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26/04/2017 | FRANCE | N°15/08382

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 26 avril 2017, 15/08382


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 26 Avril 2017

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/08382



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 14/03340







APPELANT

Monsieur [G] [S]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]
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INTIMEE

SFR

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Arnaud CONSTANS, avocat au barreau de PARIS, toque : K01...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 26 Avril 2017

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/08382

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 14/03340

APPELANT

Monsieur [G] [S]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

représenté par Me Frédéric MICHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C 773

INTIMEE

SFR

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Arnaud CONSTANS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0112 substitué par Me Thibaud D'ALÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0112

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente

Madame Séverine TECHER, Vice-présidente placée

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Eva TACNET, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- rédigé par Mme Séverine TECHER et signé par Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente et par Madame Eva TACNET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 28 octobre 2004, la société [S], EURL représentée par son gérant, M. [G] [S], a signé, avec la société française du radiotéléphone, ci-après désignée SFR, un contrat partenaire. Par acte sous seing privé du 5 septembre 2009, les deux parties ont signé un contrat de distribution de produits et services de communications électroniques 'espace SFR'. Ce contrat devait expirer le 31 décembre 2014 et pouvait se renouveler tacitement par période de deux ans sauf dénonciation par l'une des parties selon des formes précises.

Le 22 juillet 2014, une publication dans le BODACC mentionnait une cession de fonds de commerce entre la société [S] et la société Pertuis Telecom.

Par acte sous seing privé du 13 février 2006, la société Aubagne Telecom, EURL représentée par son gérant, M. [S], a signé, avec la société SFR, un contrat partenaire espace SFR ('G2"). Ce contrat devait expirer le 31 décembre 2009 et pouvait se renouveler tacitement par période de deux ans sauf dénonciation par l'une des parties selon des formes précises.

Il a été reconduit pour une période de deux ans et a pris fin le 31 décembre 2013.

Estimant ne pas avoir été rempli de l'intégralité de ses droits, M. [S] a saisi, le 6 mars 2014, le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement rendu le 30 juin 2015, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, l'a débouté de toutes ses demandes et condamné aux dépens. La demande reconventionnelle a été également rejetée.

Le 14 août 2015, M. [S] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions déposées le 28 février 2017, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, M. [S] conteste les fins de non recevoir qui lui sont opposées. Il conclut, au fond, à l'infirmation du jugement rendu et demande :

- la fixation de sa rémunération à la somme brute mensuelle de 2 800 euros,

- la condamnation de la société SFR à lui payer les sommes suivantes :

* 92 400 euros à titre de rappel de salaires pour la période comprise entre mars 2011 et décembre 2013 et 9 240 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

* 100 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 8 400 euros à titre de congés payés pour 2010, 2011 et 2012,

* 8 400 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 840 euros au titre des congés payés y afférents,

* 7 560 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 10 000 euros pour non cotisation aux caisses de retraite complémentaire,

* 10 000 euros pour non remise d'une attestation Pôle emploi,

- la condamnation de la société SFR à lui payer les primes de participation et d'intéressement pour la période comprise entre 2004 et 2013,

- la remise de bulletins de paie pour la période comprise entre mars 2011 et décembre 2013, ainsi qu'une attestation Pôle emploi et un certificat de travail conformes à l'arrêt à intervenir,

- et la condamnation de la société SFR à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions déposées le 28 février 2017, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société SFR conclut à l'irrecevabilité de l'action pour défaut d'intérêt et de qualité à agir. Au fond, elle demande la confirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions et le rejet, en conséquence, de toutes les demandes présentées par M. [S]. Elle sollicite, reconventionnellement, la condamnation de ce dernier à lui payer une indemnité de procédure d'un montant de 10 000 euros, ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS

Sur les fins de non recevoir

L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité et le défaut d'intérêt.

L'article 31 du même code précise que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, et l'article 32 énonce qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

La société SFR fait valoir que les demandes présentées par M. [S] en application de l'article L. 7321-2 2° b) du code du travail sont irrecevables.

