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22/02/2017 | FRANCE | N°08/23889

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 22 février 2017, 08/23889


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2017



(n° , 23 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/23889



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/10746





APPELANTE



Société DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION agissant en la personne de ses représentants légaux


[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par : Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée par : Me Arnault BUISSON-FIZELLIER, avocat au barreau de PARIS...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2017

(n° , 23 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/23889

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/10746

APPELANTE

Société DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par : Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée par : Me Arnault BUISSON-FIZELLIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P 496

INTIMEES

S.A. AXA FRANCE IARD en qualité d'assureur de la société QUAGLIAROLI FRERES prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par : Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée par : Me Frédéric DOCEUL, avocat au barreau de PARIS, toque : PARIS 483

LA SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS- SMABTP en qualité d'assureur de la société QUAGLIAROLI FRERES prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée par : Me Stéphane LAMBERT , avocat au barreau de PARIS, toque : C10

S.A. AXA ASSURANCE, exerçant sous la dénomination AXA WINTERTHUR, pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 4] (SUISSE)

Représentée par : Me Olivier BURETH de la SELARL KAB - KUCKENBURG BURETH BOINEAU et Associes, avocat au barreau de PARIS, toque : P0529

Assistée par : Me Anne TUENNEMANN, avocat au barreau de PARIS , toque : P0529

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre et de Madame Maryse LESAULT, conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre

Madame Maryse LESAULT, conseillère

Madame Valérie GERARD, conseillère

Qui en ont délibéré

Rapport ayant été fait par Madame Maryse LESAULT, conseillère, conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Vidjaya DIVITY

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente et par Madame Vidjaya DIVITY, greffier présent lors du prononcé.

EXPOSÉ DU LITIGE ET DES DEMANDES

La Société de Manutention de Carburants Aviation, ci-après SMCA, qui exploite un dépôt de stockage de carburant sur le site de l'aéroport [Établissement 1] à [Localité 1], a en tant que maître d'ouvrage, fait construire des cuvettes de rétention au pourtour des cuves de stockage de carburants afin, pour répondre à la règlementation en vigueur (dite « IM89 »), de recueillir ce carburant en cas de fuites provenant des cuves.

Après l'appel d'offres sur la base d'une notice descriptive, laissant aux entreprises concourantes le choix de la solution technique, les intervenants retenus pour réaliser cette installation ont été :

-l'entreprise QUAGLIAROLI FRERES ci-après QF, chargée de la construction. Assurée auprès d'AXA France et de la SMABTP, elle a été mise en liquidation judiciaire le 14 mars 2002.

-la société de droit suisse PRODUITS ET TECHNIQUES dite PTI, conceptrice de la membrane destinée à assurer l'étanchéité des cuvettes. Assurée auprès d'AXA ASSURANCES WINTERTHUR (ci-après WINTERTHUR) elle a été mise en faillite par jugement du 6 juillet 2006.

-la fabrication de la membrane avec les produits PTI a été assurée par la société PIERRE LIQUIDE.

Il n'y a pas eu de maîtrise d''uvre distincte ni de désignation d'un contrôleur technique.

Le choix technique retenu a consisté à réaliser une forme en béton fibré d'une épaisseur moyenne de 5cm après égalisation et compactage du terrain. Puis à appliquer sur cette forme en béton une couche projetée de la membrane de type « IR 4010 » conçue par PTI, d'une épaisseur d'au moins 3 mm, et à traiter les joints de fractionnements de la forme en béton fibré en incorporant dans la membrane un intissé.

Cette solution a été retenue par SMCA qui en a passé commande à QF le 27 novembre 1999 pour le montant de 419 890 € HT.

Il y a eu deux commandes de travaux complémentaires à QF :

- le 27 mai 1999 pour l'application de membranes supplémentaires,

- en mars-mai 1999, commande à la société de droit suisse PTI (ci-après PTI) concepteur de membranes destinées au bâtiment et à l'industrie, des poudres et liants permettant de réaliser la membrane nécessaire à l'exécution des travaux.

La réception a été prononcée sans réserve le 25 juin 1999 en présence du maître d'ouvrage, de l'entreprise QF et du représentant de PTI.

Des désordres sont apparus sur les ouvrages en 2002 et SMCA a formé une déclaration de sinistre auprès de la compagnie AXA France IARD, assureur de QF, laquelle avait été entre-temps mise en liquidation judiciaire.

L'assureur a diligenté une expertise amiable sans former d'offre d'indemnisation.

La SMCA a obtenu la désignation d'un expert judiciaire, en la personne de M. [S], par ordonnance de référé du 11 août 2004. Celui-ci a clos son rapport le 17 avril 2008.

Sur autorisation du président du tribunal de grande instance de PARIS, la SMCA, par actes des 26 juin 2008 et 11 juillet 2008, a assigné au fond à jour fixe les sociétés AXA FRANCE IARD et SMABTP en qualité d'assureurs respectifs de la société QF ainsi que la société AXA ASSURANCES dite WINTERTHUR en sa qualité d'assureur de PTI.

A la suite d'une exception d'incompétence territoriale soulevée par la société AXA WINTERTHUR sur le fondement de la convention de LUGANO, et par l'effet d'un jugement de disjonction du 27 novembre 2008, la demande formée par la SMCA à l'encontre d'AXA WINTERTHUR a été renvoyée devant le tribunal de grande instance de Pontoise, saisi en particulier de l'action directe de SMCA contre la WINTERTHUR.

Par jugement du 4 décembre 2008 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris :

-s'est déclaré compétent pour connaître des appels en garantie formés par AXA France et la SMABTP à l'encontre d'AXA ASSURANCES dite WINTERTHUR,

-a déclaré la société QF responsable des dommages résultant des désordres affectant les cuves,

-a condamné la société AXA France à payer à la SMCA la somme de 419 890€ sous réserve de la franchise applicable,

-a rejeté :

. l'ensemble des demandes de la SMCA formées à l'encontre de la SMABTP,

. la demande de garantie formée par AXA France contre AXA ASSURANCES (WINTHERTHUR)

-a condamné AXA France à payer à la SMCA la somme de 20 000€ au titre de l'article 700 du C PC,

-a condamné la SMCA à payer à la SMABTP la somme de 3000€ sur ce fondement,

-a condamné AXA FRANCE aux dépens dont recouvrement selon les dispositions de l'article 699 du C PC.

La SMCA a interjeté appel de cet arrêt et fait intervenir AXA WINTERTHUR en intervention forcée.

De son côté le tribunal de grande instance Pontoise, par jugement rendu le 19 avril 2013 a :

- débouté la SMCA de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la SMCA à payer à la société AXA ASSURANCES SA la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- rejeté toute autre demande.

SMCA a interjeté appel de cet arrêt.

Par ordonnance du 17 décembre 2013 le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles a ordonné la transmission de cette instance auprès de la cour d'appel de Paris.

La jonction des deux instances a été ordonnée par ordonnance du conseiller de Paris du 1er juillet 2014.

1-Par conclusions du 20 septembre 2016 la SMCA demande à la Cour en se fondant sur le rapport de l'expert judiciaire du 17 avril 2008 :

-d'entériner ce rapport d'expertise en ce qu'il a considéré que :

- Les désordres rendent l'ouvrage impropre à sa destination,

- La solution du « devis SATRAS » est la solution de réfection à retenir,

- PTI et QF sont corresponsables des désordres.

