La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2017 | FRANCE | N°14/18495

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 03 mai 2017, 14/18495


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 3 MAI 2017



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/18495



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/00376





APPELANTS



Monsieur [T], [B] [N]

Né le [Date naissance 1] 2016 à [Localité 1]

[Adresse 1]
>[Adresse 1]



Madame [V], [A] [C] épouse [N]

Née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



SCI DENTIMMO, inscrite au RCS de TROYES, SIRET n° 314 151 432 00023, prise en l...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 3 MAI 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/18495

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/00376

APPELANTS

Monsieur [T], [B] [N]

Né le [Date naissance 1] 2016 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Madame [V], [A] [C] épouse [N]

Née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

SCI DENTIMMO, inscrite au RCS de TROYES, SIRET n° 314 151 432 00023, prise en la personne de ses représentants légaux domicliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés par Me Dominique OLIVIER de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG et assistés à l'audience de Me Jean-Philippe HONNET, avocats au barreau de PARIS, toque : L0069

INTIMÉS

Monsieur [O] [S]

Né le [Date naissance 3] 1933 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [K] [W] épouse [S]

Née le [Date naissance 4] 1940 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentés par Me Patrick BAUDOUIN et assistés à l'audience d'une collaboratrice de la SCP d'Avocats BOUYEURE BAUDOUIN DAUMAS CHAMARD BENSAHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0056

Syndicat des copropriétaires DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 3], représenté par son syndic, ESPACE IMMOBILIER, SARLU inscrite au RCS de CRÉTEIL, SIRET n° 441 113 172 00023, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me Jean-Toussaint BARTOLI et assisté à l'audience de Me Thibault ETIENNEY, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 9

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, président de chambre,

Mme Claudine ROYER, conseillère,

Mme Agnès DENJOY, conseillère,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, président et par Mme Stéphanie JACQUET, greffier présent lors du prononcé.

***

Un litige oppose Monsieur [T] [N] et Madame [V] [C] épouse [N], ainsi que la SCI DENTIMMO respectivement propriétaires des lots 13 et 14 situés au 2ème étage de l'immeuble en copropriété sis [Adresse 3]) à M. [O] [S] et Mme [K] [S], propriétaires dans le même immeuble et au même étage du lot n°15. Ces trois lots sont desservis par un couloir commun éclairé par une fenêtre. Les époux [S] reprochent aux époux [N] d'avoir installé une porte dans le couloir pour clore les lots 13 et 14 en plaçant cette porte après la fenêtre, privant ainsi leur lot de l'éclairage donné par cette fenêtre.

Soutenant que l'emplacement de cette porte était irrégulier au regard des dispositions du règlement de copropriété prévoyant la possibilité de clore le couloir par sections entre deux lots, M. et Mme [S] ont fait assigner dans un premier temps (par actes des 30 décembre 2011, et 2 janvier 2012) M. [N] et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 3], puis dans un second temps (par acte du 1er mars 2013) au vu des titres de propriété transmis, Madame [C] épouse [N] et la SCI DENTIMMO devant le Tribunal de grande instance de Paris afin d'obtenir, avec exécution provisoire :

la suppression sous astreinte de la porte installée dans le couloir desservant les lots 13, 14 et 15 et à restituer l'intégralité de la portion de couloir partie commune spéciale incorporée au lots 13 et 14,

subsidiairement le déplacement de cette porte eu delà de l'emplacement de la fenêtre située en face des lots 14 et 15,

une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

une indemnité de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre dépens.

Par jugement du 22 juillet 2014 auquel il convient de se reporter pour plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, le Tribunal de grande instance de Paris (8ème chambre) a :

- jugé que la clause du règlement de copropriété de l'immeuble situé [Adresse 3], selon laquelle : si l'un des copropriétaires venait à se porter acquéreurs de l'ensemble des lots desservis par l'une des parties communes spéciales, il aurait la faculté d'incorporer ladite partie à ces lots et de clore l'ensemble au droit des parties communes générales à condition que les travaux entrepris le soient sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble et ne viennent en rien modifier l'harmonie de l'ensemble des parties communes, était claire,

