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21/04/2017 | FRANCE | N°15/12088

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 21 avril 2017, 15/12088


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 21 Avril 2017

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/12088



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° 14/00099





APPELANT

Monsieur [O] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]



représenté par Me Stéphanie CHABAUTY, avocat au barreau d

e SEINE-SAINT-DENIS, toque : 178





INTIMEE

SAS BALAS

[Adresse 2]

[Localité 2]



représentée par Me Pierre BREGOU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0093





COMPOSITION DE LA C...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 21 Avril 2017

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/12088

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° 14/00099

APPELANT

Monsieur [O] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Stéphanie CHABAUTY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 178

INTIMEE

SAS BALAS

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Pierre BREGOU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0093

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Valérie AMAND, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, président

Madame Valérie AMAND, conseiller

M. Christophe BACONNIER, conseiller

Greffier : Mme Aurélie VARGAS, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Madame Aurélie VARGAS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

La Cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur [O] [C] du jugement du Conseil des Prud'hommes de BOBIGNY, section Industrie, rendu le 28 octobre 2015 qui l'a débouté de ses demandes.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

La SAS BALAS a pour activité la couverture, la plomberie, le chauffage, tous corps d'état du bâtiment ; elle regroupe plusieurs sociétés liées au secteur du bâtiment ( FOURNIER GUIGNARD, FRAMACO, MERESSE etc) ;

Monsieur [O] [C] né au mois de février 1972,titulaire d'un DUT est reconnu travailleur handicapé pour la période du 1erAoût 2011 au 31 juillet 2016 en raison d'un déficit auditif ; il ne bénéficie toutefois ni de carte de priorité ni de carte d'invalidité ; il a été engagé le 4 Juin 2012 avec effet au 11 Juin suivant en contrat à durée indéterminée par la SAS BALAS en qualité de conducteur de travaux Niveau G, statut ETAM moyennant un salaire mensuel brut de 3200€ sur douze mois ;

Le contrat était soumis à une période d'essai de trois mois, elle a été renouvelée une fois ;

L'entreprise est soumise à la convention collective des employés, techniciens et agents de mâitrise (ETAM) du bâtiment, elle emploie plus de 600 salariés ;

Au mois d'avril 2013, Monsieur [O] [C] a eu son premier entretien annuel d'évaluation avec son supérieur hiérarchique direct, « chef de groupe » Monsieur [M] [T] ; le 20 avril 2013, il a adressé un courrier à son employeur en indiquant que son entretien s'était déroulé dans des conditions qu'il qualifie « d'inacceptables » ( trop bref: à peine une demi heure, inachevé car constamment dérangé) ; il fait état de ce que son interlocuteur lui a « annoncé brutalement [qu'il était] un boulet, un menteur et qu'il ne comprend personne » ; suite à ce courrier, il a été reçu par le directeur Monsieur [U] et la DRH, Madame [I] ;

Le 1er Juin 2013 Monsieur [O] [C] a adressé un courrier à la SAS BALAS et à la DRH en indiquant être favorable à quitter le groupe Electricité et le département Services et Collectivités tout en souhaitant rester dans l'entreprise BALAS ; il évoque « avoir subi ( de la part de son chef de groupe [M] [T]) au fil des mois et de manière progressive une pression psychologique dans le but de me régresser techniquement et de me déstabiliser afin que je perde confiance » et indique subir de lourds préjudices qu'il énumère : moral, psychologique, harcèlement, ségrégation en raison de son handicap, abus de faiblesse sur une personne handicapée; il invoque même un préjudice lié au licenciement déguisé alors qu' aucune mesure de cette sorte n'avait alors été prise ou envisagée ;

Le 18 Juin 2013, l'employeur a adressé un courrier au salarié retraçant le déroulement des faits et leur rencontre depuis le courrier adressé par Monsieur [O] [C] le 20 avril précédent ; il indique notamment : « le 13 Mai nous vous avons exposé les nombreux points d'amélioration quant à votre travail (...) Nous avons évoqué les mobilités envisageables dans le groupe, conscients que votre manque de compréhension ou de maîtrise des dossiers avait engendré une situation difficile pour vous au sein du département Collectivités et Organismes Publics (...) Vous semblez avoir perçu notre bienveillance comme un acte de discrimination à votre égard (...) vous alléguez un harcèlement moral » ; l'employeur termine son courrier en indiquant saisir le CHSCT aux fins d'enquête ;