Et, statuant sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris du 4 décembre 2008, vu les polices de responsabilité décennale d'AXA FRANCE et de la SMABTP, et les articles 1792 et suivants du code civil, L.241-2 et A.243-1 du code des assurances,

A titre principal de :

-confirmer le jugement entrepris,

-en ce qu'il a déclaré QF responsable des désordres,

-en ce qu'il a débouté les intimés de l'ensemble de leurs arguments tendant à faire supporter une part de responsabilité à SMCA,

-infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a refusé de considérer les travaux d'étanchéité litigieux comme des travaux faisant appel aux «techniques des travaux de bâtiment »,

-et l'infirmer partiellement en ce qu'il a considéré que les désordres relevaient de la garantie « ouvrage de génie civil » d'AXA, alors qu'il relève de l'assurance de responsabilité décennale de la SMABTP en application de la jurisprudence des « techniques des travaux de bâtiment »,

- dire que les exclusions de garantie dont se prévaut la SMABTP sont inapplicables en matière d'assurance construction obligatoire et que les travaux d'étanchéité dont s'agit font partie de l'activité déclarée par QF,

En conséquence,

-condamner la SMABTP à lui verser la somme de 3.779.461,38 € HT en réparation du montant des travaux de réfection,

A titre subsidiaire, si la SMABTP devait être totalement mise hors de cause,

-dire que la garantie AXA FRANCE ne distingue nullement entre le marché d'étanchéité compris dans sa globalité et le seul procédé IRETE,

En conséquence,

-confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a condamné AXA FRANCE à indemniser SMCA à hauteur du coût initial de l'ouvrage, soit la somme de 419.890 €,

Sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise du 19 avril 2013, vu l'article L.124-3 du Code des assurances, la garantie responsabilité civile d'AXA WINTERTHUR, les articles 1792 et suivants, et 1382 du code civil,

A titre liminaire,

-rejeter la fin de non -recevoir infondée soulevée par AXA WINTERTHUR, ainsi que la demande reconventionnelle d'AXA WINTERTHUR visant à obtenir la condamnation de SMCA à payer la somme de 50.000 € au titre d'un prétendu abus des droits procéduraux de la part de l'appelant,

Sur le fond,

-constater que PTI a engagé sa responsabilité vis-à-vis de SMCA sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ou à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré SMCA irrecevable à agir contre AXA WINTERTHUR sur le fondement de l'action directe,

-dire que le sinistre dont s'agit entre dans l'objet de la garantie responsabilité civile d'AXA WINTERTHUR,

-dire inapplicables les exclusions de garantie dont se prévaut AXA WINTERTHUR,

En tout état de cause,

-condamner in solidum la SMABTP sur le volet responsabilité décennale de la police souscrite par QF , et AXA WINTERTHUR au titre de la police responsabilité civile souscrite par PTI, à payer à SMCA, dans la limite de leur plafond d'assurance respectif, la somme de 3.779.461,38 € HT correspondant au coût des travaux de réfection de l'étanchéité des cuvettes de réception,

-subsidiairement dans l'hypothèse où la Cour considérerait que seul le coût des travaux à ce jour engagé doit faire l'objet d'une condamnation, il la prononcera dans les mêmes conditions à hauteur de 3.068.308 € HT,

-condamner in solidum la SMABTP (ou AXA FRANCE en cas de mise hors de cause de la SMABTP) et AXA WINTERTHUR à payer la somme de 130.000 € à SMCA au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner in solidum AXA FRANCE, la SMABTP et AXA WINTERTHUR aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise dont recouvrement selon les conditions de l'article 699 du CPC .

2-Par conclusions du 15 décembre 2015, AXA France IARD en qualité d'assureur de QF demande à la cour de :

-juger que SMCA est responsable des désordres qu'elle allègue tout au moins en partie,

-juger, si les travaux entrepris relèvent de l'assurance obligatoire comme le prétend SMCA, qu'AXA France ne garantit pas en tout état de cause la conséquence des désordres sur les ouvrages de bâtiment ou relevant de techniques de bâtiment,

En conséquence,

-débouter SMCA de toutes ses demandes à son encontre,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à verser à SMCA la somme de 419 890€ ainsi que la somme de 20 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance,

-condamner SMCA à lui restituer la somme de 417 022,65€ outre intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2009 jusqu'à parfait paiement

A titre subsidiaire si la cour considère que les désordres allégués par SMCA sont garantis au titre de la police AXA France IARD,

-juger que PTI assurée par AXA WINTERTHUR est responsable à tout le moins de 50% des désordres allégués par l'appelante,

-en tout état de cause, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que les condamnations qui peuvent être mises à la charge d'AXA France IARD ne peuvent être supérieures à 419 890€, coût de l'ouvrage d'origine, conformément au montant du plafond de garantie prévu dans sa police d'assurance n°375035166768A,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le montant de la franchise opposable doit venir en déduction des condamnations qui pourraient être retenues par le tribunal à son encontre, conformément aux conditions générales et particulières de la police,

A titre plus subsidiaire,

-condamner SMCA, la SMABTP, AXA WINTERTHUR à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être rendues à son encontre,

En tout état de cause condamner SMCA et tous succombants à lui payer 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont recouvrement selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

3-Par conclusions du 10 mars 2015, la SMABTP, assureur de QF demande à la cour, vu la police souscrite par la société QF auprès d'elle, de :

-déclarer la SMCA irrecevable et mal fondée en ses appels, l'en débouter.

Sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 4 décembre 2008

- constater que :

-la société QF FRERES avait souscrit un contrat d'assurance auprès de la SMABTP pour les activités déclarées de « structure et travaux courants de maçonnerie - béton armé ».

-les travaux litigieux ont consisté en des travaux d'étanchéité avec application d'une membrane selon un procédé très spécifique, à destination de réservoirs de stockage de carburants, et sur la réalisation d'une chape en béton fibré.

- en conséquence,

-dire que :

-les travaux réalisés ne correspondent pas aux activités déclarées au contrat d'assurance souscrit auprès de la SMABTP,

-les travaux réalisés sont de technique non courante,

-la SMABTP est fondée à dénier sa garantie.

- débouter SMCA de toutes ses demandes dirigées à son encontre de même que tout appelant en garantie.

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions à son égard.

- A titre subsidiaire,

- condamner AXA France IARD à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

- dire qu'elle ne peut être tenue que dans les limites et conditions du contrat d'assurances, lequel prévoit l'application d'une franchise et d'un plafond de garantie opposable d'un montant de 2.286.735€.

Sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de PONTOISE le 19 avril 2013

- confirmer ce jugement en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes formulées par la SMCA,

- constater que la société QF avait souscrit un contrat d'assurance auprès de la SMABTP pour les activités déclarées de « structure et travaux courants de maçonnerie - béton armé ».

- constater que les travaux litigieux ont consisté en des travaux d'étanchéité avec application d'une membrane selon un procédé très spécifique, à destination de réservoirs de stockage de carburants, et sur la réalisation d'une chape en béton fibré.

En conséquence,

- constater que les travaux réalisés sont de technique non courante.

- dire que :

- les travaux réalisés ne correspondent pas aux activités déclarées au contrat d'assurance souscrit auprès de la SMABTP,

-la SMABTP est fondée à dénier sa garantie,

-seule la compagnie AXA FRANCE IARD a vocation à garantir l'entreprise QUAGLIARIOLI FRERES.

