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24/05/2017 | FRANCE | N°15/11368

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 24 mai 2017, 15/11368


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 24 MAI 2017



(n° , 09 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11368



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2014002863





APPELANTE :



SA IDLF prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous l

e numéro 792 301 806

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, avoc...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 24 MAI 2017

(n° , 09 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11368

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2014002863

APPELANTE :

SA IDLF prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 792 301 806

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, avocat postulant

Ayant pour avocat plaidant Me Marc DUMON de la SELEURL CMD, avocat au barreau de PARIS, toque : E0193, et Me Hanane BENCHEIKH de la SELEURL CMD, avocat au barreau de PARIS, toque : E0193

INTIMÉE :

SA HAPYDF prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 383 157 310

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant

Assistée de Me Simon LE WITA, avocat au barreau de PARIS, toque : R045, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Mars 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre

Madame Agnès THAUNAT, présidente

Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.

*******

Vu le jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 28 mai 2015 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

- débouté la société IDFL de ses demandes,

- condamné la société IDLF à payer à la société HAPYDF, anciennement dénommée Ines de la Fressange, la somme de 61.437,05 € avec intérêts au taux légal sur 39.531,35 € à compter du 10 décembre 2013 et, sur le surplus, à compter du 14 mai 2014, l'anatocisme sur le tout ne s'appliquant qu'à compter de cette même date,

- débouté la société HAPYDF de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral,

- condamné la société IDLF à payer à la société HAPYDF la somme de 20.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société IDLF aux dépens ;

Vu l'appel relevé par la société IDLF et ses dernières conclusions notifiées le 28 décembre 2015 par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles L 141-1 et suivants du code de commerce ainsi que des articles 1156 et 1382 du code civil, de réformer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société HAPYDF de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et préjudice moral et, statuant à nouveau :

sur son action estimatoire :

- constater que toutes les conditions de l'action estimatoire sont réunies en l'espèce et qu'il doit être fait droit à sa demande de réduction du prix de cession du fonds de commerce,

- ordonner la réduction du prix de vente à 1.201.662 €,

- condamner 'la société Inès de la Fressange' à lui payer la somme de 1.245.338 €, sauf à parfaire, correspondant à la différence entre le prix de cession stipulé et le prix de cession judiciairement réduit,

sur les marques manquantes :

- enjoindre à la société HAPYDF de régulariser, à ses frais exclusifs, au profit de la société IDFL un acte de cession des marques suivantes :

* marque IF Ines de la Fressange enregistré à l'INPI le 24 mai 1995 sous le numéro 9557307, dans la classe de [Localité 1] 12,

* marque IF Ines de la Fressange enregistré à l'INPI le 14 septembre 2004 sous le numéro 04/3312609, dans la classe de [Localité 1] 12,

* marque IF Ines de la Fressange enregistré à l'INPI le 9 octobre 1991 à Hong Kong sous le numéro 199500348A, dans les classes de [Localité 1] 03-18-25,

* marque IF Ines de la Fressange enregistrée le 30 mai 2007 en Inde sous le numéro 637015, dans la classe de [Localité 1] 03,

* marque IF Ines de la Fressange enregistrée le 30 novembre 1998en Indonésie sous le numéro 421020, dans la classe de [Localité 1] 21,

* marque IF Ines de la Fressange enregistrée le 23 novembre 1995 en Italie sous le numéro 647553, dans la classe de [Localité 1] 12,

* marque IF Ines de la Fressange enregistrée le 30 mai 1997 AU Japon sous le numéro 3317909, dans la classe de [Localité 1] 12,

* marque IF Ines de la Fressange enregistré le 8 août 2011 au Sultanat de Bruneï sous le numéro 21240, dans la classe de [Localité 1] 18,

- assortir cette injonction d'une astreinte de 1.000 € par jour de retard et dire qu'il lui en sera référé pour la liquidation des astreintes,

sur sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral, condamner la société HAPYDF à lui payer la somme de 100.000 € à ce titre,

sur les demandes reconventionnelles de la société HAPYDF :

- prononcer la compensation à due concurrence entre le montant des condamnations prononcées à l'encontre de cette société et la quote-part lui revenant sur les redevances de licence versées à la société IDFL au titre du deuxième trimestre civil 2013 en application de l'article 14.1.5 de l'acte de cession du fonds de commerce, soit la somme de 55.766 € TTC,

