demande de crédit pour l'acquisition du cabinet SCGA ;

Qu'il en résulte que M. [U] a satisfait à ses obligations relatives aux demandes de prêt définies dans l'acte de cession du 1er août 2011, qui se limitaient au dépôt de deux demandes de financement dans les 15 jours de la signature de l'acte; que c'est en vain que les intimés lui reprochent un manque de diligence dans l'accomplissement des formalités relatives à la réalisation de la condition suspensive et encore des fautes ou un manquement à l'obligation de loyauté de ce chef; que la condition relative au prêt étant défaillie, les appelants ne sont tenus d'aucune obligation d'acquisition au titre de l'acte du 1er août 2011 en raison de sa caducité ;

Considérant que SCGA prétend, en second lieu, que M. [U] a lui-même levé les conditions suspensives, qu'en exécutant le contrat, il lui a conféré un effet translatif de propriété et qu'il a donné force exécutoire à la promesse qui les liait ; qu'elle en veut pour preuve :

- qu'il a procédé au transfert du portefeuille de SCGA, réclamé les clés du local, rédigé et apposé des affichettes sur la vitrine du cabinet SCGA informant les clients du transfert chez Ile de France assur, adressé aux clients des lettres les avisant du changement d'adresse de SCGA, transféré les lignes téléphoniques vers Ile de France assur,

- qu'en exécution de l'acte de cession, le 19 octobre 2011, elle a reversé à M. [U] les commissions dues au titre des contrats en cours, soit la somme de 5.554,16 €,

Qu'en réponse aux contestations des appelants et à leur demande subsidiaire de nullité de la cession, elle fait valoir :

- que si des discussions se sont poursuivies jusqu'au 31 octobre 2011, c'est en raison des manoeuvres dolosives de M. [U] pour prendre possession des éléments manquants du fonds de commerce,

- que contrairement à ce qui est soutenu, elle n'a pas fait perdre à l'acquéreur la possibilité de continuer à travailler avec Generali, la résiliation par cet assureur des codes affinitaires - qui ne sont que des codes tarifaires - résultant d'une mesure générale et ne concernant pas seulement les codes affinitaires Disney Land,

- que dans l'acte de cession, il n'est inséré aucune clause relative à la concurrence d'anciens salariés,

- que les allégations des appelants relatives à la non exploitation du fonds avant la cession sont fausses ainsi que le montrent les attestations et pièces qu'elle verse aux débats,

- que M. [U] a acquis le fonds en parfaite connaissance de cause de sa valeur et des résultats de son exploitation,

- qu'il ne peut être reproché à SGCA de ne pas avoir communiqué tous les éléments demandés alors que début août, M. [U] a commencé à exploiter le portefeuille de clients, qu'elle-même n'avait plus accès aux compagnies, que l'ensemble des documents se trouvaient dans les locaux d'Ile de France assur et que les courriers adressés à SCGA y arrivaient,

- que M. [U] a mis en place des manoeuvres afin de procéder au transfert de la clientèle du fonds vers d'autres personnes morales qu'il a créées, qu'il a repris les négociations dans le seul but de poursuivre et finaliser ce transfert, modifier les clauses contractuelles dans les derniers projets pour entériner des situations dont il avait une parfaite connaissance, travailler depuis des mois avec la clientèle de SCGA et s'emparer de la clientèle sans bourse déliée,

- que les arguments énoncés par M.[U] pour justifier la rupture sont fondés sur une relation mensongère des faits et des contradictions flagrantes, que SCGA a bien cédé la totalité de son portefeuille et transféré les codes les codes, que la preuve n'est pas rapportée de la soit-disant perte de centaines de clients et qu'en réalité la société Ile de France assur n'a pas suivi les clients acquis, par exemple le client Activlan et le CE Disney ;

Mais considérant qu'après le 30 septembre 2011, date de caducité de l'acte de cession du 1er août 2011, les parties ont poursuivi des pourparlers qui n'ont pas abouti; que SCGA est mal fondée à soutenir que M. [U] et/ou la société Ile de France assur auraient exécuté l'acte du 1er août 2011 alors que, au cours de la nouvelle négociation, le prix de 250.000 € était réduit à 140.000 € et que de nouvelles conditions étaient prévues, dont une clause aux termes de laquelle le vendeur déclarait qu'aucun employé ne réalise d'acte de concurrence déloyale au préjudice de l'exploitation du fonds ;

Qu'il apparaît que c'est en accord avec les associés de SGCA, qui souffraient de problèmes de santé et n'étaient plus en mesure de continuer à gérer le fonds que M. [U] a pris possession ce certains éléments de ce fonds : qu'en effet :