Elle invoque, en premier lieu, un défaut de qualité à agir en soulignant que ses co-contractantes étaient les sociétés [S] et Aubagne Telecom, non M. [S], et qu'il n'est nullement démontré que ces sociétés étaient fictives.

M. [S] réplique que les deux sociétés co-contractantes ne peuvent faire écran à son action et qu'aucune règle n'exige la démonstration du caractère fictif de la personne morale co-contractante pour permettre à son dirigeant de revendiquer le statut de gérant de succursale.

Il est constant que la revendication du statut prévu par l'article L. 7321-2 du code du travail par un gérant n'est pas soumise à la constatation que la société qu'il représente est fictive.

Les contrats conclus comportent une clause de cession qui stipule une conclusion 'intuitu personae personne morale et en la personne de son dirigeant', ainsi qu'une faculté de résiliation au profit de la société SFR, notamment en cas de modification de l'actionnariat ou de la répartition du capital social.

M. [S] était le gérant et l'associé unique des sociétés [S] et Aubagne Telecom lorsqu'elles ont conclu les contrats de partenariat avec la société SFR.

Compte tenu de ces éléments, la cour considère que M. [S] a qualité à agir contre la société SFR en revendication du statut de gérant succursaliste.

La société SFR soutient, en second lieu, que M. [S] ne justifie d'aucun intérêt à agir, ni d'aucun intérêt légitime à agir, en faisant valoir que, ayant perçu des salaires et dividendes en sa double qualité de gérant et associé unique des sociétés [S] et Aubagne Telecom, il ne démontre pas qu'il aurait subi un préjudice et se prévaut de droits qui ont déjà été satisfaits.

M. [S] répond qu'il a bien un intérêt, légitime, à agir, dès lors que ses revendications n'ont pas vocation à substituer une relation contractuelle à une autre et que la reconnaissance du statut de gérant succursaliste lui apporte des droits qui vont au-delà de la double rémunération visée par l'intimée.

Le statut de gérant succursaliste permet à celui qui y prétend de bénéficier de droits, notamment au titre de la rupture du contrat et des droits à retraite, qui vont au-delà d'un simple rappel de salaires.

En outre, la reconnaissance d'un tel statut n'entraîne pas, de facto, la disparition des sociétés qui ont permis à l'intéressé de bénéficier de salaires, en sa qualité de gérant, et de dividendes, en sa qualité d'associé unique.

Dès lors, la cour considère que M. [S] a un intérêt, légitime, à agir contre la société SFR en revendication du statut de gérant succursaliste.

Au regard de l'ensemble de ces considérations, les fins de non recevoir sont rejetées. Le jugement déféré est infirmé en son appréciation à cet égard.

Sur la nature de la relation contractuelle entre les parties

Selon l'article L. 7321-2 2° b) du code du travail, est gérant de succursale toute personne dont la profession consiste essentiellement à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.

M. [S] soutient que les conditions cumulatives posées par cette disposition sont réunies, ce que conteste la société SFR.

Sur l'exercice personnel et principal de l'activité de recueil de commandes pour le compte d'une seule entreprise

Les contrats conclus stipulent que le partenaire s'engage à enregistrer, chaque mois, sur le code serveur attribué par SFR, dans le point de vente visé, en radiotéléphonie cellulaire en France, au moins 80 % d'abonnements SFR sur tous les abonnements enregistrés, les 20 % restants pouvant être commercialisés pour des concurrents directs ou indirects. Ils précisent que le non respect de ces engagements est une cause de résiliation.

Les contrats prévoient, en outre, la possibilité, pour le partenaire, de vendre les matériels, dont téléphones mobiles, nécessaires à l'utilisation des abonnements enregistrés, ceux-ci pouvant provenir d'autres sociétés que la société SFR. Ils précisent, en effet, que l'intégralité de l'activité doit être consacrée, dans le point de vente, aux télécommunications et produits de communications, mais ne stipulent, sur ce point, aucune exclusivité pour SFR.

La société SFR n'a jamais sollicité la résiliation des contrats pour cause de manquement de ses co-contractantes à leurs engagements de part de marché SFR.

La cour en déduit que celles-ci ont satisfait aux dits engagements.