- débouter 'la société Ines de la Fressange' de toutes ses autres demandes,

en tout état de cause, condamner la société HAPYDF aux entiers dépens et à lui payer la somme de 35.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 5 janvier 2017 par la société HAPYDF, anciennement dénommée Ines de la Fressange, qui demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1382 du code civil ainsi que des articles L 141-1 et L 141-3 du code de commerce, de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société IDLF de l'ensemble de ses demandes et, notamment :

- de sa demande de réduction du prix de cession du fonds de commerce cédé par acte du 13 mai 2013 en la déclarant irrecevable, par substitution de motifs, ou à défaut mal fondée,

- de sa demande d'injonction de régulariser un acte de cession des marques prétendument manquantes,

Infirmer le jugement en ce qu'il a limité à 61.437,05 € la condamnation de la société IDLF à lui restituer les redevances des licences et, statuant à nouveau,

- enjoindre à la société IDLF de communiquer sous astreinte et à parfaire :

* la facture de redevances au titre du 2ème trimestre 2013 envoyée à la société licenciée Compagnie A.M, [Adresse 3] et les justificatifs de paiement y afférents,

* la facture de redevances au titre du 2ème trimestre 2013 envoyée à la société licenciée [Z] [Z], via [Adresse 4] et les justificatifs de paiement y afférents,

* le chiffre d'affaires réalisé au titre du 2ème trimestre 2013 par la société Mantero seta spa, via [Adresse 5] et les justificatifs de paiement y afférents,

* la facture de redevances au titre du 2ème trimestre 2013 envoyée à la société licenciée JB Martin, [Adresse 1] et les justificatifs de paiement y afférents,

- dire que la production de toutes les pièces et tous les documents ci-dessus visés, si elle n'est pas intervenue en cours d'instance, devra intervenir dans le délai de 4 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et que, passé ce délai, la société IDLF sera redevable d'une astreinte de 1.000 € par pièce et par jour de retard,

- condamner la société IDFL à lui payer l'ensemble des redevances de licences dues antérieures à la date de cession (13 mai 2013) en vertu de l'article 14.5.1 de l'acte de cession,

- dire que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil, à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2013, pour les redevances des licences du second trimestre antérieures à la date de cession,

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral, et statuant à nouveau, condamner la société IDLF à lui payer :

- la somme de 30.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour procédure abusive,

- la somme de 20.000 €, à titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice moral,

En tout état de cause :

- rejeter l'ensemble des demandes de la société IDLF,

- la condamner aux entiers dépens et à lui payer la somme de 37.230 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE

Considérant que par courriel du 16 décembre 2011 adressé à M. [E] [O], représentant légal de la société Ines de la Fressange, M. [J] [I], dirigeant de la société FB conseil et stratégie, a manifesté son intérêt pour l'acquisition de la marque Ines de la Fressange ; que le 24 février 2012, M. [I] lui a transmis pour signature un protocole d'accord de confidentialité qui mentionne, notamment, que la société FB conseil et stratégie souhaite procéder à un audit, que M. [O] donne son accord sous la condition essentielle du respect de la confidentialité, que la société FB conseil et stratégie précise qu'elle demandera ultérieurement à disposer d'une exclusivité sur la négociation comme sur la réalisation de l'opération et que la délai pour réaliser l'audit expirera le 30 avril 2012 ; que par la suite, le 10 octobre 2012, M. [I] a signé une lettre d'intention, contre-signée par M. [O], prévoyant une période d'exclusivité courant de cette date jusqu'au 15 février 2013 ; que la période d'exclusivité a été prorogée jusqu'au 31 mai 2013 ;

Qu'un acte de cession de fonds de commerce a été régularisé le 13 mai 2013 entre la société Ines de la Fressange, représentée par M. [O], et la société IDLF, représentée par M. [I] ; moyennant le prix de 2.447.000 € HT ; qu'il y est stipulé :

- au titre des éléments du fonds cédé : certaines des marques exploitées ou non exploitées se rapportant à l'appellation Ines de la Fressange dont la liste figure en Annexe 3.1.2 (iii) et qui feront l'objet d'un acte réitératif de cession de marques, étant précisé que toute marque non expressément visée à cet annexe sera réputée ne pas faire partie de la cession du fonds,

- les créances nées antérieurement à la date de cession demeureront la propriété du cédant, sous réserve des créances nées des contrats de licence qui feront l'objet d'un règlement au cédant et au cessionnaire prorata temporis en fonction de la date de cession,

