RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 11 mai 2017
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/12173
Décision déférée à la Cour : arrêt de renvoi après cassation rendu le 08 octobre 2014 par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, sur pourvoi d'un arrêt rendu le 22 juin 2013 par le pôle 6 chambre 10 de la Cour d'Appel de PARIS, sur appel d'un jugement du conseil de prud'hommes d'Auxerre du 29 mars 2011
APPELANT
Monsieur [V] [N]
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Jean-Baptiste GAVIGNET, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Isabelle-Marie DELAVICTOIRE
INTIMEE
SAS SIMON
N° SIRET : 442 741 429
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Gérard RADIX, avocat au barreau d'AUXERRE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 23 février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine MÉTADIEU, Président
Madame Martine CANTAT, Conseiller
Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.
**********
Statuant sur la déclaration de saisine après renvoi de cassation faite par la société par actions simplifiée (SAS) SIMON ET CIE et enregistrée au greffe de cette cour le 20 octobre 2014,
Vu le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Auxerre le 29 mars 2011 qui a':
- débouté M. [V] [N] de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la «'SAS SIMON'» de sa demande reconventionnelle,
- condamné M. [V] [N] aux éventuels dépens,
Vu l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris (Pôle 6 ' Chambre 10) le 22 janvier 2013 qui, saisie de l'appel formé par M. [V] [N], a':
- infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau et y ajoutant':
- annulé la mise à pied notifiée à M. [V] [N] le 18 janvier 2010 ainsi que le licenciement notifié le 10 février 2010,
- condamné la SAS SIMON ET CIE à payer à M. [V] [N] les sommes suivantes':
- 2 000,00 € au titre de l'indemnité de requalification,
- 821,52 € au titre du rappel de salaires pour la période de mise à pied conservatoire,
- 4 000,00 € au titre de l'indemnité de préavis,
- 1 200,00 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 16 000,00 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 000,00 € en réparation de la violation de son statut de salarié protégé,
- condamné la SAS SIMON ET CIE à remettre à M. [V] [N], sans astreinte, des bulletins de paie et une attestation Pôle emploi conformes à l'arrêt,
- condamné la SAS SIMON ET CIE à payer à M. [V] [N] une somme de 2 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,,
- condamné la SAS SIMON ET CIE aux dépens de première instance et d'appel,
Vu l'arrêt rendu le 08 octobre 2014 par la chambre sociale de la Cour de cassation qui, saisie du pourvoi formé par la SAS SIMON ET CIE, a':
- cassé et annulé, sauf en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement d'une somme au salarié au titre de l'indemnité de requalification, l'arrêt rendu le 22 janvier 2013 par la cour d'appel de Paris,
- renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée,
- condamné M. [V] [N] aux dépens,
- vu l'article 700 du code de procédure civile, rejeté sa demande,
Vu les conclusions visées par le greffier et soutenues à l'audience du 23 février 2017 pour M. [V] [N], appelant, qui demande à la cour de':
- réformer le jugement entrepris,
- dire et juger qu'il est bénéficiaire d'un régime de protection du seul fait de sa candidature aux élections de délégués du personnel réitérée le 15 juillet 2009 et que la durée de cette protection est prorogée d'autant qu'est reportée par l'employeur l'organisation des élections,
à défaut, avant dire droit':
- ordonner à la SAS SIMON ET CIE ainsi qu'au syndicat FORCE OUVRIERE la production aux débats du recommandé portant date d'envoi de la demande d'organiser des élections de délégué du personnel sous astreinte de 50 € par jour de retard qui commencera à courir à l'issue du délai de quinze jours à compter de la notification ou de la signification de la décision à intervenir (cette demande ne concernant en réalité que la SAS SIMON ET CIE),
- ordonner au syndicat FORCE OUVRIERE de communiquer à la cour le recommandé portant date d'envoi de la demande d'organiser des élections de délégué du personnel en 2009 au sein de la SAS SIMON ET CIE,
en toute hypothèse,
- dire et juger qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé au cours de la période de commission des faits invoqués par l'employeur à l'appui de son licenciement,
- dire et juger nul son licenciement,
- dire et juger nulle la mise à pied en date du 18 janvier 2010,