- jugé que la pose par Monsieur et Madame [N] et la SCI DENTIMMO d'une porte dans le couloir du 2ème étage de l'immeuble était irrégulière,

- condamné la SCI DENTIMMO à supprimer la porte installée dans le couloir du deuxième étage au droit de la partie commune spéciale relative à ces deux lots, et à remettre en état les murs ainsi que le plancher du couloir après le retrait de la porte sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification du jugement à intervenir, et ce, pendant deux mois,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la SCI DENTIMMO à payer à Monsieur et Madame [S] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI DENTIMMO à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 3] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI DENTIMMO aux dépens,

- autorisé Maître [P] à recouvrer directement les frais avancés par lui conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Monsieur et Madame [N] ainsi que la SCI DENTIMMO ont relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel du 8 septembre 2014.

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] a également relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel séparée du 15 septembre 2014.

Ces deux appels ont été joints par ordonnance du magistrat de la mise en état du 8 octobre 2014.

Monsieur [T] [N], Madame [V] [C] épouse [N], et la SCI DENTIMMO demandent à la Cour par dernières conclusions signifiées le 2 novembre 2016, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de :

- dire qu'ils étaient bien-fondés à se prévaloir de la prescription acquisitive à l'égard de la portion de couloir fermée par la porte dont la destruction était sollicitée,

- en tout état de cause, débouter les époux [S] de leurs demandes,

- dire que l'interprétation de la clause du règlement de copropriété relative à la possibilité de clôturer les sections de couloir constituant une partie commune spéciale permettait aux copropriétaires propriétaires de l'intégralité des lots la constituant de poser une porte au droit de la partie commune spéciale relevant des deux lots leur appartenant et ce, conformément à la commune intention des parties et à la juxtaposition des clauses du règlement de copropriété et des plans intégrés à ce dernier,

- débouter les époux [S] de leur appel incident tendant à la fixation d'une astreinte,

- débouter les époux [S] de leur demande additionnelle de dommages et intérêts et au titre des frais irrépétibles,

y ajoutant,

- condamner les époux [S] au paiement d'une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par leur avocat conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 3] demande à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 6 décembre 2014 :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré qu'une partie commune spéciale constituée d'une section de couloir défini en page 17 et 18 du règlement de copropriété dans le paragraphe C «'parties communes spéciales à certains lots'» ne pouvait être clôturée qu'au droit d'une partie commune générale,

- dire en conséquence que l'interprétation de la clause du règlement de copropriété relative à la possibilité de clôturer les sections de couloir constituant une partie commune spéciale, permettait au propriétaire de l'intégralité des lots la constituant de poser une porte au droit de la partie commune spéciale relevant des deux lots lui appartenant, et ce conformément à la commune intention des parties et à la juxtaposition des clauses du règlement de copropriété, des plans intégrés à ces derniers, et des éléments factuels de l'espèce,

- condamner tout contestant à lui verser la somme de 3.000 euros sur les fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tout contestant aux dépens d'appel pouvant être recouvrés par son avocat pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Monsieur [O] [S] et Madame [K] [W] épouse [S] demandent à la Cour par dernières conclusions signifiées le 15 novembre 2016 et au vu des articles 8, 9, 15 et 26 de la loi du 10 juillet 1965 et du règlement de copropriété de l'immeuble du [Adresse 3], de :

- déclarer l'appel des parties adverses irrecevable et mal fondé,

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il rejeté leur demande de dommages et intérêts, et notamment en ce qu'il a condamné la SCI DENTIMMO à supprimer la porte installée dans le couloir du 2ème étage au droit de la partie commune spéciale relative à ces deux lots, et à remettre en état les murs ainsi que le plancher du couloir après retrait de la porte, sauf à voir porter de 50 à 500 euros par jour de retard l'astreinte ordonnée dès signification de l'arrêt à intervenir,