- débouter toute partie de toutes demandes dirigées à son encontre,

En toute hypothèse,

- dire que la responsabilité de la société QF ne saurait excéder 50 %,

- condamner la compagnie AXA France IARD à relever et garantir la SMABTP des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- dire que la SMABTP ne peut être tenue que dans les limites et conditions du contrat d'assurance, lequel prévoit l'application d'une franchise et d'un plafond de garantie opposable d'un montant de 2.286.735 €,

En toute hypothèse

- condamner la société SMCA ou tous succombants à payer à la SMABTP la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile et en tous les dépens, dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du code procédure civile.

4-Par conclusions du 27 juin 2016 AXA WINTERTHUR, société de droit suisse, demande à la Cour:

A-Statuant sur l'appel de SMCA contre le jugement de Pontoise, vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, les articles 3 du code civil, ensemble le principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, 3, 4 et 7 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, 3 de la Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels,

Vu la Convention des Nations-Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises, signée à Vienne le 11 avril 1980, spécialement ses articles 1 (1) (a), 4, 7, 35, 39, 77, 79 et 80,

Vu les articles L.181-1 et 182-1 du Code des assurances, a contrario,

Vu l'article 2 du Code civil suisse et les articles 363, 367, 370, 371, 200, 97 à 99 et 41 à 44 du Code des obligations suisse, l'article 60 de la Loi fédérale suisse sur le contrat d'assurance,

Vu les articles 1792 et 1382 et suivants du code civil, L.241-1 du code des assurances,

Vu l'article 1er du Premier protocole concernant l'interprétation par la Cour de Justice des Communautés européennes de la Convention de Rome, du 19 décembre 1988, publié au Journal officiel de la République française en vertu du Décret n° 2005-17 du 5 janvier 2005,

A titre principal de :

- déclarer irrecevables les demandes de la SMCA par application de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui (Estoppel),

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SMCA de la totalité de ses demandes contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de PTI S.A.,

A titre subsidiaire, statuant sur les demandes de SMCA telles que présentées en cause d'appel

Sur la qualification des demandes de SMCA et les règles de droit applicable :

- qualifier les demandes de la SMCA contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de la société PTI S.A. comme une action de nature nécessairement contractuelle,

-juger :

-qu'aucune responsabilité (quasi-)délictuelle ne peut être invoquée pour les mêmes faits ;

-que les contrats de vente conclus entre la société suisse PTI S.A. et la société française QF étaient régis par la Convention de Vienne du 11 avril 1980 et, en cas de lacune de celle-ci, par le droit suisse, en vertu de l'article 3 de la Convention de La Haye du 15 juin 1955 ;

-que l'hypothétique contrat portant sur la (co-)conception de l'ouvrage d'étanchéité du site de la SMCA prétendument conclu entre celle-ci et PTI S.A., ou entre la société QF et PTI S.A. (formellement contesté par AXA ASSURANCES S.A. (Suisse)) aurait, s'il avait existé, été régi par le droit suisse en application de l'article 4.2 de la Convention de Rome ;

- A défaut, au cas où la Cour de céans serait encline à considérer que le droit français doit s'appliquer à ce contrat hypothétique et contesté, en vertu de l'article 4.5 de la Convention de Rome du 19 juin 1980:

-soumettre à la Cour de Justice de l'Union européenne une question préjudicielle, en vertu du Premier protocole concernant l'interprétation de la Convention de Rome du 19 juin 1980, afin de savoir si cette Convention permet une telle interprétation de la clause d'exception figurant à son article 4.5 selon laquelle celle-ci doit conduire systématiquement à l'application de la lex rei sitae aux contrats portant sur des travaux immobiliers,

- constater que le contrat d'assurance souscrit par la PTI S.A. auprès de la compagnie UAP (aux droits de laquelle vient AXA ASSURANCES S.A. (Suisse)), son interprétation, ainsi que ses limites et exclusions de la garantie d'assurance sont régis par le droit suisse,

- juger que la question de l'ouverture d'une action directe contre l'assureur responsabilité civile est régie par le droit applicable au contrat d'assurance, ou par le droit applicable à l'action contre le preneur d'assurance lui-même ;

- Sur la confirmation du jugement dont appel :

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de pontoise du 19 avril 2013,

- en ce qu'il a considéré que l'action exercée par la SMCA est de nature nécessairement contractuelle, que l'admissibilité d'une telle action directe du sous-acquéreur dans le cadre d'une chaîne de contrats translatifs de propriété est régie par le droit applicable au contrat conclu par son défendeur (en l'espèce, la Convention de Vienne du 11 avril 1980 et, en cas de lacune de celle-ci, le droit suisse) et qu'en application de ces droits, aucune telle action directe n'est ouverte ;

- en ce qu'il a considéré qu'en l'absence d'action de la SMCA contre la société PTI S.A., toute action contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de cette dernière est également exclue ;

- en ce qu'il a débouté la SMCA de la totalité de ses demandes contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de la société PTI S.A. ;

Ou, à titre subsidiaire, à défaut d'une confirmation dudit jugement pour les motifs adoptés des premiers juges,

Sur la recevabilité des demandes :

- déclarer irrecevables l'ensemble des demandes de la SMCA contre la compagnie AXA ASSURANCESS S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de la société PTI S.A. :

- en ce qu'elles sont considérées comme fondées sur un hypothétique contrat de maîtrise d'oeuvre entre SMCA et PTI, pour les raisons exposées sous IV.1 :

- en raison de la péremption des droits de la SMCA en application du droit suisse ;

- et / ou en raison de la prescription de son action, en application du droit suisse ;

- OU, en ce qu'elles sont considérées comme fondées sur l'action directe du sous-acquéreur, de nature nécessairement contractuelle, pour les raisons exposées sous IV.2:

- en raison de l'absence d'un tel droit d'action direct dans les droits applicables à cette question, correctement déterminé par le tribunal de grande instance de Pontoise ;

- à titre subsidiaire, en raison de la déchéance de LA SMCA de ses droits en vertu de l'article 39 de la Convention de Vienne ;

- OU, quel que soit le fondement des demandes de SMCA, pour les raisons exposées sous IV.3:

- en raison de l'absence d'un droit d'action direct contre l'assureur responsabilité civile dans le droit suisse, applicable à cette question à titre de loi du contrat d'assurance et / ou loi régissant l'action en responsabilité de la SMCA contre la société PTI S.A.

A titre plus subsidiaire

- Statuant sur les défenses au fond :

- confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Pontoise du 19 avril 2013, en ce qu'il a débouté la SMCA de la totalité de ses demandes contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de la société PTI S.A., mais pour un autre motif que celui retenu par les premiers juges :

- en raison de l'absence d'un droit d'action direct contre l'assureur responsabilité civile pour les raisons exposées sous IV.3

OU

- en raison de l'absence d'engagement de la garantie d'assurance la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) pour les raisons exposées sous V.

