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24/03/2017 | FRANCE | N°15/02993

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 24 mars 2017, 15/02993


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11



ARRÊT DU 24 MARS 2017



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/02993



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 13/050232





APPELANTES



SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT anciennement dénommée S.P.P (SOCIETE DE PARTICIPATIONS ET DE PLACEMENTS). SOCIETE PAR AC

TIONS SIMPLIFIEE

inscrite au RCS de PARIS sous le n° 399.608.991.

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domici...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRÊT DU 24 MARS 2017

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/02993

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 13/050232

APPELANTES

SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT anciennement dénommée S.P.P (SOCIETE DE PARTICIPATIONS ET DE PLACEMENTS). SOCIETE PAR ACTIONS SIMPLIFIEE

inscrite au RCS de PARIS sous le n° 399.608.991.

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Représentée par Maître Hélène GUERIN de la SELARL GENESIS avocats, avocat au barreau de PARIS, toque P0225, substituant Maître Philippe FEITUSSI de la SELARL GENESIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0225

SA ESPACE CONSEIL SOCIETE ANONYME

inscrite au RCS de PARIS sous le n° 350.594.883

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Représentée par Maître Hélène GUERIN de la SELARL GENESIS avocats, avocat au barreau de PARIS, toque P0225, substituant Maître Philippe FEITUSSI de la SELARL GENESIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0225

INTIMÉE

SARL ECOSSEV

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 444 08 1 7 07

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Maître Henoît LEPORT de la SCP LEPORT & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : T 286

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, et Madame Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, chargé du rapport

Madame Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre

M. François THOMAS, Conseiller, désignée par Ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Vincent BRÉANT

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [D] [E] :

- est le gérant de la SARL ECOSSEV (Environnement Conseil pour l'Optimisation des Sous-Sols et des Espaces Valorisables) dont il détient 80 % des parts sociales, le solde étant détenu par son épouse ;

- était, jusqu'au 5 avril 2013, Président du conseil d'administration de la SA ESPACE CONSEIL (depuis le 20 décembre 2007) et directeur général de la SOCIÉTÉ DE PARTICIPATION ET DE PLACEMENTS (SPP) (depuis le 27 août 2007, nouvellement dénommée SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT).

En raison de liens capitalistiques, les sociétés TRIMAX DÉVELOPPEMENT (TRIMAX) et ESPACE CONSEIL (ESPACE) font partie du groupe [Z] dirigé par Monsieur [K] [Z].

Par protocole « de prestations et d'association » du 24 septembre 2009, la SAS alors dénommée SOCIÉTÉ DE PARTICIPATION ET DE PLACEMENTS - SPP - a confié à la société ECOSSEV une mission d'assistance générale d'accompagnement dans le cadre de ses projets immobiliers. D'une durée de six années, le protocole était tacitement renouvelable par période de 24 mois à défaut de dénonciation préalable huit mois au moins avant le terme. La rémunération de la société ECOSSEV y a été fixée à hauteur globale de la somme de 15.000 euros HT par mois à raison d'une part fixe d'un montant de 7.500 euros HT et d'une avance de même montant sur « la participation aux projets ». Elle a été payée de septembre 2009 à mai 2011, en ayant été partagée entre la société SSP (à hauteur de 5.000 euros HT) et la société ESPACE CONSEIL (à hauteur de 10.000 euros HT). Les factures postérieures n'ont pas été réglées en dépit des mises en demeure de payer :

- du 1er octobre 2012 par lettres recommandées AR, visant les 15 factures s'échelonnant du 30 juin 2011 au 30 août 2012, totalisant les sommes de 89.700 euros TTC en ce qui concerne la société TRIMAX et de 179.400 euros TTC concernant la société ESPACE,

- du 20 juin 2013 (portant sur la somme globale de 1.699.807 euros TTC),

toutes demeurées infructueuses.

Le 8 août 2013, la société ECOSSEV a attrait la société TRIMAX DEVELOPPEMENT (nouvelle dénomination de SSP) (TRIMAX) et la société ESPACE CONSEIL (ESPACE) devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de les entendre condamner à lui payer différentes sommes majorées des intérêts au taux légal à compter des mises en demeure, soit :

- la somme globale de 1.924.300,01 euros TTC en principal par la société TRIMAX,

- la somme 275.080 euros TTC en principal par la société ESPACE,

outre l'indemnisation de ses frais irrépétibles.

