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19/05/2017 | FRANCE | N°15/22505

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 19 mai 2017, 15/22505


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 19 MAI 2017



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/22505



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Octobre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2014055998





APPELANTE



CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

RCS PARIS B 542 016 381

Prise en la personne de son repré

sentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée par Me Ali EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289

Ayant pour avocat plaidant Me Mary...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 19 MAI 2017

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/22505

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Octobre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2014055998

APPELANTE

CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

RCS PARIS B 542 016 381

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Me Ali EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289

Ayant pour avocat plaidant Me Maryvonne EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289

INTIMES

Monsieur [E] [N]

Né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1] (TUNISIE)

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représenté par Me Hussein MAKKI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1930

Ayant pour avocat plaidant Me Najoua MOULOUADE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1930

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/004878 du 04/03/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

Madame [N] [R] épouse [N]

Née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représenté par Me Hussein MAKKI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1930

Ayant pour avocat plaidant Me Najoua MOULOUADE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1930

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/004878 du 04/03/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

Mme Muriel GONAND, Conseillère

M. Marc BAILLY, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise CHANDELON, président et par Mme Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

Par acte sous seing privé du 9 août 2012, le CIC a consenti à la société LA TRADITION DU 19EME un prêt de 250 000 euros au taux de 3,55 % sur une durée de sept ans, remboursable en 84 mensualités de 3 435,08 euros, destiné à financer l'achat d'un fonds de commerce de boulangerie et aux termes de ce même acte, Monsieur [N], gérant de la société LA TRADITION DU 19EME, et Madame [N] son épouse se sont portés chacun caution solidaire à hauteur de 150 000 euros pour une durée de 108 mois.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 janvier 2014, le CIC a prononcé la déchéance du terme et mis la société LA TRADITION DU 19EME en demeure de payer la somme de 202 798,36 euros.

Par lettres recommandées du même jour, le CIC a également mis en demeure Monsieur [N] et Madame [N] de payer la somme de 150 000 euros au titre de leur engagement de caution.

Par actes d'huissier des 16 et 24 septembre 2014, le CIC a assigné la société LA TRADITION DU 19EME, Monsieur [N] et Madame [N] devant le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement rendu le 28 octobre 2015, le tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société LA TRADITION DU 19EME à payer au CIC la somme de 199 824,97 euros, outre intérêts au taux de 3,55 % à compter du 5 septembre 2014,

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

- dit que le CIC ne peut se prévaloir des actes de caution souscrits par chacun des époux [N] et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes à ce titre,

- condamné la société LA TRADITION DU 19EME à payer au CIC la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné le CIC à payer à Monsieur [N] et Madame [N] la somme de 750 euros chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné la société LA TRADITION DU 19EME aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la Cour le 6 novembre 2015, le CIC a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de Monsieur [N] et de Madame [N].

Dans ses dernières conclusions notifiées le 20 janvier 2017, le CIC demande à la Cour :

- de déclarer recevable et bien fondé son appel,

- d'infirmer le jugement en ses dispositions à l'encontre de Monsieur [N] et de Madame [N],

- de condamner Monsieur [N] à lui payer la somme de 150 000 euros, montant limité de son engagement de caution, majorée des intérêts au taux de 3,55 % postérieurs au 4 septembre 2014,

- de condamner Madame [N] à lui payer la somme de 150 000 euros, montant limité de son engagement de caution, majorée des intérêts au taux de 3,55% postérieurs au 4 septembre 2014,

sans que les règlements ne puissent excéder le montant de la dette principale,

- d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter de la première demande en application de l'article 1154 du Code civil,

- de condamner Monsieur [N] et Madame [N] à payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Dans leurs dernières écritures notifiées le 19 janvier 2017, Monsieur [N] et Madame [N] demandent à la Cour :

- de constater la disproportion de leurs engagements,

- de confirmer le jugement,

- de dire que le CIC ne peut se prévaloir des actes de cautionnements,

- de condamner le CIC à payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

SUR CE

Considérant que le CIC soutient que le cautionnement de Monsieur et Madame [N] n'était pas disproportionné à leurs biens et revenus ; qu'il indique que les époux [N] ont rempli et signé une fiche patrimoniale le 8 février 2012 dans laquelle ils ont fait état d'un patrimoine immobilier de 300 000 euros et au titre des charges d'un solde d'emprunt de 121 478 euros, soit une valeur nette de leur patrimoine de 178 522 euros en 2012 ; qu'il mentionne que les pièces produites par les intimés montrent qu'ils ont déclaré en 2012 des revenus salariaux et des revenus industriels et commerciaux de 24 611 euros et de 85 514 euros permettant de faire face aux mensualités du prêt de 3 435 euros ; qu'il ajoute que l'acquisition du fonds de commerce a été financé à hauteur de 60 000 euros par Monsieur et Madame [N] et qu'ils détenaient aussi un compte courant d'associé de 23 448 euros ; qu'il prétend qu'en tout état de cause les cautions peuvent actuellement faire face à leurs engagements, puisqu'ils disposent d'un patrimoine immobilier d'une valeur nette de 225 178 euros compte tenu du remboursement de leur prêt pendant quatre ans ;