OU

- en raison de l'absence de toute responsabilité (contractuelle ou (quasi-)délictuelle) de la société PRODUITS ET TECHNIQUES - PTI S.A., pour les raisons exposées sous VI. 159

Ou à titre infiniment subsidiaire, au cas où le jugement entrepris serait réformé à la demande de la SMCA :

- débouter la SMCA de ses demandes contre la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) ès qualité d'assureur de la PTI S.A. en ce qu'elles dépassent:

- 10 % (ou tel pourcentage inférieur qu'il plaira à la Cour de fixer pour déterminer la quote-part de responsabilité incombant à PTI S.A. par rapport à celle de la société QF) de 70 % (ou la différence entre 100 et tel pourcentage supérieur qu'il plaira à la Cour de fixer pour mesurer la diminution de la responsabilité des PTI S.A. et QF compte tenu de la faute concurrente de la SMCA de 142.330,00 €, soit un montant maximum de 9.963,10 €,

OU, A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE :

- 10 % (ou tel pourcentage inférieur qu'il plaira à la Cour de fixer pour déterminer la quote-part de responsabilité incombant à PTI S.A. par rapport à celle de la société QF) de 70 % (ou la différence entre 100 et tel pourcentage supérieur à 30 qu'il plaira à la Cour de fixer pour mesurer la diminution de la responsabilité des PTI S.A. et QF compte tenu de la faute concurrente de la SMCA) de 458.391,48 €, soit un montant maximum 32.087,40 €,

OU, A TITRE ENCORE PLUS SUBSIDIAIRE :

- 50% du montant du préjudice indemnisable qui peut, de l'avis de la Cour, être considéré comme causé par une faute de PTI S.A., diminué des pourcentages qu'il plaira à la Cour de fixer (i) au titre de la faute concurrente de la SMCA et (ii), au cas où elle aurait retenu la responsabilité de PTI au titre d'une mission contractuelle de maîtrise d'oeuvre assumée à titre gratuit, au titre de la réduction de responsabilité résultant de l'article 99, alinéa 2 du Code de s obligations suisse, pour les raisons exposées sous VI.2 / 3,

OU, A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :

- 2.650.707 € pour les raisons exposées sous VI.3.1.3

En tout état de cause :

-débouter la SMCA à payer à la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) un montant de 70.000 € à titre de dommages-intérêts pour un abus de ses droits procéduraux,

-pour les raisons exposées sous VII, la condamner au paiement d'une amende civile sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile,

-pour les raisons exposées sous VII. 160 la condamner, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au paiement de la somme de 200.000 € à la société AXA ASSURANCES S.A. ;

-pour les raisons exposées sous IX, la condamner aux entiers dépens avec recouvrement conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

B ' Statuant sur les demandes subsidiaires de recours réciproques entre la compagnie AXA ASSURANCES SA d'une part, et les compagnies AXA France IARD et SMABTP d'autre part :

Vu les articles 13.1 et 13.2 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, 1134, 1147, 1156, 1214 et 1351du code civil, L. 241-1, L. 243-8 et A.243-1 du code des assurances, ensembles l'Annexe I à ce dernier article, tous pris en leur rédaction applicable en 1999,

- déclarer recevable l'appel incident de la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) contre le jugement du Tribunal de grande instance de Pontoise du 19 avril 2013 ;

- déclarer recevable, en tant que de besoin l'appel incident de la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) contre le jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 4 décembre 2008

A titre subsidiaire, au cas où une condamnation à indemniser, en tout ou en partie, SMCA du préjudice subi par elle serait prononcée à l'encontre de la compagnie AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) :

- condamner les compagnies AXA FRANCE IARD S.A. et SMABTP, en tant que débiteurs in solidum, à garantir AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) de toute condamnation en principal qui serait prononcée contre elle au profit de la SMCA et qui dépasserait :

- débouter les compagnies AXA FRANCE IARD S.A. et SMABTP de toutes demandes de garantie à l'encontre d'AXA ASSURANCES S.A. (Suisse) qui dépassent, au total, le montant maximum que la Cour aura retenu en statuant sur la prétention précédente ;

- condamner la compagnie AXA FRANCE IARD S.A. et la SMABTP à verser chacune à la société AXA Assurances S.A. la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- pour les raisons exposées aux paragraphes VIII. et IX des conclusions.

En tout état de cause :

- condamner les sociétés AXA FRANCE IARD S.A. et SMABTP aux dépens, avec bénéfice de distraction au profit de la SELARL Kuckenburg Bureth Boineau et Associés ' KAB, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 8 novembre 2016.

Il est renvoyé aux conclusions pour plus ample exposé des demandes et moyens des parties.

SUR CE, LA COUR

·Désordres et responsabilités

·Les désordres

Il sera rappelé pour mémoire qu'ils ont porté sur les points suivants :

-fissuration quasi systématique de la membrane au droit des joints de fractionnement de la forme en béton fibré, fissuration de la membrane et de son support,

-présence de petites pustules (cloques) qui dans la quasi-généralité des cas, sont de couleur blanchâtre,

-décollements de la membrane par rapport à son support,

L'expert judiciaire (page 11 du rapport) a retenu plusieurs causes à ces désordres:

-une exécution non conforme aux règles de l'art de la membrane, expliquant les fissures au droit des joints de fractionnement de la forme support en béton fibré. L'épaisseur de la membrane est très variable, pouvant descendre jusqu'à 1,5mm,

-une exécution non conforme aux règles de l'art de la forme support en béton fibré qui explique les fissures constatées en partie courante de l'étanchéité. Il a en particulier été constaté après essais confiés au LNE (laboratoire national d'essais) que la forme en béton fibré avait une épaisseur très variable puisque comprise entre 1,5 cm et 10 cm, alors qu'elle aurait dû être d'une épaisseur d'au moins 12 cm,

-l'existence sur cette forme d'un ragréage adhérant mal, d'une épaisseur comprise entre 1m et 5 mm,

-absence d'un dispositif constructif pour éviter les remontées d'humidité capillaires, sous forme de feuille de polyéthylène, expliquant l'apparition des pustules sur la membrane étanche, et les décollements de celle-ci.

Le coût réparatoire

La SMCA fixe sa demande d'indemnisation à la somme de 3.779 461,38 € HT en se basant sur les conclusions expertales qu'elle complète par une réclamation d'honoraires de contrôle technique et de coordination du chantier évaluée à 132 612,68€ HT (4% du montant HT des travaux).

L'expertise a permis de déterminer la nécessité de procéder à une réparation « radicale » permettant d'éviter les remontées capillaires, consistant à conserver l'ancienne forme en béton fibré après l'avoir correctement nettoyée, à réaliser sur cette forme ancienne un dallage en béton armé de 12 cm d'épaisseur, en interposant une couche de désolidarisation en sable et deux feuilles de polyéthylène pour prévenir les remontées capillaires, et à appliquer sur le dallage une membrane de même type que la membrane originelle, avec traitement des joints de fractionnement selon les règles de l'art.

Le coût de ces travaux a été évalué par l'expert à la somme de 3.315 317€ HT soit en incluant le coût de la maîtrise d''uvre à 3 646 849 € HT.

WINTERTHUR fait observer que les travaux réparatoires ont été réalisés par SMCA en 2009-2010 pour un coût total HT de 3 068 308 € incluant les honoraires de maîtrise d''uvre [ 2.788 927 € + 279 381 € (10%)] ce qui n'est pas contesté, et qu'elle en saurait réclamer un montant supérieur.

Cette somme de 3.068.308 € HT et sera retenue au titre du coût réparatoire.