- condamner par conséquent la SAS SIMON ET CIE à lui payer les sommes suivantes':
- 821,52 € au titre du rappel de salaires pour la période de mise à pied,
- 4 000,00 € au titre de l'indemnité de préavis,
- 1 200,00 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 20 000,00 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 6 000,00 € au titre de l'indemnisation pour violation de son statut de salarié protégé,
- condamner en outre la SAS SIMON ET CIE à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour comportement déloyal du fait de l'absence et du report des élections et de la prolongation illégale des mandats de «'DP'» depuis 2007,
subsidiairement':
- dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la SAS SIMON ET CIE à lui payer les sommes suivantes':
- 4 000,00 € au titre de l'indemnité de préavis,
- 1 200,00 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 20 000,00 € à titre de dommages-intérêts,
- condamner la SAS SIMON ET CIE à lui remettre des bulletins de paie et une attestation Pôle emploi rectifiés et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard suivant un délai de quinze jours à compter de la notification ou de la signification du «'jugement'» à intervenir, «'le Conseil se réservant expressément la possibilité de liquider l'astreinte'»,
- condamner la SAS SIMON ET CIE à lui payer la somme de 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
Vu les conclusions visées par le greffier et soutenues à l'audience du 23 février 2017 pour la SAS SIMON ET CIE, intimée, qui forme un appel incident et demande à la cour de :
- déclarer recevable et en tout état de cause mal fondé M. [V] [N] en son appel,
statuant à nouveau,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf sur l'indemnité de requalification de 2 000 € réglée par ses soins,
- débouter M. [V] [N] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- dire et juger que M. [V] [N] ne peut se prévaloir du statut de salarié protégé,
- dire et juger qu'il ne justifie d'aucune lettre recommandée avec «'AR'» d'une organisation syndicale pour organiser les élections
- dire et juger fondé le licenciement pour faute grave qu'elle a prononcé à l'encontre de M. [V] [N],
en conséquence,
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,
- condamner M. [V] [N] à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour les préjudices subis avec intérêts «'de droit à compter du jugement à intervenir'»,
- condamner M. [V] [N] à lui rembourser les sommes qui lui ont été versées indûment':
- 821,52 € au titre du rappel de salaires pour la période de mise à pied,
- 4 000,00 € au titre de l'indemnité de préavis,
- 1 200,00 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 16 000,00 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 000,00 € au titre de la violation prétendue du statut de salarié protégé,
- 2 800,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] [N] à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens éventuels de première instance et d'appel,
La cour faisant expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties,
SUR CE, LA COUR
EXPOSE DU LITIGE
La SAS SIMON ET CIE qui emploie 22 salariés a embauché M. [V] [N] le 1er mars 2007 sous contrat à durée déterminée de trois mois à temps plein en qualité de sérigraphe, avec la qualification d'employé qualifié et au coefficient 700 de la convention collective nationale de la plasturgie.
Par avenant du 31 mai 2007, ce contrat a été renouvelé aux mêmes conditions pour une durée de trois mois.
A compter du 1er septembre 2007, le salarié a bénéficié d'un contrat à durée indéterminée.
Par lettre du 15 juin 2009 adressée sous pli recommandé avec avis de réception, M. [V] [N] s'est porté candidat dans le cadre des élections des délégués du personnel.
Par une note d'information du 26 juin 2009, l'employeur a répondu que les délégués du personnel étaient élus pour quatre ans et restaient élus «'jusqu'aux prochaines élections, dans deux ans'».
Après avoir alerté l'inspection du travail et faisant valoir que les délégués du personnel ' Mmes [S] [Q] et [R] [M] ' avaient été reconduits le 05 juin 2007 dans leur mandat sans élections, M. [V] [N] a par lettre du 15 juillet 2009 adressée dans les mêmes formes demandé à son employeur d'organiser ces élections, en lui faisant part de sa candidature en tant que délégué titulaire et délégué suppléant.
Par une note d'information du 16 juillet 2009, l'employeur a indiqué qu'à la suite de la démission de leur mandat de Mmes [S] [Q] et [R] [M], de nouvelles élections seraient organisées après le retour des congés payés.