- à titre infiniment subsidiaire, au cas où par impossible la Cour ne confirmerait pas le jugement, condamner in solidum Monsieur et Madame [N] et la SCI DENTIMMO, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement, à déplacer la porte d'accès installée dans le couloir desservant les lots n°13, 14 et 15 de l'immeuble en cause au minimum de 80 cm au delà de l'emplacement de la fenêtre située en face des lots 14 et 15, de façon à maintenir l'éclairage de la section du couloir longeant et desservant le lot n°15 leur appartenant (à eux époux [S]),

- ajoutant au jugement du 22 juillet 2014,

- condamner in solidum les époux [N] et la SCI DENTIMMO à leur payer les sommes de :

5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance occasionné,

5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum les époux [N], la SCI DENTIMMO et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] aux entiers dépens, dont distraction au profit de leur avocat, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 novembre 2016.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Il n'est pas contesté que les lots 13 et 14 sont aujourd'hui la propriété de la seule SCI DENTIMMO, les époux [N] ayant indiqué en première instance que par deux actes notariés du 27 avril 2013, ils avaient fait donation à leurs deux filles du lot n°13, puis que celles-ci avaient apporté ledit lot en société à la SCI DENTIMMO.

Le règlement de copropriété a prévu (page 1, C ' Parties communes spéciales à certains lots) que le couloir desservant plusieurs lots était composé de parties communes spéciales à certains lots. Ainsi au 2ème étage il a prévu notamment :

que la partie de couloir desservant les lots n°13 et 14 (studios 21 et 22) teintée en bleu sur le plan, serait commune à ces deux seuls lots,

que la partie de couloir desservant les lots n° 13, 14 et 15 (studios 21, 22 et 23), teintée en orange sur le plan, serait commune à ces seuls trois lots.

Ce même règlement a prévu (page 18, 2/ possibilité de clôturer les sections de couloir définies ci-dessus) les conditions dans lesquelles le couloir commun pourrait être fermé par les dispositions suivantes :

« Si l'un des copropriétaires venait à se porter acquéreur de l'ensemble des lots desservis par l'une des parties communes spéciales, il aurait la faculté d'incorporer ladite partie commune spéciale à ces lots et de clore l'ensemble au droit des parties communes générales à condition que les travaux entrepris le soient sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble et ne viennent en rien modifier l'harmonie de l'ensemble des parties communes. »

En l'espèce, il ressort des pièces et plans produits que les époux [N] et la SCI DENTIMMO, ont incorporé aux lots 13 et 14 le couloir commun desservant ces lots en fermant une porte située précisément entre le lot n°14 (propriété de la SCI DENTIMMO) et le lot n°15 (propriété des époux [S]), après la petite fenêtre à deux vantaux située en hauteur éclairant le couloir. Ces travaux de fermeture auraient été effectués, selon les explications des parties, par la SCI DENTIMMO en 2005.

Dès lors que la clôture a été posée au delà du lot 14 et sur une portion de couloir desservant également le lot 15, celle-ci est clairement implantée sur une partie commune spéciale aux lots 13, 14 et 15 ainsi que l'a définie le règlement de copropriété.

Sur la prescription

Les époux [N] et la SCI DENTIMMO soutiennent que la porte litigieuse existait avant l'acquisition de leurs lots en 2003. Ils se prévalent de la prescription abrégée de 10 ans prévue par l'article 2272 alinéa du code civil et prétendent que les époux [S] ont attendu près de 10 ans avant d'engager leur action et ce, alors que la porte préexistait à leur arrivée dans les lieux, ce qui démontre leur absence de bonne foi.

Ils affirment que les époux [S] n'ont jamais eu accès à un couloir muni d'une fenêtre; que l'immeuble était autrefois un hôtel et que la porte en cause était une porte de sécurité dite «'coupe-feu'» qui clôturait les couloirs distribuant les trois chambres de cette même portion de couloir, bien avant l'arrivée des époux [S] ; que plusieurs personnes en attestent, notamment Madame [G], ancienne propriétaire de l'Hôtel [Établissement 1], Monsieur [H] leur ancien locataire de 1999 à 2005, l'expert [M], précisant que ces portes étaient scellées et intégrées à la maçonnerie, ce qui provoquerait des dégâts importants s'il fallait les enlever; qu'une remise en état des lieux ne peut être sollicitée puisque les lieux n'ont pas été modifiés.