Le surplus réclamé au titre du contrôle technique et de la coordination des travaux n'est pas justifié étant rappelé que le poste de contrôle technique n'a pas été discuté devant l'expert, que la nature de l'opération requiert nécessairement de recourir à un maitre d''uvre d'exécution spécialisé, alors que la coordination n'est requise qu'en cas de pluralité d'entreprises ou de travailleurs indépendants travaillant simultanément sur un même chantier, et vise à prévenir les risques que cette co-intervention génère.

Pour mémoire le jugement du tribunal de grande instance de Paris, en application de la police souscrite auprès d'AXA France, a condamné AXA France à payer à SMCA la somme de 419 890€, correspondant au coût initial de construction de l'installation.

Les responsabilités

La SMCA recherche la responsabilité de l'entreprise QF et celle de PTI.

Les parties adverses invoquent une part de responsabilité de SMCA.

L'expert a rappelé que lors de la réalisation des cuvettes,

-la SMCA a laissé entièrement à la charge des entreprises le choix du type d'ouvrage à réaliser,

-que la solution alors proposée par QF avait été étudiée conjointement avec le fabricant de la membrane mise en 'uvre, à savoir PTI,

-que de plus PTI a été associée au suivi des travaux et qu'elle a même participé à leur réception, dont elle a signé le procès-verbal,

Estimant que les désordres relevaient d'erreurs de conception, l'expert a proposé de retenir pour part égale la responsabilité de QF et celle de PTI.

Au regard de la discussion concernant les responsabilités encourues, la Cour retient que :

-par des motifs pertinents qu'elle adopte, le tribunal de grande instance de Paris a écarté la responsabilité du maître d'ouvrage. Sur ce point :

.il n'est effectivement démontré aucune compétence professionnelle de la SMCA dans la réalisation d'équipements de génie civil à finalité d'étanchéité,

.il n'a en outre pas été relevé d'immixtion du maître d'ouvrage l'expert ayant au contraire indiqué qu'elle ne s'était à aucun moment immiscée dans la conception technique et dans la conduite des travaux, et qu'elle ne pouvait supposer qu'il pouvait y avoir une relation entre la nature du sol et la bonne tenue des travaux dans le temps de l'ouvrage d'étanchéité imaginé par QF et PTI (Rapport page 15). Sur ce point l'expert a noté la différence de situation entre ce chantier et celui, similaire, réalisé à [Localité 5] où le maître d'ouvrage était intervenu.

-le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de QF. Le fondement contractuel s'applique dès lors que l'installation construite par sa spécificité n'est pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil mais un équipement de génie civil.

Sur ce point en effet les cuvettes ne constituent pas des bâtiments, ou des éléments de bâtiments élaborés selon les techniques du bâtiment et selon les techniques courantes de construction.

D'une part Il s'agit d'éléments destinés à faire partie d'un dispositif de stockage et d'exploitation de carburant, à vocation industrielle, et en particulier à prévenir la pollution des sols par des hydrocarbures, dans les conditions prévues par les instructions ministérielles édictées en 1989.

D'autre part le choix constructif a fait appel à deux techniques innovantes, celle du béton fibré dont les brevets ont été déposés en 1997 (Béton Fibré à Ultra-hautes Performances (BEFUP)) pour construire la coque ou forme des cuvettes, et celle de la membrane étanche IR 4010 ® permettant précisément de réaliser l'étanchéité des dépôts pétroliers et des raffineries conformément à l'IM 89. (Instruction Ministérielle du 9.11.1989), dont la mise en 'uvre requiert l'agrément du fournisseur aux entreprises.

Les manquements de QF, titulaire du marché après avoir vu son offre retenue, sont notamment caractérisés par :

.l'absence de prise d'information sur la nature du sol, ou de préconisation auprès du maître d'ouvrage aux fins d'analyse géotechnique,

.l'absence de dispositif pour éviter les remontées d'eau par capillarité,

.la réalisation de la forme en béton fibré, du ragréage et de la membrane d'étanchéité sans respecter les épaisseurs définies pour chacune des étapes de ce chantier par les normes et règles de l'art dans ce domaine spécifique,

.le traitement non adapté des joints et réalisation de la membrane PTI sans respect de l'épaisseur requise

S'agissant de la responsabilité recherchée de la société PTI,

-le tribunal de grande instance de Paris a évoqué dans ses motifs (page 11 du jugement entrepris) la responsabilité de PTI en ces termes : « il apparaît ainsi que, tant la conception de l'ouvrage par la société PRODUITS ET TECHNIQUES PTI et la société QUAGLIAROLI FRERES que la réalisation du dallage et l'application de la membrane par cette dernière sont en cause dans la survenance des désordres ».

-le jugement rendu le 19 avril 2013 par le tribunal de grande instance de Pontoise, saisi de l'action directe de SMCA contre l'assureur de PTI a écarté l'existence d'un lien contractuel direct entre PTI et la SMCA (page 9) en rappelant d'une part les commandes et devis intervenus entre SMCA et QF, d'autre part les factures établies par PTI à l'ordre de QF pour la fourniture des composants de la membrane. Il a retenu l'existence d'une chaîne de contrat pour la fourniture des composants de la membrane (page 9).

-Selon SMCA l'entreprise PTI est à titre principal responsable à son égard sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs. SMCA invoque au soutien de cette position le fait que PTI a accompli des prestations de maîtrise d''uvre, a fourni les matériaux nécessaires à la confection de la membrane, a participé en amont à la rédaction du Cahier des Charges relatif à la mise en 'uvre de la solution technique retenue et aux spécifications techniques du chantier et a participé en aval aux opérations de réception de l'ouvrage et en ayant signé le procès-verbal de réception.

-WINTERTHUR assureur de PTI conteste l'existence d'un contrat de maîtrise d''uvre et soutient que PTI n'a été que simple vendeur. Au soutien de sa contestation, elle invoque une présentation erronée des faits par SMECA, ajoute que c'est QF qui est le concepteur de l'ouvrage et que tout rôle de conseil de PTI a toujours été contesté, alors qu'en raison de la faillite de celle-ci en 2006, seule SMCA était présente à l'expertise. S'agissant des pièces produites par cette dernière sous cote n°18, datant du 10/4/98, WINTERTHUR relève qu'elles sont antérieures à la consultation lancée pour ce chantier et ne constituent qu'une notice technique générale. Elle ajoute que la signature du procès-verbal de réception n'établit pas l'existence d'un contrat de maîtrise d''uvre et qu'elle était prévue en lien avec le contrat de maintenance qui avait été envisagé pour une durée de 10 ans mais que finalement la SMCA n'a pas souscrite.

S'il n'existe pas une définition unique, il est cependant admis que la maîtrise d'oeuvre est l'ensemble des prestations de conseil, d'études et de direction de travaux qu'un professionnel exécute pour le compte d'un client, maître d'ouvrage, en vue de réaliser des travaux et qui consiste principalement à :

concevoir un projet de construction neuve ou d'intervention sur un bâtiment existant ;

préparer les marchés de travaux passer avec les entrepreneurs ;

diriger les travaux réalisés par les entrepreneurs choisis, vérifier qu'ils sont exécutés conformément aux dispositions du marché et en contrôler les paiements ;

assister son client pour la réception.

C'est un professionnel qui a pour rôle de concevoir, coordonner et contrôler la bonne exécution des travaux.

En l'espèce, force est de constater qu'il n'est pas démontré de lien contractuel direct entre la SMCA et PTI.