Le protocole d'accord préélectoral signé par la SAS SIMON ET CIE et la confédération FORCE OUVRIERE a prévu que le premier tour des élections des délégués du personnel se déroulerait le 24 septembre 2009 et le second tour, le cas échéant, le 1er octobre 2009.
Au premier tour ont été élues Mmes [I] [C] et [H] [I] respectivement en qualité de titulaire et suppléante, toutes deux présentées par la confédération FORCE OUVRIERE.
Par jugement du 16 octobre 2009, le tribunal d'instance d'Avallon a rejeté les demandes de l'union locale de la CFDT de l'YONNE tendant notamment à l'annulation des élections.
Par lettre du 09 novembre 2009 adressée sous pli recommandé avec avis de réception, la SAS SIMON ET CIE a notifié à M. [V] [N] un avertissement.
Par lettre du 18 janvier 2010 adressée sous les mêmes formes, la SAS SIMON ET CIE a notifié à M. [V] [N] sa mise à pied.
Par lettre adressée le 21 janvier 2010 sous les mêmes formes, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable qui s'est tenu le 02 février.
Par lettre du 10 février 2010 dont M. [V] [N] a accusé réception le lendemain, la SAS SIMON ET CIE lui a notifié son licenciement pour faute grave.
C'est dans ces conditions que M. [V] [N] a saisi en 2010 la juridiction prud'homale de la procédure qui a donné lieu au jugement entrepris puis à l'arrêt partiellement cassé rendu le 22 janvier 2013 par la cour de céans.
MOTIFS
Sur le statut de salarié protégé':
M. [V] [N] soutient qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé au cours de la période de commission des faits invoqués par l'employeur à l'appui de son licenciement, à titre principal à raison de son acte de candidature du 15 juin 2009 et à titre subsidiaire à raison de sa demande d'organisation des élections faite par courrier du 15 juillet 2009 aux termes duquel il a également réitéré sa candidature.
- Sur l'imminence de la candidature':
L'article L 2411-7 du code du travail dispose':
«'L'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur.
Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement'».
Au cas présent, il est établi que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de la candidature du salarié à réception le 17 juin 2009 de sa lettre de candidature.
En outre, M. [V] [N] soutient à bon droit qu'il était fondé à renouveler sa candidature le 15 juillet 2009 dès lors que l'employeur avait dans un premier temps reporté sans motif légitime la tenue des élections.
Pour autant, il doit être rappelé qu'en application des dispositions de l'article L 2314-24 alinéa 2 du code du travail, «'au premier tour de scrutin, chaque liste est établie par les organisations syndicales mentionnées aux premier et deuxième alinéas de l'article L 2314-3. Si le nombre des votants est inférieur à la moitié des électeurs inscrits, il est procédé, dans un délai de quinze jours, à un second tour de scrutin pour lequel les électeurs peuvent voter pour des listes autres que celles présentées par une organisation syndicale'».
Il en résulte que si un salarié non mandaté par une organisation syndicale qui présente une candidature prématurée, avant même la conclusion du protocole préélectoral comme en l'espèce, bénéficie de la protection instituée par l'alinéa 2 de l'article L 2411-7 susvisé en raison de la connaissance par l'employeur de l'imminence de sa candidature, cette protection ne perdure au plus tard que jusqu'au dépôt d'une nouvelle candidature régulière pour le second tour.
Or, le délégué du personnel titulaire et le délégué du personnel suppléant au sein de la société SIMON ET CIE ont été élus au premier tour des élections organisé le 24 septembre 2009 ainsi qu'en attestent les deux procès-verbaux des élections produits, de sorte que M. [V] [N] a perdu à cette date la protection dont il bénéficiait, faute de pouvoir déposer une nouvelle candidature régulière pour le second tour.
Les faits reprochés par l'employeur dans la lettre de licenciement, citée in extenso dans l'arrêt partiellement cassé et à laquelle la cour fait expressément référence (pièce n° 17 de l'intimée et n° 7 de l'appelant), et a fortiori le déclenchement de la procédure de licenciement, sont postérieurs à l'expiration de la protection du salarié au titre de l'imminence de sa candidature.
Il s'ensuit que M. [V] [N] ne peut opposer utilement celle-ci à la SAS SIMON ET CIE.