Les sociétés TRIMAX et ESPACE ont, à titre principal, demandé l'annulation du protocole du 24 septembre 2009 en raison d'un défaut de cause, le rejet corrélatif des demandes de paiement de la société ECOSSEV et le remboursement des sommes antérieurement réglées à hauteur d'un montant de 475.710 euros TTC, outre l'indemnisation des frais non compris dans les dépens, ou subsidiairement, le rejet des demandes et reconventionnellement le remboursement :

- à la société TRIMAX (anciennement SSP) de la somme globale de 90.000 euros TTC, versée entre juin 2011 et mars 2012 alors que, selon cette dernière, la société ECOSSEV a cessé d'exécuter les prestations à partir du mois de juin 2011, et de la somme de 62.790 euros TTC perçue à titre d'avances ;

- à la société ESPACE de la somme de 128.570 euros TTC perçue à titre d'avances.

Par jugement contradictoire du 14 janvier 2015, assorti de l'exécution provisoire sans garantie à hauteur de la somme de 400.000 euros et avec cautionnement au delà, le tribunal a rejeté la demande de nullité du protocole et a condamné les défenderesses à payer à la société ECOSSEV :

- la société TRIMAX, les sommes de 47.540 euros TTC, majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2013, au titre du solde restant dû sur les factures du 1er juin 2011 au 30 avril 2013, et de 431.500 euros au titre de la rémunération postérieure au 1er mai 2013 ;

- la société ESPACE, la somme de 275.080 euros TTC, majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2013, au titre des factures du 1er juin 2011 au 30 avril 2013 ;

outre la somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 25 mars 2015, les sociétés TRIMAX et ESPACE ont saisi le Premier président de cette cour en vue de suspendre l'exécution provisoire du jugement ou, à tout le moins d'ordonner la consignation de la somme de 400.000 euros. A la suite de l'ordonnance du 3 juin 2015 du délégué de la Première présidente, la somme de 400.000 euros a été consignée le 17 juin suivant par la société TRIMAX à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC).

Vu l'appel interjeté le 9 février 2015 par les sociétés TRIMAX et ESPACE ;

Vu leurs dernières écritures transmises le 16 novembre 2016 par le RPVA, réclamant la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles et poursuivant l'infirmation du jugement en priant la cour d'écarter des débats les pièces n° 19 et 39 de l'intimée et en demandant :

- à titre principal, à nouveau la nullité du protocole du 24 septembre 2009, au motif essentiellement qu'il « fait double emploi avec les fonctions de directeur général » de Monsieur [E], et la condamnation corrélative de la société ECOSSEV à restituer la somme de 475.710 euros initialement versée par les appelantes ;

- subsidiairement, la résiliation judiciaire du protocole à compter du 1er juin 2011 aux torts de la société ECOSSEV, en raison de l'absence de prestations depuis cette date, et la condamnation de cette dernière à rembourser la somme globale de 202.790 euros (90.000 + 50.000 + 62.790) à la société TRIMAX, correspondant aux règlement des factures sans prestations en contrepartie, et aux versement des avances, et la somme de 128.570 euros TTC à la société ESPACE correspondant aux versements des avances, en précisant [conclusions pages 27 et 30] que « des avances ont vocation à être remboursée » et que l'article II du protocole stipule que « les avances ne sont acquises qu'en cas de dénonciation de la société TRIMAX à l'échéance ['] laquelle n'est pas intervenue » ;

Vu les dernières conclusions de la société ECOSSEV intimée, transmises le 26 octobre 2016 par le RPVA, réclamant également la somme de 15.000 euros au titre des frais non compris dans les dépens et poursuivant :

- d'une part, la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du protocole et a condamné les appelantes à lui payer diverses sommes ;

- d'autre part, sa réformation en sollicitant la condamnation de la société TRIMAX à lui payer en outre les sommes de :