Les époux [S] contestent l'existence d'une porte existant depuis des décennies à l'endroit où elle se trouve, et prétendent que le point de départ de la prescription ne peut être que la date d'établissement du règlement de copropriété. Ils produisent les témoignages de Mme [E], propriétaire à l'étage inférieur, confirmant qu'aucune fenêtre n'avait été incluse dans les studios situés en fond de couloir.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le fait qu'une porte coupe-feu ait été placée dans le couloir avant la mise en copropriété du temps où l'immeuble était exploité comme hôtel est sans effet sur la prescription acquisitive abrégée visée à l'article 2272 du code civil, qui ne peut concerner que l'acquisition d'un droit réel, à savoir la propriété d'une portion de couloir commun, et non d'une porte.

En tout état de cause, cette prescription acquisitive abrégée ne peut avoir comme point de départ que la date du règlement de copropriété, qui seul a prévu dans quelles conditions des parties communes spéciales pourraient être «'incorporées'» à certains lots. Or en l'espèce, à supposer que le couloir litigieux ait été clôturé dès la mise en copropriété (soit le 6 mars 2003) avant même l'acquisition de leur lot par la SCI DENTIMMO et les époux [N] (acquisition faite par actes notariés des 10 mars et 30 juin 2003), l'action des époux [S], engagée le 30 décembre 2011 et le 2 janvier 2012, ne pouvait être prescrite.

Il y a donc lieu de rejeter le moyen tiré de la prescription.

Sur la régularité de la clôture

Il ressort des dispositions du règlement de copropriété (ci-dessus rappelées) que le propriétaire de plusieurs lots desservis par une partie commune spéciale peut incorporer cette partie commune spéciale à ses lots. Cependant le règlement n'a parlé que de la possibilité de clore «'au droit de parties communes générales'» et non «'au droit de parties communes spéciales'», ce qui pose une difficulté lorsque, comme en l'espèce, la clôture concerne uniquement deux sections de parties communes spéciales distinctes. En effet, il existe un couloir constituant une partie commune spéciale au lots 13 et 14 , et un couloir constituant une partie commune spéciale aux lots 13, 14 et 15. Le syndicat des copropriétaires a relevé la contradiction de la clause ne prévoyant que la possibilité de clore au droit d'une partie commune générale, ce qui ne peut viser en effet que le couloir commun aux lots 13, 14 et 15, et non le couloir commun aux lots 13 et 14, seul concerné en l'espèce et qui ne se trouve pas «'au droit d'une partie commune générale'» mais au droit d'une partie commune spéciale.

Quoi qu'il en soit, il ressort des pièces produites et des explications des parties que si la SCI DENTIMMO est aujourd'hui propriétaire des lots 13 et 14, la clôture du couloir commun aux lots 13 et 14 n'a pas été faite à l'origine par un unique propriétaire de ces lots qui appartenaient en effet à des propriétaires différents, le lot n° 13 étant la propriété des époux [N], et le lot n°14 , la propriété de la SCI DENTIMMO.

Même si l'on peut considérer aujourd'hui que le droit de clore le couloir commun desservant les lots 13 et 14 est acquis à la SCI DENTIMMO qui en est devenue l'unique propriétaire, cette clôture ne saurait en toute logique dépasser la limite du lot n°14. Or en l'espèce, il faut constater que la limite du lot 14 tombant exactement au milieu de la fenêtre éclairant le couloir, et que la clôture litigieuse a été posée après ladite fenêtre, indiscutablement sur la partie commune spéciale aux lots 13, 14 et 15.

Même si le plan d'origine de la copropriété (plan du bureau de Géomètre [S] [L] de janvier 2003) indique un couloir commun hachuré en bleu englobant la fenêtre du couloir dans la partie commune spéciale aux lots 13 et 14, de fait, cette partie hachurée en bleu est contraire à la définition de la partie commune spéciale aux lots 13 et 14, puisqu'elle dépasse la limite du lot n°14 et se trouve déjà le long du lot n°15. Il en résulte que dès lors que les lots 13 et 14, puis 13, 14 et 15 n'appartenaient pas au même propriétaire, la possibilité de clore les lots 13 et 14, ainsi que l'ont fait les époux [N] et la SCI DENTIMMO, en y incorporant le couloir commun au delà de la limite de leurs lots et au delà de la fenêtre, ne pouvait être réalisée que conformément au droit de la copropriété, par une cession de partie commune spéciale autorisée par l'assemblée générale des copropriétaires, selon le droit commun en matière de cession de parties communes.