L'employeur a convoqué un CHSCT pour le 24 juin 2013 afin de diligenter une enquête ;

Monsieur [O] [C] a été en arrêt de travail du 1er Juin 2013 au 30 Juin 2013 puis du 1er juillet 2013 au 31 juillet 2013 et du 1er Août au 7 septembre 2013 ;

Monsieur [O] [C] est ensuite en congés payés du 9 septembre 2013 au 20 septembre suivant et il reprend son travail le 23 septembre 2013 ; il se plaint alors auprès de l'employeur d'avoir été affecté dans un bureau bruyant voisin de la machine à café, de ne pas avoir de téléphone fixe et d'avoir été dessaisi d'un dossier sur lequel il travaillait avant son arrêt de travail ;

Le 30 octobre 2013 Monsieur [O] [C] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 13 novembre 2013 en vue d' un licenciement ; au cours de cet entretien le salarié a proposé une rupture conventionnelle ce que l'employeur a accepté « sous réserve que le salarié confirme sa proposition au plus tard le 15 novembre 2013 », ce qui n'a pas été fait;

A compter du 20 novembre 2013, Monsieur [O] [C] est en arrêt maladie ;

Monsieur [O] [C] a été licencié le 4 décembre 2013 pour insuffisance professionnelle avec dispense d'effectuer son préavis d'un mois ;

La lettre de licenciement fait état des faits suivants :

- Vous ne remplissez pas les missions majeures de votre poste

- vous n'assurez pas la gestion de vos chantiers et la planification des ressources, votre insuffisance sur ce point entraîne des retards graves dans la livraison de vos chantiers engendrant une perte de confiance du client, des pertes de marché ( votre manque de professionnalisme a contribué à la perte du marché Paris Habitat), des pénalités financières et nuit à l'image de l'entreprise

- vous ne réalisez pas les devis demandés par le client entraînant des pénalités et la perte de confiance du client (lettre du 2 novembre 2012 de Paris Habitat) et vous n'avez pas jugé opportun d'alerter votre hiérarchie de l'urgence de la demande du client et de votre retard ce qui a mis notre client dans une situation délicate vis à vis de ses locataires

- vous annulez des interventions prévues sur le chantier Flandre le 3 janvier 2013 sans prévenir le client alors que ce dernier avait prévenu ses équipes et les locataires de l'intervention de la SAS BALAS et de la coupure électrique, ce qui entraîne le mécontentement des locataires et la perte de confiance du client

- vous ne communiquez pas au client des points d'avancement des travaux alors même que le chantier Curial a pris du retard et les engagements du client pris quant à la location du parking est remise en cause du fait de notre retard

- vous ne respectez pas vos engagements clients : vous annoncez au client le 7 janvier 2013 concernant le chantier [D], que vous lui adressez nos quitus l'après-midi même, alors que le client vous l'avait déjà demandé au mois de décembre 2012, le client vous a relancé par mail le 18 janvier exigeant le quitus pour le 23 janvier; sa demande est restée sans réponse de votre part ; ce même client nous a indiqué ne pas comprendre votre attitude, il est de même relancé pour des factures impayées alors que vous ne lui avez pas transmis les devis correspondants

- vous ne traitez pas les réserves à lever (chantier [Q] [D], courriel du 18 janvier 2013)

- vous ne traitez pas les demandes clients (équipements en attente et différence entre le nombre d'équipements commandés et le nombre d'équipements installés sur le chantier [D])

- vous validez la réalisation de travaux non conformes (sur le chantier Curial, les gardiennes ne peuvent pas changer les néons car des vis de fixation ont été posées sur les luminaires neufs ce qui a pour conséquence la dégradations des 120 luminaires que nous avons dû changer d'où un coût de 10.080€ ht supplémentaire

- vous êtes négligent quant à la sécurité des lieux sur lesquels nous intervenons ( négligence sur le chantier Curial : parking non fermé et rappel du client ...etc)

- vous ne respectez pas les règles de gestion des sous-traitants notamment avec notre sous-traitant PERSPECTIVES

-vous ne validez pas le paiement des factures fournisseurs en temps et en heure, notre compte se trouvant bloqué pendant plusieurs mois ( fournisseur VDS)