Au demeurant, à cet égard, M. [S] verse au débat deux attestations établies chacune par un expert-comptable desquelles il ressort :

- pour la société [S], que la part d'activité résultant des contrats conclus avec la société SFR n'était pas connue en 2011, mais que, pour 2012 et 2013, cette part représentait 97,99 % du chiffre d'affaires en 2012 et 100 % en 2013,

- et, pour la société Aubagne Telecom, que cette part représentait 82,90 % du chiffre d'affaires en 2011, 86,30 % en 2012 et 86,72 % en 2013.

L'expert-comptable ayant établi l'attestation pour la seconde société a précisé qu'aucun élément ne lui avait permis de distinguer les subventions versées pour la vente de mobiles, activité expressément autorisée par les contrats à condition que les appareils soient achetés en dehors des packs SFR, des autres rémunérations.

Il fait mention d''autofactures' communiquées par la société SFR qui mentionnaient de façon globale une ligne intitulée 'total rémunération SFR HT'.

Le chiffre d'affaires calculé au titre des contrats conclus avec la société SFR a ainsi été déterminé par référence à des données émanant de ses propres services.

Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à critiquer les chiffres en résultant, étant observé qu'elle ne demande aucune mesure d'instruction pour voir confirmer l'analyse dressée par le cabinet d'audit qu'elle a unilatéralement sollicité.

Il en résulte que l'essentiel de l'activité des sociétés [S] et Aubagne Telecom était consacré, au moins entre 2012 et 2013 pour la première, entre 2011 et 2013 pour la seconde, au recueil de commandes pour le compte de la seule société SFR.

Bien que M. [S] ne communique aucun contrat d'abonnement portant sa signature pour attester de sa participation personnelle à l'activité susvisée, les contrats conclus visent expressément, comme cela a déjà été constaté, le caractère intuitu personae de ce dernier en sa qualité de gérant dans les relations établies et l'agrément de la société SFR pour toute opération de cession ou de nature à influer sur le capital social, étant rappelé que M. [S] était associé unique des deux sociétés co-contractantes, ce dont il se déduit que c'est la personne de M. [S] qui était prépondérante dans l'exécution de l'activité confiée.

Le bénéfice des dispositions de l'article L. 7321-2 du code du travail n'est, par ailleurs, pas subordonné à la condition que l'activité soit exercée par le seul intéressé à l'exclusion de l'emploi de salariés, de sorte que la présence de vendeurs aux côtés de M. [S], à tout le moins dans la société [S], dont le chiffre d'affaires était trois fois supérieur, entre 2011 et 2013, à celui de la société Aubagne Telecom, ainsi que la distance géographique séparant les deux points de vente, nullement incompatible avec un exercice personnel de l'activité, sont sans incidence.

Enfin, la société SFR, qui, par référence aux qualifications énumérées par M. [S] dans un courriel, a extrait d'Internet les capacités requises pour obtenir les diplômes de pilotage commercial et de vol aux instruments, n'établit pas à quelles dates M. [S] a suivi les formations y afférentes ni en quoi elles l'auraient empêché d'exercer l'activité susvisée.

La cour retient donc, au vu de l'ensemble de ces éléments d'appréciation, que M. [S] exerçait personnellement et à titre principal l'activité de recueil de commandes pour le compte exclusif de la société SFR à tout le moins à compter de l'exercice 2011.

Sur la fourniture ou l'agrément du local

L'article L. 7321-2 2° b) du code du travail vise un local fourni ou agréé au singulier comme le souligne la société SFR.

Il n'interdit pas, pour autant, la possibilité de plusieurs points de vente, les contrats conclus évoquant eux-mêmes cette possibilité, notamment au titre des critères d'éligibilité lors de l'exécution du contrat ou en annexe.

Le moyen soulevé par l'intimée au titre de l'unicité du local doit donc être purement et simplement écarté.

La cour constate, par ailleurs, que les contrats conclus stipulent, d'une part, des conditions de conformité du point de vente, d'autre part, une faculté de résiliation au profit de la société SFR en cas de modification substantielle de ce point de vente.