En effet, l'appel d'offre aux entreprises n'a pas été lancé sur la base d'un projet technique préalablement défini, à l'élaboration duquel serait intervenu PTI, mais sur la base d'une demande de « mise en conformité IM89 » selon arrêté préfectoral du 26 octobre 1994 (Préfecture du Val d'Oise) de quatre cuvettes de rétention (N°1,2,11 et 12 du dépôt de [Localité 1]) à charge pour les candidates de construire leur offre.

A cet égard il est inexact de présenter « PTI fabricant de la membrane « IR 4010 », comme ayant rédigé les documents techniques afférents à la réalisation des travaux d'étanchéité, savoir le « cahier des charges » relatif à la membrane et les « spécifications du chantier » (ccl. SMCA page 4) alors que les pièces présentées sous la cote n°18 ne constituent pas un cahier de charge de l'opération mais :

- pour deux d'entre elles (18-1 et 18-2) des fiches techniques dont :

- l'une (18-1) énonce les compétences spécifiques requises des entreprises exécutant des étanchéités à l'aide de produits PTI (nettoyage et sciage de fonds de cuvette, ragréage, pontage, création d'un sol minéral fibré, mise en forme et renforcement des merlons, mise en oeuvre de la membrane et traitement des joints'). Il s'agit sans ambiguïté d'un document général d'information (« SPECIF 1/ 10.04/1998 ») dépourvu de toute indication relative au chantier litigieux.

-l'autre (18-2) intitulé « CAHIER DES CHARGES » IR 4010-REVETEMENT MINERAL CUVETTES DE RETENTION » est également une fiche technique générale (datée « F.T. 16.09.1997 ») précisant les conditions dans lesquelles doit être mis en 'uvre le procédé de membrane minérale de PTI IR 4010, les caractéristiques des surfaces à revêtir et de cette membrane, ainsi que les essais qu'elle a subis en laboratoires.

Il est particulièrement intéressant de noter que cette fiche prévoit (page 3) que des contrôles du chantier seront exécutés sur les conditions de la mise en 'uvre, le respect de l'épaisseur et la réalisation de plaques et échantillons, contrôles que l'éditeur PTI mentionnent devoir être effectués en coordination avec le fabricant/auteur du procédé, c'est-à-dire elle-même.

Cette formulation renvoie à la relation ainsi susceptible d'être contractualisée entre elle-même et les entreprises choisissant de mettre en 'uvre ce procédé.

-le troisième document (coté 18-3), mentionnant cette fois précisément l'opération qu'il s'agit de réaliser, est établi sous la double entête QF-PTI et fait état des paramètres retenus pour réaliser l'opération. Il est selon toute vraisemblance à destination de la SMCA et ne fait que contribuer à définir l'offre de travaux.

Aucun document ne place PTI en rôle de maître d''uvre, assistant le maître d'ouvrage et surveillant à son profit la réalisation des travaux, et le fait que cette société soit la conceptrice d'un produit d'étanchéité spécifique dont elle définit précisément les conditions de mise en 'uvre ne fait pas d'elle un maître d''uvre concepteur.

La production d'à tout le moins un document à double en-tête QF-PTI est au surplus antinomique avec la mission d'un maître d''uvre d'exécution qui, chargé de surveiller les entreprises et la coordination est par définition indépendant.

L'absence de tout règlement par la SMCA des prestations de PTI à celle-ci conforte ce constat.

Enfin il est une règle établie selon laquelle en l'absence de maîtrise d'oeuvre distincte, la mission attachée à cette maîtrise d''uvre est exercée par l'entreprise choisie.

De ce fait, au regard des éléments qui précèdent et des conditions dans lesquelles PTI définissait le contrôle de la mise en 'uvre de son produit, ce qui est un corollaire de la garantie attachée au produit, la signature de PTI apposée sur le procès-verbal de réception n'est en rien probante d'une maîtrise d''uvre distincte.

Au surplus comme il a été dit, la nature du chantier relève du génie civil et est à ce titre exclusive du régime de la responsabilité des constructeurs.

La responsabilité de PTI est recherchée à titre subsidiaire sur le fondement délictuel. SMCA se prévaut de ce que le manquement de PTI dans ses relations avec QF lui a causé préjudice et a engagé envers elle, tiers au contrat, sa responsabilité délictuelle.

Sur la fin de non- recevoir tirée du principe de l'Estoppel, opposée par WINTERTHUR recherchée en sa qualité d'assureur de la société PTI,

WINTERTHUR fait notamment grief à SMCA d'avoir pour la première fois motivé ses demandes à son encontre :

-sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l'article 1382 du code civil ou sur un fondement quasi délictuel, dans ses conclusions d'appel devant la cour d'appel de Versailles du 2 août 2013,

-sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil dans ses conclusions récapitulatives du 27 novembre 2014 puis dans celles du 10 février 2016,alors qu'en première instance SMCA avait toujours invoqué la responsabilité contractuelle de PTI avant de rechercher cette responsabilité sur le fondement d'un contrat de construction ou encore celui de la responsabilité quasi délictuelle, à seule fin d'obtenir l'application de la loi française,

WINTERTHUR fait valoir qu'il ne s'agit pas de nouveaux moyens, possibles en cause d'appel, mais de moyens développés depuis 2008 de manière contradictoire, l'empêchant de se défendre de manière efficace, obligée qu'elle a été de suivre SMCA dans ses nombreux revirements. Elle invoque la sanction d'une fin de non-recevoir consacrée par la cour de cassation et, invoquant les manquements graves à la loyauté procédurale et la tactique d'épuisement mise en 'uvre, qui lui ont causé grief, et au respect du service public de la justice, elle sollicite que les demandes de la SMCA soient déclarées irrecevables.

Il est rappelé que c'est sur une exception d'incompétence soulevée par WINTERTHUR que l'examen de l'action directe de SMCA contre elle a été renvoyée devant le tribunal de grande instance de Pontoise, cette instance ainsi devenue distincte ayant eu un objet différent de l'instance dont a été saisi le tribunal de grande instance de Paris. C'est WINTERTHUR qui devant le tribunal de Pontoise a attrait AXA France et la SMABTP assureurs de QF en jugement commun et en garantie.

La sanction d'irrecevabilité sollicitée par WINTERTHUR suppose établie la preuve d'une argumentation contradictoire et de mauvaise foi de SMCA ayant généré un préjudice à son égard.

En l'espèce d'une part l'argument d'une atteinte à sa défense n'apparaît pas pertinent alors que le tribunal de Pontoise a retenu la position que défendait WINTERTHUR à savoir l'application au litige les opposant de la loi suisse, et l'inexistence en droit suisse de l'action directe auprès de l'assureur.

Au surplus force est de constater que les variations de l'argumentation initiale de SMCA (Cf page 12 des conclusions de WINTERTHUR) sont restées dans le champ contractuel.

SMCA a pu, au regard du jugement rendu par le tribunal de Pontoise et comme le permettent les dispositions de l'article 563 du code de procédure civile, développer des moyens nouveaux au soutien précisément de son appel, puisque ce fondement contractuel écartait le bénéfice de l'action directe qu'elle recherchait. Admettre le contraire reviendrait en substance à la priver de son droit d'agir en appel.