432.000 euros TTC au titre de la rémunération pour la période du 23 septembre 2015 au 22 septembre 2017, le contrat, selon l'intimée, ayant été tacitement renouvelé à défaut de dénonciation dans le délai ;

137.540 euros TTC, majorés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er octobre 2012 sur la somme de 89.700 euros correspondant aux 23 factures et à compter de la mise en demeure du 20 juin 2013 sur le solde d'un montant de 47.840 euros ;

211.393 euros TTC, augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juin 2013, au titre « de l'îlot H » ;

239.221,25 euros TTC et de 736.216 euros TTC [soit un montant de 975.437,25 euros au total] augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juin 2013, au titre « de l'îlot G » ;

105.000 euros TTC au titre de la vente du 22 décembre 2009 à la SCI de Béthemont ;

6.472,71 euros TTC majorés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juin 2013, « au titre des frais »,

en sollicitant la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil [en réalité de l'article 1154 ancien du code civil encore applicable à la cause concernant des conventions souscrites antérieurement au 1er octobre 2016] ;

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

SUR CE

Considérant, à titre liminaire, que les appelantes demandent à la Cour d'écarter des débats les pièces n° 19 et 39 produites par l'intimée, concernant, la première « la vente des 41 appartements suite à la vente de terrains à bâtir dans le périmètre de la ZAC [Localité 3] (Yvelines) » et, la seconde « la liste des projets et prestations d'ECOSSEV » en vue de justifier le travail accompli ;

Mais considérant que les appelantes ne s'expliquent pas clairement sur les raisons de leur demande de rejet de pièces, étant surabondamment observé que les deux pièces litigieuses étaient déjà visées dans le bordereau de communication annexé aux écritures transmises par le RPVA le 5 janvier 2016 par les intimées, la clôture de l'instruction de l'affaire étant seulement intervenue 10 mois plus tard, par l'ordonnance du 17 novembre 2016 du magistrat de la mise en état ; qu'en conséquence, leur demande de rejet desdites pièces des débats ne sera pas accueillie ;

Sur la cause du contrat litigieux

Considérant que, faisant valoir qu'une société doit pouvoir bénéficier de « l'expertise et des prestations de son directeur général » et soutenant que le contrat litigieux constitue « une délégation des fonctions de représentation, de stratégie et de décision incombant au directeur général », les sociétés TRIMAX et ESPACE sollicitent le prononcé de la nullité du contrat du 24 septembre 2009 sur le fondement de l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, en relevant que la mission définie en son article I se confond avec celle incombant au directeur général de la société TRIMAX rendant le contrat litigieux dénué de cause ;

Mais considérant qu'il n'est pas contesté que :

- l'article 18-1 des statuts de la société SPP (pièce des appelantes n° 2) stipule que le président de la société bénéficie des « pouvoirs les plus étendus », tandis que l'article 18-2 des mêmes statuts indiquent que l'assemblée générale détermine l'étendue des pouvoirs qui sont délégués au directeur général ;

- la deuxième résolution du procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 27 août 2007 de la société SPP (pièce des appelantes n° 19) désignant Monsieur [E] en qualité de nouveau directeur général, stipule d'une part, que sa rémunération, en compensation de la responsabilité et de la charge attachées à ses fonctions, sera fixée ultérieurement et, d'autre part, que ses fonctions et délégations seront ultérieurement précisées par une autre assemblée devant se tenir « prochainement » ;

- les appelantes n'ont pas véritablement démenti Monsieur [E] qui a indiqué dans ses écritures que ses fonctions et délégations de pouvoirs n'avaient jamais été précisées, en tout état de cause, les sociétés TRIMAX et ESPACE n'ont pas justifié qu'une telle détermination soit effectivement intervenue et qu'en outre l'article 18-2 des statuts stipule aussi que « les règlements signés par le directeur général devront recevoir la contresignature du président » ;

- les fonctions de directeur général de Monsieur [E] n'ont pas davantage été rémunérées, étant observé qu'il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale mixte du 30 juin 2008 de la société SPP (pièce des appelantes n° 20) que l'autre directeur général percevait lui, une rémunération annuelle d'un montant de 80.866,50 euros et que le président percevait une rémunération annuelle d'un montant de 130.000 euros, outre avantages en nature, son montant ayant été ramené à hauteur de 80.904 euros à partir de l'exercice 2009 ;