A supposer que les appelants aient pu se croire autorisés à incorporer à leurs lots le couloir commun «'hachuré en bleu sur le plan'» (eu égard à la définition ambiguë du règlement de copropriété), ils n'établissent pas que ces travaux ont été entrepris en tout état de cause «'sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble'» et qu'une démarche particulière a été effectuée auprès de la copropriété représentée par son syndic pour vérifier que ces travaux ne modifiaient pas «'l'harmonie de l'ensemble des parties communes'».

Pour ces motifs, il ne peut être considéré que les travaux litigieux de fermeture du couloir ont été régulièrement effectués. Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrégulière la clôture de couloir telle que réalisée par les appelants, mais de l'infirmer en ce qui concerne ses conséquences, en ordonnant à la SCI DENTIMMO de remettre le couloir commun dans son état d'origine, en ce compris l'obligation de supprimer la porte installée après la fenêtre, de remettre le sol et les murs dans leur état d'origine, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 4 mois, commençant à courir à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires formées par les époux [N] et la SCI DENTIMMO

L'action des époux [S] étant fondée, la demande de dommages intérêts pour résistance abusive formée par les appelants ne pourra qu'être rejetée, de même que leur demande au titre des frais irrépétibles fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté leurs demandes.

Sur les demandes des époux [S]

Pas plus en appel qu'en première instance les époux [S] n'établissent la réalité et l'étendue du préjudice de jouissance qu'ils invoquent depuis la fermeture du couloir commun par la SCI DENTIMMO, les premiers juges ayant relevé à juste titre que d'autres fenêtres existaient dans le couloir apportant ventilation et lumière.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté leur demande de dommages intérêts pour préjudice de jouissance.

En revanche, il serait inéquitable de laisser à la charge des époux [S] les frais irrépétibles exposés par eux tout au long de la procédure . La SCI DENTIMMO, désormais seule propriétaire des lots 13 et 14, sera condamnée à leur payer une somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel. Le jugement déféré sera donc infirmé et complété en ce sens.

En toute équité, il y a lieu de rejeter la demande des époux [S] formée contre le syndicat des copropriétaires au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les demandes du syndicat des copropriétaires

Il serait inéquitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] les frais irrépétibles exposés par lui tout au long de la procédure. La SCI DENTIMMO sera condamnée à lui verser une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel. Le jugement déféré sera donc infirmé et complété en ce sens.

Sur les dépens

Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par la SCI DENTIMMO qui succombe. Ces dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette la prescription de l'action soulevée par Monsieur [T] [N], Madame [V] [C] épouse [N] et la SCI DENTIMMO,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- déclaré irrégulière la fermeture du couloir commun du 2ème étage réalisée par Monsieur [T] [N], Madame [V] [C] épouse [N] et la SCI DENTIMMO en incorporant ce couloir commun aux lots n°13 et 14 de l'état descriptif de division,

- rejeté la demande de dommages et intérêts de Monsieur [O] [S] et de Madame [K] [W] épouse [S] pour préjudice de jouissance,

Mais l'infirmant partiellement,

Ordonne à la SCI DENTIMMO de remettre le couloir commun ainsi clôturé dans son état d'origine, et donc à supprimer la porte installée après la fenêtre dans ce couloir du 2ème étage, remettre en état les murs et le plancher du couloir après retrait de la porte, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 4 mois, commençant à courir à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne la SCI DENTIMMO à payer à Monsieur [O] [S] et Madame [K] [W] épouse [S] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,

Condamne la SCI DENTIMMO à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 3] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne la SCI DENTIMMO aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/18495
Date de la décision : 03/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°14/18495 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-03;14.18495 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award