WINTERTHUR qui ne démontre pas avoir été mise à mal dans la construction de sa défense sera en conséquence déboutée de ses demandes formées sur le principe de l'Estoppel.

Sur le fond,

La règle du non cumul de responsabilité opposée subsidiairement par WINTERTHUR appelle les observations suivantes :

-rien ne s'oppose à ce que les fondements contractuel et délictuel soient recherchés l'un à défaut de l'autre et, ici, l'un à titre principal, l'autre à titre subsidiaire,

-il n'est pas invoqué de vice de la membrane elle-même en ses composants tels que conçus et définis par PTI, qui les a fournis à QF. Ce sont les conditions de réalisation des travaux qui sont à l'origine des désordres,

-les causes des désordres ont en effet mis en évidence une absence totale de prise en compte des caractéristiques du sol et du risque de possibles remontées d'eaux dans le substrat de l'installation, des épaisseurs inégales et non conformes tant de la forme en béton fibré que de la membrane posée dessus, et un traitement inadapté des joints,

-or PTI a mis en exergue dans la présentation de sa technique, l'existence de contrôles de sa part. Elle a apporté le crédit de son savoir-faire dans le domaine très spécifique et spécialisé de la création de cuvettes de rétention de carburants, et s'est présentée aux côtés de QF (pièce 18-3 citée) dans la définition des paramètres des travaux,

-en l'absence, comme il a été dit, de tout lien contractuel entre elle et SMCA, cette dernière est fondée à voir retenir la responsabilité délictuelle de PTI dès lors qu'elle relève avec exactitude les manquements de celle-ci dans ses interventions prévues pour ce chantier.

La Cour retiendra que PTI, en ayant défini les conditions de la réalisation et de suivi des travaux auprès de son client QF cela dans le cadre des contrôles expressément prévus selon les pièces cotées 18 précitées, et en ayant validé le résultat par sa présence aux côtés de QF lors de l'acte de réception, a manqué à vérifier le respect des règles de l'art notamment en ce qui concerne les épaisseurs des éléments de l'installation réalisées, (Cf sur ce point ses spécifications de chantier en pièce 18-1 point 3 intitulé « Contrôles », et plus particulièrement 3-2 et 3-2 ). PTI a aussi manqué à la vigilance quant à la compatibilité du sol avec l'opération en n'ayant pas évoqué la question du risque de remontée d'humidité, ici à l'origine des pustules. En manquant à ces diligences elle a contribué à la survenance des désordres engageant ainsi sa responsabilité envers le maître d'ouvrage, tiers au contrat de fourniture.

Si l'essentiel des développements des parties quant à la recherche de la loi applicable concernent la responsabilité contractuelle par référence à la convention de Rome I, WINTERTHUR conclut cependant sur l'hypothèse de la responsabilité délictuelle de PTI (pages 93 et s. de ces conclusions) sans dénier dans ce cas la recevabilité à son encontre, ou encore l'existence en droit Suisse, d'une action directe du tiers lésé contre l'assureur, puisqu'au contraire WINTERTHUR objecte des moyens de fond pour voir écarter la responsabilité de son assuré.

En conséquence, l'action directe de SMCA contre WINTERTHUR sera déclarée recevable par infirmation du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise le 19 avril 2013.

Obligation la réparation

2-1-sur la recherche de garantie de WINTERTHUR assureur de PTI

Il résulte des termes mêmes de la lettre adressée par WINTERTHUR à PTI le 14 février 2005 (pièce WINTERTHUR n°4 citée p. 92 des conclusions) dans laquelle l'assureur déniait devoir sa garantie dans le cadre de la couverture des contrats de responsabilité civile entreprise (exclusion des prétentions concernant l'inexécution ou l'exécution imparfaite notamment des travaux), que cette police trouvait à s'appliquer dans le cas où l'activité de PTI causait un dommage au tiers. AXA ASSURANCES WINTERTHUR indique en effet « à ce titre, seuls les éventuels dommages matériels à des tiers pourraient justifier notre intervention ».

Or précisément SMCA est fondée à se prévaloir de sa qualité de tiers en l'absence de tout contrat entre elle et PTI.

En conséquence WINTERTHUR sera condamnée à indemniser SMCA à hauteur du coût réparatoire fixé.

2-2-sur la recherche de garantie de la SMABTP assureur de garantie décennale

Il est rappelé que les cuvettes litigieuses ont pour finalité de prévenir l'écoulement de carburant dans le sol, et qu'elles sont ainsi des accessoires de citernes de stockage et de distribution d'énergie qu'elles entourent, la Cour confirme le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que les travaux litigieux relevaient du génie civil et non des travaux de construction après avoir précisément décrit les travaux constructifs des cuvettes à savoir couche de graviers plus ou moins compactés couvrant le sol naturel, radier plus ou moins épais et chape recouverte de la membrane, le tout destiné à recueillir un éventuel écoulement d'hydrocarbures, qui ne caractérisaient pas des travaux de bâtiment.

L'argumentation adverse soutenant qu'il s'est agi d'un ouvrage relevant de la garantie obligatoire et par conséquent de la garantie souscrite auprès de la SMABTP est inopérante.

A cet égard il est établi que dès avant la souscription de la police en vue de ce chantier la SMABTP, saisie par QF « pour le compte de PTI le, 25 novembre 1998 (pièce 4) avait répondu le 30 décembre 1998 en ces termes « après une nouvelle étude des documents complémentaires transmis, il ressort qu'il ne nous est pas possible de prévoir une garantie pour vos travaux de technique non courante de mise en conformité des bassins de rétention d'hydrocarbures pour vos deux chantiers ».

La garantie décennale obligatoire ne concernant que les ouvrages au sens des articles 1792 et suivants du code civil, l'argumentation des premiers juges est superfétatoire en ce qu'ils ont retenu sur ce point que la réalisation en 1999 d'un béton fibré ne relevait pas d'une technique courante, la norme DTU 13.3 applicable n'ayant été en vigueur qu'en mars 2005.

Il s'en évince que la contestation du plafond de garantie attaché au contrat d'assurance souscrit auprès de la SMABTP est dépourvue de fondement.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées contre la SMABTP.

2-3-sur la recherche de garantie d'AXA FRANCE

QF avait souscrit auprès d'AXA France une garantie facultative au titre de la réalisation d'un ouvrage de génie civil, assortie d'un plafond égal au montant du coût de l'ouvrage sans pouvoir excéder 10MF.

WINTERTHUR conteste que cette garantie ait relevé d'une garantie facultative alors que les travaux exécutés relevaient selon elle de « travaux de bâtiment » telle que comprise par la jurisprudence sur l'article L241-1 du code des assurances dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2005-658 du 8 juin 2005. Elle fait valoir que la Cour de cassation a censuré toute tentative d'exclure de cette définition, en la restreignant, les installations industrielles et commerciales, et ajoute que l'arrêté du 17 novembre 1978 cité par AXA France sur la définition des travaux concernés a été annulé.

Cependant comme il a été dit par les motifs qui précèdent la construction litigieuse ne constitue pas un ouvrage au sens de l'article 1792 mais équipement de génie civil, non soumis au régime de la garantie décennale obligatoire, de sorte que l'argumentation selon laquelle il se serait agi de travaux de bâtiment au sens de l'article L241-1 du code des assurances sera écartée.