Qu'il résulte des termes de l'article I du contrat litigieux déterminant la mission confiée à la société ECOSSEV, que celle-ci concerne uniquement l'accompagnement de la société SPP essentiellement dans :

- la recherche d'espaces fonciers et/ou immobiliers et de partenaires et sous-traitants ;

- l'accomplissement des démarches administratives ;

- la coordination des intervenants et le suivi des travaux en tenant notamment à jour un tableau de bord des opérations ;

Qu'il s'agit de missions purement d'assistance technique, ne se confondant pas avec celles plus générales de représentation et de gestion de la société SPP tant par son président, qu'éventuellement par son directeur général ;

Qu'il apparaît en conséquence, alors que les fonctions de directeur général de Monsieur [E] devaient initialement être rémunérées, que les parties ont finalement choisi de ne pas le faire, mais d'assister les organes de direction et de gestion de la société par un contrat de prestations de services souscrit auprès de la société ECOSSEV ;

Que, la société SPP devant bénéficier des prestations de la société ECOSSEV en contrepartie des rémunérations prévues, le contrat du 24 septembre 2009 est causé et le rejet de sa nullité par le jugement déféré doit être confirmé ;

Sur l'approbation ou l'autorisation du contrat litigieux par l'assemblée générale de la SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT ou par le conseil d'administration de la SA ESPACE

Considérant que les appelantes estiment que le contrat du 24 septembre 2009 est une convention réglementée conclue entre :

- la société TRIMAX (SAS) et son directeur général par personne interposée (la société ECOSSEV) qui n'a pas été approuvée ;

- la société ESPACE (SA) et son président, qui n'a pas davantage été préalablement autorisée par le conseil d'administration, en violation de l'article L 225-38 du code de commerce, en observant que le rapport du 2 mai 2012, versé aux débats par l'intimée, étant postérieur au protocole et en outre, n'étant signé que du seul Monsieur [E], ne prouve pas l'existence d'une autorisation donnée par le conseil d'administration ;

Considérant que le contrat du 24 septembre 2009 a été conclu :

- par la SAS SPP (nouvellement dénommée SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT) représentée par Monsieur [K] [Z] agissant en sa qualité de président ;

- avec la société ECOSSEV représentée par Monsieur [D] [E] agissant en sa qualité de gérant, mais qu'au jour de la souscription du contrat, ce dernier était aussi directeur général de l'autre partie contractante (société TRIMAX DEVELOPPEMENT) ;

Qu'outre sa fonction de gérant de la société ECOSSEV, Monsieur [E] en détenait 80 % des parts sociales, le solde étant entièrement détenu par son épouse, permettant à Monsieur [E] de contrôler 100 % de la SARL ECOSSEV directement ou par alliée, de sorte que ladite société doit être qualifiée de personne interposée au sens des articles L 227-10 et L 225-38 du code de commerce en faisant du contrat litigieux une convention réglementée devant être soumise à l'approbation a posteriori de l'assemblée générale de la SAS et à l'autorisation préalable du conseil d'administration de la SA ;

Qu'en se bornant à indiquer qu'au titre des conventions visées à l'article L 227-10 du code de commerce, l'assemblée approuve chacune des conventions mentionnées dans les rapports spéciaux du président et des commissaires aux comptes, le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire annuelle du 30 novembre 2010 de la SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT, statuant notamment sur les comptes de l'exercice 2009 (pièce n° 22 des appelantes), ne précise pas pour autant que la convention du 24 septembre 2009 entre ECOSSEV et TRIMAX a expressément été approuvée, lesdits rapports n'ayant pas été versés au dossier ;

Que, si le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire annuelle du 30 juin 2012 de la société TRIMAX (SPP) [pièce appelante n° 24, 3ème résolution] statuant sur les comptes de l'exercice 2011, et le rapport spécial à cette assemblée, signé le 14 juin 2012 par Monsieur [K] [Z] en sa qualité de président [pièce n° 32 de l'intimée], font état du « protocole de prestations et d'association avec la société ECOSSEV », il convient de relever que cette approbation est tardive dès lors qu'elle aurait dû intervenir au cours de l'AGO annuelle statuant sur les comptes de l'exercice 2009 au cours duquel est intervenu le protocole litigieux ;

