Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRÊT DU 27 AVRIL 2017
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/18775
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Septembre 2015 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2011081732
APPELANTE
Syndicat des copropriétaires DU [Adresse 1]
ayant son siège social chez son Syndic, la Société NEXITY
[Adresse 2],
et dans les locaux de l'Agence [Localité 1],
dont le siège social est [Adresse 3]
pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Leonel DE MENOU, avocat au barreau de PARIS, toque : D0278
Assistée de Me Cynthia JOLLY, avocat au barreau de PARIS, toque : D0278
INTIMEE
SAS PARK ALIZES
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 2]
N° SIRET : 442.414.207
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par et assistée de Me Jean PICHAVANT de la SELEURL PICHAVANT AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0333
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de chambre
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère
Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président, et par Monsieur Vincent BRÉANT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société Park Alizés a signé le 28 décembre 2007 avec le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, la société Immobilière 3F, un contrat de prestation de service pour l'exploitation d'un parc de stationnement d'une capacité de 1400 places. Ce contrat était renouvelable par période d'un an et prévoyait la possibilité de résilier par lettre recommandée avec accusé de réception adressée 6 mois avant chaque terme annuel, et ce à l'initiative de l'une ou l'autre des parties.
Par acte sous seing privé du 9 juin 2008, le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] et les sociétés Park Alizés, d'une part, et Immobilière 3F, d'autre part et agissant à titre personnel, ont établi un avenant au contrat de prestations de service du 28 décembre 2007. En application de cet avenant, à compter du 1er janvier 2009, le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] a réglé entre les mains de la société Park Alizés 75% du montant de la redevance, le surplus étant directement réglé par la société Immobilière 3F elle-même agissant en qualité de copropriétaire majoritaire, sans passer par la comptabilité du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1].
La société Nexity Lamy a succédé à la société Immobilière 3F dans les fonctions de syndic de cette copropriété.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 juin 2011, la société Nexity Lamy a notifié à la société Park Alizés sa décision de mettre un terme à ce contrat avec effet au 1er août 2011, retenant l'application de l'article L. 136-1 alinéa 2 du code de la consommation.
Par lettre en date du 13 juillet 2011, la société Park Alizés a contesté le principe de la résiliation qu'elle a considérée comme nulle et de nul effet.
Par lettre recommandé avec avis de réception du 1er septembre 2011, la société Nexity a indiqué que la cessation du contrat serait finalement fixée au 30 septembre 2011.
C'est dans ces conditions que, par acte du 9 novembre 2011, la société Park Alizés a fait citer le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] aux fins de prononcer la nullité de la résiliation et de le voir condamné à payer à la société Park Alizés la somme de 149.043,76 euros au titre de la redevance contractuelle outre une indemnité de 20 000 euros pour préjudice subi.
Par jugement du 15 septembre 2015, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
condamné le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic à payer à la société Park Alizés 149 043,76 euros avec intérêt au taux légal à compter du 2 juillet 2012,
débouté la société Park Alizés de sa demande en dommages et intérêts,
condamné le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic à payer 6 000 euros à la société Park Alizés au titre de l'article 700 du code de procédure civile
débouté les parties de leurs demandes plus amples, autres, ou contraires aux présentes dispositions.
Vu l'appel interjeté le 21 septembre 2015 par le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] ;
Vu les dernières conclusions régularisées le 25 janvier 2017 par le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] dans lesquelles il demandé à la cour de :
Infirmer le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de PARIS en date du 15 septembre 2015 en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
Débouter la Société Park Alizés de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Y ajoutant,
Condamner la Société Park Alizés à payer au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] la somme de 6.500 euros, pour contribution aux frais irrépétibles, par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, le Syndicat des Copropriétaires indique qu'il n'est pas pertinent de déterminer si un syndicat des copropriétaires a la qualité de consommateur (ce qu'il n'est du reste pas) dès lors que l'article L. 136-1 du code de la consommation vise également les non-professionnels comme bénéficiaires de ses dispositions ; que l'argumentation selon laquelle un syndicat des copropriétaires doit être considéré comme un professionnel dès lors qu'il agit dans le cadre de son objet doit être rejetée puisque l'objet de ces syndicats est fixé par l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et que, cette loi étant d'ordre public, il est impossible d'y déroger ; que les contraintes imposées aux syndicats de propriétaires par la loi du 10 juillet 1965 sont exclusives de toute finalité professionnelle et que son objet est civil ; que l'exploitation des parkings n'est pas source de profit pour le Syndicat et que le règlement des prestations est financé par les copropriétaires par appels des charges de copropriété ; que, de jurisprudence, le syndicat des copropriétaires étant une personne morale, il est éligible au champ d'application de l'article L. 136-1 du Code de la consommation en tant que personne morale non professionnelle et que sa représentation par un syndic professionnel ne lui fait pas perdre sa qualité de non professionnel.