En conséquence les parties ont pu valablement prévoir un plafond de garantie sans référence au coût de reprise des désordres.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné AXA France à payer à SMCA la somme de 419 890€ correspondant au prix de construction des cuvettes de rétention.

Contribution à la réparation

A titre liminaire l'argumentation de WINTERTHUR tendant à voir juger que l'obligation à garantie devrait être plafonnée en tant que maximum au montant du marché initial de travaux concerne l'hypothèse de la responsabilité contractuelle.

Or le fondement ici retenu de la responsabilité délictuelle de PTI est exclusif de plafonnement.

D'ailleurs si WINTERTHUR évoque l'article 99 alinéa 3 du code suisse des obligations, sans démontrer d'ailleurs que la loi suisse soit applicable en matière délictuelle, la rédaction de ce texte et en particulier le premier alinéa suffit à retenir le principe du droit à réparation intégrale du créancier. En effet selon cet article 99 :

1-En général, le débiteur répond de toute faute.

2-Cette responsabilité est plus ou moins étendue selon la nature particulière de l'affaire ; elle s'apprécie notamment avec moins de rigueur lorsque l'affaire n'est pas destinée à procurer un avantage au débiteur.

3-Les règles relatives à la responsabilité dérivant d'actes illicites s'appliquent par analogie aux effets de la faute contractuelle.

L'argumentation sur la réduction de la responsabilité dérivant d'actes illicites est sans rapport avec la responsabilité ici recherchée de PTI sur le plan délictuel de sorte qu'il n'y a lieu à plafonnement.

Sur la part contributive de PTI dans la réalisation du dommage, il convient de prendre en compte les éléments suivants :

-l'appel d'offres émise par SMCA (pièce 6b article 3) a laissé le choix du procédé aux entreprises, donc à QF qui a choisi, en lien avec PTI, celui de la membrane minérale IR 4010,

-en l'absence de maîtrise d''uvre distincte, QF a été investie, dans ses relations avec le maître d'ouvrage, des missions habituelles attachées à la maîtrise d''uvre, donc au suivi du bon déroulement des travaux et de leur conformité aux règles de l'art, par autocontrôles de l'entreprise. Or QF a été largement défaillante quant à la qualité des travaux dont l'expertise a mis en évidence des épaisseurs non conformes non seulement de la forme en béton fibré mais aussi de la membrane elle-même,

-PTI spécialiste du procédé, qui a précisément défini ses préconisations et énoncé les compétences requises de l'entreprise applicatrice de la membrane d'étanchéité (Pièce SMCA 18-1) a, par sa participation à la définition des paramètres des travaux résultant du document 18-3 à double entête PTI-QF, et par sa présence à la réception et sa signature du procès-verbal validé la bonne exécution des travaux réalisés par QF,

-PTI spécialiste du procédé est ainsi réputée avoir considéré que les conditions de réalisation prescrites avaient été respectées, ce qui au regard du produit a nécessairement inclus la compatibilité du sol d'assises avec le projet, alors qu'en l'absence de tout élément sur ce point, il sera retenu qu'à cet égard elle a manqué à appeler l'attention de sa cocontractante QF, alors que l'absence de dispositif contre les remontées d'humilité a été l'une des causes déterminantes du sinistre.

Ces circonstances permettent de fixer la part respective de responsabilité de QK et PTI à raison de :

-45% pour PTI

-55% pour QF

WINTERTHUR d'une part, AXA France d'autre part, se devront l'une et l'autre garantie dans cette proportion, cela toutefois en ce qui concerne AXA France dans la limite du plafonnement de garantie au coût de l'ouvrage initial.

Le recours contre la SMABTP est infondé, la garantie de celle-ci comme il a été dit n'étant pas applicable.

5-Sur les autres demandes

Les demandes tendant au paiement de dommages-intérêts pour préjudice de procédure et à l'application d'une amende civile sont pour la première sans objet par rejet du moyen sur le principe d'Estoppel, pour la seconde irrecevable dès lors qu'il résulte de l'article 32-1 du CPC que l'amende civile profite à l'Etat et non à la partie adverse qui est mal fondée à faire une demande à ce titre.

Il sera statué dans les termes du dispositif sur les demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu la jonction ordonnée entre les appels formés contre le jugement rendu le 4 décembre 2008 par le tribunal de grande instance de Paris et le 19 avril 2013 par le tribunal de grande instance de Pontoise,

1-Sur le jugement rendu le 4 décembre 2008 par le tribunal de grande instance de Paris,

CONFIRME le jugement entrepris,

Y ajoutant,

DIT que la condamnation de la compagnie AXA France IARD est prononcée in solidum avec celle à l'encontre de la société AXA ASSUURANCES connue sous la dénomination AXA WINTERTHUR ci-après, dans la limite du plafond de la garantie due par la société AXA France IARD,

2-Sur le jugement rendu le 19 avril 2013 par le tribunal de grande instance de Pontoise,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes de la SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA et l'a condamnée à payer à la société AXA ASSURANCES connue sous la dénomination AXA WINTERTHUR la somme de 10.000€ au titre de l'article 700 et aux dépens,

Statuant à nouveau,

REJETTE la fin de non-recevoir de la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR fondée sur le principe de l'Estoppel,

DIT que la société suisse PRODUITS ET TECHNIQUES dite PTI a engagé sa responsabilité délictuelle envers la SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA,

DIT que les manquements respectifs de la société QUAGLIAROLI FRERES (QF) et de la société PRODUITS ET TECHNIQUES dite PTI ont contribué à la survenance de l'intégralité du préjudice subi par la SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA,

FIXE la part respective de responsabilité à raison de :

-45% pour la société PRODUITS ET TECHNIQUES dite PTI,

-55% pour la société QUAGLIAROLI FRERES (QF),

CONDAMNE la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR assureur de responsabilité civile de la société suisse PRODUITS ET TECHNIQUES dite PTI, à payer à la SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA, en deniers ou quittances, en réparation du coût de réfection des cuvettes de rétention d'hydrocarbures du site de l'aéroport [Établissement 1] [Localité 1], les sommes de :

- 2.788 927 € au titre des travaux

- 279 381 € (10%)] au titre de la maîtrise d'oeuvre

Pour un montant total de 3.068.308 € HT et cela in solidum avec la société AXA France dans la limite de la garantie de celle-ci,

DIT que la société AXA France IARD et la société AXA France IARD se devront mutuellement garantie dans cette proportion, dans la limite du plafond de garantie de la garantie due par la société AXA France IARD,

DEBOUTE la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR de sa demande de dommages-intérêts,

DECLARE la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR irrecevable en sa demande formée sur l'article 32-1 du code civil,

Y ajoutant,

CONDAMNE in solidum, et avec garantie mutuelle dans la proportion fixée, la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR et la société AXA France IARD à payer à LA SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA la somme de 80.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE LA SOCIETE DE MANUTENTION DE CARBURANTS AVIATION dite SMCA à payer à la SMABTP la somme de 7500€ au titre des frais irrépétibles devant la Cour,

CONDAMNE in solidum, et avec garantie mutuelle dans la proportion fixée, la société AXA ASSURANCES dite AXA WINTERTHUR et la société AXA France IARD aux dépens de première instance devant le tribunal de grande instance de Pontoise et devant la Cour d'appel de céans,

ADMET les Conseils en ayant formé la demande et en réunissant les conditions au bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/23889
Date de la décision : 22/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°08/23889 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-22;08.23889 ?
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