- Mme [F], de la compagnie Allianz, atteste que lorsque que M. [W] lui a annoncé son souhait de vendre son portefeuille, il lui a déclaré que son associé avait disparu en 48 heures et qu'il voulait trouver un repreneur qui pourrait reprendre la gestion immédiate de la clientèle dont il ne pouvait ni ne voulait plus s'occuper,

- dès le 5 août 2011, puis les 7 septembre et 13 octobre 2010, M. [W] a signé des ordres de transfert du courrier de SCGA chez Ile de France assur,

- SCGA, cédant, et Ile de France assur, repreneur, ont co-signé des documents libellés 'attestations de cession totale de portefeuille et autorisation de transfert' aux termes desquelles ils ont attesté que, par acte sous seing privé du 1er août 2011, le cédant avait cédé à cette date la totalité de son portefeuille au repreneur et s'interdisait toute action sur le portefeuille cédé,

- Messieurs [W] et [Z] ont signé des lettres avisant leurs clients qu'ils cessaient leur activité pour des raisons personnelles et familiales et la confiaient à M. [U] ;

Que dans sa lettre de rupture des négociations du 6 novembre 2011, M. [U] a demandé à SCGA de reprendre sans délais la gestion exclusive de sa clientèle et précisé qu'il se tenait à sa disposition pour lui permettre de récupérer l'ensemble des documents qu'elle lui avait remis ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que SCGA doit être déboutée de ses demandes tendant à voir constater la réalisation de la cession du fonds de commerce suivant acte du 1er août 2011 et entendre condamner solidairement M. [U] et la société Ile de France assur au paiement de la somme de 250.000 € outre intérêts; que SCGA doit restituer à M. [U] la somme de 15.000 € - montant du dépôt de garantie qu'il a versé - avec intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2011, date de mise en demeure ; que M. [W] et M. [Z] sont intervenus à l'acte du 1er août 2011 pour souscrire les engagements de non concurrence et de mise au courant et donner leur engagement solidaire aux obligations de SCGA ; qu'ils sont donc tenus solidairement au paiement de cette somme ;

Considérant, sur la demande subsidiaire des intimés en paiement de la somme de 1.708.500 € au titre de la clientèle extournée, que ceux-ci invoquent les stipulations de l'article 5.1 § 3 et 5 de l'acte de cession et calculent ce montant sur la base de 1139 clients extournés, c'est-à-dire transférés au profit des appelants, et 1.500 € par client extourné ;

Que les appelants soulèvent l'irrecevabilité de cette demande comme nouvelle en cause d'appel ; mais que la demande fondée sur les dispositions du contrat dont l'exécution était demandée en première instance est recevable pour la première fois en cause d'appel ;

Que les appelants contestent ensuite le bien fondé de la demande en faisant valoir :

- que la notion de client extourné n'est pas définie dans la convention, qu'il ne peut s'agir des clients de SCGA gérés à titre provisoire et ensuite re-transférés et que cette notion ne correspond qu'aux seuls clients transférés à M. [U] et qu'ils n'auraient pas voulu rétrocéder,

- qu'il n'y a aucun client extourné, M. [U] ayant demandé depuis des années à SCGA de reprendre ses clients et au moins à deux reprises les 30 septembre et 6 novembre 2011,

- que la reprise des clients peut se faire sans difficulté comme attesté par les compagnies d'assurance,

- que conformément aux articles 1156,1161 et 1162 du code civil, la convention doit s'interpréter en leur faveur, ce qui doit conduire au rejet de la demande,

- que les listings de clients auxquels se réfère SCGA sont des faux ou à tout le moins sont inexacts ;

Considérant que l'article 5.1 du contrat du 1er août 2011 prévoit précisément les conséquences de la non réalisation des conditions suspensives et, en particulier, l'engagement de l'acquéreur de rétrocéder l'ensemble des contrats conclus avec les clients visés en annexe 2 et d' indemniser le vendeur à hauteur de 1.500 € par client 'extourné',

Considérant que si le vocable 'extourner' correspond à l'annulation d'une écriture ou d'une opération comptable, il convient, en interprétant la volonté de parties, de dire qu'une indemnisation a été prévue pour le cas où des clients cédés ne seraient pas rétrocédés au vendeur ;

Que même si SCGA n'a pas voulu reprendre les clients cédés, il demeure que ceux-ci sont restés au moins pour partie entre les mains des appelants qui doivent en conséquence l'indemniser à ce titre ;

Qu'il apparaît que la liste des clients figurant en annexe II de l'acte du 1er août 2011 pour les compagnies Axa, Allianz, Novelia et Generali ne correspond pas aux clients effectivement cédés et non rétrocédés; qu'en effet, il ressort des pièces 52, 53, 54 et 55 qu'avant le 30 septembre 2011, date prévue pour la cession, de nombreux contrats conclus avec Axa, Allianz, Novelia et Generali avaient été résiliés ;

Que cependant les appelants, qui ne font pas état des clients liés aux autres compagnies d'assurance et ne produisent que des tableaux et évaluations de perte de commissions établis par eux-même, ne démontrent pas que ces contrats résiliés représentent 15% ou plus en volume des commissions perçues annuellement ;

Qu'il ressort du courriel de Mme [H], inspecteur commercial au sein de Generali, en date du 13 février 2011, que le code affinitaire du cabinet SCGA, qui lui permettait de proposer aux salariés de Disney Land, par le biais de leur CE, des contrats d'assurance Generali à des tarifs préférentiels, a été supprimé suite à une insuffisance de production et que SCGA en avait été averti en avril 2011 ; que par ailleurs, de nombreux clients attestent qu'ils ne réussissaient pas à joindre SCGA pour régler leurs problèmes d'assurance ; que Mme [C], Mme [F] et Mme [Q] relatent que M. [L], ancien salarié de SCGA, cherchait à reprendre la clientèle de son ancien employeur ;

Qu 'au regard de l'ensemble de ces éléments, l'indemnité due par les appelants au titre de la clientèle qu'ils ont conservée et pu continuer à exploiter ultérieurement à leurs risques et périls, sera fixée à la somme de 100.000 € ; que tous deux sont tenus solidairement au paiement de cette somme ;

2- Sur les demandes de dommages-intérêts :

Considérant que SCGA ne démontre pas les manoeuvres dolosives ou déloyales qu'elle impute aux appelants, ni leur résistance abusive dans l'exécution de leurs engagements issus de l'acte du 1er août 2011 ; qu'en conséquence, sa demande en paiement de la somme de 30.000 €, à titre de dommages-intérêts, sera rejetée ;

Considérant que les appelants étaient en droit de rompre des pourparlers ; que la rupture motivée notamment par l'absence de fourniture des documents comptables et d'accès à l'intégralité des données concernant la clientèle et la découverte de la concurrence d'un ancien salarié ne présente pas un caractère abusif ; que la demande de SCGA en paiement de 25.000 €, à titre de dommages-intérêts, sera rejetée ;

Considérant que les appelants soulèvent l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de M. [W] au motif qu'il n'est plus gérant ; mais que cette seule circonstance ne rend pas irrecevable son intervention ;

Que M. [W] et M. [Z], qui demandent chacun la somme de 25.000 € en réparation de leur préjudice moral, allèguent que les manoeuvres frauduleuses des appelants ont conduit, le premier à une dépression profonde et une addiction à l'alcool entraînant plusieurs hospitalisations et son divorce, le second à une dépression, à la perte de l'emploi qu'il avait trouvé à la société Coriolis à [Localité 8] et à la précarité de sa situation, n'ayant ensuite été embauché qu'en CDD pour un salaire équivalent au SMIC ;

Mais considérant que M. [W] et M. [Z] ne démontrent en aucune façon la relation de cause à effet entre le comportement des appelants, au demeurant non frauduleux, et les ennuis familiaux et de santé qu'ils subissent ; que leurs demandes seront rejetées ;

3- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que les appelants, qui restent débiteurs envers la SCGA, doivent supporter les dépens de première instance et d'appel ;

Que vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il y a lieu d'allouer la somme de 8.000 € aux intimés et de débouter les appelants de leur demande de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau :

Condamne solidairement la Société de courtage et de gestion d'assurances (SCGA), M. [W] et M. [Z] à rembourser à M. [U] la somme de 15.000 €, avec intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2011,

Déclare recevable la demande de la Société de gestion et de courtage d'assurances (SCGA) en sa demande subsidiaire en paiement de la somme de 1.708.500 €,

Condamne solidairement M. [U] et la société Ile de France assur à payer à la Société de courtage et de gestion d'assurances la somme de 100.000 € ainsi que celle de 8.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties, en ce compris M. [W] et M. [Z], de toutes leurs autres demandes,

Condamne solidairement M. [U] et la société Ile de France assur aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/02846
Date de la décision : 07/06/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°16/02846 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-07;16.02846 ?
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