Considérant, par ailleurs, qu'il n'est pas contesté qu'au jour de la conclusion du contrat du 24 septembre 2009, Monsieur [E] était aussi président du conseil d'administration de la SA ESPACE CONSEIL, de sorte que la partie de la convention faisant état de la possibilité d'une délégation de paiement à la société ESPACE au profit de la société ECOSSEV relève aussi, à due concurrence, de l'article L 225-38 du code de commerce soumettant ladite convention à l'autorisation préalable du conseil d'administration ;

Qu'en faisant état du rapport de gestion du 2 mai 2012, établi par le conseil d'administration en vue de l'assemblée générale du 18 juin 2012 faisant référence à la facturation d'honoraires par la société ECOSSEV à hauteur de la somme de120.000 euros HT au titre de l'exercice 2011 [pièce ECOSSEV n° 23], l'intimée ne rapporte pas la preuve de ce que le conseil d'administration de la société ESPACE CONSEIL a effectivement autorisé préalablement la convention du 24 septembre 2009, dès lors que cette pièce, sous la seule signature de Monsieur [E] agissant en qualité de président du conseil, n'est pas confortée par la production de la copie conforme du procès-verbal des délibérations du conseil, étant au surplus observé que ladite convention aurait due être soumise à l'assemblée générale statuant sur les comptes de l'exercice 2009 ;

Que le rapport spécial sur les conventions réglementées du 14 juin 2010 du commissaire aux comptes à l'assemblée générale de la société ESPACE CONSEIL statuant sur les comptes de l'exercice 2009 [pièce n° 56 des appelantes] vise certes « la convention de prestation avec la société ECOSSEV dont Monsieur [E] est gérant, par délégation de la SAS SPP » en précisant que « la prestation prise en charge : 125.000 euros HT. La convention prévoit un maximum de 180.000 euros HT à répartir éventuellement sur plusieurs sociétés », mais ne permet pas de prouver que la partie de la convention du 24 septembre 2009 pouvant intéresser la société ESPACE a été effectivement approuvée, en l'absence de la production aux débats du procès-verbal de l'assemblée générale de la société ESPACE statuant sur les comptes dudit exercice ;

Que cependant, nonobstant les défauts d'approbation à bonne date par la SAS et d'autorisation préalable du conseil d'administration de la SA, il convient aussi de relever que :

- d'une part, la convention réglementée non approuvée entre la SAS et son directeur général n'en produit pas moins ses effets à charge pour la SAS de rapporter la preuve des conséquences dommageables qu'elle aurait éventuellement subies ;

- d'autre part, l'annulation des conventions réglementées non autorisées par le conseil d'administration n'est encourue que si la convention a eu des conséquences dommageables pour la SA concernée, qui a la charge de la preuve de la réalité du préjudice subi ;

les intéressés devant alors supporter les conséquences dommageables tant pour la SAS que pour la SA, étant observé que les sociétés TRIMAX et ESPACE se bornent à solliciter le remboursement des sommes versées en exécution du contrat en conséquence de son annulation ou de sa résiliation ;

Sur la résiliation du contrat du 24 septembre 2009

Considérant que les appelantes soutiennent aussi que la société ESPACE n'est pas partie au protocole litigieux en affirmant qu'elle n'a pas bénéficié de prestations effectuées par la société ECOSSEV et qu'elles estiment que la clause du protocole prévoyant que la société TRIMAX « pourra déléguer le paiement de tout ou partie [du montant de la rémunération mensuelle de la société ECOSSEV] à la société ESPACE CONSEIL ou tout autre société en charge de projets pour lesquels ECOSSEV réalise des prestations » ne constitue « qu'une simple indication de paiement » sans permettre à la société ECOSSEV de réclamer le paiement d'honoraires directement à la société ESPACE ;

Mais considérant qu'il convient de relever qu'il résulte de cette clause que la société TRIMAX est déléguante, la société ESPACE est déléguée et la société ECOSSEV est délégataire ;

Que, si la société ESPACE n'est pas partie au contrat au jour de sa signature, il apparaît que le contrat du 24 septembre 2009 envisage expressément les sociétés autres que la société TRIMAX, qui bénéficieraient directement des prestations de la société ECOSSEV et qu'en ayant réglé sans réserve les factures émises à son encontre par la société ECOSSEV de septembre 2009 à mai 2011, à hauteur de 10.000 euros HT chacune, la société ESPACE a implicitement reconnue avoir bénéficié à due concurrence desdites prestations, de sorte qu'elle a ainsi, en sa qualité de déléguée, accepté la délégation de la société TRIMAX (prise en sa qualité de déléguante) au bénéfice de la société ECOSSEV (prise en sa qualité de délégataire), au titre de la clause précitée du contrat litigieux ;

Considérant aussi que, pour justifier le défaut de paiement des factures à compter du mois de juin 2011, les appelantes affirment que la société ECOSSEV a cessé d'exécuter ses prestations à compter de cette période, et opposent l'exception d'inexécution des obligations de la société ECOSSEV, tandis que cette dernière conteste formellement avoir cessé ses prestations en affirmant qu'elle continue actuellement de les effectuer ;

Mais considérant qu'en présence de la contestation élevée par la société TRIMAX, créancière des prestations et en application de l'article 1315 (ancien) du code civil, il appartient à la société ECOSSEV, en sa qualité de débitrice de l'exécution des prestations prévues par le contrat litigieux, de rapporter la preuve de leur accomplissement ;

Qu'au regard de la mission définit par l'article I du contrat, concernant la recherche d'espaces fonciers, les démarches administratives, la coordination des architectes, urbanistes et bureaux d'études, en vue de l'élaboration des projets et de l'obtention des autorisations administratives, outre la recherche de sociétés partenaires ou sous-traitantes pour la réalisation des projets, leur suivi et la mise à jour d'un tableau de bord des opérations, il ne résulte ni des pièces versées aux débats par l'intimée sous le n° 39 (39-1 à 39-8), ni de l'attestation du 26 mars 2013 du président de la société TRIMAX, que la société ECOSSEV a accompli les missions lui incombant au titre du contrat litigieux, de sorte que, succombant dans l'administration de la preuve qui lui incombe, la société ECOSSEV ne rapporte pas la démonstration de l'accomplissement effective de ses obligations postérieurement au 1er juin 2011 ;

Considérant aussi que les appelantes soutiennent que le protocole doit être résilié aux torts de l'intimée à la date du 1er juin 2011, soit à partir du moment où la société ECOSSEV a cessé « subitement et sans motif » d'accomplir des prestations ;

Que la société ECOSSEV ne rapportant pas la preuve qui lui incombe de l'accomplissement de ses prestations postérieurement au 1er juin 2011, le contrat du 24 septembre 2009 doit être résilié à cette date aux torts de la société ECOSSEV, de sorte que les demandes de paiement de la société ECOSSEV pour les périodes postérieures sont sans fondement ;

Sur les demandes de remboursement

Considérant que les appelantes sollicitent le remboursement de :

- la somme globale de 202.790 euros (90.000 + 50.000 + 62.790) au profit de la société TRIMAX, correspondant aux règlement des factures sans prestations en contrepartie ;

- la somme de 128.570 euros TTC au profit de la société ESPACE correspondant aux versements des avances postérieurement au 1er juin 2011 ;

Mais considérant que la société TRIMAX a exposé dans ses écritures que les versements de 90.000 euros et de 50.000 euros correspondaient aux remboursements à due concurrence de comptes coutants, de sorte qu'elle n'est pas fondée d'en demander la restitution au titre du paiement de prestations non exécutées ;

Qu'en revanche, la somme de 62.790 euros par la société TRIMAX et de celle de 128.570 euros TTC par la société ESPACE au titre des avances postérieurement au 1er juin 2011 doivent être restituées ;

Considérant que la société ECOSSEV sollicite par ailleurs la condamnation de la société TRIMAX à lui payer diverses sommes tant au titre des rémunérations mensuelles postérieures au 20 juin 2013, qu'en application de l'article V, paragraphe 3 du contrat du 24 septembre 2009 ;

Mais considérant que les sommes sollicitées pour des périodes postérieures au 1er juin 2011 ne sont pas justifiées et qu'en réclamant reconventionnellement, dans ses écritures déposées à l'audience du 13 novembre 2013 du tribunal, la nullité du contrat du 24 septembre 2009, la société TRIMAX l'a implicitement, mais nécessairement dénoncé, de sorte que le contrat n'a pas pu être tacitement reconduit à son échéance du 24 septembre 2015 ;

Que l'article V, paragraphe 3 précité prévoit la participation de la société ECOSSEV aux projets en cours et futurs du groupe [Z] en stipulant « qu'à chaque acte authentique de cession ou de location, une convention d'honoraires sera établie entre la société SPP et la société ECOSSEV », mais que cette dernière n'a pas produit de convention d'honoraires, de sorte que ses demandes correspondantes ne sont pas fondées ;

Qu'en conséquence, ne sont pas fondées les demandes principales de la société ECOSSEV de paiement des sommes de :

- 432.000 euros TTC au titre de la rémunération pour la période du 23 septembre 2015 au 22 septembre 2017 ;

-137.540 euros TTC, correspondant aux 23 factures ;

- 211.393 euros TTC, au titre « de l'îlot H » ;

- 239.221,25 euros TTC et de 736.216 euros TTC, au titre « de l'îlot G » ;

- 105.000 euros TTC au titre de la vente du 22 décembre 2009 à la SCI de Béthemont ;

Qu'en se bornant à affirmer avoir antérieurement adressé les justificatifs de ses frais à la société TRIMAX, cette dernière n'en rapporte pas pour autant la preuve qui lui incombe en présence de la contestation élevée par ladite société, de sorte que sa demande de paiement de la somme de 6.472,71 euros TTC en principal n'est pas davantage fondée ;

Sur l'engagement d'exclusivité

Considérant que les appelantes font valoir que la part fixe de la rémunération mensuelle stipulée au protocole comprend, à hauteur de 1.000 euros, la contrepartie de l'engagement d'exclusivité de Monsieur [E] [personnellement] de ne pas participer à des activités en concurrence avec celles de la société TRIMAX, et prétendent que cet engagement a été violé ;

Mais considérant que Monsieur [E] n'est pas personnellement partie au protocole litigieux, de sorte que les appelantes ne peuvent pas fonder leur demande d'indemnisation d'une éventuelle violation de l'exclusivité sur le contrat du 24 septembre 2009 ;

Considérant qu'en fonction de la complexité des conventions souscrites par les parties, contenant virtuellement les litiges d'exécution objet de la présente instance, il apparaît équitable de laisser à chaque partie la charge définitive des frais irrépétibles qu'elle a engagés depuis l'origine de l'instance, les demandes correspondantes devant toutes être rejetées ;

PAR CES MOTIFS

DÉBOUTE la SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT et la S.A ESPACE CONSEIL de leur demande de rejet des débats des pièces n° 19 et 39 de l'intimée ,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du contrat du 14 septembre 2009 fondée sur l'absence de cause,

LE RÉFORME pour le surplus,

STATUANT À NOUVEAU,

PRONONCE, à la date du 1er juin 2011, la résiliation du contrat du 24 septembre 2009 entre la société ECOSSEV et la société SPP, devenue TRIMAX DEVELOPPEMENT, et, corrélativement de la délégation de paiement à la société ESPACE CONSEIL,

CONDAMNE la SARL Environnement Conseil pour l'Optimisation des Sous-Sols et des Espaces Valorisables (ECOSSEV) à payer les sommes de :

- 62.790 euros à la SAS TRIMAX DEVELOPPEMENT,

- 128.570 euros TTC à la société ESPACE,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

REJETTE leurs demande d'indemnisation de leurs frais irrépétibles tant de première instance que d'appel,

CONDAMNE la SARL ECOSSEV aux dépens de première instance et d'appel,

ADMET Maître Laurence TAZE BERNARD (SCP IFL), avocat postulant, au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 15/02993
Date de la décision : 24/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°15/02993 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-24;15.02993 ?
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