Or, à aucun moment la société SFR n'a reproché à ses co-contractantes un manquement à leurs obligations contractuelles sur ce point ni sollicité le bénéfice de la clause de résiliation de ce chef.

La condition relative à l'agrément des points de vente exploités est donc également considérée comme remplie.

Sur les conditions d'exercice de l'activité

Les contrats conclus comportent nombre de clauses contraignant le partenaire, notamment, sur la nature de l'activité à développer, sur l'aménagement et la localisation stratégique du point de vente, sur l'affectation de certains vendeurs, sur les jours et mois d'ouverture du point de vente, sur le contrôle de la comptabilité, sur les tarifs de certains services ou encore sur la politique commerciale.

Ils stipulent qu'un manquement à celles-ci sont susceptibles d'entraîner la résiliation du contrat.

La société SFR ne démontre pas que ses co-contractantes ont failli à leurs obligations puisqu'elle n'a jamais émis aucune doléance à cet égard ni sollicité la résiliation des contrats pour un quelconque manquement de ces dernières aux stipulations susvisées.

Au vu de ces constatations, il est considéré que les conditions d'exécution de l'activité de recueil de commandes pour le compte exclusif de la société SFR étaient imposées par cette dernière.

Les critères posés par l'article L. 7321-2 2° b) du code du travail étant réunis, M. [S] est fondé à solliciter le statut de gérant succursaliste, ce, uniquement à compter de 2011, en l'absence d'éléments sur l'exercice d'une activité dans la période antérieure. Le jugement des premiers juges est donc infirmé.

Sur les conséquences financières de la reconnaissance du statut de gérant succursaliste

M. [S] réclame des rappels et indemnisations en conséquence de la reconnaissance du statut de gérant succursaliste à son profit, contestés par la société SFR.

Sur les rappels

Compte tenu de la superposition des contrats de société d'un côté et de gérant succursaliste de l'autre, la société SFR ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la double rémunération.

Il s'en déduit que M. [S] peut parfaitement prétendre à un rappel de salaires au titre de sa qualité de gérant succursaliste.

Au regard de la nature de l'activité développée au cas d'espèce, il y a lieu d'appliquer la convention collective nationale des télécommunications du 26 avril 2000, ce que revendique M. [S] et ne conteste pas la société SFR.

Il a été vu précédemment que M. [S] bénéficie du statut de gérant succursaliste dans la mesure où sa profession consistait essentiellement à recueillir les commandes pour le compte de la seule société SFR.

Dans ces conditions, il est fondé à revendiquer la classification C, correspondant, notamment, à la fonction de conseiller en boutique, laquelle consiste à accueillir, conseiller le client et vendre des produits et services, éventuellement à assurer le traitement administratif du compte client, gérer les encaissements, traiter des demandes de réclamations ou renseignements.

M. [S] n'explicite ni ne fait aucune démonstration de l'exercice de fonctions supérieures.

Il n'établit pas davantage un droit à revendiquer le niveau le plus haut dans cette classification.

La cour retient donc le seul niveau 1.

Au vu des salaires minimaux fixés dans la convention collective, il est retenu les salaires mensuels bruts suivants :

- en 2011, 1 612,33 euros (19 348 euros par an),

- en 2012, 1 652,66 euros (19 832 euros par an),

- en 2013, 1 679,08 euros (20 149 euros par an).

Il est donc alloué à M. [S], à titre de rappel de salaires entre mars 2011 et décembre 2013, et au titre des congés payés y afférents, les sommes, respectivement, de 56 104,30 euros et 5 610,43 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014, date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.

Par ailleurs, en l'absence de cotisation, par la société SFR, aux caisses de retraite complémentaire, M. [S] perd une chance de percevoir une retraite plus élevée.

Aucune explication ni aucune pièce n'ayant été produite sur le calcul de son préjudice, il lui est alloué la seule somme de 1 000 euros en réparation.

Le rappel de salaires susvisé ayant été assorti des congés payés afférents, la demande supplémentaire en paiement de congés payés, au demeurant non explicitée, n'apparaît pas justifiée.

Elle est donc rejetée.

