RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 20 Avril 2017
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07949
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2013 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 12-04704
APPELANTE
SCA EURODISNEY
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Brigitte BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0372 substitué par Me Audrey BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815
INTIMES
Monsieur [B] [I]
[Adresse 2]
[Localité 2]
non comparant
SAS SPACE INTERIM
[Adresse 3]
[Localité 3]
représentée par Me Edmond TAHAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0702, substitué par Me NAPARSTEK Sacha, avocat au barreau de Paris, du même Cabinet.
CPAM [Localité 4]
DIRECTION DU CONTENTIEUX ET DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substituée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 5]
[Localité 6]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Claire CHAUX, Présidente de chambre
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseiller
Greffier : Mme Anne-Charlotte COS, lors des débats
ARRET :
- réputé contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre, et par Mme Anne-Charlotte COS, greffier présent lors du prononcé, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société Eurodisney à l'encontre d'un jugement rendu le 3 juin 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la société Space Intérim, en présence de M. [I] et de la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 4] ;
Les faits, la procédure, les prétentions des parties :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler que M. [I], employé par la société NG Services, exerçant son activité sous l'enseigne Space Intérim, a été victime d'un accident du travail, le 28 novembre 2010, à l'occasion d'une mission effectuée pour le compte de la société Eurodisney ; que cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle et une procédure en reconnaissance de la faute inexcusable a ensuite été engagée contre l'employeur ;
Par jugement du 3 juin 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a retenu l'existence de cette faute, ordonné une mesure d'expertise pour évaluer les préjudices en résultant et fait droit à l'appel en garantie de la société NG Services à l'encontre de la société Eurodisney en ce qui concerne l'intégralité des conséquences financières et des cotisations afférentes à l'accident du travail.
Limitant son appel à cette dernière disposition, la société Eurodisney demande à la cour d'infirmer ce chef du jugement, de dire que le recours de l'employeur portera seulement sur les conséquences financières de la faute inexcusable à l'exclusion du coût de l'accident du travail. Subsidiairement, elle conclut qu'il soit jugé que le coût de l'accident du travail s'entend du seul capital représentatif de la rente, les frais médicaux et d'hospitalisation ainsi que les indemnités journalières restant à la charge de la société Space Intérim.
Au soutien de son recours, elle fait valoir qu'en application de l'article R 242-6-1 du code de la sécurité sociale, le recours de l'entreprise de travail temporaire à l'encontre de l'entreprise utilisatrice porte sur les conséquences financières de la faute inexcusable mais ne s'étend pas au surcoût de cotisations d'accident du travail pouvant également en résulter. Selon elle, la société Space Intérim ne démontre pas en quoi il y aurait lieu de modifier la répartition des conséquences financières de l'accident du travail prévue à l'article R 242-6-1 du code du travail. En tout état de cause, elle prétend que le coût de l'accident du travail au sens des articles L 241-5-1 et R 242-6-1 s'entend du seul capital représentatif de la rente à l'exclusion de toute autre dépense.
La société NG Services, exploitant son activité sous l'enseigne Space Intérim, fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions de confirmation du jugement attaqué en ce qu'il condamne la société Eurodisney à la garantir de l'ensemble des conséquences financières de l'accident du travail de M. [I], en ce compris le surcroît de cotisations accident du travail. Elle conclut à la condamnation de la société Eurodisney à lui verser la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle prétend que l'accident dont a été victime le salarié intérimaire est exclusivement dû à la faute de la société Eurodisney qui a été condamnée pénalement pour blessures involontaires et reconnue responsable par les premiers juges. Après avoir rappelé que l'entreprise utilisatrice ne contestait pas sa faute inexcusable, elle relève qu'en revanche, aucune faute ayant pu concourir au dommage subi par le salarié ne peut être relevée à son encontre. Elle indique en effet avoir sélectionné le salarié avec soin et s'être assuré qu'il disposait de la formation nécessaire pour son emploi. Elle ajoute qu'elle ignorait les conditions anormales d'exécution du travail confié par la société Eurodisney à son salarié et n'est aucunement responsable de la situation dans laquelle il s'est trouvé. Elle en déduit que la garantie des conséquences financières à laquelle est tenue l'entreprise utilisatrice doit être intégrale et s'étendre au surcoût de cotisations d'accident du travail. Elle rappelle qu'en application de l'article L 241-5-1 du code de la sécurité sociale, le juge peut procéder à une répartition différente du coût de l'accident du travail et qu'en l'espèce la gravité de la faute commise par l'entreprise utilisatrice justifie qu'elle en supporte seule l'ensemble des conséquences financières qui sont plus étendues que le seul capital représentatif de la rente. Elle se prévaut également de la garantie contractuelle prévue à ce sujet dans la convention conclue entre elle et la société Eurodisney.