- Sur la demande d'organisation des élections des délégués du personnel':
L'article L 2411-6 du code du travail dispose':
«'L'autorisation de licenciement est requise, pendant une durée de six mois, pour le salarié ayant demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel ou d'accepter d'organiser ces élections. Cette durée court à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation syndicale a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections.
Cette protection ne bénéficie qu'à un seul salarié par organisation syndicale ainsi qu'au premier salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a demandé l'organisation des élections.'»
La protection attachée à la première demande d'un salarié de l'entreprise tendant à l'organisation des élections des délégués du personnel nécessite donc pour être effective qu'une organisation syndicale prenne le relais par l'envoi à l'employeur d'une lettre recommandée en ce sens, envoi à compter duquel court la durée de protection.
Il ressort des productions et il n'est pas contesté que M. [V] [N] a été le premier et au demeurant le seul salarié non mandaté par une organisation syndicale à demander l'organisation des élections des délégués du personnel, par courrier du 15 juillet reçu deux jours plus tard par l'employeur.
En revanche, l'intéressé ne justifie pas de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle la confédération FORCE OUVRIERE a demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections.
Il n'est plus temps aujourd'hui, plus de sept ans après les faits, de solliciter en justice la production de cette lettre recommandée, alors que M. [V] [N] ne justifie d'aucune démarche préalable auprès de la confédération FORCE OUVRIERE ni d'aucune sommation de communiquer délivrée à la SAS SIMON ET CIE qui seraient restées vaines.
Il s'ensuit que l'intéressé ne peut davantage se prévaloir de la protection prévue par les dispositions de l'article L 2411-6 du code du travail.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [V] [N] liées à la violation de son statut protecteur.
La demande nouvelle en dommages-intérêts pour comportement déloyal de l'employeur du fait de l'absence et du report des élections et de la prolongation illégale des mandats de délégués du personnel depuis 2007, que M. [V] [N] n'a présentée que dans l'hypothèse où son licenciement serait déclaré nul, sera par voie de conséquence également rejetée.
Sur le licenciement':
En vertu des dispositions des articles L 1234-1 et L 1234-9 du code du travail, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la période du préavis.
L'employeur qui invoque la faute grave du salarié pour le licencier doit en rapporter la preuve.
Dans la lettre de licenciement, citée in extenso dans l'arrêt partiellement cassé et à laquelle la cour fait expressément référence (pièce n° 17 de l'intimée et n° 7 de l'appelant), l'employeur reproche au salarié les faits suivants':
- depuis les élections du 24 septembre 2009, tenue de propos intolérables, débordements verbaux injurieux à l'égard du «'PDG'»';
- perturbation des salariés en apostrophant et provoquant certains d'entre eux, notamment le 11 janvier 2010 en déclarant dans l'atelier': «'Il est agréable de voir bosser les filles alors que moi je ne fais rien'», en faisant circuler pendant le temps de travail des informations inexactes sur l'application de la convention collective de la plasturgie, en cherchant à créer un conflit entre eux et l'employeur (exemple des masques qui ne seraient pas conformes)';
- tenue de propos méprisants à l'encontre de Mme [I] [C], élue déléguée du personnel en la prenant de haut en ces termes': «'Aussi en ta qualité d'assistante de direction, comptable et surtout titulaire du personnel FO, tu voudras bien en faire part au responsable de la société SIMON'».
En outre, après avoir rappelé la teneur de l'avertissement du 09 novembre 2009 relatif à la non-conformité des travaux de sérigraphie qui lui avaient été confiés, l'employeur fait grief au salarié d'avoir réitéré le 27 novembre 2009 ce comportement qui a entraîné la destruction de 75 mètres linéaires de matière.
Le premier grief, insuffisamment documenté, ne peut être retenu d'autant qu'il a déjà fait l'objet d'une sanction le 09 novembre 2009.