Enfin, la demande en condamnation à paiement de primes de participation et d'intéressement pour la période comprise entre 2004 et 2013 n'ayant pas été chiffrée et M. [S] n'ayant versé au débat aucun élément permettant à la cour d'en vérifier le bien fondé, elle est également rejetée.

Sur la rupture de la relation de travail

Il est constant que les règles gouvernant la rupture du contrat de travail sont applicables à la rupture de la relation de travail entre un gérant succursaliste et l'entreprise pour le compte de laquelle il recueille des commandes.

Les clauses des contrats de partenariat, notamment en ce qui concerne la résiliation, ne sont pas opposables au gérant succursaliste dans sa relation avec la société SFR qui, en l'absence de contrat écrit, s'analyse en un contrat de travail à durée indéterminée.

Il convient, dès lors, de déterminer à qui est imputable la rupture de la relation de travail entre M. [S] et la société SFR.

En 2011, la société SFR a subordonné le dernier renouvellement du contrat conclu avec la société Aubagne Telecom au développement d'un nouveau concept.

La société Aubagne Telecom n'ayant pas développé ledit concept, le contrat a pris fin en décembre 2013.

En ce qui concerne la société [S], la cession de son fonds de commerce a été publiée dans le BODACC le 22 juillet 2014.

La poursuite des relations de partenariat ayant été soumise, en 2011, à tout le moins s'agissant de la société Aubagne Telecom, au développement d'un concept imposé par la société SFR, la cour considère que cette dernière est seule à l'origine de la rupture des dites relations et, par voie de conséquence, de la rupture de la relation de travail avec M. [S].

Cette rupture, intervenue sans respect des règles relatives au licenciement, s'analyse donc en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit à indemnisation.

Compte tenu des salaires fixés précédemment, M. [S] a droit aux sommes suivantes :

- à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10 074,48 euros, en vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, au regard, notamment, de l'effectif de la société SFR, au moins onze salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération due à M. [S], de son âge, 43 ans, de son ancienneté, au moins deux ans, de sa capacité à trouver un nouvel emploi, eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, et des conséquences de la rupture à son égard, aucune pièce n'ayant été communiquée sur sa situation postérieurement à cet événement, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

- à titre d'indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés y afférents, 3 358,16 euros et 335,82 euros, conformément à l'article 4.4.1.1 de la convention collective applicable, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014,

- à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 604,47 euros, en application de l'article 4.4.1.2 de la convention collective applicable, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014.

En revanche, M. [S] n'ayant justifié d'aucun préjudice résultant pour lui de la non remise d'une attestation Pôle emploi, il n'y a pas lieu à dommages et intérêts de ce chef.

Sur les autres demandes

Compte tenu des développements qui précèdent, la cour ordonne à la société SFR de remettre à M. [S] des bulletins de paie ou un bulletin de paie récapitulatif pour la période comprise entre mars 2011 et décembre 2013, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt.

La société SFR succombant à l'instance, il est justifié de la condamner aux dépens et à payer à M. [S] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles dont il serait inéquitable de lui laisser la charge.

Elle est déboutée de sa demande reconventionnelle de ce dernier chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

REJETTE les fins de non recevoir ;

CONDAMNE la société SFR à payer à M. [S] les sommes suivantes :

- à titre de rappel de salaires entre mars 2011 et décembre 2013, et au titre des congés payés y afférents, respectivement, 56 104,30 euros bruts et 5 610,43 euros bruts, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014,

- à titre de dommages et intérêts pour non cotisation aux caisses de retraite complémentaire, 1 000 euros nets,

- à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10 074,48 euros nets, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

- à titre d'indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés y afférents, 3 358,16 euros bruts et 335,82 euros bruts, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014,

- à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 604,47 euros bruts, avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014,

ORDONNE à la société SFR de remettre à M. [S] des bulletins de paie ou un bulletin de paie récapitulatif pour la période comprise entre mars 2011 et décembre 2013, ainsi qu'une attestation Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Ajoutant,

CONDAMNE la société SFR à payer à M. [S] la somme de 1 000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties du surplus des demandes,

CONDAMNE la société SFR aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/08382
Date de la décision : 26/04/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/08382 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-26;15.08382 ?
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