- le cédant a déclaré que le chiffre d'affaires s'est élevé à 310.192 € pour 2010, 498.838 € pour 2011 et 613.254 € pour 2012, que le résultat a été de 6.107 € pour 2010, 50.809 € pour 2011 et 121.211 € pour 2012, le chiffre d'affaires pour le premier trimestre 2013 s'élevant à 86.560,53 € ;

Que le 29 mai 2013, les conditions suspensives prévues à l'acte de cession du fonds de commerce ayant été levées, les parties ont signé l'acte réitératif de cession de marques ;

Qu'entre-temps, suivant acte de cession de marques complémentaires signé le 13 mai 2013, la société Ines de la Fressange avait cédé à la société IDLF, sous réserve de la réalisation de la cession du fonds, des marques complémentaires énumérées en annexe 1, moyennant le prix de 569.167 € ;

Considérant que le 5 juin 2013, M. [I] a demandé au comptable salarié de la société Ines de la Fressange - repris dans le cadre de la cession du fonds - des explications sur la comptabilisation dans le chiffre d'affaires pour l'exercice 2012 de la somme de 176.000 € HT, soit 200.000 € TTC, facturée à un ancien licencié suite à un protocole d'accord ;

Que par courriel du 5 septembre 2013, M. [I] a demandé à M. [O] un rendez-vous pour faire le point sur les redevances des licences en indiquant avoir cru trouver des incohérences sur les chiffres définitifs de 2012 ;

Que la société Ines de la Fressange, par lettre recommandée du 9 octobre 2013 résumant les sujets en suspens avec la société IDFL, lui a demandé paiement de sa quote-part de redevances des licences du 2ème trimestre préalable à la date de la cession ;

Que la société IDLF lui a répondu, par lettre recommandée du 28 octobre 2013, en lui reprochant d'avoir omis d'évoquer parmi les sujets en suspens leur différend relatif au chiffre d'affaires déclaré pour 2012 dans l'acte de cession, augmenté à tort de 176.000 € HT - alors que cette somme aurait dû être comptabilisée en produit exceptionnel - et l'informant, à propos du paiement de la quote-part sur les redevances de licence qu'elle ne pourrait la rétrocéder qu'une fois elle-même payée et qu'elle ne pourrait procéder à aucun règlement tant que les questions en suspens, en particulier celle relative au chiffre d'affaires 2012, ne seraient pas réglées ;

Que les 20 décembre 2013 et 6 janvier 2014, la société IDFL a fait assigner la société HAPYDF, nouvelle dénomination de la société Ines de la Fressange, devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir la réduction du prix de vente et la cession de marques manquantes ; que par le jugement déféré, elle a été déboutée de ses demandes et condamnée à payer à la société HAPYDF la somme de 61.437,05 € au titre des redevances des contrats de licence ;

Que le 18 avril 2014, la société HAPYDF avait saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de voir condamner la société IDLF à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 39.531,35 € au titre des redevances des contrats de licence générées sur la période du 1er avril 2013 au 12 mai 2013 ; que par ordonnance du 2 mai 2014, ce magistrat avait dit n'y avoir lieu à référé ;

1- Sur la demande de la société IDFL en réduction du prix de cession du fonds de commerce :

Considérant que la société IDLF, rappelant les dispositions des articles L 141-1 et L 141-3 du code de commerce, soutient que les conditions de l'action estimatoire sont réunies alors que :

- son action a été introduite dans le délai d'un an à compter de la prise de possession du fonds intervenue le 29 mai 2013,

- aucune clause élusive ou limitative de responsabilité n'est opposable, la garantie du vendeur étant d'ordre public,

- pendant les premières discussions, le vendeur a communiqué un tableau faisant apparaître pour 2012 un chiffre d'affaires de 800.000 € diminué d'une recette exceptionnelle de 200.000 €, ce qui aboutissait à un revenu des licences de 600.000 €,

- les déclarations du vendeur sur le chiffre d'affaire et le résultat d'exploitation de l'année 2012 sont inexactes et mensongères - le chiffre d'affaires n'étant que de 446.000 € et le résultat étant négatif de 45.789 € - le maquillage du chiffre d'affaires par intégration d'un produit exceptionnel, à savoir la somme de 167.224,08 € HT provenant d'une transaction intervenue avec la société Aubusson, ayant été habilement réalisé dans les documents qui lui ont été remis,

- le vendeur a ainsi intégré au chiffre d'affaires de 2012 les revenus d'une licence parfum conclue avec la société Aubusson qui avait pris fin depuis 2009 et ne faisait pas partie de l'activité cédée,

- la comptabilisation de produits sur exercices antérieurs est possible, sous réserve conformément au plan comptable, de donner dans l'annexe au bilan des précisions sur la nature, le montant et le traitement comptable de ces produits et de mentionner dans la liasse fiscale le détail de ces produits, ce qui n'a pas été le cas,

- la société ACSM, qui est son commissaire aux comptes, a rendu un avis le 29 janvier 2015 aux termes duquel : le chiffre d'affaires réel de l'exercice 2012, hors effet du protocole est de 446.254 €, ce qui reflète la véritable activité de la société HAPYDF, et que si le protocole s'analysait comme un abandon partiel de créance s'imputant directement sur la créance d'origine, le chiffre d'affaires comptable serait également de ce montant et se serait traduit par une réduction de créance au bilan sans impact au compte d'exploitation ;

Que l'appelante allègue que les déclarations erronées du vendeur ont déterminé son consentement ; qu'elle expose en ce sens :

- que le chiffre d'affaires 2012 n'est pas en progression de 25%, mais en baisse de 10% par rapport à l'exercice 2011 et le résultat comptable 2012 négatif,

- que les parties ont toutes deux pris en considération, pour la fixation du prix, les revenus générés par les licences de marque sur les exercices 2011, 2012 et 2013 et un coefficient multiplicateur de 7 sur le résultat d'exploitation,

- que pour déterminer le montant de la réduction de prix, il convient de prendre en considération la moyenne des résultats d'exploitation retraités, c'est à dire déduction faite des charges non récurrentes et non liées à l'exploitation des marques, des années 2011, 2012 et 2013, soit 171.666 € et de lui appliquer le coefficient multiplicateur de 7, ce qui donne un montant de 1.201.662 € ou encore d'appliquer ce coefficient multiplicateur à la somme de 167.000 €, ce qui aboutit à un montant de 1.169.000 € ;

Considérant que la société HAPYDF réplique :

- que dès avril 2012, M. [I] avait reçu un tableau d'estimations faisant apparaître sous le compte 7, compte de produits, la somme de 167.224,08 € sous l'intitulé 'Licence parfums

(Litige Aubusson)',

- qu'il est grotesque de prendre le tableau de prévisions envoyé le 13 avril 2013 comme base finale de détermination du prix, alors le prix de 3.534.393 € était fixé déduction faite d'une participation de 40% qui aurait été conservée par M. [O], que de multiples négociations ont eu lieu par la suite venant diminuer de façon drastique le prix avec des changements substantiels opérés dans la structuration de l'opération et que la détermination du prix a résulté d'une négociation de gré à gré sur la valeur des marques,

- que c'est en réponse à sa mise en demeure du 10 décembre 2013 de régler la quote-part de redevances de licence que la société IDLF a sais le tribunal pour demander la réduction du prix ce cession du fonds de commerce ;

Qu'elle soulève l'irrecevabilité de la demande de la société IDLF aux motifs :

- que le tableau de prévision adressé le 13 avril 2013 n'est qu'un document de travail et n'apparaît pas dans l'acte de cession,

- que selon la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, dont l'avis est repris dans le mémento [T] [P] comptable dans sa dernière version 2005, l'indemnité pour non exécution d'un contrat s'analyse comme un dédit sur vente à classer parmi les produits exceptionnels, mais que dans une autre conception du résultat courant, le produit pourrait être courant puisque lié à l'activité de l'entreprise,

- que les comptes sociaux au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012 , approuvés et certifiés par les commissaires aux comptes font état du chiffre d'affaires de 613.524 €,

- que M. [G], son commissaire aux comptes, ainsi que M. [L], expert-comptable et commissaire aux comptes de profession qu'elle a saisi amiablement confirment que l'enregistrement en 2012 , année de signature du protocole, de l'indemnité en chiffre d'affaires est régulière et conforme aux dispositions du plan comptable général,

- qu'il n'existe donc aucune inexactitude dans l'acte de cession relativement au chiffre d'affaires 2012.

Que si la cour retenait l'inexactitude des comptes, la demande de la société IDLF serait mal fondée parce que :

- la prétendue erreur alléguée n'a pas été déterminante du consentement de la société IDLF dont le dirigeant est un professionnel averti ayant plus de 25 ans d'expérience dans le domaine du luxe qui a pu, assisté de ses conseils financiers et juridiques et de leurs audits pendant la négociation, laquelle a duré plus de 18 mois, prendre connaissance des livres comptables et des prévisions pour l'exercice 2012, en ce inclus le traitement des redevances du licencié Aubusson,

- que la société IDFL a pu consulter toutes les liasses fiscales et documents pertinents,

- qu'elle a expressément indiqué dans la convention que le chiffre d'affaires 2012, tel que déclaré avant la cession et ultérieurement certifié, n'était pas déterminant de son consentement,

- que ce chiffre d'affaires 2012 n'était pas un élément d'un quelconque réajustement de prix ;

Que la société HAPYDF ajoute :

- que la seule preuve d'une inexactitude est insuffisante à déclencher la garantie du vendeur, l'acquéreur devant démontrer que cette inexactitude lui a causé un préjudice,

- que la société IDLF ne justifie pas en quoi l'inexactitude alléguée devrait conduire à une réduction de plus de la moitié du prix convenu ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats :

- que le 2 février 2009 la société Parfums Daniel Aubusson a mis un terme anticipé au contrat de licence de marques conclu en 2002 avec la société Ines de la Fressange, qu'elle a été condamnée à lui payer la somme de 339.926,24 € HT au titre des redevances dues pour les années 2006 à 2009 et que, suivant protocole de règlement transactionnel signé le 22 février 2012, les parties ont décidé de fixer à 167.224,28 € HT, soit 200.000 € TTC, le montant dû par la société Parfums Daniel Aubusson pour solde de tous comptes,

- que le tableau invoqué par la société IDLF communiqué au cours des discussions qui ont précédé la cession du fonds de commerce de la société Ines de la Fressange, intitulé 'valorisation pour la cession du fonds de commerce et de la marque Inès de la Fressange', évalue le chiffre d'affaires de 2012 à 800.000 € sous déduction de la recette exceptionnelle de 200.000 € avec le commentaire ' produits exceptionnels non récurrents',

- qu'avant la cession du fonds de commerce, la société IDLF a eu connaissance des livres comptables de la société Ines de la Fressange et de l'existence de la recette exceptionnelle de 200.000 € qui n'était pas encore comptabilisée,

- que si dans l'acte de cession du fonds de commerce signé le 13 mai 2013 entre la société Ines de la Fressange et la société IDLF, il est mentionné au titre de l'exercice 2012 un chiffre d'affaires de 613.254 € incluant la somme payée en 2012 au titre du protocole conclu avec la société Parfums Daniel Aubusson, la comptabilisation de cette somme dans les produits perçus au titre de l'exercice 2012 n'est pas contraire au Plan comptable général,

- que la société Parfums Daniel Aubusson ne figurant pas dans l'annexe 3.1.2 relatif aux contrats de licence en cours portant sur les marques, la société IDLF connaissait le périmètre exact de l'activité cédé et des redevances qu'elle pouvait attendre pour l'avenir en provenance des marques cédées,

- que la détermination du prix de cession a résulté d'une négociation de gré à gré sur la valeur des marques et que le chiffre d'affaires de 2012 n'a pas constitué un élément de réajustement de ce prix ;

Considérant que l'article L 141-3 du code de commerce dispose que le vendeur est, nonobstant toute stipulation contraire, tenu de la garantie à raison de l'inexactitude de ses énonciations dans l'acte de cession, dans les conditions édictées par les articles 1644 et 1645 du code civil; que l'article 1641 du code civil, auquel renvoie l'article 1644 de ce code, dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus; qu'en l'espèce, la société IDLF ne démontre pas le préjudice qui serait résulté pour elle de l'inexactitude alléguée du chiffre d'affaires déclaré pour l'exercice 2012 ; qu'en effet elle indique elle-même avoir en quelques mois re-dynamisé les marques et redonné à l'enseigne le luxe qu'elle avait perdu; qu'il ressort encore de ses comptes sociaux arrêtés au 31 décembre 2015 que son chiffre d'affaires qui était de 3.500.000 € pour l'exercice du 1er mars 2013 au 31 décembre 2014 (22 mois) est passé à 4.000.000 € pour l'exercice clos le 31 décembre 2015 (12 mois) ;

Considérant, en conséquence, que la demande de la société IDLF en réduction du prix de cession doit être rejetée ;

2- Sur la demande de la société IDLF au titre de marques manquantes :