S'agissant des deuxième et troisième griefs, les deux nouvelles élues attestent du comportement hautain, arrogant et provocateur de M. [V] [N] depuis les élections. Mme [I] relate que pendant ses heures de récupération, le 11 janvier 2010, il a tenu des propos «'vis à vis de nous ' genre de nous voir bosser pendant que lui ne faisait rien'». Mme [C] confirme que courant janvier 2010 il s'est adressé à elle «'de façon méprisable (sans doute parce que je suis du «'sexe féminin'»)'» de la façon suivante': «'Les masques qu'on nous a fourni[s] ne sont pas conformes, aussi en ta qualité d'assistante de Direction, comptable et surtout déléguée titulaire du personnel F.O., tu voudras bien en faire part au responsable de la société SIMON'» et elle ajoute': «'bien évidemment écrit comme cela vous n'avez pas le ton donné'!'» (pièces n° 23 et 24 de l'intimée).
Ces témoignages imprécis et peu circonstanciés ne peuvent suffire à caractériser une faute de nature à justifier le licenciement de l'intéressé.
En revanche, il ressort de la fiche de non-conformité n° 64 en date du 27 novembre 2009 établie par M. [A] [O] (atelier coupe) que celui-ci explique la non-conformité par le fait que «'le sérigraphe [lui] a demandé de découper en plus de la matière sans feuille de coupe. je l'ai fait car il a fortement insisté'».
Contrairement à l'argumentaire de M. [V] [N], ce manquement qui lui est imputable est établi au regard de l'explication fournie par le salarié de l'atelier coupe, en l'absence du moindre élément contraire.
L'intéressé avait déjà été sanctionné le 09 novembre en raison de quatre non-conformités n° 52, 53, 56 et 57 constatées les 07, 21, 28 octobre et 03 novembre 2009 sans s'expliquer utilement sur ces faits alors qu'il avait demandé à cet effet et obtenu le 26 novembre 2009 les quatre fiches de non-conformité considérées (pièces n° 11 et 18 de l'intimée).
Si ainsi que l'expose l'intimée la survenance de nouveaux griefs reprochés au salarié autorise l'employeur à retenir des manquements antérieurs déjà sanctionnés pour apprécier la gravité desdits griefs, pour autant l'unique faute commise par M. [V] [N] et mise en évidence le 27 novembre 2009 ne revêt pas le caractère de gravité retenu par l'employeur, sa nature ne rendant pas impossible le maintien du contrat de travail durant la durée du préavis.
En revanche, elle est constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur le rappel de salaire et les indemnités :
Ayant été licencié pour une cause réelle et sérieuse, M. [V] [N] ne peut qu'être débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En revanche et compte tenu d'un salaire mensuel de référence de 2 000 € bruts, il a droit à son salaire durant la période de mise à pied conservatoire, soit 821,52 €, à l'indemnité compensatrice de préavis, soit 4 000 € et à l'indemnité légale de licenciement qui en fonction de son ancienneté (près de trois ans) sera fixée à 1 200 €.
La décision entreprise sera réformée de ces chefs.
Sur la demande de remise des documents sociaux':
Il y a lieu de condamner la SAS SIMON ET CIE à remettre à M. [V] [N] un bulletin de paie récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi conformes au présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte.
Sur les demandes reconventionnelles':
La SAS SIMON ET CIE ne justifie pas du préjudice allégué au soutien de sa demande en dommages-intérêts dont elle sera en conséquence déboutée.
Le présent arrêt vaut titre de remboursement sans qu'il y ait lieu de prévoir une disposition expresse en ce sens.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens de première instance.
Chacune des parties, qui succombe partiellement, supportera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel en application des articles 696 et 639 du code de procédure civile.
Il n'y a pas lieu en équité de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties, tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant sur renvoi de cassation,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [V] [N] de ses demandes liées à la violation de son statut protecteur et de ses demandes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [V] [N] de sa demande nouvelle en dommages-intérêts pour comportement déloyal de l'employeur du fait de l'absence et du report des élections et de la prolongation illégale des mandats de délégués du personnel depuis 2007';
Dit que le licenciement de M. [V] [N] est fondé non sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
Déboute M. [V] [N] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';
Condamne la SAS SIMON ET CIE à payer à M. [V] [N] les sommes suivantes :
- 821,52 € au titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire ;
- 4 000,00 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;
- 1 200,00 € au titre de l'indemnité légale de licenciement ;
Condamne la SAS SIMON ET CIE à remettre à M. [V] [N] un bulletin de paie récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi conformes au présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte';
Déboute la SAS SIMON ET CIE de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT