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23/02/2017 | FRANCE | N°16/13288

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 23 février 2017, 16/13288


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 23 FEVRIER 2017



(n°147, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/13288



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2016 - Président du TGI de PARIS - RG n° 16/53525



APPELANTE



SARL MEDIASITE SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE

inscrite au RCS de PARIS sous le n° 419.794.532. Représentée par son

Gérant en exercice et tous représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 419.794.532



Représentée par Me Laurence TAZ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 23 FEVRIER 2017

(n°147, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/13288

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2016 - Président du TGI de PARIS - RG n° 16/53525

APPELANTE

SARL MEDIASITE SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE

inscrite au RCS de PARIS sous le n° 419.794.532. Représentée par son Gérant en exercice et tous représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 419.794.532

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS,

toque : P0241

Assistée par Me Bertrand LAMBERT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE

Société COMPLEXE MJD

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Olivier FOURGEOT, avocat au barreau de PARIS,

toque : D1369

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Janvier 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Bernard CHEVALIER, Président, et Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard CHEVALIER, Président

Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente de chambre

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Aymeric PINTIAU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Bernard CHEVALIER, président et par M. Aymeric PINTIAU, greffier.

Par trois actes sous seing privé du 23 mars 2010, la société COMPLEXE MJD a donné à bail à la société MEDIASITE des locaux commerciaux n°3 au 2ème étage, n°4 au 4ème étage, et n°20 au 3ème étage de l'immeuble situé [Adresse 1].

Par acte sous seing privé du 6 juillet 2001, la société COMPLEXE MJD a donné à bail à la société GROUPE PRO ACTIF des locaux au 8ème étage du même immeuble, le fonds de commerce et le droit au bail ayant été cédés à la société MEDIASITE par acte du 30 mars 2007.

Par acte d'huissier en date du 1er février 2016, la société MEDIASITE a fait assigner la société COMPLEXE MJD devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, aux fins de voir notamment ordonner la suspension du paiement des loyers et subsidiairement, suspendre les effets de la clause résolutoire jusqu'à ce que le juge du fond se soit prononcé.

Par ordonnance du 7 juin 2016, le président du tribunal de grande instance de Paris a :

- rejeté la demande de suspension de paiement des loyers,

- condamné la société MEDIASITE à payer à la société COMPLEXE M.J.D. la somme provisionnelle de 192.336,58 euros au titre de l'arriéré locatif au 23 mai 2016 pour les quatre baux souscrits, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,

- dit que la société MEDIASITE pourra s'acquitter de cette somme, en plus des loyers courants, en 24 mensualités égales et consécutives de 8.014 euros,

- ordonné la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours de ces délais et dit que faute pour la société COMPLEXE M.J.D. de payer à bonne date, en sus du loyer, charges et accessoires courants, une seule des mensualités, le tout deviendra immédiatement exigible, la clause résolutoire sera acquise, et il sera procédé à l'expulsion immédiate de la société COMPLEXE M.J.D. et à celle de tous occupants de son chef avec l'assistance si nécessaire de la force publique des lieux loués, à savoir [Adresse 1].

La société MEDIASITE, appelante de cette décision, par conclusions, notifiées par la voie électronique le 20 janvier 2017, demande à la cour de l'infirmer et, statuant à nouveau, de :

- déclarer nul et de nul effet le commandement du 5 janvier 2016,

- ordonner la suspension du paiement des loyers jusqu'à ce que le tribunal saisi au fond se soit prononcé ou que les travaux de remise en état aient été réalisés.

- subsidiairement, suspendre les effets de la clause résolutoire jusqu'à ce que le tribunal de grande instance, régulièrement saisi, se soit prononcé sur le fond.

- plus subsidiairement, lui accorder un délai de deux ans, étant entendu que tout paiement se fera sous les plus expresses réserves de la procédure engagée au fond.

- dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes financières et celle visant l'objet du bail.

La société MEDIASITE soutient que :

- malgré les engagements pris concernant la remise en état, c'est à dire le changement des fenêtres, la pose des radiateurs manquants, le respect des règlements de sécurité et l'ensemble des éléments concernant l'ascenseur, aucuns travaux n'ont été réalisés ; que ces éléments sont toujours aujourd'hui défaillants, comme le démontre le procès-verbal de constat d'huissier en date du 5 janvier 2017 ; qu'il s'ensuit un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser par la suspension du paiement des loyers jusqu'à ce que les lieux soient mis en conformité par le bailleur.

- l'activité de la société MEDIASITE, depuis maintenant vingt ans, dans les lieux loués, est d'une part la formation qu'elle dispense elle-même et d'autre part la mise à disposition de ses clients du matériel technique, pédagogique et mobilier, pour qu'ils effectuent des formations dans les locaux loués. Son activité n'a jamais consisté en la mise en location de salles,

- de plus, le juge des référés n'a pas été saisi de ce problème car le commandement est postérieur à la saisine du juge du fond et à la désignation d'un juge de la mise en état au fond, le juge des référés n'est donc pas compétent pour interpréter la clause visant l'occupation des lieux.

La société COMPLEXE MJD, intimée et appelante incidente, aux termes de ses conclusions notifiées par la voie électronique le 17 janvier 2017, demande à la cour de :

- de confirmer l'ordonnance dont appel sous réserve de la rectification de ses erreurs matérielles et de l'actualisation des loyers impayés,

1) Sur la rectification d'erreur matérielle, rétablir les situations respectives de preneur et de bailleur des parties,

2) Sur les demandes relatives à la suspension du paiement des loyers, débouter la société MEDIASITE,

3)A titre reconventionnel,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire visée au commandement du 5 janvier 2016 et dire les engagements liant les parties résiliés de plein droit,

- ordonner, en conséquence, l'expulsion de la société MEDIASITE et de tout occupant de son chef, si besoin est, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir,

- condamner la société MEDIASITE au paiement à titre provisionnel de la somme de 326.526,76 euros arrêtée au 1er janvier 2017 avec intérêts au taux légal à compter du commandement,

- fixer le montant des indemnités d'occupation au montant du loyer majoré de 10% dont le preneur sera redevable jusqu'à la libération des locaux ;

- condamner la société MEDIASITE au paiement d'une somme de 10 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société MEDIASITE aux entiers dépens.

La société COMPLEXE MJD soutient que :

- l'activité du preneur consiste exclusivement en la mise en location de salle pour y assurer des prestations de formation lesquelles sont exécutées par des sociétés tierces, en contravention aux dispositions du bail pour ce qui concerne d'une part, l'activité autorisée, d'autre part, l'interdiction de sous location telle qu'elle résulte des dispositions de l'article 4 « Cession et sous location » si bien que la clause résolutoire visée aux termes du commandement du 18 mai 2016 est acquise.

- depuis le mois de juillet 2015, la société MEDIASITE ne s'est pas acquittée du paiement des loyers dont elle demeure redevable, sa dette locative s'élevant à la somme de 326.652,76 euros arrêtée au 1er janvier 2017 si bien que la clause résolutoire visée au commandement de payer du 5 janvier 2016 est acquise.

- l'absence de tout paiement la met dans une grave situation financière dès lors qu'elle rencontre des difficultés pour faire face aux travaux de rénovation de l'immeuble et la contraint, effectivement, à en envisager la vente.

- elle a toujours fait diligence dans le respect de ses obligations contractuelles afin de permettre l'occupation et la jouissance paisible du bien loué, y compris dans la gestion de la mise en oeuvre de l'accessibilité des lieux aux personnes à mobilité réduite.

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Aux termes de l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application des dispositions de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable le président du tribunal de grande instance peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire au titre du non paiement des loyers

La société COMPLEXE MJD invoque un commandement de payer vainement délivré le 5 janvier 2016 et actualise sa créance à la somme provisionnelle de 326.526,76 euros arrêtée au 1er janvier 2017, faisant valoir sans être contredite qu'aucun loyer n'est versé depuis juillet 2015.

La société MEDIASITE prétend , au visa de l'article 1719 du code civil, être fondée à ne pas avoir régularisé ce commandement de payer dans le mois de sa date conformément à l'article L 145-41 du code de commerce, arguant d'un défaut de délivrance paisible des lieux loués et de la saisine du juge du fond à ce titre.

Au vu des pièces produites, le juge des référés a exactement retenu par motifs adoptés que l'absence d'entretien des locaux loués et leur non conformité aux normes ne sont pas suffisamment démontrées par la société MEDIASITE pour justifier la suspension du paiement des loyers et qu'au demeurant cette société ne justifie pas d'une impossibilité totale de les exploiter ni n'explique en quoi la baisse de son chiffre d'affaires est liée à l'état des locaux.

Il y a donc lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail à compter du 5 février 2016 et de condamner la société MEDIASITE, qui ne saurait se faire justice comme elle fait depuis juillet 2015, à libérer les lieux dans les termes et conditions du dispositif de l'arrêt.

La société MEDIASITE conteste le décompte de la dette locative invoquée ci-dessus,

motif pris de la non justification des charges et travaux divers imputés, sans toutefois fournir de décompte de ce qu'elle reconnaît devoir.

Compte tenu du différend des parties quant à l'entretien par le bailleur des lieux loués et des pièces produites, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à 250.000 € la provision due par la société MEDIASITE à valoir sur cette dette locative.

Par ailleurs, le paiement du loyer et des charges est une obligation essentielle du locataire et en raison de sa nature mixte, compensatoire et indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des lieux, assure la réparation du préjudice résultant pour le bailleur d'une occupation sans bail. Il y a donc lieu de condamner la société MEDIASITE à payer à la société COMPLEXE MJD, à compter de la résiliation jusqu'à libération des lieux, une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du loyer courant, charges en sus, des quatre baux litigieux, seul montant manifestement incontestable.

Enfin, quant aux délais sollicités, la mauvaise foi de la société MEDIASITE est patente dans la mesure où elle ne s'acquitte ni du loyer courant ni de l'arriéré que le juge des référés l'a autorisée à apurer en 24 mensualités, sans pour autant consigner les sommes en litige. Cette attitude témoigne de difficultés de trésorerie certaines qui s'opposent à l'octroi des nouveaux délais sollicités dont la vraisemblance du respect fait défaut.

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise, ce qui rend sans objet la demande de rectification d'erreur matérielle et de condamner la société MEDIASITE à payer à la société COMPLEXE MJD :

- la somme provisionnelle de 250.000 € à valoir sur sa dette locative arrêtée au 1er janvier 2017,

- et une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du loyer, charges en sus, qui aurait été payé en application des quatre baux en cause, à compter du 5 janvier 2016 jusqu'à libération des lieux.

La demande de la société COMPLEXE MJD tendant à la condamnation de la société MEDIASITE à libérer les lieux sous astreinte apparaît justifiée, conformément aux articles L131-1 et suivants du code des procédure civiles d'exécution, par l'absence de tout paiement depuis juillet 2015. Il y sera donc fait droit dans les termes du dispositif de l'arrêt.

Il suit de ce qui précède et de la saisine du juge du fond qu'il n'y a pas lieu à référé sur l'acquisition de la clause résolutoire au titre du commandement du 18 mai 2016, étant observé au demeurant que cette demande, qui n'a pas été présentée devant le premier juge, apparaît sérieusement contestée, quant à l'exercice par des sociétés tierces des activités de formation menées dans les locaux loués à la société MEDIASITE depuis 20 ans, qu'aucun élément en débat n'étaye à l'évidence.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes du dispositif de la présente décision.

La société MEDIASITE, partie perdante, ne peut prétendre à une indemnité de procédure et doit supporter la charge des dépens, conformément aux articles 696 et 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau,

CONSTATE l'acquisition de la clause résolutoire des quatre baux litigieux à compter du 5 février 2016 ;

ORDONNE en conséquence à la société MEDIASITE et à tous occupants de son chef de libérer les lieux loués dans le mois de la signification de l'arrêt et, à défaut, son expulsion, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, sous astreinte de 600 € par jour de retard pendant quatre mois ;

CONDAMNE la société MEDIASITE à payer à la société COMPLEXE MJD la somme provisionnelle de 250.000 € à valoir sur sa dette locative arrêtée au 1er janvier 2017 outre une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du loyer courant, charges en sus, à compter du 5 février 2016 jusqu'à libération des lieux ;

CONDAMNE la société MEDIASITE à payer à la société COMPLEXE MJD une indemnité de procédure de 3.000 € ;

CONDAMNE la société MEDIASITE aux dépens et REJETTE toute autre demande.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 16/13288
Date de la décision : 23/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°16/13288 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-23;16.13288 ?
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