- vous n'effectuez pas la facturation dans des délais raisonnables ( chantier [D], le client vous rappelant la nécessité de facturer)

- votre comportement négligent et vos erreurs d'interprétation avec vos collègues comme avec les clients ou les fournisseurs ont fait l'objet de nombreuses recommandations, orales ou écrites et de points réguliers avec votre hiérarchie

- refus de rendre compte à la hiérarchie ([Y] [U]) ou de transmettre les informations à ses collègues, toute demande étant interprétée comme une atteinte ou une agression

- la situation et l'incompétence du salarié persistent et deviennent ingérables pour la bonne marche de l'entreprise ;

La lettre de licenciement rappelle encore que Monsieur [O] [C] a demandé de ne plus dépendre de son supérieur hiérarchique direct, Monsieur [M] [T] qu'il accuse de harcèlement et de discrimination, que son poste a donc été temporairement aménagé le temps de réaliser une enquête CHSCT et qu'il lui a été demandé de rapporter à Monsieur [Y] [U], le directeur de département et que force est de constater que malgré les alertes il persévère dans une attitude de négligence avec manque de rigueur et de fiabilité ce qui est inacceptable compte tenu de son expérience après 15 mois de présence.

Monsieur [O] [C] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 9 janvier 2014 ;

Monsieur [O] [C] demande l'infirmation du jugement, de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SAS BALAS à lui payer les sommes de :

*32.000€ à titre de dommages intérêts pour rupture abusive

*5.000€ en réparation du préjudice subi suite aux faits de harcèlement

*2.000€ en application de l' article 700 du Code de procédure civile

La SAS BALAS demande de dire que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de M. [O] [C] est proportionné et régulier, que l'insuffisance professionnelle est établie et en conséquence de confirmer le jugement tout en condamnant l'appelant à lui payer la somme de 3000€ en application de l' article 700 du Code de procédure civile ; subsidiairement, elle soutient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice au sens de l'article L 1235-5 du code du travail et conclut au rejet des prétentions de l'appelant.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre .

Sur le licenciement

Monsieur [O] [C] rappelle qu'il était conducteur de travaux ; il communique lui-même les tâches incombant à un conducteur de travaux selon les référentiels métiers ; ainsi, le conducteur de travaux est responsable de l'exécution des travaux d'un ou de plusieurs chantiers; il est le pivot de l'organisation et de l'exploitation dirigée par les chefs de chantier. Il exerce son métier directement sur les chantiers, dirige et organise le chantier, compose les équipes dirigées par le chef de chantier, surveille l'avancement des travaux, achète et répartit les matériaux, rédige les rapports, dialogue avec les ingénieurs et les riverains du chantier. Il est responsable vis à vis de son client du respect des délais et de la qualité de l'ouvrage, il est également responsable du respect des règles d'hygiène et de sécurité sur le chantier ;

Il a été licencié pour insuffisance professionnelle ;

Sans que Monsieur [O] [C] puisse valablement arguer de ce que les chantiers connaissaient des difficultés et des retards antérieurement à son arrivée comme anéantissant les griefs spécifiques qui lui sont faits, il ressort de l'ensemble des pièces versées aux débats par la SAS BALAS, notamment des mails de réclamation du client confié à Monsieur [O] [C] tel PARIS HABITAT (client important de la SAS BALAS aux multiples chantiers dont un certain nombre étaient confiés à la responsabilité de Monsieur [O] [C]) et des échanges directs par courriel de ce client avec Monsieur [O] [C] avec copie à l'employeur ou à [M] [T], supérieur hiérarchique de l'appelant, que des mécontentements précis, exclusivement imputables aux tâches dont Monsieur [O] [C] avait personnellement la direction et la responsabilité ont justement et à bon droit été exprimés ( absence de sécurisation du parking, portes d'accès des chantiers laissées ouvertes, communication de mauvaises adresses de chantiers à PERSPECTIVES, sous-traitant (lettre de mécontentement du sous-traitant en date du 23 janvier 2013 à Monsieur [O] [C] ), communication au client des coordonnées d'un sous-traitant qui en réalité n'est pas intervenu sur son chantier (lettre de mécontentement à Monsieur [O] [C] en date du 14 Juin 2013) multiples retards à fournir au client des « quitus » promis pour lui permettre la réception, installation de matériel non conforme ( réclamation de Paris Habitat du 4 septembre 2013) ayant entraîné un préjudice pour la SAS BALAS, annulation d'intervention prévue sur un chantier sans prévenir le client qui avait pris des disposition auprès de ses propres équipes et de ses locataires ;