Considérant que la société IDLF expose que 8 marques déposées par la société Ines de la Fressange ne figurent pas dans l'acte de cession du fonds ni dans l'acte de cession de marques complémentaires conclu le même jour; qu'elle soutient :

- que conformément à l'article 1156 du code civil, il convient de rechercher la commune intention des parties,

- qu'il a toujours été convenu entre elles que toutes les marques Ines de la Fressange seraient cédées, ce qui ressort de sa lettre d'intention du 20 avril 2012 ainsi que de celle du 10 octobre 2012 contresignée par M. [O],

- qu'aux termes de l'acte de cession du fonds, la société Ines de la Fressange s'est interdite d'exploiter le nom Ines de la Fressange et s'est engagée à changer de dénomination sociale ;

Que la société HAPYDF s'oppose à cette demande pour les motifs retenus par le tribunal ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu à interprétation des conventions conclues entre les parties dont les termes sont clairs et précis; qu'en effet l'acte de cession du fonds stipule que sont cédées les marques dont la liste figure en annexe 3.1.2 (iii), étant précisé que toute marque non expressément visée à cette annexe est réputée ne pas faire partie de la cession, et l'acte de cession de marques complémentaires énumère les marques cédées en annexe 1; que la demande de la société IDLF au titre de marques manquantes est mal fondée ;

3- Sur la demande de la société HAPYDF au titre des redevances de licence dues antérieurement à la cession du fonds :

Considérant que par application de l'article 14.5.1 de l'acte de cession du fonds de commerce, 'les créances nées antérieurement à la date de cession demeureront la propriété du cédant sous réserve des créances nées des contrats de licence sur les marques qui feront l'objet d'un règlement au cédant par le cessionnaire pro rata temporis, en fonction de la date de cession' ; que l'annexe 3.1.2 (vi) de ce contrat relatif aux contrats de licence portant sur les marques comporte un échéancier des 15 contrats en cours ;

Que la société HAPYDF ne conteste pas que parmi les 15 licenciés répertoriés dans l'annexe, la société Berger visée dans cet échéancier n'était plus licenciée depuis 2007 et la société J.B Martin, qui venait de signer un contrat de licence, ne serait facturée au titre des redevances qu'à compter du 4ème trimestre 2013 ;

Que des factures versées aux débats par la société IDLF ( piéce 18) ainsi que de sa pièce 19 bis récapitulant le montant des redevances perçues, en ce inclus celle relative au contrat avec la société Mantero, et appliquant le prorata convenu, il ressort que la société IDLF est redevable de la somme de 52.766 € TTC, sous réserve de l'ajout de la quote-part afférente aux contrats de licence avec la compagnie A.M et avec la société Maniffarura [Z] qui ne sont pas mentionnées en pièce 19 bis et dont les facturations ne figurent pas en pièce 18 ;

Que les sommes dues par la société IDFL porteront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2013 ; que la capitalisation des intérêts doit être ordonnée dans les conditions prévues à l'article 1154 du code civil ;

4- Sur les demandes de dommages-intérêts :

Considérant que la société IDLF qui succombe en toutes ses prétentions est mal fondée en sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

Que la société HAPYDF ne démontrant pas l'existence d'un quelconque préjudice moral sa demande de dommages-intérêts à ce titre doit être rejetée ;

Que la société IFLF n'ayant pas fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice, la demande de la société HAPYDF en dommages-intérêts pour procédure abusive sera rejetée ;

5- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que les entiers dépens sont à la charge de la société IDFL ; que vu les dispositions de l'article 700 du code civil, il y a lieu d'allouer la somme de 30.000 € à la société HAPYDF au titre de ses frais irrepetibles tant en première instance qu'en appel et de débouter la société IDFL de sa demande à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- débouté la société IDFL de toutes ses demandes,

- débouté la société HAPYDF de ses demandes de dommages-intérêts pour préjudice moral et procédure abusive,

- condamné la société IDFL aux dépens;

L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau :

Condamne la société IDFL à payer à la société HAPYDF la somme de 52.766 € TTC, outre la quote-part contractuelle sur les redevances dues au titre des contrats de licence conclus avec la compagnie A.M , [Adresse 3] et avec la société [Z] [Z], via [Adresse 4],

Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2013 et ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,

Condamne la société IDLF à payer à la société HAPYDF la somme de 30.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne la société HAPYDF aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 15/11368
Date de la décision : 24/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°15/11368 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-24;15.11368 ?
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