Considérant qu'en réponse, Monsieur [N] et Madame [N] font valoir que leurs engagements de caution étaient manifestement disproportionnés à leurs revenus et patrimoine ; qu'ils exposent que Monsieur [N] exploitait une boulangerie en [Localité 3] dont le résultat était déficitaire de 85 514 euros, déficit reporté sur les revenus de 2012, et qu'il a cédé ce fonds de commerce pour acheter le fonds de commerce de la rue Secretan à [Localité 4], que le fonds à [Localité 4] a été acquis avec leurs deniers personnels à hauteur de 60 000 euros moyennant un prêt de 50 000 euros du meunier [L] du 28 février 2012, ainsi qu'avec le prêt du CIC ; qu'ils précisent que les revenus étaient de 12 750 euros par an pour Monsieur [N] et de 1 210 euros par mois pour Madame [N], que leurs charges courantes s'élevaient à 1 576 euros, soit un reste à vivre de 696 euros par mois ; qu'ils allèguent par ailleurs que le CIC ne démontre pas qu'au moment où il les a appelés, ils pouvaient faire face à leur obligation et que le tribunal a justement dit qu'à cette date leur patrimoine avait une valeur nette de 186 850 euros ;

Considérant qu'aux termes de l'article L341-4 du Code de la consommation, 'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation' ;

Considérant que le CIC verse aux débats les fiches patrimoniales signées par Monsieur [N] et Madame [N] le 8 février 2012, dans lesquelles Monsieur [N] et Madame [N] ont déclaré au titre du patrimoine, un pavillon estimé à 300 000 euros, avec un capital restant dû de 121 478 euros et au titre des charges deux prêts immobiliers du LCL de 153 500 et 22 500 euros sur lesquels il reste dû 121 478,12 euros et 6 796,54 euros, ainsi qu'un prêt 'voiture' SOCRAM de 29 525 euros avec un capital restant dû de 16 814,71 euros ;

Considérant qu'il ressort de la déclaration d'impôt sur les revenus de 2012, que Monsieur et Madame [N] ont perçu un revenu global de 27 346 euros et qu'ils ont déclaré un déficit au titre des revenus industriels et commerciaux de 85 514 euros, de sorte que le CIC ne peut sérieusement prétendre que les cautions pouvaient rembourser les mensualités du prêt de 3 435 euros en cas de défaillance de la société LA TRADITION DU 19EME ;

Considérant que le CIC affirme aussi que le fonds de commerce a été financé par les deniers personnels de Monsieur [N] et Madame [N] à hauteur de 60 000 euros et que ces derniers avaient un compte courant d'associé de 23 448 euros ;

Considérant que Monsieur [N] et Madame [N] ne contestent pas l'existence du compte courant d'associé de 23 448 euros dans la société LA TRADITION DU 19EME ;

Considérant que le fonds de commerce a été acquis au prix de 310 000 euros moyennant le prêt de 250 000 euros du CIC et la somme de 60 000 euros provenant des deniers personnels de Monsieur et Madame [N] ;

Considérant que Monsieur et Madame [N] versent aux débats la lettre du 28 février 2012 de la SARL MEUNERIE GUENEGO leur confirmant l'octroi d'un prêt meunier de 50 000 euros garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de boulangerie, nantissement qui a effectivement été inscrit le 25 septembre 2012 ; qu'il est ainsi établi qu'ils ne disposaient que de la somme de 10 000 euros à titre personnel lors de l'achat du fonds de commerce ;

Considérant qu'à la date du 9 août 2012, le patrimoine immobilier net des époux [N] était de 178 522 euros et leur patrimoine mobilier s'élevait à 33 448 euros (23 448 euros + 10 000 euros), soit au total 211 970 euros et 105 985 euros pour chacun des époux;

Considérant en conséquence que l'engagement de caution de Monsieur et Madame [N] à hauteur de 150 000 euros chacun, était manifestement disproportionné à leurs biens et revenus ;

Considérant qu'à la date du 10 janvier 2014, à laquelle les cautions ont été appelées par le CIC, le tribunal a estimé que la valeur nette du bien immobilier des époux [N], déduction de l'encours de crédit, ressortait à 186 850 euros ;

Considérant que le CIC affirme que le bien immobilier a une valeur actuelle de 225178 euros mais qu'il n'apporte aucun élément susceptible de critiquer l'évaluation retenue par les premiers juges ;

Considérant s'agissant du compte courant d'associés, que par acte du 30 janvier 2015, Monsieur [N] et Madame [N] ont cédé les parts sociales de la société LA TRADITION DU 19EME au prix de 1 euro et que la cession du compte courant d'associé de 23 448 euros a été consentie moyennant le prix forfaitaire de 10 000 euros ;

Considérant que même en tenant compte de cette somme de 10 000 euros au titre du compte courant d'associé et de la valeur du bien immobilier, déduction faite du capital restant dû, Monsieur [N] et Madame [N] disposaient d'un patrimoine global de 215 000 euros, soit 107 500 euros chacun, à la date de la décision du tribunal ;

Considérant par ailleurs que Monsieur [N] et Madame [N] ont obtenu l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente procédure ;

Considérant dans ces conditions que le CIC ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, qu'au moment où ils ont été appelés, Monsieur [N] et Madame [N] étaient en mesure de faire face à leur engagement de caution respectif à hauteur de 150 000 euros ;

Considérant que le CIC ne peut donc se prévaloir des engagement de caution de Monsieur [N] et Madame [N] et que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le CIC de l'ensemble de ses demandes à ce titre ;

Considérant que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné le CIC au paiement de la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que le CIC, qui succombe, supportera ses frais irrépétibles et les dépens d'appel ;

Considérant que l'équité n'impose pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de Monsieur et Madame [N] ;

PAR CES MOTIFS

Statuant sur l'appel du CIC à l'encontre de Monsieur et Madame [N],

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Déboute les parties de toutes autres demandes.

Condamne le CIC aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle et à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/22505
Date de la décision : 19/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°15/22505 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-19;15.22505 ?
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