Il s'ensuit que la SAS BALAS rapporte la preuve des faits qu'elle invoque et des insuffisances de Monsieur [O] [C] dans la conduite des chantiers qui lui étaient confiés de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu ainsi que la cour l'a vérifié au regard des pièces qui lui sont soumises, que les faits reprochés à Monsieur [O] [C] sont établis, la seule circonstance que Monsieur [O] [C] conteste ne pas avoir eu à réaliser les devis ou à s'occuper de la facturation, ne privant pas de leur réalité l'ensemble des autres griefs qui sont établis et caractérisent une insuffisance professionnelle au regard des tâches normales d'un conducteur de travaux et des attentes légitimes d'un employeur ;

L'insuffisance professionnelle dès lors qu'elle est établie constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement quels que soient l'ancienneté et les mérites antérieurs du salarié dans d'autres entreprises et ses diplômes ;

Il convient en conséquence de confirmer le jugement qui a retenu que le licenciement de Monsieur [O] [C] repose sur une cause réelle et sérieuse et a rejeté sa demande fondée sur l'article L 1235-5 du Code du travail.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L1152-1du Code du travail «Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel» ; selon les dispositions de l'article L1154-1 du code du travail , en cas de litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1 précité, le salarié a seulement la charge d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement .

En l'espèce, Monsieur [O] [C] expose les faits suivants : son entretien d'évaluation conduit par son chef de groupe a eu lieu « au pas de charge » en dehors de toute confidentialité, des propos désobligeants ont été tenus au cours de cet entretien qu'il a dénoncés à son employeur dans sa lettre du 20 avril 2013 ( « il m'a annoncé brutalement que j'étais « un boulet », un « menteur » et que « je ne comprends personne ») , il a été prié par sa direction (M.[U]) de rechercher un emploi ailleurs ce qu'il a dénoncé par courrier du 1er juin 2013 - le 13 juin 2013 il a adressé un courrier à l'employeur et à la DRH en indiquant que le harcèlement devient « collégial », qu'il constate que sa décision de rester au sein la société BALAS dérange « puisque le harcèlement d'[M] [T] se perpétue», que son bureau a été fouillé pendant qu'il assistait à une réunion, qu' à peine avait-il quitté son bureau « mercredi en fin d'après-midi pour aller sur site » il a reçu deux appels téléphoniques de [C] [P] (nouveau conducteur de travaux) pour savoir où il était ; il ajoute dans cette lettre « il s'agit bel et bien d'une ségrégation et d'un acharnement à mon encontre » - À l'issue de son arrêt maladie et de ses congés, sans en avoir été prévenu, il a consaté que son bureau était désormais occupé par l'un de ses collègues et il s'est vu attribuer un bureau à proximité de la machine à café, très bruyant , il a été privé d'un poste de téléphone fixe, il a été dessaisi d'un dossier qu'il traitait avant son arrêt de travail, l'employeur a précipité le licenciement après l'enquête du CHSCT à laquelle il considère que l'inspecteur du travail avait été convoqué trop tardivement pour pouvoir participer à la phase d'enquête et d'audition ;

L'ensemble de ces faits laissent présumer l'existence de faits de harcèlement ;

Il ressort toutefois des pièces versées aux débats que le 21 juin 2013 M. [M] [T] avait écrit à son employeur pour dénoncer l'acharnement dont Monsieur [O] [C] faisait preuve à son égard ;