Vu les dernières conclusions régularisées le 25 janvier 2017 par la société Park Alizés dans lesquelles il est demandé à la cour de:
Dire et juger que le Syndicat des Copropriétaires n'est ni un consommateur ni un non-professionnel,
Dire et juger que le contrat de prestations de service et son avenant ont été conclus par des professionnels,
Dire et juger non applicables les dispositions de l'article L136-1 ancien du Code de la Consommation,
Dire et juger que la résiliation du contrat ne peut prendre effet qu'au 2 juillet 2012,
En conséquence,
Confirmer le jugement en ce qu'il a :
condamné le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic à payer à la Société Park Alizés les redevances contractuelles jusqu'au terme de la période de renouvellement du contrat, soit une somme de 149.043,76 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2012,
condamné le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice au paiement d'une somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,
Débouter le Syndicat des Copropriétaires de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Y ajoutant,
Dire et juger que les intérêts sur la somme de 149.043,76 euros porteront eux-mêmes intérêts suivant les dispositions de l'article 1154 du Code Civil,
Condamner le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice à payer à la Société Park Alizés une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Le condamner au paiement d'une somme de 6.000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel et pour ces derniers admettre la Selarl Pichavant Avocat, dans les termes de l'article 699 du CPC.
Au soutien de ses demandes, la société Park Alizés soutient que le Syndicat des Copropriétaires, personne morale, n'est ni un consommateur, ni un non-professionnel ; qu'il a une activité économique et a d'ailleurs été assimilé à un professionnel dès lors que, s'agissant de l'obligation pour un maitre d'ouvrage de désigner un coordonnateur SPS conformément au code du travail, la cour de cassation a jugé que le Syndicat des Copropriétaires ne pouvait prétendre à l'exonération dont bénéficient les particuliers dans le cadre de la réalisation de travaux de bâtiment pour leur usage personnel et devait avoir recours au coordinateur SPS ; que, conformément à l'instruction n° 3A-3-99 parue au Bulletin officiel des impôts, l'activité des syndicats de copropriétaires s'analyse en une prestation de services à titre onéreux de gestion de la copropriété rendue aux copropriétaires ; que si la cour de cassation a admis qu'un syndicat de copropriétaires puisse être recevable en tant que personne morale à solliciter le bénéfice de l'article L136-1 du code de la consommation, cela ne signifie pas que ce syndicat soit automatiquement déclaré fondé en ses prétentions ; que les dispositions d'ordre public de la loi du 10 juillet 1965 ne sauraient interdire de reconnaître au Syndicat des Copropriétaires la qualité de professionnel ; que le critère est en effet non de savoir s'il poursuit une activité lucrative mais de dire s'il a contracté dans le cadre de son activité statutaire, et que le contrat du 28 décembre 2007 signé entre les parties est en rapport direct avec son objet ; qu'en outre la relation contractuelle est devenue tripartite par l'intervention à titre personnel de la société commerciale Immobilière 3F, excluant ainsi l'application de l'article L.136-1 du code de la consommation.
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MOTIFS DE LA DÉCISION
Il n'est ni discutable ni discuté que n'entre pas en débat, dans le cas présent, la notion de consommateur.
Aux termes de la loi du 10 juillet 1965 le syndicat des copropriétaires n'acquiert pas la qualité de professionnel dès lors qu'il exerce les attributions que lui attribue ce texte, et qui concernent la conservation de l'immeuble et des parties communes. C'est en conséquence à tort que le premier juge a, après avoir constaté que tel était le cas des prestations confiées à Park Alizés par le contrat du 28 décembre 2007 afférent à l'exploitation du parc de stationnement, déduit de l'énoncé de ces prestations (surveillance du site, accueil des usagers, nettoyage..) que, dès lors qu'elles étaient en rapport avec l'activité du Syndicat des Copropriétaire et sa «compétence professionnelle», ce dernier ne pouvait être considéré comme non professionnel, le tribunal affirmant ainsi une présomption contraire à la loi et à la mission même du syndicat, alors même qu'il ne relevait aucune activité lucrative dans la gestion de ce parc destiné aux résidents.
Pour autant le contrat du 28 décembre 2007 fait, en son article 10, référence à la compétence exclusive du Tribunal de commerce, indication qui ne lie pas la cour, mais se trouve justifiée par les termes de l'avenant du 9 juin 2008 qui introduisent comme partie prenante la société Immobilière 3F, non plus seulement en tant que syndic du Syndicat des Copropriétaire mais en tant que «Copropriétaire Majoritaire».
Cette clarification permettant, selon les termes de cet acte, un paiement direct «pour des raisons propres à son organisation interne», change en réalité la nature des relations entre les parties, dès lors qu'elles impliquent un changement de l'appréciation du rôle du syndic, en ce que sa qualité de professionnel, sans effet dans le cas où elle se limite à la représentation du syndicat des copropriétaires, prend une portée autre du fait de son intervention personnelle au contrat, et ce en tant que «Copropriétaire Majoritaire».
Le Syndicat des Copropriétaires a lui-même, de ce fait, signé par cet avenant son acceptation à la nature professionnelle de l'acte initialement dépourvu de cette qualification.
Le jugement est en conséquence confirmé par substitution de motifs.
Les intérêts sur la somme de 149.043,76 euros seront capitalisés suivant les dispositions de l'article 1154 du Code Civil.
Ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure ne permettent de caractériser à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit de se défendre en justice; il n'est pas fait droit à la demande de dommages intérêts formée à ce titre.
Aucune considération tirée de l'équité ne conduit à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME, par substitution de motifs, le jugement en toutes ses dispositions hormis en ce qu'il a condamné le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic à payer 6 000 euros à la société Park Alizés au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
DIT que les intérêts sur la somme de 149.043,76 euros porteront eux-mêmes intérêts suivant les dispositions de l'article 1154 du Code Civil,
REJETTE toutes autres demandes,
CONDAMNE le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Pichavant Avocat, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
Le GreffierLe Président
Vincent BRÉANTLouis DABOSVILLE