La caisse primaire d'assurance maladie [Localité 4] s'en rapporte à l'appréciation de la cour sur le principe et l'étendue de la garantie de l'entreprise utilisatrice.
Convoqué à cette audience ayant pour unique objet l'étendue du recours de l'employeur contre l'entreprise utilisatrice, M. [I] n'a pas comparu.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Motifs :
Considérant qu'il résulte des articles L 241-5-1 et L 412-6 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident du travail imputable à la faute inexcusable d'une entreprise utilisatrice, l'entreprise de travail temporaire est tenue envers les organismes sociaux de toutes les obligations pesant sur l'employeur mais dispose d'un recours en garantie contre l'auteur de la faute inexcusable ;
Considérant qu'en l'absence de faute de l'employeur, l'entreprise utilisatrice doit le relever et le garantir de l'ensemble des conséquences financières de la faute inexcusable dont elle est responsable ;
Considérant qu'en l'espèce, la faute inexcusable de la société Eurodisney, qui a fait travailler le salarié intérimaire dans des conditions particulièrement dangereuses ayant entraîné sa condamnation pénale pour blessures involontaire n'est pas contestée ; que les premiers juges ont aussi relevé à raison qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la société NG Services qui s'était bien assurée de la formation du salarié et de sa capacité à remplir la mission qui lui était confiée ;
Considérant qu'en l'absence d'autre responsabilité que celle de l'auteur de la faute inexcusable, c'est donc à bon droit que la société Eurodisney a été condamnée à garantir la société intérimaire de l'intégralité des conséquences financières résultant de sa faute inexcusable ;
Considérant que cette garantie s'étend non seulement aux réparations complémentaires versées à la victime à l'issue de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable mais encore au surcoût de cotisations d'accident du travail résultant de cette faute ;
Considérant qu'en effet, à l'occasion de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable engagée par le travailleur intérimaire, l'entreprise de travail temporaire est fondée à demander au juge une répartition différente de la charge financière de l'accident du travail dû à la faute inexcusable de l'entreprise utilisatrice, conformément aux dispositions de l'article L 241-5-1 du code de la sécurité sociale ;
Considérant que si le coût de l'accident s'entend, au sens des articles L 241-5-1 et R 242-6-1, exclusivement du capital représentatif de la rente servie à la victime, ces dispositions ne s'opposent pas à ce que l'entreprise de travail temporaire soit garantie non seulement du capital représentatif de la rente et de sa majoration mais encore de l'ensemble des surcoûts de cotisation résultant de cet accident ;
Considérant que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Eurodisney à garantir la société NG Services du remboursement des indemnités complémentaires allouées à la victime en réparation de ses préjudices mais aussi de la charge financière des cotisations d'accident du travail qui ne se limitent pas au capital représentatif de la rente ;
Considérant que la décision attaquée ne comporte toutefois aucun énoncé à ce sujet dans son dispositif ;
Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en complétant son dispositif ;
Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il y a lieu de condamner la société Eurodisney à verser à la société NG Services la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par ces motifs :
- Déclare la société Eurodisney recevable mais mal fondée en son appel ;
- Confirme le jugement attaqué ;
Le Complétant :
- Condamne la société Eurodisney à garantir la société NG Services des conséquences financières résultant de sa faute inexcusable comprenant tant l'indemnisation complémentaire versée à la victime que l'intégralité du surcoût de cotisations lié à l'accident du travail ;
- Condamne la société Eurodisney à verser à la société NG Services la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L 241-3 et la condamne au paiement de ce droit s'élevant à 326,90 € ;
Le Greffier Le Président