Il indiquait notamment que si l'entretien d'évaluation avait été interrompu avant sa conclusion c'est effectivement parce que les participants avaient été dérangés ; Monsieur [T] indiquera à l'employeur que l'interruption avait notamment été causée par la réception d'un mail de mécontentement du client concernant un chantier dont s'occupait précisément Monsieur [O] [C] (Chantier [D]) et qu'il avait été convenu de reprendre un rendez-vous ; Monsieur [M] [T] indique que les propos qui lui sont prêtés ont été sortis de leur contexte, qu'il a dit à Monsieur [O] [C] qu'il ne souhaitait pas qu'il devienne un boulet et qu'il ne voulait pas croire qu'il lui mentait quand il affirmait que depuis un an ses chantiers étaient terminés alors qu'il y avait des courriers de réclamations ; il fait notamment valoir qu'en sa qualité de responsable direct de Monsieur [O] [C] il lui paraissait normal de savoir où sont les personnes sous sa responsabilité et de connaître les tâches qu'elles accomplissent, ce qu'il n'arrivait souvent pas à savoir de Monsieur [O] [C] ; il fait état de ce que conscient des difficultés que rencontrait Monsieur [O] [C] en tant que conducteur de travaux, il avait envisagé de le faire évoluer vers un autre poste dans l'équipe ;

Le 19 juin 2013 Monsieur [T] qui encadre une équipe de 25 personnes dont quatre chargés d'affaires et Monsieur [C] avait déposé une main courante au commissariat en relatant les difficultés qu'il rencontrait avec Monsieur [O] [C] qui dit-il a un réel sentiment d'isolement probablement augmenté par son handicap car souvent il n'entend pas ce qu'on lui dit ;

Par ailleurs, l'enquête du CHSCT est versée aux débats dont un exemplaire a été adressé le 23 octobre 2013 par l'employeur à l'inspection du travail ; Monsieur [O] [C] a régulièrement pu faire valoir ses observations au cours de l'enquête ainsi qu'il en justifie lui-même par la communication des réponses qu'il a faites au questionnaire ;

Il ressort de cette enquête au cours de laquelle ont été interrogés suivant formulaire type préparé par la délégation du CHSCT outre Monsieur [O] [C], Monsieur [M] [T], le n+2 et 5 collègues de l'environnement de travail des protagonistes qu'il n'y a pas eu de faits de harcèlement, qu'il s'agit d'un conflit strictement professionnel et d'actions managériales mal interprétées et que Monsieur [O] [C] n'est pas victime de discrimination quant à son handicap et qu'il n'était pas en situation d'isolement au sein de l'équipe ;

La délégation du CHSCT indique que la situation a fait du mal aux deux salariés qui ne peuvent pas prendre le recul nécessaire pour travailler ensemble que les salariés entendus estiment que Monsieur [M] [T] était dans son rôle de manager en effectuant les recadrages de Monsieur [O] [C] chez qui des lacunes professionnelles avaient été notées et que [M] [T] était prévenant et demandait à l'équipe de parler lentement et de reformuler mais que Monsieur [O] [C] ne disait pas ce qu'il ne comprenait pas des problématiques clients ; le CHST mentionne encore que les compétences de Monsieur [O] [C] ne permettent pas de le reclasser dans un autre service « d'autant que l'activité électricité est peu développée » ;

Monsieur [O] [C] a été longuement absent de son poste pour maladie et congés (13 juin 2013 au 20 Septembre 2013), il entrait dans le pouvoir de direction et d'organisation de l'employeur de confier le suivi des chantiers dont s'occupait Monsieur [O] [C] à un autre salarié et pour des questions d'organisation et d'implantation des dossiers relatifs à ces chantiers, d'installer ce salarié dans le bureau de Monsieur [O] [C], sachant que les mécontentements justifiés exprimés par les clients, notamment PARIS HABITAT, avaient déjà amené l'employeur au cours d'un entretien avec Monsieur [O] [C] le 13 Mai 2013, mené par Monsieur [U], directeur départemental et la DRH, à envisager différentes pistes de mobilité pour le salarié ; l'absence de téléphone fixe dans le bureau étant anecdotique et dépourvu de caractère constitutif de harcèlement puisque le salarié disposait d'un portable professionnel ;

Il s'ensuit que la cour considère que les faits invoqués par Monsieur [O] [C] même pris dans leur ensemble ne caractérisent pas l'existence d'un quelconque harcèlement à son égard ou discrimination liée à son handicap et il convient dès lors de le débouter de sa demande de dommages intérêts de ces chefs.

Sur les frais irrépétibles

Les faits de la cause ne justifient pas qu'il soit fait droit aux demandes des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement par substitution de motifs.

Rejette les autres demandes des parties.

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses frais irrépétibles

Laisse les dépens à la charge de Monsieur [O] [C].

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 15/12088
Date de la décision : 21/04/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°15/12088 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-21;15.12088 ?
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